Tout se paye un jour... ○ Libre

« Jaxx & Nola ;

Au petit matin, le solitaire au pelage blanc était sorti de sa tanière pour aller pêcher. L'heure était idéale pour cette activité lorsque les premières lueurs de l'aube venaient caresser la surface de l'océan en de charmants scintillements. C'était là que les poissons s'éveillait, pas encore complètement alerte car se sentant encore sécurisé par la pénombre. Jaxx aurait sû, d'ordinaire, profiter de ce spectacle si simple mais si beau de Dame Nature. Il aurait apprécié chaque reflets de soleil sur les écailles luisantes et colorées, il aurait sourit devant le sable s'embrasant de paillettes,  il aurait rit en observant le ballet maladroit des petits crabes rouges quittant leur abri nocturne. Mais le mâle aux yeux de miel n'avait pas le coeur à s’émerveiller, il était trop épuisé, trop aigri par sa situation désespérée. Une grimace tordait son museau alors qu'il s'étirait brusquement et attrapait son petit déjeuner dans l'eau fraîche. L'eau salée éclaboussa sa tête et son flanc mutilé. Il grogna, les crocs planté dans sa proie. Ses dernières rencontres l'avaient fortement amoché et malgré ses semaines de convalescence, caché au calme le plus loin possibles des territoires Etelkrus, il restait encore une large estafilade pas tout à fait cicatrisée lui longeant le côté de l''épaule à la cuisse. La solitaire à l'allure féline coiffée de plumes l'avait méchamment atteint et son funeste combat contre son paternel, quelques jours plus tard, n'avait pas aidé. Puis l'altercation avec la patrouille Etelkrus quelques heures après ça alors que son esprit était aussi affaibli que son corps.

Sa fuite était un miracle. Il en remerciait... Qui il ne savait pas. L'entité divine ou démoniaque, peu lui importait, qui s'était penché sur son sort. Depuis Jaxx avait fait profil bas, rasant le sol et cachant les traces de son passage pour ne pas être retrouvé. Il avait voulu se sortir les derniers événements de la tête, il avait voulu remballer tout ça au fin fond de son encéphale pour se remettre. Bon sang, il avait tué un loup. Son géniteur. La père de sa soeur. Sœur qu'il... Enfin. Ils avaient... Un haut le coeur le prit et le blanc regarda son poisson avec amertume. Repas à peine entamé mais déjà la faim l'avait quitté. Il ne parvenait pas à s'éloigner de tout ça, il n'en dormait presque plus et mangeait peu. C'était sans doute pour ça qu'il avait mis autant de temps à se soigner à peu prêt convenablement. Et si ses forces étaient revenues, quelques séquelles restaient bien présentes pour le tarauder. D'abord physique, car la couture de la longue cicatrice sur son flanc restait tendue, rose, boursouflée et donc très sensible, et que forcément chaque geste trop rapide lui arrachait un grognement car cela tirait douloureusement sur la peau a vif. Il craignait à chaque foulée un peu audacieuse, que sa plaie ne s'ouvre à nouveau et que le rouge grenat ne vienne inonder son pelage pâle. Le souvenir de son mort s'étouffant dans son sang lui donna la nausée, alors qu'il revoyait la tâche de liquide sombre s'étendre sur le poil blanc de Jagh. Le solitaire au regard ambré repoussa son poisson et se redressa, dégoutté. De lui et de ses actes.

Autre chose troublait le prédateur : depuis ce jour maudit, il avait peur. Il sentait ce que c'était que d'être traqué, il se savait sur le fil du rasoir. Jamais il n'avait ressenti ça. Cette pierre constante dans son estomac qui le rendait patraque, fébrile, inquiet. Plus les cauchemar qui hantaient ses trop rares heures de sommeil. Il revoyait Joy, son expression horrifiée, il la voyait se noyer dans le sang de leur géniteur commun. Et il imaginait sans peine la haine brûlante et destructrice qu'elle devait ressentir à son égard... Alors que lui n'était que peine et désarroi pour elle. Dire que... Il ne pouvait y penser sans se sentir extrêmement honteux de... Enfin, il ne savait pas. Il n'avait pas fait le lien. Il aurait pu cependant, il aurait dû ! Son regard d'or pétillant, les traces de vert sur son pelage et cette sensation de complicité immédiate, ce jeu de domination perpétuel jusqu'à... La séduction. Il s'en voulait. Et en même temps il comprenait pourquoi elle l'avait tant intriguée, tant attirée. Si seulement il avait comprit, ou ne serait-ce que penser qu'il avait pu avoir une soeur d'à peu près son âge. Il avait été persuadé, sans trop savoir pourquoi, que Jagh devait vivre malheureux et pénitent pour les horreurs qu'ils avaient imposés à sa mère... Version maternelle contré par un rapide échange avec ce loup qu'il avait tué par colère et vengeance. Et si... Et si Nola n'avait fait que mentir ? Et si la vérité était autre ? Comment Joy aurait-elle pu être si déchirée parla mort d'un père violent, brutal ou mesquin comme en avait fait le portrait la louve brune ?

