[ARCHIVES] Un autre monde / Astaroth & Brienna

Astaroth aimait contempler le ciel et ses étoiles, le soleil couchant reflété par les eaux et aimer entendre le vent siffler à travers les branches des arbres. C'était tout naturellement qu'il s'était retrouvé sur les terres Nakhu à observer ce qui l'entourait, bercé par les doux sons de Mère Nature. Le jeune animal était assis en haut d'un rocher quand il remarqua une étrange brume qui semblait s'arrêter brusquement, comme si elle cachait quelque chose. D'un naturel curieux, il avait décidé de mener son enquête. S'il y avait de la brume, c'est qu'il y avait un sol, donc une île.
En foulant la terre cette étrange île, il se sentit plus seul que jamais. Peut-être était-il vraiment seul après tout. La brume l'entourait et créait une ambiance mystique qui rappela au jeune loup sa mère. Il évalua la situation à l'aide de son ouïe et de son odorat, mais rien ne l'avertit d'un quelconque danger. Cette île était sans doute laissée à son compte.
Astaroth fredonnait une chanson qu'il avait entendu dans son enfance, gardant néanmoins les oreilles dressées, prêt à réagir au moindre danger. Il était peut-être imprudent mais pas fou. La brume se dissipa soudainement devant lui et, à sa place, de grands murs firent leur apparition. Il leva le museau, voulant estimer la hauteur de ces murs. Mais ceux-ci étaient cachés par cette brume épaisse qui s'étendait sur toute l'île. Il voulait savoir ce qui se trouvait à l'intérieur de ces murs imposants. Cela devait être très important. Cela pouvait peut-être même lui apporter des réponses. Il accéléra alors le pas et ralentit lorsqu'une porte immense se dressa devant lui. Intrigué, il entra dans le plus grand des calmes, prêt à détaler au moindre faux pas.

Ses yeux mirent du temps à s'adapter à l'obscurité de cet étrange lieu. Il resta ébahit lorsqu'il remarqua ces immenses colonnes de livres, ces étagères qui disparaissaient dans l'obscurité .. il se croyait dans un rêve. Il huma l'air, les oreilles bien dressées. La plupart de ces livres étaient vieux, et leur odeur mêlé à la poussière lui fit tourner la tête un instant. La seconde d'après, il éternua. Celui-ci résonna à l'intérieur des murs et mourut quelques secondes plus tard. Astaroth se figea net, son cœur battant comme s'il s'était mis dans le plus grand des dangers. Et si c'était un lieu secret ? Il venait de se faire repérer. Son poil gonfla légèrement comme pour faire disparaître le froid qui l'avait envahi. Que faire ? Devait-il fuir et espérer qu'on ne le trouvera pas, ou tenter le tout pour le tout et rester ? Il planta ses griffes dans le sol dur et glacial sous ses pattes. Son écharpe glissa lentement le long de son cou avant de se retrouver au sol. Il la ramassa avec précaution et la remit du mieux qu'il put.
Il vagabonda entre les étagères, les yeux rivés sur cette multitude de livres. Fasciné par la diversité de leur couverture, de leur taille et de leur odeur, plusieurs fois il avait trébuché sur son écharpe qui traînait au sol. Il accéléra le pas, comme emporté dans un tourbillon de savoir. Lorsqu'il reprit ses esprits, il trouva une table devant lui. Sur celle-ci, une dizaine de livres étaient empilés. Astaroth les contempla un instant, se demandant s'il avait le droit d'y toucher. Il agita les oreilles comme pour se rassurer et attrapa délicatement entre ses crocs le plus gros, celui qui était tout au dessus. La poussière se logea dans sa truffe et il se retint tant bien que mal d'éternuer. Une fois cette envie passée, il enleva les fines particules grisâtres recouvrant cet énorme ouvrage.
« Dairo la Renarde », souffla-t-il.
Qui était-ce ? Il voulait savoir qui était cette Dairo, et surtout, ce qu'elle avait de particulier pour avoir un livre à son effigie. Astaroth jeta un coup d’œil derrière lui pour s'assurer qu'il était bien seul. Il s'assit calmement, repoussant ses mèches de cheveux en arrière. Il posa sa patte sur cet étrange livre et ferma les yeux un instant. Avait-il le droit de l'ouvrir ? C'était un ouvrage très ancien, et par conséquent, très fragile. S'il se montrait délicat, personne ne remarquerait que ce livre avait été consulté non ? Il ouvrit donc le précieux bouquin, effleurant délicatement de sa patte le papier. Astaroth fut surpris par la qualité de la calligraphie, et après avoir admiré celle-ci quelques instants, il entama sa lecture. Ses sourcils se froncèrent lors des premiers mots.
« Une … déesse ? »
Étonné par cette indication, il n'avait pas pris la précaution de mesurer sa voix.

