Démon de l'Espoir [DC/ libre limité]

Elle était née sa fille, minuscule petite boule noire qui dormait paisiblement contre sa fourrure blanche, au milieu de ce nid installé dans une des cavités de Morne-oeil, à l'abri du vent, de la marée, du froid et des prédateurs. Tout avait été soigneusement choisi et installé, tout était parfait pour que son enfant soit en parfaite sécurité, pour que rien ne vienne l'emporter comme de trop nombreux Raeders l'avaient été avant. Tout les Etelkrus et tout les Continentaux pouvaient débarquer là, à cet instant sur l'île, avec leurs dieux s'ils le voulaient, ils ne pourraient pas lui enlever sa fille, ils ne la trouveraient pas, l'Océan et les démons les tueraient avant, elle les tuerait avant, tous, tous autant qu'ils sont. On ne lui volerait pas son enfant, un enfant qui avait été offert en sacrifice d'elle même, quelque chose dont l'existence valait toutes les peines et tout les maux du monde.
Elle était là, sa si petite Emilitia, au creux de son ventre comme si elles deux formaient encore qu'un seul être. Petit louveteau au corps chaud et au souffle paisible, petit louveteau qui ne pleurait, qui ne pleurerait pas, car elle était bien plus que loup. Elle serait promis à grand destin, c'était une évidence, qu'importe que ses actions soient bonnes ou mauvaises, qu'importe si elle sauve les loups ou annihile le monde, son existence le marquera indéniablement.

Si elle l'avait pu, Limule n'aurait jamais quitté un seul instant le petite boule de poil noir, mais chaque être se devait de vivre et se nourrir, même si la louve blanche s'éloignait toujours plus du véritable loup, elle devait manger. Elle ne fut pas longue, ni difficile, attrapant la première pieuvre déterrée de sa cachette à marée basse, baignade suffisante cependant pour venir transformer son corps. Elle avait huit ans, l'Océan avait fini par agir sur elle bien qu'il semblait incertain sur le choix à faire. Limule n'y accorda pour l'instant pas grande importance, elle devait revenir vers son terrier, vers cette petite grotte à l'entrée dissimulée par mousses et buissons de branches sèches où l'attendait son si précieux trésors. Alerte à tout, elle laissa pourtant son attention baisser un instant, le temps d'ouvrir délicatement, l'entrée de son nid.

Abysse marchait sur l'île, la tête haute et souriante, le regard posé sur les formes en face de lui. Aujourd'hui, il ne ferait rien de spécial, si ce n'était aller dire bonjour à tout le monde ici. Et ce même si les autres ne voulaient pas le croiser. Lui se disait que de bonnes paroles et de bons gestes seraient bon pour le moral de sa grande famille donc bon, les retours ils les prenaient, bons ou mauvais.


C'était d'ailleurs quand il suivait les odeurs des autres loups qu'une en particulier l'intriguait, qu'une, le forçait à s'arrêter pour mieux l'humée. Celle de Limule. Cette vieille louve, qui pourtant était pour lui une petite chose, c'était pour lui, une jeune femelle silencieuse et calme. Qu'il était triste de ne pas la croiser plus souvent d'ailleurs, cette bonne Limule.


Rapidement, il suivit le chemin d'odeurs qu'elle laissait, se concentrant pour ne pas perdre la piste avant de la sentir de plus en plus fort. Et au détour d'une roche, il sentit qu'elle était là. Et s'approche par derrière.


"-Bonjour Limule!" Fit Abysse. "Moi te cherchait! Moi avoir été très inquiet de ne pas te croiser! Encore plus que à le habitude!" N'ayant pas senti la petite, ni l'avoir entendu, et ni l'avoir vu, le mâle ne se doutait donc de rien et se mit assit. "Toi vouloir venir pêcher un peu avec moi?" Il sourit, agitant ses queues sur le sable.

