Bonjour Continent! [Kalashnikov]

Limule avait atteint un âge où elle ne ressemblait à rien. A mi-chemin entre la boule pataude du bébé et la silhouette de gringalet de l'adolescence, elle avait les membres fin mais encore des pieds trop larges, sa tête s'allongeait mais ses oreilles semblaient encore immense. Son pelage n'était pas joli non plus, un mélange informe entre le duvet de bébé et les touffes de poils plus durs de grand. Petite louve qui avait encore besoin de grandir avant d'aller aussi loin mais les louveteaux ont toujours eu cette affection à dépasser les limites du raisonnable, d'autant plus lorsqu'ils étaient éduqué à la façon Raeders qui incitait très fortement à faire ce qu'on a envie quand on en a envie. Un mode de vie qui prône le sans règle tout en possédant tout plein, et Limule pouvait se vanter de connaître le code par cœur. Et aujourd'hui elle s'était estimée suffisamment grande pour traverser pour la première fois ce bras de mer qui séparait l'île de Morne-oeil et le Continent si régulièrement critiqué par les adultes de sa meute. Mais sa Maman venait de cette terre de l'autre côté alors la petite louve blanche voulait aller visiter ces plages là bas, ne prenant en compte ni l'immensité de cette terre en face ni la distance à parcourir à la nage. Bien évidemment, elle oublia volontairement de prévenir son père, Safran ou encore son frère Ajani de sa petite aventure.
Grand mal lui en prit, un louveteau non Raeders aurait probablement fini noyer. Plusieurs fois les vagues firent boire la tasse à la petite louve qui crachait de l'eau par la gueule et par la truffe. Son crâne de crocodile lui tombait sur les yeux, l'empêchant de voir correctement, l'incitant à couler encore plus sous la surface. La peinture qu'elle avait mis en traits bien propres sur son museau s'était effacé en immonde tâche rouges informes lui donnant un aspect de vieux sang non lavé. Elle toussait et agitait ses pattes un peu paniquée parfois, son corps s'engourdissait, elle fatiguait. Et finalement elle vit la côte, but une dernière fois la tasse en essayant de toucher le sable encore trop loin pour sa taille mais elle arriva, fatiguée, trempée mais elle y était arrivée.

Sa première action sur ce nouveau sol fut d'abord de vomir le trop plein d'eau, tousser, et vomir encore. Limule traîna les pattes jusqu'au sable sec. Il était si clair sous le soleil, celui de Morne-oeil était plus foncé. La petite louve finit par se laisser tomber dedans comme si elle venait de mourir sur le coup. Elle resta quelques instant immobile avant d'avoir un spasme lors d'un reniflement. Le sable était si doux et si chaud, les rayons du soleil qui réchauffait son corps mouillé faisait tellement de bien, ça lui fit afficher un large sourire sur la gueule malgré qu'elle ait échappé de peu à la noyade. La petite boule blanche se mit alors à se rouler dans le sable en s'étirant dans un bonheur soudain, finissant sur le côté puis le dos puis le côté puis à nouveau le dos, lançant des gerbes autour d'elle, se recouvrant elle même des grains fin. Ça allait la gratter toute la soirée, elle le savait, ça faisait toujours ça quand on jouait dans le sable mais c'était pas grave, son papa lui enlèverait les grains comme à chaque fois, la petite louve aimait bien quand il lui brossait le pelage comme ça. Elle se releva soudainement, se retrouvant dans une position assis et dans une présentation des plus déplorable, le ciel était magnifiquement bleu et la mer calme. L'odeur du sel emplissait ses poumons qui avaient craché toute leur eau et le sable lui réchauffait le corps. Elle se sentait bien, cette journée allait être parfaite.
Et jamais elle n'aurait pu remarqué cette immense forme au pelage sombre qui s'approchait.