En musique ~

Brienna posa sa bougie sur sa table de lecture-travail-détente, avant d’enlever les livres qu’elle avait placé dans sa sacoche, et de les glisser délicatement sur la surface de bois ancien, les empilant avec soin. Elle était toujours dans ses recherches sur les dieux, son questionnement sur la nature de sa destinée la tracassant toujours autant. La question du glowstick était des plus importantes, et cela avait induit en elle une curiosité sur l’apparition des glowsticks, sur les dieux et leur histoire. Et quand Brienna était curieuse, elle lisait.

Alors elle avait décidé de faire des recherches.

Elle attrapa ses lunettes de lecture toutes rondes, et les posa sur son museau, avant de se pencher sur le premier livre de sa pile ‘Dairo la Renarde’. Alors qu’elle dévorait les lignes, elle leva la patte, à la recherche de son stylet en forme de plume…. Qu’elle ne trouva pas.
Elle tapota l’espace vital de la table de sa patte, ne désirant pas arracher son regard des pages de fin parchemin qui l’intriguaient tellement, mais ne trouva pas sa plume. Elle soupira, et s’arracha enfin de sa lecture, pour chercher du regard le stylo qui lui échappait si bien au mauvais moment. Sauf qu’il n’était pas là.

« Huh ? »

La louve violette-grise aux cheveux d’or et de rose se redressa, ses deux pattes avant toujours posés sur la table, et regarda derrière la pile de livres, mais il n’y avait rien à faire. Sa plume n’était pas là. Exaspérée, elle souleva ses parchemins de notes pour la chercher. Comment est-ce qu’on pouvait perdre une plume rouge écarlate, bons dieux ?
Elle se remit sur quatre pattes et glissa la tête sous sa table, mais elle n’était pas tombée par terre non plus.
« Grmlmlmlml » rouspéta-elle, en glissant un bout de tissu orangé dans son livre, et en le reposant sur sa pile.

Alors, où est ce qu’elle avait bien pu le laisser ?
Elle réfléchit un instant, et leva la tête vers la voûte de la bibliothèque, avant de soupirer. Bon, elle allait devoir retracer les rayons qu’elle avait parcouru à la recherche de livres sur les divins. Avec un peu de chance il était tombé de sa sacoche pendant qu’elle était dans la bibliothèque. Parce que sinon, elle l’avait surement perdu sur la route du camp Etelkrus jusqu’à la bibliothèque, et elle devrait s’en trouver un nouveau.
Elle attrapa sa petite chandelle entre les crocs par la poignée, et s’en fut chercher sa plume dans la bibliothèque, qui était devenue depuis quelques ans déjà son repère secret.
Au loin, lui bruit ténu d’un éternuement résonna dans l’imposant bâtiment.


Elle contourna enfin le dernier rayon de livres, sur le retour de sa quête, sa plume rangée à sa place dans sa sacoche, sa bougie dans la gueule. Fufu, plume de Satan qui s’échappait toujours de son sac à la moindre inattention.

Elle illuminait les couvertures des livres de la lumière orangée et vacillante de la petite flame qu’elle portait, et son ombre se projetait sur les murs alors qu’elle avançait vers son lieu de travail, rassurée d’avoir retrouvée sa possession.

Lieu de travail qui n’était pas aussi inoccupé qu’elle l’avait laissé quelques minutes plus tôt.

Car à sa table, à peine illuminée par une des torches fichées dans le mur à quelques mètres, et par les larges vitraux de plusieurs mètres de haut, qui filtraient la lumière depuis le haut des murs, se trouvait un parfait inconnu. Quelqu’un qu’elle n’avait jamais croisé avant, dans la bibliothèque ou autre part. C’était un loup sombre, aux couleurs grises et noires, avec un écharpe marquée de doré.

