Nouveau départ · Valens

Valens

Il y avait eu trop de choses en cette journée de pourtant libération. C'était comme si elle avait duré des jours et Valens n'aurait pu dire exactement tout ce qu'il s'était passé. Malgré l'endroit inconnu, il s'était pourtant rapidement endormi, peut-être parce que son instinct considérait qu'enfin, il était parvenu à se réfugier dans un endroit suffisamment sécuritaire pour laisser à son corps cette occasion de remplir les besoins primaires. Valens était plus qu'épuisé, il n'aurait su dire non plus si cette nuit avaient été habitée de rêves ou de cauchemars, il avait simplement dormi comme une pause dans sa propre existence.

Le mâle ocre se réveilla aux premiers sons d'activités du matin, il ne quitta pas pour autant sa position de petite boule décoiffée au museau enfoncé dans la queue touffue mais cette semi somnolence simulée lui permit d'appréhender un peu son environnement sans qu'on ne vienne lui prêter attention.
La structure des lieux était un peu étrange et lui rappelait fortement les murs de la cité, c'était comme s'il avait fini par avoir eu le droit d'y entrer. Pour le protéger, le dissimuler, Séléné lui avait également proposer coussins, couvertures et autres, Valens n'ayant pas vraiment été en état de refuser s'était retrouvé avec une pile de tissus à disposition. Il n'avait jamais vraiment dormi dans autant de confort auparavant, c'était peut-être à cause de ça qu'il s'était endormi si vite. Flottait également constamment dans l'air une odeur de plantes, couvrant presque l'odeur de cette multitude d'inconnus au delà du coin de Séléné, au sein de ce dernier, il y avait l'odeur de la louve plus que toute les autres, élément rassurant qui persistait au delà de tout le reste.

Il ouvrit les yeux lorsqu'il entendit son nom, releva le museau, l'expression fatiguée de celui qui venait de se lever mais qui n'avait pas assez dormir et encore moins émergé sur le visage, humant les odeurs inconnues qui allaient avec ce que rapportait Séléné avec elle. Cela sentait bon, bien plus que les mixtures immondes qu'on lui avait fait avaler mais le souvenir lui redonna un goût amer en gueule, l'incitant à simplement reposer sa tête sur sa queue sans avoir rien bouger de plus de sa position initiale. Il sentait toute les courbatures à venir s'il tentait de bouger plus que ça.

« Qu'est-ce que c'est ? »

Son estomac trahit cependant que ça ne semblait pas être aussi mauvais que ce que son cerveau voulait bien croire.

Valens

L'odeur, le goût qu'on peut imaginer aller avec, étaient tout deux des choses totalement inconnues pour Valens. Le mâle ocre ne sait pas encore s'il veut goûter, s'il veut essayer. Il a encore en tête ces choses affreuses qu'on lui à fait avaler de force, cette irritation dans la gorge qui continue à le brûler et ces petites plaques qui le grattent sur le nez, les gencives et le bout des pattes. Ça l'affole moins cependant que la mixture tout aussi étrange que lui avait tendu la louve monstre noire pour le « soigner ». Peut-être parce qu'il avait un peu plus confiance en cette louve-ci tout de même, ou que ce qui lui était tendu n'était pas liquide, ou encore cette odeur de sucre qui même si elle est mélangée à autre, il reconnaît.
Le temps de son hésitation, Valens avait reposer sa tête sur sa queue, sans chercher à la cacher cependant, regardant de ses yeux bicolores et fatigués, la fameuse madeleine posée devant lui. Il prend du temps, restant silencieux également avant de finir par se décider au bout de longues secondes. Il ose, tend son cou mais garde l'avertissement en tête, étrangement lui revint l'instant du rêve où il avait goûté le truc très salé et mou. Ça le fait à nouveau hésité mais Valens a déjà les dents dans la madeleine et quelques morceaux touchent sa langue.
Il se recroqueville à nouveau sur lui même le temps de se faire un avis.

C'est aussi quelque chose qui prend du temps. Il mâche les quelques miettes, peine un peu à déglutir à force, il sent sa gueule un peu pâteuse – quand avait-il bu pour la dernière fois ? Le mâle ocre est surpris cependant, il s'attendait à quelque chose d’étonnamment plus sucré.

« Les fleurs de cactus et les fourmis bonbonnières aussi sont très sucrées, mais c'est pas pareil. »

Il connaissait un goût plus vif, là c'était presque trop doux et un peu lourd avec cet arrière goût qu'il ne connaissait pas. Celui du fameux beurre sans doute.

Valens

Il la regarde mettre ses herbes dans l'eau et ça le tend. Ça ne sent pas mauvais, mais il y a ces plantes qui infusent, qui colorent l'eau et créent un nouveau mélange. Il y a cette pâte immonde qui est forcée dans gueule, plus que ça, il y a cette potion à l'odeur nauséabond qui est forcé dans sa gorge et qui la brûle comme mille aiguilles avalées d'un cactus, il y a cette brûlure aussi comme s'il y avait eu également tout autant de piments.
C'est un sursaut presque, qui sort Valens de sa torpeur alors que Séléné reprend la parole. Il relève des yeux écarquillés vers elle, comme s'il se réveillait d'un mauvais rêve, le souffle rapide et la gueule entrouverte. Il s'accroche aux mots qu'elle prononce, il essaye, même s'il ne comprend pas tout, parce que son esprit bourdonne.
Elle pense que c'est plus léger. De quoi?. Que les madeleines sont riches et lourdes. Peut-être. Elle trouve qu'elles sont réconfortantes. Lui aime bien les larves de scarabée.

