Help me sister |Feat.Ann

• 3 ans et demi •
F A E I

La comptine lui trottait dans la tête comme une ritournelle. Persuadée d'avoir trouvée un lien avec ce mystère qui la rongeait depuis toujours, la sorcière au poil noir était revenue dans la grotte pour se planter devant la porte et... Y trouver Skavelden en proie à une trop grande agitation pour que ça soit normal. Elle soupira, mais s'avança tranquillement vers lui de son pas léger et aérien. Son odeur était différente, comme moins... Prenante. Il fallu quelques secondes à Ann pour identifier le changement : Le loup gris et bleu ne suait pas une odeur âcre de rhum arrangé comme à l'habitude. Quelque chose clochait. La Noiraude fronça les sourcils et s'approcha en détaillant le mâle de ses prunelles sanguines, comme si la réponse se trouvait là, sous ses yeux. C'est toutefois dans ses oreilles qu'elle tomba... Il était amoureux ! De Mavis ! Évidemment, comme il pouvait s'y attendre, la femelle explosa de rire à en avoir les larmes aux yeux. Mavis ?! Vraiment ? Bon en même temps les deux faisait la paire... Après son court-fou rire, elle se calma en essuyant ses joues.

« Excuse moi ! Je n'était pas prête ! »

Clairement pas. cela dit, elle fit un effort de sérénité et ne laissait que son regard pétiller de malice en signe d'amusement. Après tout, elle plus que quiconque comprenait le déchirement d'une tendresse difficilement avouable, et la culpabilité de ses sentiments. Enfin, elle avait su évoluer là dessus et avait tout récemment décidé de ne plus s'empoisonner l'esprit et le cœur avec ça. Elle assumait désormais parfaitement l'attention portée au loup abyssal et ne s'en cacherait dorénavant pas plus que ça. Sans aller le crier sur toutes les vigies de navire non plus ! Elle sourit de tous ses crocs.

« Invente lui un cocktail ? Je crois que ça lui plairait beaucoup ! »

Réponse un poil moqueuse mais tout à fait logique dans la tête de la petite sorcière : sa soeur était une alcoolique notoire, passion partagée par Skavelden en plus. Alors lui créer un cocktail dédiée... N'était-ce pas le cadeau idéal ? En plus, s'il réfléchissait aux ingrédients favoris de la pirate, il toucherait deux cordes sensibles : celle de son penchant pour la boisson, et celle des sentiments... Enfin, si toutefois Mavis était capable d'une telle émotivité, et ça c'était pas gagné... Parce que la louve à queue d’hippocampe et la mièvrerie, ça ne faisait pas du tout un.

« Ca fait longtemps ? »

La question, sérieuse et sans doute trop personnelle, était sortie sans réfléchir, alors qu'elle se demandait-elle même depuis combien de temps elle dissimulait ses ressentis à Abysse.

• 3 ans et demi •
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Il était visiblement satisfait de sa proposition, très bien, car elle n'en avait pas d'autres ! Ann n'était malheureusement pas aussi proche de Mavis ou de Barthélémy que ce qu’elle aurait souhaité, probablement était-ce insidieusement dû à ce lien si particulier qu'elle avait avec sa jumelle. Comme si cette étroite complicité avait été un rempart, un obstacle inconscient au reste de la fratrie. En grandissant, la sorcière en prenait doucement mesure.

« Comment pourrais-je refuser une telle proposition ? »

Elle sourit de tous ses crocs bien blancs à force de grignoter des os de seiche. Tout le monde ici savait son amour pour la Bibliothèque et son trésors de savoirs. Il égalait presque sa tendresse pour ses proches, bien que cela ne soit pas vraiment comparable. L'océan savait à quel point la découverte de curiosités et l'apprentissage de nouvelles connaissances passionnaient sa fille. Apprendre la lecture avait été le plus beau cadeau que son géniteur barbe de poulpe ai pu lui faire. Et puis, elle avait dans l'idée de chercher quelque chose qui pouvait aider à améliorer la vue, que cela soit un rituel mystique ou occulte, ou une décoction plus ou moins buvable de Médecin ! A son tour, elle exprima la joie et le contentement au travers de son langage corporel avant de se refermée brutalement comme une huitre et de fixer le gris et bleu de ses prunelles sanguines insondables. Un très léger pli sur son museau marquait sa réflexion.

« C'est si évident ? »

Elle plissa les yeux, rit un peu gênée, avant de reporter son attention sur la porte qu'elle était venue voir en première intention.

« Je ne sais pas. »

Elle hésita. Pouvait-elle se confier au pirate ? Elle haussa les épaules finalement, elle avait dit qu'elle ne voulait plus se prendre la tête avec ça.

« Il est heureux comme ça. Ça devrait me suffire. »

Elle sourit, un peu tristement tout de même. Bien sûr, elle rêvait parfois la nuit d'autre chose, de plus... Mais il avait une famille. Et quand bien même, ses petits devenaient grands, ce serait une forme de trahison au sein des Raeders, et Ann avait trop foi en l'Océan et en cette meute-famille pour transgresser ce genre de lois tacites. Elle avait décidé de ne plus cacher ses sentiments, mais ne comptait pas non plus en faire étalage ou se permettre des avances au loup abyssal. Elle ne l'avait jamais fait et ne le ferait jamais. Rêver était parfois suffisant. Parfois.

• 3 ans et demi •
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Le poids de vue de Skavelden était simple, et, quelque part, tout à fait en adéquation à ce qu'elle désirait ardemment. Sans doute se posait-elle trop de question, sans doute se formalisait-elle trop des conséquences possibles. Après tout, que risquait-elle ?

« Non, en effet. »

Elle accueillit le geste affectueux d'un rire, hochant la tête doucement. Il avait raison le gris, ce n'était pas donné à tout le monde de s'écraser. Et ce n'était pas du tout son genre. Il n'y avait qu'une corde qui retenait sa voile, et il n'y en avait toujours eu qu'une seule : le peine qu'Abysse pourrait ressentir. Parce qu'en bonne pirate, la femelle noire avait sa part d'ombre, égoïste et cupide. Facette de sa personnalité qu'elle réfrénait souvent, d'ailleurs, trop peut-être, d'où cette colère grondante en son âme. Peut-être était-il temps de libérer et déchainer l'ouragan en elle, peut-être était-il temps d'embrasser complètement sa nature de fille de l'océan. Un rictus étira ses babines. Oui, c'était vraiment fortement tentant.

« Bon. On part quand pour la Bibliothèque ? Jcrois qu'on a du pain sur la planche. »

Elle se releva à son tour, posant un dernier regard assombris sur la lourde porte close.