Brienna pencha la tête, quelque peu surprise, et s’immobilisa pour l’observer. Il feuilletait avec attention le vieux livre qu’elle avait posé tout à l’heure… ça la rassura. Tout être qui faisait autant attention avec ses précieux livres était un être bien. La louve piqua ses oreilles en avant en le regardant tourner les pages avec intérêt, avant de s’exclamer :
« Une … déesse ? »

… Au moins ça prouvait qu’il savait lire.

La louve hésita un instant. Qui était-il au juste ? Il devait être très mal renseigné, pour être aussi surpris de trouver dans un livre sur Dairo le terme de déesse. Elle se secoua. Aller, fait un petit effort de sociabilité.

Alors elle s’approcha de la table, illuminant le sol qui la précédait avec sa bougie, qu’elle posa sur un coin du meuble de bois sombre avant de lever la tête vers le loup. Il était gris anthracite, avec des marquages noirs et gris plus clair, et une grosse écharpe grise et or, très jolie. Son visage était encadré d’épaisses mèches noires traversées de fins filaments d’or.
Elle sourit en guise de salutation, et agita lentement le bout de la queue, en signe de non-agressivité.

« Bonjour, est ce que je peux vous aider ? » demanda elle, avant de remonter ses lunettes, qui avaient glissé vers l’avant de son museau.

En tout cas elle était curieuse de savoir qui il était, lui qui lui avait piqué sa table et ses livres pensa-elle, sans animosité.

Hein ? Qui avait parlé ?
Astaroth se retourna vivement au son de la voix qui avait résonné dans ses oreilles. Tout en se levant, il tomba nez à nez avec une louve qu'il n'avait jamais vue. Elle ne semblait pas plus vieille que lui, mais le ton de sa voix et ses lunettes qui glissaient le long de son museau la rendait plus mature qu'une louve de son âge. Il l'observa brièvement, son regard traînant quelques instants sur sa chevelure ondulée si peu commune. Astaroth hésita quelques instants. Était-elle digne de confiance ? Il le découvrirait assez vite. Il fallait néanmoins l'avouer, la louve avait un joli sourire.
« Eer je … Bonjour, et oui … Pouvez-vous m'expliquer où je suis ? »
Le jeune loup était complètement perdu. Il venait d'arriver, avait perdu son pouvoir si précieux et venait de découvrir que des dieux régnaient sur ces terres. Il dressa les oreilles en direction de la louve colorée, signe qu'il était prêt à boire la moindre de ses paroles. Mais devoir tutoyer une louve qui semblait être du même âge que lui le dérangeait quelque peu. Ils étaient jeunes, et les jeunes, à part ceux de famille noble, ne se vouvoyaient que rarement. Les paroles de son père résonnèrent alors dans sa tête et lui firent enlever ses pensées de jeune animal fougueux. Les apparences sont parfois trompeuses.
« Serait-il possible d'avoir votre nom ? »
Il avait longuement hésité avant de prononcer ces quelques mots. Soudain, il réalisa que cela pouvait être vu d'une manière que lui ne souhaitait pas.
« Je préfère avoir un nom sur chaque visage, voilà tout. »
Un sourire gêné s'esquissa sur ses babines. Il ne devait pas contrarier cette jeune louve qui semblait en savoir énormément. Enfin, ça, c'était par simple déduction. Et cette déduction était sans doute due aux lunettes. Les louves à lunettes semblaient toujours plus vieilles et plus sévères qu'elles ne l'étaient réellement.
Astaroth tourna alors la tête vers la table, comme pour vérifier la présence du livre. Il se figea soudainement, et tourna de nouveau la tête vers elle.
« Oh … j'imagine que tout ça est à vous, désolé »
La question qu'elle avait posé était-elle si innocente ? Peut-être l'avait-t-il dérangée dans son travail. Face à des inconnus, il était toujours nerveux, mais si en plus il semait le trouble, c'était pire.

Il se retourna avec une hâte peu commune, comme si elle l’avait profondément troublé en venant le déranger. Comme si elle était profondément troublante. Elle se demandait ce qui le rendait aussi inquiet, après tout, elle n’était une jeune louve. Une jeune louve avec des lunettes qui venait de l’approcher sans bruit pour lui parler. Ouais, en fait elle voyait peut-être les problèmes qu’elle avait inconsciemment posés au loup sombre.

