L'Appel du Continent [Libre]

Tris n'était pour une fois en train de rien faire, elle avait passé beaucoup de temps au terres désolées, autant pour faire les travaux que pour chasser et se reposer après.
Elle regarda le bout de ses pattes à demi-enseveli sous le sable, cet endroit était plutôt tranquille, là, tout de suite. Elle, qui d'habitude était active et prudente, s'autorisa une pause, et observa les côtes, la mer, le loup qui était à moitié noyé...

Elle soupira puis s'approcha du loup en question.
Elle n'arrivait pas à bien sentir son odeur, à travers celle de la mer et il n'avait pas de glowstick, aucun moyen de savoir s'il venait d'une meute, mais elle doutait d'avoir en face d'elle un etelkru, qu'est ce qu'il ferait là ?

Une fois assez proche, elle baissa sa tête, pour voir s'il était réveillé, il semblait l'être, puisqu'il avait réussi à venir s'échouer sur la plage, mais on ne sait jamais...
Il souriait, avec les yeux rivés sur l'horizon, en vie, donc.

Elle prit un air inquiet et demanda :

- Ça va ?

La beige ne s'inquiétait pas beaucoup, il était en vie s'était déjà ça, mais... disons qu'on fait plus confiance à une jeune et pauvre louve, qui s'inquiète gentiment plutôt qu'à une inconnue qui te remue du bout de la patte pour voir si t'es en vie.
Et elle ne tenait pas à lui faire peur en plus de son état.

L'inconnu ne devait pas être d'ici, ou alors c'était un loup de meute qui ne sortait jamais de son territoire pour s'étonner de trouver une solitaire en terre libre.
Elle chercha autour d'eux s'il y avait quelqu'un d'autre, quelqu'un pour exécuter la corvée de le faire vomir.
C'était un des nombreux avantages à être solitaire, d'habitude, l'on ne croisait que rarement un loup à faire gerber.

Personne. Dommage, elle regarda piteusement sa patte, bon et bien, quand faut y aller...
Ce n'était pas par dégoût qu'elle repoussait la tâche, mais elle ne lui faisait pas confiance, il n'avait pas eu l'air très heureux de découvrir qu'il n'était pas seul sur la plage, mais elle essaya quand même d'être gentille, elle ne comprenait pas pourquoi certains le faisait tout le temps sans raison, il fallait être bien naïf pour croire que la solidarité encourageait les autres à être généreux. Mais elle laissait une dernière chance à ce style de vie que certains arboraient fièrement, mais qu'elle, elle avait renié il y a bien longtemps. Le mâle échoué était la parfaite expérience.

La solitaire se reconcentra sur le loup en question, celui à faire vomir.
Elle ne connaissait qu'un seul moyen pour y parvenir, il fallait toucher le fond de la gorge.
Sa patte était fine, elle pourrait passer mais quand elle s'apprêta à la glisser dans la gueule de l'autre, une image de l'inconnu, refermant les crocs sur sa patte, émergea dans son esprit.
La conscience de la beige lui disait qu'il n'avait aucun intérêt à l'attaquer, mais elle ne pus s'empêcher d'y penser.
Finalement, elle inspira une gorgée d'air, et avança sa patte, espérant avoir raison et ne pas faire n'importe quoi, minutieusement, elle évita de le griffer et fini par atteindre le fond de sa gorge, là elle bidouilla un peu, puis elle ressorti la patte.

La louve la laissa retomber sur le sol, peut-être que ce n'était pas suffisant, normal, elle n'était pas vraiment instruite sur comment soigner les gens, c'était du savoir inutile. De toute façons, il allait sûrement se plaindre, mais autant laisser passer...

Le test continuerait tant qu'il ne montrerait pas les crocs.

Quand Tris releva la tête, l'autre avait déjà vomi: l'opération avait fonctionné.
Et il avait retrouvé sa joie... en même temps qu'il avait oublié son existence ...
Peut-être qu'il avait reçu un choc à la tête... Ça expliquerais sa mémoire défaillante ...
Il n'était pas blessé, donc la beige pourrait potentiellement s'en aller, lui n'étant pas particulièrement aimable. Il semblait juste... fier. Fier de quoi, d'avoir survécu ?
Sûrement, ou d'avoir réussi à vomir, peut-être aussi, même si il n'avait fait que régurgiter dans l'histoire.

Elle n'avait pas vraiment envie de le sortir de sa rêverie, alors elle s'assit juste.
Elle comprenait parfaitement qu'on puisse être heureux quand l'on échappait de peu à la mort mais là, il ressemblait aux loups narcissiques qui, selon eux, collectionnaient les victoires.
Même sans connaître le passé de l'inconnu, elle trouvait ce raisonnement idiot, au lieu de rester fixé sur une réussite, il fallait mieux se concentrer sur quoi faire après.
Ce n'était pas vomir qui allait lui permettre de manger quand il en aurait besoin.