Si seulement les choses avaient été différentes. Si seulement la jeune Etelkru beige n'avait pas été sa demie-soeur. Si seulement Nola ne l'avait pas embrouillée avec ses histoires. Si seulement Jagh n'avait pas eu cette air si surpris d'entendre de tels accusations... Si seulement il n'avait pas porté ce coup de crocs fatal... Tellement de suppositions. Mais les choses étaient ce qu'elles étaient et désormais, Jaxx vivait avec le poids de ses remords, avec la honte de se sentir sali par ce meurtre, mais aussi l'idée écœurante d'avoir... Avec sa demie soeur. Penser qu'il ne le savait pas à ce moment là ne le soulageait en rien. Il aurait dû le deviner, il avait eu en sa possession assez d'indices ! Et dans u sens, Joy aurait dû réagir la première, elle qui voyait ce jeune loup presque copie de son paternel ! Qu'avait-elle cherché alors ? Et elle, le savait-elle ?? Le mâle eu le tournis et se redressa pour rejoindre sa tanière, mais le vertige s'accentua et les nausées reprirent de plus belle. Tout ça le rendait malade, littéralement. Il symptômatisait, il en avait conscience, mais ne parvenait à passer au delà du choc. Son esprit restait coincé sur ses images sombres et dérangeantes comme une ritournelle infernale. Le mâle blanc, vert et indigo observa le contenu de son estomac presque vide avant de l'enfuir rapidement sous un tas de sable. Effacer la moindre de ses traces étaient primordiales. De même il rejeta le poisson a peine grignoter à la mer, où il trouverait sûrement un autre affamé pour le déchiqueter. En boitant un peu pour éviter de trop tirer sur ses muscles et la peau de son flanc, le jeune assassin s'en alla rejoindre sa cahute de fortune.

Pour s'isoler de ce monde trop beau pour y accueillir un scélérat de son espèce. Un monstre pourtant façonnée par des mots doux, cajolant, et des pattes expertes. Pattes qui se posèrent alors sur le haut de la dune au dessus de Jaxx. Pattes qui crissèrent sur le sable tiédissant. Pattes qui ne firent rien pour se dissimuler à la vue du solitaire qui sursauta nerveusement en grognant. Il sentit son flanc piqué de milles aiguilles alors qu'il se retournait trop brusquement.

« Qui donc a osé abîmer mon petit de la sorte ? »

Grinça une voix faussement fâchée, qu'il aurait préféré ne jamais ré-entendre. Les oreilles du blanc se plaquèrent contre son crâne alors qu'il recula d'un pas en fixant la louve brune qui descendait la butte de sable la queue haute et un sourire innocent flottant sur les babines. Méfiant et en colère contre elle, il n'accepta pas l'étreinte de sa mère sans broncher. Cependant elle n'écouta ses protestations et se glissa contre son poitrail et sous son menton, puis contre son flanc blessé. Jaxx frissonna et rompit la contact aussi vite que possible, plantant un regard glacial sur sa mère. Le miel de ses iris semblait devenu de l'or dur et froid, comme forgé pour blesser. Interloquée, Nola reprit la parole de son ton suave et confiant :

« N'es tu pas content de revoir ta mère, mon poussin ?
- Non.
- Tu m'as manqué ! »

Protesta la femelle dans un souffle affligé. Jaxx ne se laissa pas attendrir. Ce qu'il avait fait était trop grave, et même s'il refusait de l'admettre complètement, parce qu'il était un bon fils, elle en était la cause première. Jusqu'ici, il avait fait son possible pour la protéger de ces mâles qui lui tournaient autour avec de mauvaises intentions. C'était pour ça en premier lieu qu'il était devenu plus fort, plus vif, plus leste. Pour être meilleur et pouvoir défendre sa mère. Mère dont il doutait de la bonne foi, aujourd'hui.

« Eh bien ? Souris un peu ! J'ai mis du temps à te retrouver, ça fait des année que je te suis. Tu es devenu très malin pour ne pas te laisser filer. Ton frère n'a pas ce don.
- Mon frère ?
- Oui, il est né quelques temps après que tu sois parti et que tu m'ai abandonnée ! Il s’appelle Rov. Il ressemble à son père, comme toi au tien. »

Forcément, le fils se sentit mal, coupable d'avoir ainsi agit envers celle qui l'avait élevée avec tendresse et confiance. Mauvais garçon, enfant ingrat. Et pourtant, pourtant au fond de lui résonna quelque chose, comme une sensation de piège implacable se refermant sur sa proie. Il connaissait Nola, il ne connaissait que trop bien son manège et vivre loin d’elle quelques temps lui avait permis de se rendre compte qu'il avait fait le meilleur choix pour son avenir en la quittant. La honte reflua pour être remplacer par une colère bouillonnante, explosive.