Il lui répondit, l’air légèrement mal à l’aise, puis lui demanda si elle pouvait lui expliquer où il était. Aha ! Elle avait donc eu raison, c’était un loup nouveau sur les terres de punk wolf, et particulièrement mal renseigné. Elle pivota ses oreilles rapidement, décidée à lui répondre du mieux qu’elle pouvait avant qu’il ne lui demande son prénom.
Les yeux doré pâle de la jeune louve s’agrandirent de surprise, et elle bredouilla un petit « Uhm… », surprise par cette soudaine prise d’assurance à son égard, avant que le sombre ne se réavise, avec un sourire gêné, et que le sourire de la violette, s’étant effacé sous l’effet de la surprise un instant, ne revienne illuminer son museau.

Pas de problème, elle voulait bien lui dire ça, après tout, tous les loups qui passaient souvent à la bibliothèque finissaient par le savoir, et c’était pas avec son nom qu’il pouvait lui faire du mal.
Et soudain, le mâle se figea, comme profondément mal à l’aise, et elle pencha la tête, en l’entendant s’excuser. Elle sourit, en soufflant un peu, un mouvement qui se traduit par un début de rire joyeux, ses yeux retrouvant leur gaieté.

« Oh mais ce n’est pas à moi ! Ces livres appartiennent à la bibliothèque, je ne fais que les emprunter ! » s’exclama-elle, avant d’agiter la queue.

« Alors ça fait beaucoup de questions d’un coup, ehm… »

Elle s’assit à côté de la table, et posa ses pattes avant dessus, et réfléchit un instant, pour essayer d’ordonner sa réponse. Tout d’abord il voulait savoir où il était, mais c’était plus poli de se présenter d’abord. Alors elle releva la tête, et remonta ses lunettes sur son museau, puisqu’elles s’obstinaient à toujours glisser vers l’avant.
« Je me nomme Brienna, et je suis une Nourrice du clan Etelkrus. Je ne sais pas si tu es au courant, mais nous sommes sur les terres de Punk Wolf et… hmmm je dois avoir une carte grmlmlmlml »

Elle se redressa, et attrapa un des livres de la pile qui se trouvait toujours sur la table. C’était un vieil ouvrage noir tracé d’arabesques dorées, sur la couverture duquel on pouvait encore discerner le titre de ‘Hitsoire et Géographie de punk Wolf’.
Elle caressa délicatement la couverture, pour enlever la poussière, et vérifia que c’était bien ce qu’elle cherchait, avant de l’ouvrir, de feuilleter quelques instants, puis d’ouvrir une page dépliante, sur laquelle était tracée à l’encre une carte assez récente, qui de toute évidence venait d’être ajoutée à la fin de livre, depuis la catastrophe de chronos.

« Alors, je disais donc que nous sommes sur Punk Wolf. Ces terres sont divisées entre 3 clans, et les terres Libres. Les trois clans sont les Etelkrus, les Lazuli et les Nakhus ! Il y a également un clan de pirates, mais il n’a pas été reconnu par les dieux donc il n’a pas de vraies terres. »

La violette laissa sa patte glisser sur la carte, montrant à chaque fois de la griffe les camps des différents clans, avant de poser sa patte sous la légende ‘bibliothèque’.

« Nous sommes en terres Nakhus, à la bibliothèque. Les terres Nakhus et Libres sont accessibles à tout le monde, par contre les terres des clans ne le sont pas… A moins de faire partie du clan !»

Brienna repoussa une mèche de cheveux, puis attrapa d’autres livres de la pile, la réduisant de deux bons tiers, pour les ouvrir sur la table devant le loup sombre, s’arrêtant à chaque fois sur une page qui contenait une illustration du dieu dont parlait l’ouvrage.

