✡ ✴ Le créneau de Basilic

Au castel

De ses quatre enfants, Basilic était le plus turbulent. Celui face auquel Désastre arrivait un peu moins à s'adapter, celui qui lui demandait le plus d'effort et, il l'avait su rapidement, celui qu'il ne pourrait prendre avec un autre de ses enfants. Quand les deux filles étaient calmes, et que le premier fils pourrait aller avec chacune des deux filles s'il décidait un jour d'assurer la surveillance de plus d'un enfant... Le dernier né se désaccordait des trois autres dans une agitation qu'il peinait à contenir.
Il se montrait conflictuel, avec sa fratrie. Anita savait faire ; lui se retrouvait en incapacité, de savoir le gérer.
Seul, et avec patience, il ne lui posait moins de soucis.

Il était petit, et ses problèmes d'élocution l'avait rapidement amené à lui apprendre à lire et à écrire, tout comme à mieux articuler, au travers d'exercice trouvé dans des livres traitant des troubles d'élocution.
Il disposait d'un problème différent de celui de Valériane.
Le sien venait de sa dentition.
Il serait bavard, s'il avait eu les dents mieux disposées.

Désastre avait rapidement perçu ses limites et ses frustrations, même s'il lui arrivait parfois de voir l'enfant partir malgré tout, las d'un exercice qu'il n'aurait pas réussi, ou d'une tâche qu'il s'était lui-même imposée et qu'il aurait échoué sans que le père n'eut temps d'une interaction ou d'un conseil.
Il revenait après.

Il s'était demandé, une fois, si Pepper enfant était ainsi.
Petite, et agitée.
Ce n'était pas impossible.
Il réalisa, aussi, que depuis que ses enfants étaient là, il lui arrivait de ne pas penser à Pepper pendant plusieurs jours.

Ce n'est pas une mauvaise chose.
C'est peut-être qu'ils étaient comme une ultime vague qui calme.
...
Aujourd'hui, Désastre n'impose à son fils une leçon. Il le laisse explorer sa grotte, et les objets qu'elle contient semble plaire à son fils.

« Ess'que 'e peux 'e pren' ? »

Ses yeux ronds et sombres se sont arrêtés sur la griffe imposante et bleutée, autour de laquelle Basilic est alors venu poser ses pattes. Son fils l'a retourné dans tous les sens, l'a regardé d'un peu plus proche.
Désastre n'en avait jamais rien fait, de cette griffe, l'arrachant de la patte du dragon par besoin de fournir à la meute quelque chose d'utile, que ce combat qu'il avait estimé comme son dernier apporte par la suite un objet intéressant pour une amure ou une arme.

« Oui. »

Il y a un couinement de joie chez le tout jeune loup. Le père reste impassible ; inconscient de la jalousie que pourrait provoquer tel présent, ne songeant qu'au fait que la griffe allait, au moins, revenir à un de ses enfants.
...
Il estime qu'il est nécessaire d'ajouter, pour la culture du jeune fils comme pour l'héritage.

« Elle appartenait à un dragon, sur les terres Nakhus. Nous avons réussis à le tuer, ensemble.
...
Ta maman aussi, y a participé. »

Le récit est court, loin d'être épique.
Mais il suffit à provoquer chez Basilic un éclat de voix enthousiaste, qu'il fait entendre avant de brusquement le couper. Pas trop de bruit. Il la ramène tout contre lui, la sert un peu plus contre son torse...

« ...Si tu veux, je peux te montrer comment on en fait une armure. »

Une transmission.
Comme Valériane aime qu'il lui parle des plantes, il croit que Basilic aime ce qui attrait au combat.

« UI. »

Il peine à nouveau à se contenir, mais ce n'est pas grave.
Quelque part Désastre est satisfait, de ne pas avoir fait d'erreur en lui proposant l'activité.

« Mmh. Il faut du cuir. De quoi coudre. De quoi attacher la griffe. »

Il a, dans ses stocks, un reste de cuir de zèbre, ses aiguilles, du fil.
Basilic s'en approche, curieux, mais...

« MMh ! 'e veux que sssa 'appè' 'a maissson et 'out 'ouver 'à-bas. »

Le jeune loup affiche un sourire plus large, convaincu que ce serait une meilleure idée et que son père en serait fier.
Désastre n'a qu'une réponse :

« D'accord. »

Au marais aux lianes.

Et c'est ainsi que père et fils, se retrouvèrent à nouveau ensemble au coeur du marais.

A côté de Papa Dez, Basilic se sent gonfler d’orgueil et de bons sentiments. C'est à lui qu'il a offert sa super griffe, et c'est maintenant avec lui qu'il va concevoir une armure.
Quelque chose qui le protègera toute sa vie.
Quelque chose dont il pourra être fier.
Ce n'était plus un simple moment ! C'était son moment.