« Tu m'a menti ! Il avait une famille ici !
- De ? Qui donc ?
- Mon père !
- Ce salaud a donc trouvé une nouvelle victime ? »

Jaxx gronda sourdement. Les oreilles de la louve brune se braquèrent vers l'arrière un instant, un doute passa dans ses yeux de jade mais elle tint bon sans ciller. Elle était la mère, il lui devait le respect. En effet, le mâle baissa les yeux le premier, non sans sentir gonfler dans sa poitrine une émotion violente et destructrice qui ressemblait étrangement à de la rage.

« Je l'ai tué Maman !
- Ah ! Tant mieux ! Le monde sera enfin débarra-
- Arrête ! Il a dit que...
- Oh. Tu l'as donc rencontré. Tu lui as parlé. »

Le ton sympathique de la femelle changea soudainement. Un vent froid sembla passer entre les deux solitaires tandis qu'elle prenait les devants pour garder le contrôle sur son fils.

« J'ai peut-être exagéré la situation, à mon avantage, pour que tu ne cherche pas à retrouver ce bon à rien. Il n'avait de penser que pour une autre alors qu'il passait la nuit avec moi. C'était un lâche. Un idiot transit facile à berner. Et je voulais des enfants. Je suis bien tombé, j'ai eu le plus beau des garçons.
- Tu n'es qu'une-
- Ton langage jeune loup, je reste ta mère ! »

Gronda t-elle en prenant une posture dominante face au mâle pourtant plus grand qu'elle. Il recula d'un pas, battant en retraite. Nola sourit, victorieuse. De son côté, le blanc réalisa enfin à quel point elle était manipulatrice, à quel point tout n'était que mensonge et tromperies. Il comprit enfin que l'image d'une mère aimante et surprotectrice n'était qu'une façade. Masque qui s'était fendu il y a longtemps, mais il avait refusé de regarder en dessous. Il découvrait maintenant qu'il n'avait été que l'objet. La femelle ne voyait qu'en lui un moyen de se protéger. Elle avait fait de lui un parfait petit soldat, prêt à se jeter devant elle en bouclier au moindre signe de danger. Il sût qu'il n'y avait jamais eu d'amour, jamais de sincérité. Même les jeux que la mère et le fils avait partagés n'avaient été que dans le but de le rendre meilleur, plus fort, plus rapide, plus réfléchi. Nola était une louve mauvaise et le rictus qui fendait son museau à cet instant semblait démoniaque au jeune solitaire. Sa mère n'était qu'une marionnettiste hors-pair. Il n'avait été que son instrument, depuis toujours. D'abord pour faire pitié aux mâles croisés qui chassaient pour eux, puis pour les garder auprès d’elle sous prétexte qu'il fallait un mentor au louveteau, puis il avait joué le rôle du garant de la sécurité et quand elle avait senti que doucement il s'échappait, elle avait recommencer son manège avec un autre mâle. Et il avait donc un frère. Ce pauvre Rov avait-il subi la même enfance biaisée ? Et qu'avait-il pu arriver à la brune dans sa prime jeunesse pour qu'elle devienne aussi mesquine, aussi méchante ? Il ne voulait même pas le savoir. Sa rage éclata alors.

« Je l'ai tué pour toi, pour TE VENGER ! A CAUSE DE TOI ! IL AVAIT UNE FAMILLE !
- Et alors ? Il a peut-être réussit à tremper son dard dans celle qu'il convoitait, peu m'importe.
- J'AI UNE SŒUR ! QU'IL A EU LA CHANCE ÉLEVER ! QUI...
- Ne me crie pas dessus, Jaxxou, je le répéterais pas.
- J'AI DÉTRUIT CETTE FAMILLE A CAUSE DE TOI ! POUR DES MENSONGES ! POUR-
- FERME LA. »

Glapit la louve au regard vert. Son échine était hérissée, sa queue dressée et elle incarnait la fureur. Le solitaire hésita fait fit face à sa mère. Pour la première fois, il était prêt à la défier. L'or croisa le fer avec le jade. Si leurs yeux avaient pu tuer, ça aurait été la fin de cette tragique histoire. Ce fût Jaxx en premier qui baissa les armes. Il n'était pas en état de se battre, avec personne. Mais sa décision était prise, irrévocablement. C'est avec toute l'hostilité dont il était capable qu'il mit fin à la confrontation.

