Le Passage [Epreuve de Glowstick]

Le silence pesait un peu plus à chaque seconde, même les bruissements lointains semblaient s’étouffer dans l’antre. Nandil continuait de regarder la statue. Soudainement, les vapeurs dansantes au dessus de la fontaine matérialisaient la silhouette rassurante de la déesse. La jeune louve soupira de soulagement à cette vision, n’étant pas certaine de sa venue, c’était un peu naturel. La voix de Yurai, douce et posée l’invita à répondre à une question simple. Pourquoi porter cette couleur ?

Nan’ resta un court instant silencieuse, détaillant la silhouette pourpre. Puis elle s’assit. Galilée déséquilibré par ce changement de position, s’envola pour faire le tour de la grotte. La brethen quant à elle commença sa réflexion. Tout d’abord sans un mot, elle songea à tous ceux qui l’avaient rencontré, sa famille, ses amis –si peu nombreux soient-ils-, les dirigeants de sa meute. Avaient-ils ne serait-ce que l’idée qu’elle existait ? Peut être bien.

Son regard vide reprit vie lorsqu’elle le posa sur l’apparition. Et d’une voix tout aussi calme et posée, lui répondit :

« Pourquoi la sagesse ? Et pourquoi pas un autre ? Je ne serai pas apte de juger les choix des dieux, ce n’est pas mon rôle. Cependant, je peux vous expliquer mon choix si cela vous convient. »

Elle prit une profonde inspiration avant de continuer son discours :

« Vous n’êtes pas sans savoir que ma grand-mère, Hlynn, fut une de vos disciples. Je ne l’ai jamais connu et pourtant je sens que nous sommes très liées. Je lui ressemble un peu selon ma propre mère. Je sais qu’elle a toujours fait les choses qu’elle pensait justes, elle vous a toujours loué même sans le dire. J’aimerais être, ne serait-ce qu’un peu, comme elle. Pourtant je sais que c’est inutile de se comparer à nos prédécesseurs. Je sais aussi qu’il nous est inutile de refaire les mêmes choses, de leur ressembler ou d’essayer d’accomplir de grands exploits. Non. Tout cela est voué à l’échec car nous ne sommes pas les êtres que nous chérissons. Ma motivation est peut être égoïste de prétendre à vos couleurs. Cependant, si je veux protéger ces êtres qui me sont chers, ces idéaux de liberté, tout ce qui fait que je suis Nandil et non pas ma grand-mère, il faut que je me batte et que je prouve toute la force dont je peux faire preuve. Je ne parle bien entendu pas de combat physique, comme vous le voyez, je ne suis pas aussi robuste et musclée que les disciples d’Aka ou de Kiro. Aussi, tout ce qu’il me reste est mon savoir, mes connaissances. »

Elle s’arrêta, laissant ses derniers mots en suspend. L’oiseau lui vint se poser à ses pattes et lâcha un petit piaillement comme s’il l’encourageait. Nan’ sourit puis reprit :

« Je désire connaître le monde et pouvoir le protéger, comme j’ai toujours protégé mon frère et ma sœur des dangers. Il m’est impensable de les laisser seul face aux monstres et autres menaces de notre terre. Je serai prête à leur sacrifier ma vie pour les guider au travers de ces terres hostiles et merveilleuses. »

Elle se releva, montrant un visage assuré. Oui elle ferait tout pour que le monde ne les engloutissent pas, Nan’ donnerait tout pour pouvoir voir le futur de son peuple. Leur dispenser tous les enseignements, offrir ce qu’elle pouvait à quiconque en aurait besoin.

« La sagesse est pour moi la meilleure des armes pour vivre et connaître le bonheur. Agir en conséquence et apprendre des erreurs passées, c’est l’essence même de votre couleur et je désire profondément faire perdurer vos enseignements. »

Les dés étaient jetés, le résultat importait peu car pour une fois, Nandil avait réussi à exprimer ce qu’elle pensait. A Yurai de juger si, oui ou non, la louve grise méritait de porter ce glowstick.