Puisqu'elle se doutait qu'il ne le prendrait pas bien si elle lui demandait son identité, elle ne lui demanda pas, finalement ce n'était peut-être pas le bon pour son test...
Mais elle essaya tout de même :

-Il vous est arrivé quoi ?

Elle garda son air bête et fragile en lui demandant cela tout en s'étant un peu recroquevillé pour se mettre à la hauteur du naufragé.

Il était franc, cet inconnu, mais aussi perdu qu'elle sur le genre de l'autre.
Elle arrêta ses précautions, s'il avait voulu l'attaquer il l'aurait fait il y a longtemps, elle se releva peu à peu et entrepris de répondre :

-Femelle. Et toi ?

Puis il recommença à parler et répondit à sa question.
Comment avait-il pu finir sur une minuscule île au beau milieu de l'océan ? Ce n'était pas un raeder, puisqu'il avait dit que sa tribu était totalement constituée d'individus écailleux et à pointes, or la solitaire, même si elle n'avait jamais croisé de membres de cette meute, était à peu près sûre qu'il y avait plus de diversité chez les pirates.

-Non, désolé

Mais elle le saurait si il y avait une meute du genre dans le coin, non ?

-Mais ça m'étonnerais qu'ils soient dans le coin, une meute entière qui se balade, j'aurai bien fini par le sentir.

Elle qui voyageait beaucoup, elle l'aurait forcément détecté si une meute avait chassé et vécu vers ici, ils auraient eu besoin de beaucoup de proie et donc, de territoire de chasse.

-Ils voyagent beaucoup ?

Même si il n'y avait qu'une infime chance qu'elle ne les aient pas vu, autant demander.

Un mâle donc, un mâle un peu déçu de sa réponse visiblement, étrange, de ce qu'elle avait vu, il avait plus le caractère débrouillard des solitaires, qui n'avait donc pas vraiment besoin de meutes pour vivre.
Mais elle compris quand il donna sa deuxième réponse, il venait de terres plus dangereuses qu'ici, même si cette terre avait son lot de prédateurs, les meutes n'avaient jamais été poussé à les fuir pour survivre. Enfin, pas qu'elle sache.

Puis il demanda de l'eau qu'il puisse boire, il ne précisa pas qu'elle devait être proche, et ça tombait bien en fait, de ce qu'elle connaissait du coin, les seules sources d'eau buvable étaient très loin, derrière les montagnes à l'oasis, où simplement sur les ruisseau qui y coulaient, mais il valait mieux ne pas être fatigué pour les atteindre, les montagnes pouvaient être dangereuses pour un loup non-averti.

-Ce n'est pas très proche, mais il y a des ruisseaux sur la montagne et derrière il y a une oasis. À toi de voir.

Elle ne s'inquiétait pas trop pour lui, il survivrait sûrement, il fallait juste être prudent aux rochers mal accrochés et aux pentes glissantes.

Elle fut un peu étonnée quand il lui demanda ce qu'était une oasis, il était vrai qu'ayant grandi dans le coin, où les climats se mélangeaient, elle connaissait bien les spécialités de chaque territoire, mises à part les terres des meutes bien sûr. Là, les solitaires, même les plus sympathiques, y étaient interdits,  enfin... sur les terres etelkrus surtout, les autres ne défendant pas vraiment le territoire qui leurs permettaient de se nourrir.

-Une sorte de petit lac dans le désert

Elle ne se risquait que très rarement à aller boire là bas, traverser le désert ne la tentait pas vraiment et les montagnes n'étaient pas non plus son lieu préféré, quoiqu'elle y allait déjà plus.

-Il y a des noix de coco et des crabes

Il y avait des endroits où manger était un problème nettement plus important qu'ici, la facilité était telle que beaucoup de loups emmenaient leurs petits pour les divertir, aucun danger. Évidemment, si les parents en question laissaient leurs petits se noyer ou jouer avec les requins, ça changeait la donne.

-En quelques sortes

Cet endroit était autant sa maison que beaucoup d'autres, la solitaire tournait entre les différentes terres libres, on pouvait donc bien dire qu'elle vivait ici.

-Je passe de territoire en territoire, je vis ici, mais pas que.

Sur ce elle s'approcha d'un cocotier et ramassa un des fruits qui lui semblait mûr, prit une fine mais solide canne à sucre qui avait poussé non loin et la planta pour percer un des points foncés de la carapace de bois avant de jeter la canne.
L'inconnu lui avait demandé de l'eau, ce n'était pas exactement pareil, mais ça pouvait se boire. Elle le poussa un peu dans la direction du mâle roux.

-Si t'as soif tu peux toujours boire ça, et l'intérieur se mange

La beige ne savait pas si l'étranger connaissait les noix de coco, pourtant ce n'était pas ce qu'il manquait sur la plage.