« Il y a 7 dieux en tout, Moiro, Dairo, Yurai, Mido, Ao, Kira et Aka, et chacun représente une couleur et un trait de caractère, qu’ils recherchent dans leurs disciples. Ces 7 dieux ont le pouvoir de donner à un loup qui réussit leur épreuve un glowstick, c’est-à-dire un tube qui contient de la magie, et qui te permettra d’avoir un pouvoir. Chaque clan a des dieux qui le caractérisent, par exemple, les Nakhus sont les disciples de Yurai, la déesse de la sagesse, les Etelkrus sont ceux de Kiro, Dairo et Aka, et les Lazuli sont formés des disciples de Mido, Ao et Moiro » expliqua-elle, à fond dans ses descriptions.
Elle ouvrit la gueule pour continuer … Puis se rendit compte qu’elle était peut-être un peu enthousiaste, et que le loup sombre ne voulait peut-être pas en savoir autant d’un coup.

« Euhm, désolé, je me suis emportée … » S’excusa-elle, en ôtant ses lunettes, qui ne lui servaient habituellement que pour lire, et qui lui étaient donc peu utiles actuellement.

Elle hésita un instant, en regardant le loup. Il n’était peut-être pas aussi âgé qu’elle l’avait d’abord cru, et elle sourit presque timidement.

« Est-ce que je pourrais avoir votre nom, messire ? »
Ses parents adoptifs l’avaient toujours éduquée pour bien traiter tous les loups, dans la politesse la plus parfaite, et elle ne réfléchit même pas en apostrophant l’anthracite, ses oreilles pointées vers lui avec curiosité.

Une bibliothèque ? Son père lui avait déjà parler de ce genre d'endroits. Il lui avait dit que c'était l'emplacement de tout le savoir du monde, que c'était un lieu très important et qu'il était interdit de souiller un tel lieu, que c'était un lieu neutre où tous étaient admis dans un seul et unique but : la recherche et l'apprentissage du monde. Cela voulait donc dire qu'il était en sécurité aussi, et son inquiétude disparut comme de la neige au soleil.
Ses oreilles se dressèrent lorsque Brienna se redressa afin d'attraper l'un des livres de la pile afin de l'ouvrir sous ses yeux. Il suivit chaque indication de la louve du regard, mémorisant les différents endroits composant les différents territoires. Ça en faisait des choses à retenir d'un seul coup. Astaroth fut néanmoins surpris par l'encre utilisée pour la carte. Elle était si récente ... était-on autorisé à écrire sur les livres anciens ? Ou peut-être était-ce l'oeuvre d'un membre à part entière de la bibliothèque. Mais pour l'heure, la seule présence qu'il voyait en ces lieux était celle de Brienna.
Des pirates. Il y avait vraiment des pirates ici ? Cette nouvelle lui arracha un sourire en coin. Ce serait sympathique d'en rencontrer un, un jour, et de voir comment ils vivent. Des "hors-la-loi" en quelques sortes. Et puis même, pourquoi pas, passer quelques jours avec eux afin de s'imprégner de leur mode de vie ? Astaroth était ouvert à tout, ou presque. Et il avait entendu parler de pirates dans son enfance. Mais ceux-ci étaient-ils ceux décrits, ou étaient-ils d'un autre genre ? Il espérait simplement qu'ils ne soient pas hostiles envers lui. Après tout, il ne comprenait pas forcément le principe des guerres.
La jeune louve venait d'annoncer qu'ils étaient en terres Nakhus. Mais ceux-ci, comment les autres meutes, n'avaient-ils pas de territoire à défendre ? Ils avaient besoin d'un territoire délimité pour chasser, pour s'assurer qu'il n'y avait pas d'intrus, comme les Etelkrus et les Lazuli. Il se demanda comment cette meute fonctionnait. Il avait tant à apprendre de ce territoire ... mais néanmoins il ne se découragea pas. Il avait avec lui une excellente professeure.
... Brienna venait bien de dire que les dieux donnaient un pouvoir aux loups appartenant à une meute non ? C'était pour cela qu'il n'avait plus de pouvoir .. La présence des dieux devait être si forte qu'elle brouillait son pouvoir, et le seul moyen de le récupérer ... Mais cela voudrait dire qu'il lui fallait entrer dans une meute. Serait-il accepté ? Aura-t-il la capacité de s'adapter ? Et surtout, serait-il en mesure de réussir l'épreuve ? Son pouvoir l'avait rendu si unique dans son passé ... et voilà que la présence des dieux l'avait fait disparaître.
Tout au long de l'explication, Astaroth s'était tu. Il avait bu la moindre de ses paroles, hochant de temps à autre la tête afin de montrer à Brienna qu'il parvenait à suivre. Il fut alors surpris lorsque la louve s'excusa de s'être emportée. Elle n'avait clairement pas à l'être, elle montrait là un savoir intéressant et très bien expliqué.
Alors qu'il ouvrit la gueule afin de la rassurer à ce sujet, le mot "messire" retentit dans ses oreilles. Messire .. Il la regarda attentivement un instant, comme surpris qu'elle adopte un tel langage.
« En effet, je ne me suis pas présenté ... Astaroth, je m'appelle Astaroth. »
Absorbé par son récit, il en avait complètement oublié les formalités.