Son sourire est rassurant, apaisant.
Le loup ocre se repositionna, reforma sa petite boule de lui même, cachant ses pattes sou sa queue, son étoffe et son corps, comme s'il avait froid bien qu'il faisait tout de même bon – bien que moins chaud que dans un désert évidemment. Il baisse le regard alors que la louve lui parle de citrons et d'agrumes.

« Derrière le mur de la cité peut-être » Les mots ne lui sont pas totalement inconnus. «  Mais pas dans le désert. »

Là où tout brûlait, il n'y avait guère plus que des insectes et des reptiles, peut-être une herbe grâce ou une fleur ici et là. Dans certains coins, des dattiers arrivaient à persister mais jamais bien loin des murs de la cité.
La potion est glissé vers lui. Le poil de Valens se hérissa alors à son approche. Il la regarde, relève un instant les yeux vers Séléné, la regarde à nouveau sans pouvoir y le regard. Il sent une angoisse le prendre au ventre et remonter jusque dans sa gorge, c'est comme s'il n'arrivait plus à respirer. Il veut reculer mais ses membres refusent de lui obéir.

«Je... »

« … J'peux pas. »

Boire ça, il ne pouvait pas.

Valens

Elle va la boire elle.
Les oreilles en arrière, Valens n'ose vraiment plus relever les yeux vers la louve. Il se sent si désolé de ne pas pouvoir, d'être obligé de refuser la gentillesse. Honteux aussi, parce que ce n'était que quelques herbes jetées dans de l'eau chaude, Séléné elle même comptait consommer le breuvage puisque lui le refusait mais le mâle ocre ne le pouvait vraiment pas. Les images de la fabrication de l'immonde mélange des Etelkrus lui revenaient en tête, tout comme l'irritation de sa gorge était également un rappel des événements.

« De l'eau tout court c'est bien. »

Il pense, il le croit. Oui, dans de l'eau tout court il n'y avait rien, pas de goût ou d'effets étranges, juste... de l'eau. Le mâle ocre a l'impression de faire un caprice, d'être un enfant qui refuse ce qu'on fait l'effort de lui offre. Il s'en veut tellement de devoir repousser ainsi ceux de Séléné, à un point qu'il a presque envie de lui faire dos pour se couper du monde à nouveau, se contente de cacher sa tête sous sa queue.

Valens

Il l'entend s’affairer sans que ça ne le fasse bouger, demeurant cette petite boule stressée au poil hérissé formant des épis mal peignés ici et là. Il remontre tout de même le bout du museau lorsque Séléné lui apporte de l'eau sans rien cette fois, simplement claire. Et parce qu'elle l'invitait à venir sentir, parce que obéir était un chemin de pensée facile malgré tout, le mâle ocre vint approcher sa truffe du récipient.
Il y a une sensation de chaleur tiède, comme une flaque pas encore évaporée mais tout de même restée au soleil. Mais il y a rien d'autre pour rendre l'eau bizarre, pas d'odeur de médicament, pas d'aspect inhabituel, pas de trucs qui flottent, qui trempent, qui infusent. Sa gueule est pâteuse, il a soif Valens, et l'instinct pousse à ce qu'il se jette un peu sur ce qui a été apporté. Ça nettoie un peu sa gueule, apaise à peine la brûlure mais fait tout de même du bien. Il ne buvait pourtant jamais beaucoup, héritage des milieux arides, pourtant il vide bien la moitié de la tasse.

Il releva ses yeux bicolores vers Séléné à sa question, avant de se recroqueviller à nouveau sur lui même, faisant retomber son regard sur le sol, le grattant nerveusement d'une patte avant, les oreilles en arrière.

« ... »

Sa gorge se serre, ses babines se font tremblantes. Les mots allaient être difficile à sortir, ils lui brûlaient la trachée en rappel aux effets subis.

« Je... je sais pas ce que c'était. »

Il sent toute la tension remonter le long de son corps, lui hérisse l'échine à ce simple souvenir, comme si le danger se présentait à nouveau devant lui.

« … Ils ont... mélangés des trucs bizarres ensembles. Je... j'crois qu'ils voulaient pas l'essayer eux même. »

Alors ils l'avaient forcé lui, parce qu'ils avaient su où le ramasser. Ce n'était pas personnel, il avait juste manqué de chance, Valens trouvait ce fait tellement plus effrayant, car il n'y avait aucune raison véritable pour qu'ils lui fassent ça. Ils l'avaient voulu alors l'avaient fait.

Valens

Valens ne répondit pas tout de suite à la proposition de Séléné, restant prostré dans la même position, le regard toujours sur le sol bien que remontant parfois sur la louve. Le mâle ocre ne parvenait pas vraiment à trouver quelle était sa volonté sur le sujet, oscillant entre la peur et le pragmatisme qui demandait nécessité d'attention. Il s'était passé des choses si étranges avec les mixtures testées... si désagréables... Il y avait peut-être des choses qu'il n'avait pas vu dont il fallait se soucier. Mais...
Son regard tombe sur le sourire avenant de la louve. Séléné se montrait très gentille avec lui et peut-être que ça le mettait plutôt en confiance. Suffisamment en tout cas pour que le mâle ocre hoche la tête en signe d'acceptation bien qu'il ne l'exprima pas oralement.