Sa langue filtre entre ses crocs écartés, pour mieux prélever les odeurs de la faune présente. Il leur fallait du cuir ! Il espérait qu'il pourrait abattre une bête avec Papa Dez, qui devait être l'un des loups les plus forts du clan, pour avoir battu un dragon.
S'avançant proche du sol, un bruit le surpris alors et amena son père à presque le couvrir. Basilic se redresse, peu décidé à paraitre comme nul devant Papa Dez, et s'exclame à la place en désignant la bête qui l'a surpris et qui désormais fuit comme un lâche.

« UN RHI'O !
- Oui. Il est jeune. »

Ca ne semble pas captiver Papa Dez.
Sans doute parce qu'ils peuvent trouver mieux !
Il se montra donc plus attentif, pour trouver ce qui servirait à son armure...
...mais pas assez pour ne pas finir les pattes dans une boue épaisse, limitant ses mouvements et l'empêchant d'en ressortir.

« ARH !
- Ne t'énerve pas. Mmh. Penche-toi plus en avant et agite ta patte de gauche à droite en tirant, pour qu'elle sorte de la boue. »

Basilic ouvrit la gueule...et s'appliqua à le faire.
Ok.
Ouais..!

Il en sortie, de la boue jusqu'au coude.
Mais il en sortie.

Et accorda un sourire large à son père.

« Bravo. »

Il sait que c'est important, de féliciter les enfants sur ce que les adultes ne trouvent plus important. Pour eux, le monde ne cesse de les surprendre et ils ont tout à découvrir. C'est important, de les féliciter et de les pousser dans leurs découvertes. C'est ce que les livres, Zen et Anita lui auront appris.
Le fils extirpé de la boue, ils purent donc reprendre leur exploration.

Il ne sait pas, ce qu'il veut exactement pour l'armure.
Peut-être a-t-il une idée précise.
Le cuir de rhinocéros ne semblait pas l'intéresser.

Pour une griffe de dragon, il désire peut-être support plus particulier.
Il peut comprendre, Désastre.

Et plus que de chercher, c'est son fils et l'environnement qu'il surveille...

Plouf.

Il pose ses yeux hétérochromes sur une carpe qui a éclaboussé ses pattes en un mouvement brusque à la surface d'une mare.
Mmh.


« Pfrt- »

Le rire lui a échappé.
Ce n'est pas tant de son père, qu'il a rit. Plutôt de cette succession de carpe qui l'éclabousse, et lui qui posa sur la carpe un regard morne. Sans surprise, mais qui le laissait paraître malgré tout.
Bref.
Basilic était davantage comme Mamanita : plus expressif. A défaut de bien réussir à parler, même s'il estimait avoir fait des progrès, il pouvait communiquer plus de la sorte.

Et comme Mamanita, il se décida lui aussi à aller au-devant d'un potentiel dragon, en pressant un peu plus le pas, son père marchant dans les siens...

Mais rien de bien, pour le moment !

Les piranhas étaient sans utilité.
Seulement un danger auquel il fallait prêter attention.

Son fils semblait cependant avoir retenu cela, en poursuivant son chemin sans chercher à sauter dans leur mare.
C'était une bonne chose.
Il croit.
...
L'oreille entendante, que l'âge amène à moins entendre, se dressa avant que ne le fasse son fils.

« Attention. »

Ses babines frémissent.
Il y a un ennemi.

Et aucun ennemi ne se devait de toucher à ses enfants.

Le tas de vase bouge, bleuté, et se redresse face à eux.

« On peut 'e ba're ?
- Oui. »

Laisser les enfants faire leurs propres expériences et assurer leurs arrières pour les rattraper au besoin.
C'est ce que s'apprêtait à faire Désastre, laissant son fils évoluer face à un ennemi peu dangereux.
Il ne serait pas toujours là, pour le protéger, il sait.

Il pouvait lui apprendre à s'en sortir sans lui, tant qu'il était encore là.

Son père lui dit qu'ils peuvent se battre contre ce truc qui est soudain apparu sous leur nez. Qu'est-c'que c'était, un tas d'morve bleue face à un dragon !
Papa Dez en ferait qu'une bouchée.

Mais lui...
Lui voulait aussi essayer, de le battre.

Il s'entrainait un p'tit peu. Enfin. Il avait décidé de devenir fort et valeureux. Alors même si l’appréhension lui mange un peu le bide, il est décidé.
Basilic grogne.

Et claqua ses mâchoires contre le slim dégeulasse.

Son fils se jette contre la vase, et la déforme du passage de ses crocs contre la surface informe. Celle qui se referme alors sur lui, l'enserrant, l'avalant.
C'est là, qu'il décide d'agir.
Une attaque en soutien, pour le libérer de l'entrave d'un des dangers de cette moère.