La louve violette aux cheveux colorés l’écouta se présenter, après avoir remarqué qu’il digérait les informations qu’elle avait balancé en quantité faramineuse, et qu’il ne semblait pas complètement submergé. Elle se dit qu’elle aurait quand même dû faire un peu plus attention. Il était probablement nouveau sur le territoire, inutile de le noyer dans les informations, il aurait certainement appris à un rythme plus reposé si elle ne lui avait pas tout expliqué en enseignement magistral.
Elle sourit donc au loup sombre, et agita ses oreilles en signe de reconnaissance, qu’il ait partagé son nom avec elle.

« Ravie de vous rencontrer, Sire Astaroth ! » s’exclama-elle avec un sourire sincère.

Elle espérait que ses formules de politesse ne le mettraient pas mal à l’aise, comme elles l’avaient fait auparavant avec d’autres individus, mais elle ne les utilisait pas avec ce but. Au contraire, c’était une forme de respect élevée, même envers ceux qu’elle ne connaissait pas très bien.
Elle lui avait expliqué ce qu’il avait à savoir, et maintenant elle pouvait retourner tranquillement à ses recherches et sa lecture sur les dieux, pour essayer de se renseigner sur ce que tout cela signifiait réellement…

Alors elle fit un mouvement de la patte, comme pour attraper sa plume et les parchemins, et se mettre au travail. Elle aimait lire, elle aimait chercher des choses dans les livres. Cette bibliothèque était vraiment devenue son espace de vie, là où elle passait tout son temps, non pas parce qu’elle n’aimait pas sortir ni parler aux autres, mais pas simple amour de la littérature. Comment ne pas être fasciné par tous ses ouvrages qui ne demandaient qu’à être lus ? Par tous les secrets qui étaient inscrits dans les pages jaunies, qui ne demandaient qu’à être découvertes ? Elle en tout cas, n’y résistait pas, et le fait que ça la séparait du monde ne la dérangeait pas tant que ça, et puis les loups étaient tellement moins intéressants que les livres.

Enfin, c’était ce qu’elle avait cru jusque-là.

Elle se faisait la remarque que peut être que la raison pour laquelle elle s’intéressait si peu aux autres était tout simplement parce qu’elle ne connaissait presque personne d’autre que sa famille. Est-ce qu’elle avait déjà réellement interagit avec quelqu’un qui ne faisait pas partie de sa famille adoptive ? Non, pas vraiment.
Ce n’était pas un problème quand il s’agissait d’étaler sa culture, qui sortait tout droit des pages des livres étalés sur la table … Mais est ce qu’elle savait réellement parler avec les autres ? Arrivait-elle à interagir ? Ça, elle n’en savait rien.

La violette baissa ses oreilles d’un millimètre, en ouvrant la gueule, hésitante, avant de lancer :
« Est-ce que je peux vous aider d’une autre manière ? J’ai beaucoup de temps vous savez … Ce n’est pas souvent qu’on rencontre quelqu’un dans cette bibliothèque. » avoua-elle.

Et après tout, oui, elle avait tout son temps. Personne n’allait lui demander de rentrer q=avant qu’il ne fasse nuit, personne n’allait rouspéter si elle n’étudiait pas les dieux aujourd’hui… Après tout, elle était adulte maintenant, et capable de s’occuper d’elle-même sans problème. Enfin en théorie.
Elle ne se sentait pas adulte et mature, et prête à affronter la vie toute seule. Ce n’était pas parce qu’on passait tout son temps toute seule qu’on se sentait bien comme ça. Le truc c’était juste qu’elle n’avait jamais vraiment eu d’amis en dehors de sa famille, et soudain, elle espérait vraiment qu’elle venait de s’en faire un. Quelqu’un avec qui elle pourrait parler d’autre chose que de la grossesse de sa sœur adoptive Korra, ou du choix des clans. Quelqu’un qui aurait une vision différente du monde que la sienne, que celle de ses parents.

