Sous les étoiles avec une petite étoile — Agathe

Il y avait autour de toi des grosses bulles colorées, d'où sortaient parfois de tous aussi gros papillons. Tu les esquivais quand elle s'approchait, de peur de les faire éclater. Au cas où elles furent vivantes, ces bulles, toi qui te devait de ne jamais blesser quiconque. Maman et Papa te le disait souvent. Et même s'il n'était pas là, et même si ça n'était qu'un rêve, c'était quelque chose qui en permanence restait en toi.
Gravé, à la base de ton éducation. C'était ce qu'il y avait de plus important, le respect pour la vie.
Même en rêve, oui.
Tu bondis et défies la gravité, avance dans ce lieu qui ressemble à l'île aux roses. Puis-

Tu ne connais pas la fin, de ce rêve.
Tes émeraudes s'ouvrent sur la tanière plongée dans l'obscurité, dérangée par quelque chose. C'était Prudy ou Onyx, qui t'avait encore donné un coup de patte ?! Ou bien Papa, qui s'était retourné presque sur toi dans son sommeil d'ours ?
Non. C'était... Oh ! C'était Maman.

Tu clignes des yeux, toute ensommeillée, petite Agathe déjà bien grande.

Quand elle te dit de venir, ta Maman, tu te lèves et tu t'ébroues, détend au maximum chacune de tes pattes en bougeant tes orteils dans tous les sens. Puis tu bailles, la gueule grande ouverte mais sans un bruit.
Et tu la suis dehors.
Il fait pas très chaud, à cette heure-ci...Mais chaud quand même. C'est ça, l'été dans la Savane. Tu y es habitué finalement, tu n'as connu que ça. Puis qu'importe le temps qu'il aurait fait, de toute façon !
Maman avait piqué ta curiosité, en voulant te montrer quelque chose. A toi. Juste à toi.
C'est un super grand honneur, tu as bien de la chance et tu le sais. C'est parce que tu es un petit peu plus sage que t'es soeur, et donc un petit peu plus sa préférée. Ça doit être pour ça, oui.

Tes oreilles s'agitent, et tu te laisses un peu lourdement tomber sur les pattes de Maman. Tu rentres plus très bien entre elles, et tu les écrases un petit peu. Tu es plus très légère, Agathe, tu l'as jamais vraiment été. Mais tu restais un bébé, qui ne se souciait pas vraiment de bloquer l'oxygénation des doigts de ta Maman.

Puis elle te montre. Et tu suis sa patte.
Et tu la voies, oui.
Cette étoile qui file dans le ciel.

Tu te redresses et presque tape la tête de Maman de la tienne, ne frôlant que son menton de ta corne de licorne.

« OH il faut faire un vœu Maman !! On peut en faire plein ce soir même que !! »

Parce qu'il y en a plein, des étoiles filantes. Elles filent, filent, filent dans le ciel et disparaissent !
A chacune des apparitions, et avant leur disparition, toi tu fais des vœux.
Tu souhaites vivre de grandes aventures.
Tu souhaites que ta famille soit super heureuse, même Onyx et Prudence qui des fois t'embêtent.
Tu souhaites rester super forte.
Tu souhaites entendre plein de blagues trop nulles de Papa demain.
Tu souhaites que ta Maman bah elle t'apprenne tous son savoir sur les plantes.
Tu souhaites...

Tes yeux brillent de milles lumières. Tu te tournes vers ta maman Licorne, avec ton visage si réjouie.

« ...Tu as fais quoi comme vœux Maman ?? »

Tu rigoles. C'est vrai, que tu étais curieuse ! Tu protestas pas, parce que ça aurait été mentir que de dire que tu l'étais pas. Et que mentir, bah, c'était pas bien. Ils t'avaient bien éduqués, tes parents !
Et tu glousses un peu plus, à son museau de maman qui vient s'écraser contre toi.

« Bah je te dirais pas les miens non plus alors !! »

Tu les écrirais dans un carnet, dans ce besoin éternel de communiquer avec le monde extérieur, de coucher toutes tes pensées, tes réflexions, tes découvertes de ce monde. De donner ton avis sur tout, en écrivant des choses que plus jamais tu ne lirais pourtant. Parce que tu en avais besoin. Parce que... Tu ne sais pas ! Ça te faisait du bien, de parler en silence, quand tu ne pouvais pas forcément tout raconter à quelqu'un parce que ça aurait été trop soulax de tout dire et que tu aurais fini par avoir soif avant d'avoir fini.
C'est pour ça. Que tu en ferais beaucoup, beaucoup, BEAUCOUP, des carnets d'aventure !
Parce qu'il y aurait jamais quelqu'un à qui tout dire, sur le moment.

L'histoire de Maman te fait lever la tête vers elle. Tu roules sur le dos, regroupe tes pattes contre ton ventre. Tu la regardes, les yeux qui brillent, alors que tu t'écrases un peu plus contre ses pattes. C'est que tu es vraiment grande, déjà, t'as presque plus la place de t'y tenir voir tu débordes déjà de partout.

« Et elles tombaient beaucoup, chez toi, autant que là ?? »

Ça ferait beaucoup, beaucoup de naissances quand même ! Une meute entière !! Tu te demandes si au jour de votre naissance, Maman avait regardé le ciel pour voir si trois étoiles passaient côte à côte. Ou si elle avait été trop fatiguée, pour le regarder, mais que ça c'était quand même produit.
Tu as pas le temps de réfléchir plus dessus.
Parce qu'elle vient te faire rire, Maman.
Elle a gonflée ses joues et vient les dégonfler contre le poil tout doux de ton ventre, te faisant gesticuler et t'agiter dans tous les sens, comme un asticot géant.
Tu ris fort, t’essaies de pas trop faire de bruit pour pas réveiller tes soeurs et profiter de cet instant toute seule avec Maman mais c'est dur.
Tu finis par tourner la tête sur le côté, envoyant tes pattes contre sa tête pour la repousser des quatre. Niah, comme ça !

« Mamaaan stop ! »

T'en as les yeux qui coulent de larme tellement t'en peux plus ! Ton ventre se soulève et s'affaisse avec rapidité, dans ce souffle qui te manque un peu et que, pfiouh!, tu regagnes progressivement.
Et soudain tu te retournes contre elle, gniah attaque ninja ! Glisse ton museau sur son torse pour le pocker un peu partout. Là, et là, et là aussi !
Puis tu t'arrêtes, retombe comme une masse sur le sol. Si fort, que ça fait même du bruit, quand ta queue de cristal claque contre la roche et perd quelques miettes.

« Je veux d'autres histoires de chez là où tu viens Maman, siteu'plait. »

Tu aimais bien, les histoires, surtout celles de Maman. Tu en voulais davantage, maintenant.
Tu voulais tout savoir.