« Je ne veux plus jamais te voir.
- JAXX, ON NE PARLE PAS A SA MÈRE AINSI !
- Tu n'existe plus.
- JAXX REVIENS ICI. NE ME TOURNE PAS LE DOS.
- Tu es morte pour moi.
- JAXX ! »

Nola tonnait encore mais le fils prodigue ne le serait plus jamais. Il fuyait à jamais cette louve néfaste. Prenant un pas soutenu, malgré les tiraillements de son côté, il s'éloigna, il quittait à jamais cette femelle qui ne serait plus jamais rien pour lui. Il préférait encore être complètement seul, plutôt que de savoir ses longues griffes prendre encore possession de sa réflexion, de ses avis, de ses choix. Plus jamais personne ne pourrait le contrôler ainsi. Plus jamais. Il entendait encore les cris de Nola qui s’époumonait mais ne le suivait pas. Sans doute du haut de son piédestal en carton croyait-elle encore qu'il reviendrait. La Reine avait perdu son soldat le plus fidèle et ne l'acceptait pas. Les cris se transformèrent en grognements qu'il ignora jusqu'à ce que l'intonation en change, et que d'autres ne les rejoignent. Alors le rire machiavélique de sa mère éclata et il se retourna pour comprendre. Qui ? Qui avait rejoint sa mèr- non, juste Nola ? Qu'est-ce qui l'amusait tant ? Qu'est-ce que... Les yeux ambré, perçants, du prédateur en perdition captèrent un mouvement : une silhouette beige sur la sable clair. Alors que le soleil se levait maintenant sans paresse et que toute pénombre avait abandonné la plage, il vit Joy se jeter sur la louve brune. Il vit les deux femelles rouler dans des gerbes de sables étincelantes. Il entendit la haine et les mâchoires qui claquaient furieusement. Il eut soudain peur pour elle et revint sur ses pas aussi vite que possible alors que l'élan du combat embarquait les deux louves vers l'océan où une lame fraîche vint les cueillir et les calmer pour reprendre leur souffle, toutes deux échevelées, et maintenant trempées.

« Joy ;

Son insupportable binôme et elle s'était séparés à la frontière Etelkrus après s'être tout deux bien assurés que Lymphalème avait renvoyé son paternel hors de leur territoire. Forcément, un pincement au coeur avait forcé la femelle à respirer un bon coup avant de s'acquitter de la mission donnée par l'Alpha au pelage bleue. Il était encore difficile pour Joy de penser à son père et cela la rendait plus à cran, plus grinçante. En ces semaines sombre, la disciple d'Aka n'était pas de bonne compagnie. Heureusement donc, Nachos la laissa seule une fois le chef Lazuli reparti. Elle en avait profité pour s'aérer la tête, pour courir et grogner, pour vider son sac et son énergie au passage. Jusqu'à ce qu'elle tombe sur une piste. Une odeur qui ressemblait à celle de l'assassin de Jagh. Une fragrance féminine qui forcément, avait un lieu avec le solitaire blanc qui... Bref. Elle se refusa de penser à tout ce qu'il y avait eu entre eux. C'était trop... Dérangeant. Honteux. Et elle ne pouvait s'empêcher de se sentir fautive, sale. Elle aurait tant voulu en parler à son amie, elle aurait tant eu besoin d'une oreille attentive... Mais Pepper avait bien d'autres chats a fouetter et elle savait que son attirance pour un solitaire n'aurait été comprise. Surtout maintenant qu'on se doutait très fortement du lien réel qui les unissait. Avec le portrait d'Athelstan et Lucie en prime du sien, le lien de parenté entre Jaxx et Jagh avait été confirmé. Il ne pouvait en être autrement, la ressemblance était bien trop frappante. Alors pourquoi n'avait-elle pas vu elle aussi que cette curieuse similitude ne pouvait être une coïncidence ?!