Sire Astaroth. C'était bien la première fois qu'on l'appelait "Sire". Cela lui arracha un léger rire. Il pensait que ces titres honorifiques étaient uniquement réservés aux rois ou tout autre membre de la noblesse. Brienna devait avoir reçu une sacrée éducation pour avoir un tel niveau de langue.
« Je suis de même ravi de vous avoir rencontrée. »

A vrai dire, il était soulagé d'être tombé sur une louve aussi accueillante que Brienna. Elle était sympathique, bien élevée et très instruite, et c'était tant mieux. Grâce à elle, il avait appris le nom des meutes, les terres leur appartenant, ainsi que l'existence des dieux. Ça faisait beaucoup de chose à retenir d'un seul coup, mais il savait qu'au besoin, si jamais il oubliait quelque chose, il pourrait revenir ici afin que cette jeune louve lui apporte des réponses.

Astaroth la regarda alors qu'elle semblait se remettre au travail. Elle semblait si sérieuse, entourée de ces piles de livres ... Sortait-elle de la bibliothèque de temps en temps ? La réponse était oui, et c'était évident, mais passait-elle toutes ses journées ici ? Ne se sentait-elle pas seule ? Son regard parcourut la salle dans laquelle ils se trouvaient. Il n'y avait personne, pas un bruit. Un endroit sombre, peu accueillant quand on ne connaît pas. Il posa à nouveau son regard sur elle.

Aux paroles de la louve, il agita les oreilles. Il avait visé juste. L'hésitation de la louve et le fait que personne ne vienne ici prouvait qu'elle se sentait réellement seule.
« Pour le moment non ... Pour tout avouer, je dois réfléchir à toutes les informations que vous m'avez données ... »
En réalité, il avait d'autres questions à poser. Ces dieux, étaient-ils réels ou existaient-ils seulement dans la tête de ceux qui y croyaient fermement ? Lui ne croyait en quelque chose que s'il avait des preuves derrière. S'il voyait un dieu, peut-être que son avis changerait là-dessus. Néanmoins, les informations de Brienna lui laissaient un doute. Les dieux faisaient passer des épreuves, alors ... cela voulait peut-être dire que les participants voyaient les dieux. Astaroth était perdu. Il allait devoir réfléchir à tout ça. Et s'il voulait entrer dans une meute, comment cela se ferait-il ? Et ces fameux pirates, allaient-ils lui couper la tête s'il cherchait à les rencontrer ? Il n'espérait pas, mais rien n'était impossible.

« Mais si ça vous dit, on pourrait mettre une patte dehors un de ces jours. »
Il espérait secrètement qu'elle allait accepter. Après tout, avoir des amis, ça ne fait de mal à personne non ?

Elle lui sourit alors qu’il exprimait le fait qu’il était également ravi, et agita ses oreilles. C’était toujours sympa de savoir qu’on avait rencontré quelqu’un, et que ce dernier ne considérait pas cela comme un problème ni un poids non-nécessaire.

Il avoua alors avoir besoin de réfléchir à ce qu’elle lui avait dit, et elle opina de la tête. Elle ne pouvait pas imaginer comment c’était de se retrouver seul dans l’inconnu, mais elle se doutait que ce n’était pas toujours facile, et qu’on avait besoin de temps pour s’adapter. Elle se recoiffa d’une patte, soudain très embêté par le fait qu’elle devait avoir une coiffure très peu présentable. Et si elle était la première personne qu’il rencontrait ici ? Quelle impression donnait-elle des loups de punk wolf ?

« Très bien ! Mais si jamais vous avez d’autres question, n’hésitez pas ! » s’exclama-elle, en enroulant sa longue queue ornée de crins colorés autour de ses pattes.
Ca devait pas être sympa, d’être soudain tout seul sur un territoire inconnu, se dit elle. Elle essaya d’imaginer ce que ça ferait, d’être séparée de sa famille, de ses amis, et d’être seule parmi des inconnus. Non, elle ne pensait pas qu’elle apprécierait… Et pourtant, en pensant à changer de clan, c’est exactement ce qui pouvait se produire … Elle soupira intérieurement, son esprit revenant sur le sujet complexe de son futur glowstick.
Qui choisir ?

