La gloire d'un Roi - Solo

Il était temps que le monde soit mis au courant de sa grandeur.
Alors, Exxus avait faussé compagnie à Jun sans le moindre scrupule, pour rejoindre la bibliothèque dans un objectif bien précis. Au diable, les rayons chargés de livre, ces ouvrages qui pourraient le divertir ou, mieux encore, l’instruire. Il n’était pas venu lire, mais bien écrire. C’était une idée qu’il avait en tête depuis bien longtemps déjà.
Il s’arrêta devant un petit meuble, qui devait bien être à quelqu’un, mais de cela il n’avait que faire, pour fouiller dans l’un des tiroirs et en tirer une longue plume, de l’encre et du papier, du beau papier digne de recevoir ses écrits. Son postérieur trouva place sur un coussin moelleux.
Il était fin prêt à se lancer dans ce formidable récit.

Il songea au début de ce livre qu’il voulait écrire. Par quoi commencer ? Par le commencement, bien évidemment : sa naissance. La plume imbibée d’encre trouva sa place sur le papier, y crissant doucement alors qu’apparaissaient les premiers mots, dans une écriture aussi prétentieuse que l’était son propriétaire.

Il était une fois, sous le dôme du cruel Mido, naquit un être d’exception que tous ne pouvaient que jalouser. Oh, il ne vint pas seul : A ses côtés, d’autres enfants ne passèrent pas la nuit. De cette portée, il était le seul assez fort pour survivre dans ce monde. L’on le nomma Exxus Le Grand et tous ceux qui étaient alors Lazulis vinrent se prosterner devant lui.

Oui, ça, c’était bien. Bon, il n’était pas certains de la véracité de ses propos mais… eh, qui irait vérifier, puisque les Lazulis n’étaient plus ?
Il sourit, content de lui.

Cet être quasi divin

Il raya le quasi.

Cet être quasi divin n’avait eu besoin d’un géniteur pour naître. L’on disait partout qu’il était né sans que celle qui lui donna vie ne soit enlacée par quelconque individu. Et c’était vrai. Il était une insufflation divine dans un monde en manque d’êtres d’exceptions.
Partout où il allait, le Prince Exxus inspirait le respect. A l’âge de deux mois seulement, il renversait d’une patte les guerriers les plus entraînés.
Il aurait, sans l’ombre d’un doute, pu devenir Alpha, si la meute ne s’était pas effondrée à cause des autres.

Très bien, ça. Toujours la faute des autres, jamais la sienne.

Le merveilleux Roi Exxus fut donc contraint de quitter, le coeur gros, sa terre natale, parcourant alors le pays pour laisser profiter ses congénères de sa présence vertueuse. Ses pattes le menèrent jusqu’aux terres Nakhus où il trouva refuge. Il fit alors la connaissance de l’infâme Ajani, emprunt de fausseté et de sourires faussement amicaux. En effet, cet être ignoble fit l’affront de…

Les doigts de sa patte se crispèrent sur sa plume.
C’était fou, comme il le détestait, Ajani. Comme il avait envie de le voir disparaître, de… Il serra les crocs et, pour montrer à ses lecteurs à quel point l’Oracle Nakhu était détestable, se sentit obligé de dessiner cet immonde personnage.
Là, quelle représentation fidèle de la réalité, il était fort content de sa personne (pour changer).

De quérir avant lui le cœur de celle qu’il s’était choisi pour Reine.
De physique ordinaire, elle n’avait, la première fois, pas attiré l’oeil du Roi. Avant qu’il ne la découvre, le lendemain, pleine de valeurs, prête à défendre son infâme rejeton, si belle et charmante qu’il ne voulait, désormais, plus qu’elle.
Eva.

Il s’affala sur son coussin, laissant l’encre goutter de sa plume sur le tissu clair. De toutes manières ce ne serait pas lui qui nettoierait, alors tant pis !
Exxus rencontrait ici son premier problème. Il ne pouvait… Ne voulait parler de cet incident, de ce combat contre celle qu’il avait voulu, et souhaitait toujours, d’une certaine manière, comme Reine.

Elle était intelligente, charmante mais, hélas, bien aveuglée par l’infamie d’Ajani et ne savait, de ce fait, reconnaître la beauté et la puissance supérieure du Roi Exxus sur l’Oracle Nakhu. Quel dommage, alors qu’elle aurait pu lui donner si bel héritier, muni d’une paire d’ailes lui permettant de régner sur les cieux, en plus de la terre.
Au lieu de cela, et si elle n’ouvrait pas les yeux, sa descendance n’en serait que bâtarde.