Parce qu’elle avait tant eu confiance en son père, si désespéramment amoureux de Noroi que jamais elle n'aurait imaginer qu'il puisse avoir eu d'autres liaisons ? Sa mère avait eu deux filles avant elle. Pourtant il lui avait paru insensé, impossible même, que le le Doyen Etelkru ai pu avoir d'autres enfants avant elle. Il avait toujours agit comme si elle était son trésor, comme si elle avait été la seule, l'unique. Forcément, il ne devait pas savoir qu'il avait un fils ailleurs. N'empêche qu'imaginer son géniteur avec une autre louve que sa mère la mettait hors d'elle. Sans doute à cause de tout ce que cela avait engendré. Même si Joy était désormais seule, elle n'hésita pas un instant à suivre la piste olfactive. Toute la nuit elle traqua sa proie, truffe au sol et regards suspicieux partout. Rongée par la haine, l'envie de vengeance faisait palpiter son coeur et inondait ses veines d'adrénaline. Enfin elle allait le retrouver et le dépecer. Enfin elle allait le confronter et le tuer de ses crocs comme il avait volé la vie de Jagh. Elle se libérerait ainsi de tous ses malheurs, du poids de la honte et de la rage. Alors avec férocité et acharnement, la jeune Bouclier avait avancer à travers les terres libres, s'éloignant toujours plus de son territoire en quête de celui qui était la cause de tout ça. Et au bout de longues heures de chasse, à écouter les sons de la nuit, à fouiller l'obscurité des bois, à renifler les arbres et le sol poussiéreux, à chercher d'autres traces de passage, enfin, elle toucha au but en parvenant à la Côte. La terre fit place au sable rugueux et doré. Des éclats de voix lui parvinrent.

Joy se tapit alors et glissa en avant pour observer en contre-bas, sur la rive. Deux loups se disputaient. Jaxx était l'un deux. La disciple du Grizzli vu rouge mais resta cachée pour écouter. Ce que ses tympans captèrent ne firent que gonfler sa haine et elle dû retenir un grognement pour ne pas être repérée.
« Je l'ai tué pour toi, pour TE VENGER ! A CAUSE DE TOI ! IL AVAIT UNE FAMILLE !
- Et alors ? Il a peut-être réussit à tremper son dard dans celle qu'il convoitait, peu m'importe.
- J'AI UNE SŒUR ! QU'IL A EU LA CHANCE ÉLEVER ! QUI...
- Ne me crie pas dessus, Jaxxou, je le répéterais pas.
- J'AI DÉTRUIT CETTE FAMILLE A CAUSE DE TOI ! POUR DES MENSONGES ! POUR-
- FERME LA. »
Ainsi il n'avait pas agit seul. Le crime avait été commandité. Cette femelle semblait avoir l'ascendant sur son assassin de demi-frère. Elle était donc le cerveau. N'était que les muscles ? Non. Il ne lui avait jamais semblé être docile ou obéissant à quelques femelles que ce soit. Qui était cette catin ? Qui était pour lui, pour qu'il tue pour elle son propre père ?! Les crocs de la louve beige se serrèrent si fort qu’elle sentit ses gencives demander grâce. Qui était cette jolie femelle antipathique au possible ? Cela s'ajouta à sa rancoeur. A bien observer, elle portait quelques traits physiques semblables au solitaire, de l'indigo sur son pelage, un poisson mort sur l'épaule...

Elle ne devait pas être beaucoup beaucoup plus âgée qu'eux. Une cousine ? Une grande soeur ? Etait-elle aussi liée à elle d'une quelconque façon ? Une pointe de jalousie complètement déplacée la réveilla soudain et elle secoua le museau. C'en était trop. La Bouclier Etelkru se releva en fixant les deux individus avec ses yeux ambrés lançant des éclairs. Ils ne la virent pas, trop occupés à se crier dessus. Tant mieux. Lentement, elle s'efforça de descendre de sa dune, en restant bien perpendiculaire à eux qui se faisait face, ainsi, elle aurait une chance de rester dans l'angle mort. Elle se figea ensuite, entendant le reste de la conversation.
- JAXX, ON NE PARLE PAS A SA MÈRE AINSI !
Voilà donc l'explication. Cette louve brune était la génitrice de son demi-frère. Incontestablement cela expliquait le pouvoir qu'elle possédait sur lui, et aussi pourquoi il avait tué pour elle. Cela n'excusait en rien son geste, cela n'apaisait pas les tourments de Joy et surtout cela ne changeait absolument rien à son besoin de faire justice elle-même. Ou presque. Parce qu'elle pouvait comprendre un peu mieux les enjeux de cette tragédie et ses causes, la cible première de son courroux changea. Au moment où Jaxx s'éloigna en courant -par chance il ne fit pas attention à elle, sans doute son pelage se camouflait assez bien sur le fond du paysage-, elle bondit vers la salope qui s'était joué de tous et avait ordonné la mort de son père. Rien ne l'atteignit plus alors que tout son esprit était focalisée sur la brune.