La vase ignora sa salve, alors que sa mâchoire ne trouva rien d'autre qu'une douleur liée à une articulation vieillissante.

« RAWR !»

Saleté, ça lui fait mal ! Il sent la vase le contourer, il a confiance parce que Papa Dez n'est pas loin, mais il n'en mène pas très large non plus.
C'est le moment de prouver qu'il est un adversaire de taille, contre ça-
Alors, face à la tentative d’étouffement de la vase, il s'agita comme un beau diable en envoyant ses griffes et sa gueule.
Il était souple et agile, il finirait bien par la toucher assez pour se creuser une brèche dans son corps et lui échapper !

Mmh.
Il croit que son fils se débrouillerait sans lui, à bien reconsidérer la situation.
A force de se démener, il créa une brèche dans la vase en souffrance, et s'extirpa de là pour retomber à quatre patte, couvert de la substance bleue qui composait l'ennemi.
Un combattant acharné.
...

« Tu peux l'avoir. »

C'est un encouragement.
Il n'est pas en droit de lui voler une victoire potentielle.

Ce serait douter de ses compétences, celles qu'il lui dévoilait alors.

Tu peux l'avoir.
Son père croit en sa force. Son père croit en sa victoire.
Et ça-
Ça ça le gonfle d’orgueil et de motivation. Il va lui montrer !

Basilic repartit à l'offensive, visant la sale gueule de la vase.

Et si la vase referma sa mâchoire sur lui, lui faisant sentir une pression forte qui comprima ses os et ses poumons... Lui l'explosa tout bonnement au travers de son passage. Retombant de l'autre côté, essoufflé, avec un peu le tournis.

« AHAH, 'ai ga'yé ! »

Son souffle siffle un peu, quand il se retourne avec des yeux brillants vers son père, recherchant toute la satisfaction qu'il aurait pu lui déclencher suite à un tel combat.
Son premier ennemi rencontré avait été vaincu sous les yeux de son père.

Et ça, ça n'avait aucun prix.

Il le fixe droit dans les yeux, ce tout jeune loup qui vient d'abattre seul un des ennemis de la moère, sans qu'il n'ait eu besoin de lui. Sous le corps petit et juvénil, se dessine des muscles agiles qu'il remarque d'autant plus sous le bleu luisant de la vase venue le recouvrir.

Un combattant acharné.
Comme avait pu l'être Pepper.

« Tes grands-mères étaient de grandes guerrières. Tu me fais penser à l'une d'elle. »

Sans doute est-il maladroit, dans le compliment qu'il veut formuler. Si l'expression manque, il s'essaie à poser des mots, important pour l'enfant.
Et l'enfant à les yeux qui brillent, de les entendre. C'est ce qu'il voit. Ou bien est-ce la douleur, qui menace les larmes de couler de ses yeux ?
...

« ...Ne bouge plus, je vais te soigner. »

Il sort le nécessaire. Une bille d'argile pour la douleur, un baume qu'il passe sur sa peau lisse pour soulager ses douleurs, son dos qu'il manipule un peu suite à la torsion que lui aura fait subir la vase.
Il ira mieux, après ça.

Il respire, tout blottit qu'il est contre son père, alors que celui-ci le manipule et fait en sorte qu'il aille un peu mieux. Comme ses grands-mères.
Ses grands-mères étaient deux alphas et une prêtresse. Etre associé à un rang si haut fait pulser son coeur un peu plus vite.
Elles aussi, elles avaient dû défier des dragons, ou un truc qui y ressemblaient.
Alors, d'y être comparé..!
Enfin. D'être comparé à l'une, ça lui revient maintenant...

« Què' grand-mère ?
- [b]A Pepper. »

Il sourit, satisfait. Il aurait été content de n'importe quelle réponse, 'faut dire...
Il se sentait fier de son accomplissement, d'avoir abattu un tel ennemi, si tôt, si vite !
AH. Ce n'est pas son frère ou une de ses sœurs, qui auraient été capable de ça !

Quand Papa Dez a finit de le rafistoler, il s'ébroue et fait un pas.

« On peut rep'en're ! »

Il se sent capable de tout, désormais.

Le caïman semble ne pas oser bouger davantage.
Peut-être que lui aussi, est impressionné par la capacité du jeune loup.
Mais cela ne suffit pas à faire baisser sa surveillance.

Il doit anticiper. Il n'a plus sa forme d'antan, et l'hiver freine Quetzalcóatl. Sa santé est fragile, ses capacités réduites. Si une vase est tolérable, un ennemi trop puissant nécessitera une fuite...

« Tu aimes te battre.
- 'oui ! »

Ce sur quoi il marche fait frémir ses sourcils. De la salive collante. Mmh.

« Tu devrais aller voir Aka. Un jour.
...
Il y a de la salive collante, pour aider au maintien de pièces sur l'amure. »