Mousses et branches en gueule, dégageant petit à petit l'entrée de son antre pour rejoindre son si précieux trésors qui l'attendait sagement au chaud et en sécurité, Limule n'avait pas entendu Abysse arrivé. Elle sursauta en entendant sa voix, lâchant ce qu'elle tenait, elle n'entendit pas ce qu'il dit cependant. D'un seul coup, comme si le démon en elle s'était éveillé, son pelage se hérissa alors qu'elle se retourna, crocs en avant, se jetant sur le mâle verdâtre qu'elle manqua uniquement parce qu'elle n'était pas en position favorable, ses crocs claquant juste devant son museau. Elle gronda dans le son le plus menaçant qu'elle pouvait faire, comme si elle ne reconnaissait pas le mâle... c'était le cas,  sur ces quelques secondes si courtes dans une vie, si longues à cet instant avant que la lucidité ne vienne éclaircir son regard.
Limule cligna des yeux, comme si elle voyait son Second pour la première fois, son souffle encore saccadé par la point d'adrénaline soudaine, son pelage était toujours hérissé mais son corps d'un seul coup se détendit alors qu'elle essaya de comprendre où elle  était, reculant, les oreilles en arrière lorsqu'elle se rendit compte qu'elle avait failli mordre Abysse.

« Je... je suis désolée. Je suis un peu tendue en ce moment. »

Les hormones, l'instinct maternel, tout ça, elle aurait pu les accuser si elle avait eu conscience de leur existence. A défaut, sans doute accuserait-elle l'influence des démons.

A peine eut il finit de parler que bien vite il sentit la louve se jeter sur lui. Reculant de justesse pour sentir le souffle chaud de Limule juste en face lui, signifiant clairement qu'elle aurait pu lui bouffé le museau. Ses paupières se fermèrent, fronçant la truffe dans un geste de crainte en détournant la tête. Le loup reculait encore en se demandant ce qui avait bien pu se passer, se demandant s'il avait osé dire quelque chose de mauvais... ou fait un pas de travers. Il ne comprenait pas pourquoi une louve, qu'il trouvait si douce, pouvait elle ainsi attaquer aussi sauvagement. Il s'abaisse, queues à plats, oreilles plates, crête forcée à rester couchée pour protéger son dos et ainsi le ventre, optant pour la position de soumission face à sa capitaine. Abysse cherchait mais ne trouvait pas ce qu'il avait fait de mal..


Peut-être devrait-il la laissée seule et partir? Ou... Elle s'excusait. Il se redresse, très, très lentement, comme si il s'attendait à ce qu'un danger réapparaisses. Il hésite.


"-Dé...solé! Moi aurais du peut être prévenir avant.." Ou alors tout simplement la laissée tranquille. Abysse ne savait jamais comment venir vers eux et comment agir, tout le monde ici était différents sur pleins de choses et s'adapter pouvait être très compliqué. "Peut-être moi devrais laisser toi?"
Si c'était un oui, il s'en irait, lui n'était pas contraire à laisser la liberté à sa famille, de laisser de l'air à ceux qui en ont besoins et jamais il ne lui en voudrait. Toujours sur ses gardes, peut être par pur instinct ou par réflexe du passé, il attend juste un ordre, une parole ou il ne savait pas trop. Il attendait.

L'attitude d'Abysse, son expression penaude, sa position soumise, ça fit un pincement au cœur à la louve qui dans ascenseur émotionnel, se sentit coupable. Il était son Second et l'un des derniers loups en qui elle avait encore confiance, elle n'aurait pas voulu perdre la sienne. Sa voix se fit plus douce, plus peinée et sincèrement désolée. Elle avait accumulé tant de choses seule ces derniers temps, elle était si épuisée, si fatiguée de l'être.

« Non, ce n'est pas de ta faute, c'est... »

Elle avait baissé sa garde là où son instinct lui demandait d'être encore plus vigilante. Elle soupira, oui, c'était sans doute mieux si le mâle la laissait tranquille mais la louve blanche ne voulait pas le blesser d'avantage... Finalement la question fut vite oublier lors d'un petit bruissement venu du terrier.

« Oh Emilitia ! »

Oubliant la présence du mâle, oubliant ses excuses, oubliant son épuisement, oubliant le monde entier, Limule fit volte-face pour retourner ouvrir l'entrée de son refuge, déblayant mousse et branchage avant d'y faire disparaître toute la moitié avant de son corps à l'intérieur.

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Il attendait qu'elle termine, mais le bruit, ne tomba pas dans l'oreille d'un sourd. C'était curieux qu'il tendit le cou pour essayer de "voir" et comprendre ce qui se passait avant que la femelle ne lâche le nom d'Emilitia. Sa tête se penche sur le côté, ne faisait toujours pas le lien entre le nom, et la petite dans le trou. Un trou? Aysse se redresse et se post juste derrière Limule. Lui aussi voulait voir ce que sa capitaine cachait dans son trou.