Son rire dément, lorsque qu’elle comprit qui venait les rejoindre sur cette plage, ne fit qu'accentuer la détermination de Joy à lui arracher les tripes. Il n'y eu plus que son envie de déchirer la gueule de cette louve, d'allonger son sourire en une décapitation sanglante. Les deux louves firent front et la solitaire n'hésita pas une seconde à répliquer à l'assaut de l'Etelkru au glowstick rouge. Des touffes de poils volèrent au même titre que le sable autour d'elle. Une vraie tornade de grognement et de glapissement lorsque l'une des deux sentaient les griffes ou les crocs de l'autre percer son cuir. Sans faire attention, elle se rapprochèrent de l'eau léchant la rive. Une vague les surpris. La solitaire brune et la jeune louve beige se séparèrent, le souffle court et l'échine doublée de volume. Quelques gouttes de sang par ci par là venait agrémentés leurs corps soulevés par un rythme cardiaque soutenu et une respiration saccadée. Elle se firent face quelques secondes, se jaugeant, se défiant de revenir à la charge. Joy n'était pas beaucoup plus petite que l'autre et sa rage valait bien milles fois l'instinct de survie de l'autre, assurément. Pourtant, elle manquait d'expérience et l'autre s'en doutait. Elle feignit d'attaquer d'un côté, pour bondir de l'autre. Joy réagit au quart de tour mais ne pu cacher l'éclair d’inquiétude dans ses prunelles de miel. La mère de Jaxx su alors qu'lele trouverait une faille et continuer de sauter et d'attaquer de tout côté sans jamais reproduire de schéma identiques contrairement à la plus jeune qui parait souvent par les mêmes gestes.

Dès qu'une ouverture dans sa garde se fit, elle s'y engouffra. C'était sans compter sur le mâle blanc qui s'interposa face à sa génitrice. Nola fût stoppée nette par surprise. Pourquoi diable son bébé s'interposait pour protéger l'autre ?! Pourquoi donc se jetait-il désespéramment devant elle pour l'aider ?! Joy se sentant acculée, agressée par les deux parias en même temps, et ne réalisant pas tout de suite que le blanc était de son côté, planta ses crocs dans la cuisse de son demi-frère, à l’exact endroit où terminait la couture de sa cicatrice. Sous la douleur, il perdit l'équilibre et tomba, Joy en profita pour l'écraser de ses antérieurs et lui couper la respiration. Sonné et le flanc vrillé par la souffrance, le blanc ne réagit pas et se laissa dominer. La louve brune hésita un court de laps de temps en fixant son rejeton. Instant décisif car l'Etelkru bondit sous la femelle en prenant appui sur le flanc de Jaxx qui étouffa un gémissement, l'estafilade le long de son côté s'étant déchirée en plusieurs point et le sang tâchant une nouvelle fois ses poils clairs. La mère ne fit que ça, et ce fût ce manque d'attention qui permit à Joy de planter ses dents vengeresses pile dans la jugulaire de la brune. Affolée et sentant son fluide vitale la fuir, Nola tituba plus loin et ne parvint pas à se défendre de la disciple d'Aka. Cette dernière, poussa la solitaire encore et encore jusqu'à atteindre son cou et lui briser la nuque. Elle au moins, elle ne laissait pas les choses traîner. Elle ne laissait pas le temps à la femelle, aussi mauvaise et au coeur de pierre fût elle, de comprendre qu'elle allait mourir. Le regard vitreux se ternit rapidement tandis que plus aucun spasme ne venait traverser le système nerveux de la mère de Jaxx.

Contrairement au blanc qui avait regretter son geste aussitôt le coup fatal donné, la louve au pelage couvert de sable, de bave et de sang n'eu absolument aucun remord. Aucune étincelle ne vint éveiller ses prunelles dures. Elle observa quelques secondes le cadavre à ses pattes et s'en détourna pour se rapprocher de son demi-frère. Elle n'était pas calmée, elle n'était pas apaisée. Elle en voulait toujours autant à ce loup d'avoir détruit sa vie. Toutefois, après coup lui revint en mémoire l'acte irréfléchi du mâle qui s'était calé entre les deux louves prêtes à s'entre-tuer malgré sa faiblesse apparente. Pourquoi était-il revenu ?! Tout en elle était agressivité, et elle l'aurait écharpé sur place si la vision pitoyable du mâle ne lui avait pas autant rappeler l'image de son défunt père. Elle n'allait pas achever une loque. Il était a terre et plein de sang. Ce ne serait qu'une exécution sommaire et assez de sang venait d'être versé. Elle se sentit sale et poisseuse. Elle voulu parler mais les mots lui manquèrent tandis que la tension du combat peu à peu libéra ses muscles.