Elle leva ses oreilles à ses paroles et le regarda avec surprise. Sortir ? Dehors ? Avec quelqu’un ?
Elle devait vraiment sembler asociale, se dit-elle, à dire qu’elle ne voyait personne, a sous-entendre qu’elle restait toujours dans la bibliothèque. Evidement qu’elle voyait sa famille de temps en temps, mais d’autres loups ? Non, pas vraiment.

La violette sourit, touchée par la proposition du mâle sombre. C’était la première fois que quelqu’un lui proposait de passer du temps avec lui, et c’était vraiment sympa comme idée.

« Oui, bien sur, quand vous voudrez ! ... ce serait vraiment sympa, merci. " dit-elle, sincère avant d'ajouter " Vous saurez ou me trouver… non ? » dit-elle, avec un sourire, en montrant du museau l’immense bâtisse de pierre. Sa résidence ne passait pas inaperçue.

Astaroth hocha la tête aux paroles de la louve, un sourire se dessinant dans le coin de ses babines. Il était content d'avoir fait une telle rencontre. Parfois, la curiosité était une bonne chose, et c'était ici le cas. S'il s'était écouté, jamais il ne serait entré ici, dans cet endroit lugubre aux premiers abords mais qui se trouvait être un puits de connaissances intarissable. Et jamais il n'aurait rencontré la charmante jeune louve qu'était Brienna.
Les paroles de Brienna résonnèrent dans sa tête concernant les dieux. La vie de meute lui manquait, mais d'un autre côté, la vie de solitaire ne le dérangeait pas. Serait-il capable de rejoindre une meute dont il ne sait rien ? Il ne devait sans doute pas le seul solitaire à vouloir intégrer une meute, mais à l'idée de débarquer dans un endroit rempli de canidés dont il ne connaissait rien lui fit hérisser les poils de la nuque. Peut-être qu'un jour il parviendra à passer outre cette peur, mais lui n'y croyait pas.

Son regard croisa alors celui de la jeune louve. Elle semblait surprise qu'on lui propose de mettre une patte à l'extérieur. Passait-elle vraiment toutes ses journées ici ? Il eut comme un léger pincement au cœur. Non pas de la pitié, mais la louve devait se sentir bien seule ici. Son attitude prouvait bien que c'était une demande inhabituelle pour elle.

Le sourire qu'aborda Brienna le rassura et se retint de soupirer de soulagement. S'il avait fait ça, elle aurait pu mal le prendre, voire penser qu'il était nerveux. Lui, nerveux ? Nooon .. Pas du tout. Il n'aimait tout simplement pas qu'on lui dise non pour une question aussi ... délicate. Après tout, il avait toujours eu une certaine distance avec les femelles. Non pas qu'il ne les aimait pas ou qu'il les fuyait comme la peste, loin de là, mais dans son enfance, il y avait les mâles d'un côté et les femelles de l'autre. Celles-ci lui avaient toujours paru inatteignable, comme si un loup de bas rang ne les intéressait pas.

« En effet, et si vous bougez, envoyez-moi un corbeau ! »
Il eut un sourire lorsque la louve montra du museau les énormes blocs de pierre.

Astaroth se tourna alors, se dirigeant d'un pas lent vers la sortie. Soudainement, il s'arrêta et agita la queue. Il tourna sa tête en direction de Brienna.
« J'imagine qu'on peut se tutoyer maintenant, non ? »
Pour lui, le vouvoiement était réservé à des inconnus ou à des personnes d'un rang supérieur. Or, Brienna ne semblait pas plus âgée que lui, et il voyait en elle une potentielle amie. Alors pourquoi garder cette distance verbale ? Pour la première fois, la réponse de la louve ne semblait pas le préoccuper. Il ne redoutait pas le "non" ou une quelconque réponse négative.

Il agita les oreilles, un sourire dessiné sur ses babines, et, sans attendre de réponse, reprit sa marche et disparut dans la lumière lunaire qui était apparue lors de l'ouverture de la porte.