"-Ca être quoi Emilitia?" Fit doucement le mâle limite à voix basse comme si c'était un secret. Il en oublia l'incident qui venait de se passer pour laisser son côté curieux prendre le dessus. Si cette chose était un secret, ou important il comprenait qu'elle se soit retournée si brutalement sur lui. Même si c'était ridicule de s'en prendre à quelqu'un comme ça.

Dés que le trou fut assez large, Limule s'engouffra à l'intérieur, disparaissant dans l’obscurité de sa tanière, se lovant contre sa fille, la replaçant au creux de son ventre, là où elle ne risquerait  plus rien.
Une voix, douce, calme, presque silencieuse. Celle d'Abysse évidemment, une voix intruse tout de même soufflait son instinct et elle ressortie la tête, crocs dévoilée, oreilles en arrière, grondante et œil fou.

« NE T'APPROCHES PAS ! »

Son souffle était court, comme si elle venait de faire un effort. Au-delà de ça, elle était bête sauvage, mère animal qui ne réfléchissait plus qu'à une chose, la survie de son petit. La louve blanche laisse passer quelques secondes, le temps de reprendre ses esprits, le temps de se calmer et la fureur fait place à un air penaud et désolée, une voix plus douce moins assurée.

« C'est ma fille... s'il te plaît ne t'approches pas. »

C'était son enfant, son si précieux trésor. Elle avait beau avoir confiance en Abysse, ce n'était pas assez pour Emilitia.

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IC'était triste la situation. Abysse oublie ce qui se passe, il s'intéresse à ce qu'elle pouvait caché, en toute amitié, agréablement curieux. Mais, soudainement voilà pas que Limule encore une fois déversait tant d'agressivité envers le mâle qui par instinct fit un bon en arrière en lâchant un couinement d'angoisse. Il n'avait rien fait de mal, il avait soudainement tellement peur, qu'il n'osait plus bouger de sa place en fixant le trou sombre en face de lui. Son coeur battait si vite, il était tellement apeuré par la louve.

Pourquoi elle agissait comme ça.. Les larmes menaçaient de tomber, autant par la peur que par la tristesse que cela montrait. Et finalement elles tombèrent quand il compris encore une fois qu'elle redescendait d'un cran. Il baisse la tête, les oreilles. Assit à un ou deux mètres plus loin que l'entrée. Lui aurait aimé pouvoir la sentir sa fille, la léchée pour en apprendre sur elle, la félicité pour le coup et savourer de joie ce moment qui devait être sympa. Mais là, non. Il avait peur, et rien d'autres, le mal, il se sentait si mal. Il ne pouvait même pas approcher, il se sentit mit de côté.

"-Désolé.. Limule.. Ca est ma faute.." Il se levait, faisant un pas pour aller faire le terrier, mais refit un pas en arrière aussi vite. Non, il ne pouvait pas approcher. "Si...si toi avoir besoin de quelque chose.. toi peux hurler, Aby..heu..moi vie...vend..viendra.. excuse moi.." Pouvait il au moins dire félicitation? Dans un silence il fit demi tour et s'éloignait de Limule et la petite boule de poil, oreilles toujours basses et queues entre les pattes. Malgré qu'il prit ses distances, pour la laissée, il gardait l'oreille attentive, on sait jamais qu'elle voudrait de lui, peut être.. Ou pas.

Est-ce qu'elle l'avait vu ? Est-ce qu'elle avait conscience de la peine dans laquelle elle avait mis ce loup en qui elle avait pourtant le plus confiance sur cette île ? Non, son instinct trop fort l'empêchait de de voir, elle n'était obnubilée que par une chose : sa fille. Le reste n'existait presque pas.

« Non non, ce n'est pas de ta faute c'est... je suis désolée... »

Elle ne le regardait pas, ses yeux yeux cherchaient frénétiquement dans la pénombre la petite boule de fourrure noire, le moindre de ses gestes, le moindre de ses souffles. Déjà la louve blanche disparue à nouveau à demi dans le terrier mais elle s'arrêta, repris conscience un instant de la présence du mâle et se retourna une dernière fois vers lui, lui donnant toute son attention, toute sa sincérité.

« Abysse... Merci d'être là »

D'être toujours là, pour rattraper sa faiblesse de mauvais Capitaine, pour aimer cette île et ce monde comme elle l'avait aimé autrefois, d'être présent pour les Raeders... d'être présent pour elle.
La louve blanche retourna  au fond de son terrier.