« Merci... »

Les oreilles de Joy se plaquèrent contre son crâne. Quoi ??! Troublée, elle gronda, avant de se détourner. La fatigue l’enserra dans un étau et un mal de tête explosa dans ses tempes. Elle réalisa qu'elle était quand même salement amochée. Des morsures sur ses flancs et ses épaules libéraient un peu de sang. Une à son cou semblait plus profonde et donc débitait plus de liquide encore. Rien de mortel cependant si elle se faisait soigner rapidement. Un vertige la prit, elle se rappela aussi qu'à un moment donné elle s'était cogné contre un petit rocher, la douleur s'éveillait maintenant entre son omoplate et l'arrière de sa tête. Il lui fallait retourner auprès des siens et se soigner rapidement. Hors il lui fallait retraverser toutes les terres libres seule dans cette état de faiblesse et d'épuisement dangereux. Elle ne pouvait se permettre de perdre encore du temps et de l'énergie si elle voulait rentrer avant la nuit et ne pas voir ses chances de survie s'amoindrir considérablement. Dos à Jaxx, qui gisait au bord de la mer la respiration difficile, elle tourna le museau vers lui et lâcha d'une voix sèche et pleine de fiel :

« Si tu survis a cette journée, je ne saurais que vivement te conseiller de ne plus jamais croiser mon chemin, de ne plus jamais poser les pattes sur nos territoires. »

Et elle s'en alla, quittant les Côtes de Nacre en le laissant là avec la carcasse de sa mère. Elle s'éloigna aussi vite que possible pour rentrer à la maison, mais bien vite, elle sentit ses pattes trembler et ses forces la quitter. L'adrénaline étant retombé, la colère se renfermant dans un coin de son âme a chaque pas supplémentaire, la brume de son esprit s'envola enfin doucement. Au bout de quelques heures de courses, elle ne réussus plus à poser une patte devant l'autre. Et elle réalisa. Chaque seconde de cette rencontre, chaque gestes. Tout cela la percuta et elle dû s'arrêter, se laissant choir pour pleurer. Ses nerfs lâchaient. Bon Dieux. Elle venait de tuer à son tour. Elle avait, de sang-froid, mis fin à la vie d'une louve. Elle était devenue exactement la même que son demi-frère en déchirant la gorge et transperçant la nuque de la mère de Jaxx. Une vie pour une vie, la dette était payée. Mais cela n'avait pas un goût de victoire. Au contraire, il lui semblait qu'elle venait de perdre bien plus encore...

De son côté Jaxx attendit d'être seul, attendit que sa respiration se stabilise et que la douleur reflue un peu pour lécher sa plaie et se remettre maladroitement debout. Il n'eut tout d'abord pas un regard pour le corps brun, sans vie, de sa génitrice. Il fît quelques pas en grognant, se mordit la langue et s'approcha finalement de Nola. Il observa son museau où nul faux sourire ne viendrait plus l'embobiner, où plus aucun regard mielleux ne viendrait charmer quiconque. Il se détourna enfin pour rejoindre sa tanière et récupérer ses affaires. Il lui fallait une nouvelle maison, il lui fallait soigner cette blessure au plus vite pour qu'aucune infection ne vienne le faucher, et surtout, il fallait qu'il trouve refuge là où personne ne le retrouverait plus aussi aisément. Il avait besoin de temps. Pour se remettre d’aplomb. Pour réfléchir, pour comprendre tout ce qui s'était passé ce jour. Il s'était interposé sans y penser, pour que la louve brune ne blesse pas Joy davantage. Cette dernière l'avait attaquée, de manière tout à fait légitime, elle avait tué sa mère comme lui avait tué son père -leur père, et pourtant, elle l'avait épargné en fin de compte. Lui laissant une chance de survivre par ses propres moyens. Sans l'achever, et surtout, sans le livrer à sa meute... Que devait-il en conclure ? Il ne savait pas. Il ne comprenait pas. Et Joy ne le comprenait pas non plus.

Seuls les Dieux savaient qu'en cet instant, le frère et la soeur, bien qu'à moitié seulement, était plus proche que jamais. Des actes barbares et violents sur fond de tragédie familiale les ancreraient à jamais l'un à l'autre. Et si l'une vouait une haine sans bornes à l'aîné, l'autre ne pouvait qu'être plus étonné.

( premier post pour Athelstan svp, après libre à tous <3
Par contre Jaxx est parti donc pas la peine de le chercher )

« Joy ;