L'inconnu sortit tout un tas de noms étranges d'animaux, Tris ne connaissait aucun d'eux et fut rapidement perdue dans les paroles du loup. Halszkaraptors ? Spinosaures ?
Le premier avait un nom si compliqué qu'elle dut repasser plusieurs fois le souvenir dans sa tête avant de comprendre le mot.
Et bien, visiblement elle ne connaissait pas tant que ça les différentes choses qui pouvaient exister dans ce monde.

-Euh... De quoi ?

En tous cas une chose était sûre, quelque soient ces choses, elles n'étaient pas à l'oasis. Surtout si elle était aussi dangereuses qu'il le prétendait.

-Non, la solitude me va très bien

Son point de vue avait déjà étonné, Méridor quand il lui avait demandé à peu près la même chose, pourtant la solitaire, elle, ne trouvait pas cela si étrange, à quoi ça lui servirait d'aller vivre en meutes ? Certains pouvaient peut-être aimer ça, mais elle, trouvait qu'il y avait bien trop de problèmes à gérer alors que l'on pouvait se faire des amis sans rester sans arrêt avec eux.

Puis l'echoué s'avança vers l'ombre, et la solitaire le suivit sans se rendre compte qu'elle avait totalement oublié que à l'origine, elle faisait un test. Elle était tout bonnement passée à autre chose.

-Mais en fait, c'est quoi ton nom ?

Elle aurait peut-être dû le lui demander il y a longtemps, mais ça ne lui avait servi à rien jusque là alors mine de rien le moment était propice à cette question.

Pas vivre longtemps ? Tant que ça ? Il devait venir de bien loin pour craindre autant des bêtes dont elle n'avait jamais entendu parler. Il l'intriguait, elle ne le cachait pas, aussi étrange qu'ils soient, les loups qu'elle rencontrait d'habitude ne parlaient pas souvent de bêtes dangereuses et qui lui était totalement étrangères.

-Ce que j'entendait par là, c'est que les bêtes dont tu parles, je n'en ai jamais entendu parlé ni vue, pas même à l'oasis.

Il finit par lui donner son nom, Fenouil, pas trop dur à prononcer par rapport aux autres mots qu'il avait dit, c'était... simple et efficace.
Elle ne connaissait pas le Asclepia dont, il parlait, tant pis, ça devait être quelqu'un de sa meute.

Je suis Tris

Tandis que Fenouil se frottait à un arbres, elle s'assit, attendant de voir si elle aurait des explications.

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'Hasard' :

Elle haussa les épaules, elle espérait qu'elles ne viendraient pas, mais au fond, elle ne s'inquiétait pas, elle ne saurait pas dire pourquoi, mais elle ne s'en faisait pas plus que ça.
Elle se trouvait un peu imprudente mais son instinct lui disait de rester tranquille.

-Non, je ne crois pas, enfin, je ne me rappelle pas l'avoir fait...

D'aussi loin, qu'elle pouvait se souvenir, elle avait toujours été '' Tris'', mais elle n'avait jamais su l'origine de ce nom, peut-être était-ce ses parents qui l'avait nommée ainsi... Ou son mentor, possible aussi, elle n'avait jamais cherché à savoir, pourtant, petite, elle s'était interrogée sur sa naissance, sur ses parents, maintenant ça l'étonnait qu'elle ait raté cette question.

Soudain tout devint noir, le sable, les palmiers, la mer, elle força ses oreilles à se relever à la recherche de bruits suspects, mais rien, les oiseaux qui fuyaient apeurés par cette obscurité subite, elle s'applatit en entendant Fenouil fuire, est-ce qu'une des bêtes dont il parlait avait fait son apparition ?
Elle tourna la tête à toute vitesse mais ne voyait rien, ses yeux n'était pas encore habitués au manque de luminosité, elle sentait la peur arriver, quelque soit la menace, elle ne pouvait la voir, elle se prépara à des coups, protégeant sa tête... mais rien, que dalle, plus un bruit, elle tout simplement seule, c'était le parfait résumé de sa vie, la peur, puis la solitude.
Lentement, elle se releva, et chercha ce qui avait causé cette panique.
Le soleil !
Il n'était plus là !
Il ne restait de l'astre qu'une fine couronne, ce spectacle était hypnotique, elle n'arrivait plus à le quitter des yeux, c'était si... beau, mais à la fois si effrayant.
Elle regarda jusqu'à que le soleil revienne, petit à petit le rond noir quittait la lumière et la solitaire dut détourner les yeux quand ce fut trop brillant.
Elle cligna rapidement des yeux, tentant d'effacer l'image du soleil de sa rétine, puis elle chercha le mâle qui s'était enfui, elle ne le voyait plus, ne l'entendait plus, elle sentait encore son effluve, mais à quoi bon le chercher, certes il l'intriguait, certes il connaissait des animaux... intéressants, mais elle était venue se reposer, donc elle se reposerait, seule.
Si elle passait vers là bas, elle irait peut-être demander à la bibliothèque, si ces animaux risquait vraiment de venir, il faudrait qu'elle soit prête.