Elle n’avait idée de la chance qu’elle possédait, d’être aimée par l’être supérieur qu’il était. D’autres, nombreuses, le comprirent cependant, se jetant à ses pattes alors qu’il marchait vers l’île aux roses, l’implorant de leur faire don de son corps divin. Ce qu’il fit, par bonté d’âme, bien évidemment. La première s’avéra être fort laide et lui donna des enfants à son image. Les suivantes, elles, furent plus dignes de sa personne. Si l’on oubliait l’une d’elles, prête à vendre son corps pour quelques plantes.

Il hésita.

Mais bon, elle était sacrément bonne.

C’était un détail qu’il était important de préciser, à son humble avis.
Car, de thon, il n’avait engrossé qu’une fois. Pour le reste, il s’était dressé des standards, respectés à la lettre : jamais plus son sang ne viendrait se mêler à celui d’une louve qui n’était pas à son goût… Enfin, ça allait être difficile, désormais, puisqu’il avait toujours le corps d’une femelle.
Exxus fit la moue et se redressa un instant de son coussin, faisant les cents pas dans la bibliothèque pour se dégourdir un peu les pattes.
Puis repris sa plume entre les doigts de ses pattes.

Il y eut aussi celle avec des plantes, une fort jolie nymphe au pelage chocolat. Elle aussi, elle était sacrément bonne, et sacrément facile aussi. Il se la fit rapidement, avant de la laisser le lendemain matin.
Elle voulait juste un enfant de lui. Chose tout à fait compréhensible, vu la grande beauté et toute aussi grande intelligence du si grand Roi Exxus.

Qui ne vit jamais l’enfant engendré, mais ça, il ne le précisa pas, histoire de ne pas passer pour un trop mauvais père. Il ne parla pas non plus des autres, de ceux qu’il avait pu croiser sur Morne-Oeil, au cas où ses lecteurs puissent en déduire que ses gênes n’étaient pas de qualité.
Ce qui n’était nullement le cas : Non, c’était les mères, qui avaient tout gâché.

Bon, qu’allait il pouvoir raconter, désormais ? Il soupira et s’accorda quelques instants de réflexion.
Ah oui, la suite, l’horrible Anianka, la mort, la résurrection. C’était important d’en parler, de ça, les gens devaient savoir.

Puis un jour, alors que le Grand Roi Exxus se rendait sur l’île aux Roses, il fut pris en traître par l’horrible sorcière rouge Anianka. Celle ci avait, de plus, corrompu la déesse rose, Moiro, afin d’obtenir son aide et de faire tomber le Roi.
Ce jour ci, le Roi tomba à terre…

Il hésita. Valait-il mieux dire qu’il s’était fait tuer par Anianka, et donc passer pour la victime, ou dire la vérité, donc qu’il s’était suicidé pour ne pas lui laisser le plaisir de lui ôter la vie ?
Mhhh.
C’était pas important, il venait de le décider.

Mais ça, ce n’était pas important. Car le Roi, l’immortel, revint d’entre les morts, gratifiant à nouveau les vivants, peuple de Punk Wolf, de sa divine présence. Dans les meutes, nombreux furent les loups à pleurer de joie et à l’acclamer. La sorcière, elle, fulminait de ne pouvoir le vaincre.
Quel beau gosse ce Roi Exxus.

Et maintenant, est ce que son histoire était terminée ?
Du tout, mes amis !
Il reprit l’écriture, malgré la douleur qui commençait à se faire sérieusement sentir au niveau des doigts de sa patte.

Malin, il se trouva un garde du corps. Il s’appelle Jun, le garde du corps. Une espèce de loup robotique-on-sait pas quoi. Sympa. Un peu frigide. Ce loup l’accompagnera jusqu’au bout, tout dévoué, qu’il est, à son maître. En même temps, comment pourrait-ce ne pas être le cas ?

Vive le Roi Exxus.

La fin, finalement, il ne l’avait pas encore. Elle viendrait, un jour, il le sentait, au fond de lui, avec ce corps qui fatiguait tout doucement, comme pour lui rappeler, perfide, que sa résurrection ne le rendrait pas, pour autant, éternel. Combien de temps, tiendrait-il encore ? Quelles aventures pourrait-il ajouter à ce récit ?

Il l’ignorait encore et c’était un peu dingue, à y penser, mais dans ses entrailles, la vie se développait. Une vie si fragile qui ne tenait à rien. Une vie qui souffrait déjà de son propre mal-être physique, à lui.
Une vie, dont il ferait la connaissance dans quelques jours.

Pour le moment, satisfait de lui, Exxus quitta son coussin, referma son livre et arpenta la bibliothèque à la recherche d’un rayon ou il pourrait le placer en évidence. Se décida pour un rayon comportant des récits sur des loups importants, qu’ils soient sur Punk Wolf ou sur les terres voisines. D’une patte, il retira l’ouvrage d’une certaine Ysée, l’envoyant balader quelques mètres plus loin, pour y glisser le sien.
Sourire sur les babines, il fit quelques pas en arrière pour l’admirer.
Ah, quel beau travail.