Un aboiement grave fit dresser les oreilles de la femelle, inquiète. Qui venait ? Le ton qu’elle réalise que la formulation ne pouvait être le fruit que de rares compatriotes et que la voix n'était pas féminine, le soulagement envahit tout son corps courbaturés. Le grand guerrier bicolore l'avait retrouvé en premier. Il allait la protéger et la rapatrier à la maison. Les épaules crispées de la jeune Bouclier s'affaissèrent alors qu'elle sentit le souffle chaud et haletant du mâle, preuve de son pas de course récent. Il était accompagné du fils de Nachos et frère de l'Alpha, jeune mâle qu'elle ne savait trop comment cerner, mais qui, dans l'immédiat, apportait également du réconfort et de la sécurtié à Joy. Les mots chuchotés par le Chevalier captèrent son attention. Parce qu'ils étaient soucieux pour elle, pour ce qui avait bien pu arrivé ces dernières heures... mais devait-elle dire ? Que pouvait-elle avouer ? Qu'elle avait attaqué sans sommation une solitaire probablement responsable de la mort de son père ? Au moins en partie ? Qu'elle avait apprécié de sentir la vie la quitter ? Qu'elle n'avait eu aucun remords à voir s'éteindre ses prunelles mesquines ? Qu'elle avait abandonné l'autre, son frère... A son sort ? Qu'elle lui avait laissé la vie sauve ? Qu'elle avait, en quelque sorte, accepté d'enfin passer à autre chose ? Comment avouer qu'elle avait eu la faiblesse de ne pas aussi lui faire la peau, parce qu'il avait semblé la défendre de sa folle de génitrice ?

Joy redressa la tête, épuisée. Elle lança un regard vide au membre du Conseil quand Dough gronda. Il avait raison, son propre poil puait l'odeur de ces scélérats. Mais de Jaxx elle ne voulait plus en etendre parler, elle ne voulait pas non plus qu'il soit encore traquer pour le meurtre de son -leur- père, alors qu’elle venait de se faire justice par un vil acte de vengeance. Elle n'en était pas fière, ce n'était pas honorable... Et pourtant, pourtant elle ne parvenait pas à le regretter.

« Je l'ai... Tuée. Sir Athelstan... Je m'en sors mieux que l'autre... »

Souffla la femelle, consciente de l’ambiguïté de sa façon de parler, les mots sciemment choisis pour laisser planer le doute. Après tout, il n'y avait aucune raison de penser qu'il y avait plusieurs solitaires pas vrai ? L'odeur qu'lele portait sur elle était peut-être assez semblable à celle de Jaxx pour faire croire qu'elle n'avait croisé que lui ? Ainsi on penserait qu'il n'était plus de ce monde... Et si le blanc était malin et qu'il écoutait sa menace formulée comme un conseil, il ne reviendrait jamais dans le coin et personne n'aurait alors à remettre en cause son demi-mensonge, cette falsification de la vérité. Nul n'avait besoin de connaître les détails de cette tragédie familiale qui n'avait déjà que trop duré. Elle fût chargé sur le dos du disciple d'Aka, et instinctivement elle se relâcha un peu plus. Depuis la mort de Jagh, le Chevalier était un peu le modèle masculin de substitution de la femelle aux yeux d'or. Il était celui dont l'image représentait la fierté et la force Etelkrus. Joy voulait à son tour pouvoir être ambassadrice de sa meute rien qu'en étant une fière Bouclier. Elle appréciait s'entraîner avec lui, elle appréciait aussi écouter discrètement les conseils qu'il prodiguaient à droite à gauche. Forcément donc, son odeur était synonyme de confiance, d'assurance, de calme. Enfin sa peur et son malaise se dissipèrent un peu, offrant un répit à la louve qui retrouva un semblant de souffle.

Ou presque. La louve beige redressa le museau et observa la mine déterminé du guerrier lorsqu'il se figea. L'angoisse que le manque de transparence de ses paroles ne soient découverts, qu'il comprenne qu'il y avait autre chose, ou plutôt, quelqu'un d'autre... Elle pria le Grizzli pour qu'Athelstan ne cherche pas plus loin que le bout de sa truffe, mais aussi demanda pardon pour ce qu'elle faisait, pour ce manque de clarté, pour ce demi-mensonge, pour sa faiblesse face à son frère... Malgré tous leurs antécédents. Elle promit alors à son Dieu qu'elle viendrait rapidement mettre les pattes dans son temple et faire pénitence. Et puis le Prêtre rouge avait prévu une montée aux flambeaux jusqu'à la maison du Grizzli/ Tandis que sa conscience frisait à peine l'éveil, elle dodelinait de la tête. Elle se savait mal en point, elle se savait faible et épuisée. La perte importante de sang la rendait fébrile et un vertige la prit et elle prit peur. Et si c'était là son dernier jour ? Etait-ce ainsi qu'elle voulait partir ? Dans la honte ? Dans la tromperie ? Dans la dissimulation ?

« Je suis désolée Sir... Si désolée... Je n'ai pas été à la hauteur... J'ai été fai... ble... Je l'ai laissé... Il est... »

Ses paroles, décousues, hachées par une respiration un peu irrégulière, moururent dans sa gorge alors que sa tête retomba lourdement sur l'épaule du Chevalier. La fatigue et la douleur eurent raison de sa résistance.