Icarus [PV Lucian]

Il n’avait jamais rêvé. Du moins, c’est ce qu’il aurait répondu si on lui avait demandé, car c’est ce qu’il lui semblait. Lorsqu’on lui décrivait ce qu’était un rêve, c’était en tout point différent de ce qu’il vivait la nuit depuis sa naissance, chaque fois qu’il trouvait le repos, quand il le trouvait du moins.

Lucian était de ceux dont le sommeil se faisait trouble, dont les nuits étaient diluées. Il était de ceux qui devait compter les heures, les minutes, les seconds pour espérer un peu de repos, ceux dont les cernes se faisaient plus noircies encore au levé du jour qu’au coucher. Puisqu’il évitait méticuleusement l’obscurité et ses méandres, ceux qui le rendaient aveugle en plus d’être sourd. C’était ce qui l’avait toujours terrorisé. Ça et les murmures, les voix qui contre toute attente se faisaient multitudes.

Aujourd’hui, il avait réussi à conquérir cet espace qu’on appelle rêve pour quelques temps, quelques heures tout au plus. Il en avait fait son royaume, y était entrer comme pour le conquérir. Un monde en noir et blanc, dépourvu de toute couleur. Au orage projetant des flashs sans bruit. Et aux silhouettes fantomatiques marchant toujours plus nombreuses sur ce monde, toute identique ou presque, indifférentes à sa présence. Lui, il se tenait là, portant sa lanterne dont il se séparait rarement, éclairant les ténèbres par un halo blanc. Le monde se faisait silence, couvert d’un brouhaha, la multitudes de murmures car ils étaient les seuls sons à exister pour lui, à être entendu par aigrettes. Il n’était pas vraiment détendu ici, il avait l’habitude de ce sombre manège, de cette manifestation sordide, mais son plumages se faisait volumineux et ses pupilles deux fentes qu’il dardait sur le vide.

Il ne peut pas entendre ce dont il ignore les vocalises, alors il reste sourd à ton appel.

N’était-ce pas étrange ? Ou bien n’était-ce qu’étranger ?
Il attendait, attendait le moment où un tressautement plus rude que les autres le tirerait de son sommeil, c’était ce qui arrivait habituellement, mais ce rêve malaisant, ce cauchemar semblait vouloir s’éterniser encore un peu. Ne sachant quoi y faire, il y restait immobile, n’avait fait le moindre de pas pour visiter ce monde qui était celui de son esprit, comme prisonnier de sa propre conscience.

Des couleurs en ce lieu. Un silhouette colorée qui s’avance vers lui, qu’il reconnaît. Des paroles qui n’entends pas plus qu’à l’habitude, puisqu’il n’avait idée de quelle voix était la sienne parmi la multitude de « voix ».


Peut-être n’aurait-il du paraître si surpris, et pourtant il n’y eu qu’effroi et surprise pour illuminer ses yeux.
Un regard en coin, juste le blanc de ses yeux pivota jusqu’à croiser l’image de la louve qu’il prit pour une illusion, l’un des leurs, une parmi la multitude. C’était bien la première fois qu’une des entités daignait interagir avec lui. Le rêve s’éternisait un peu plus, son sommeil se faisait plus profond encore. Le plumage resta gonflé, la mâchoire claqua dans le vide happant par la même occasion un peu de brume qui virevolta en cercle autour d’eux. Il était ainsi en son esprit, nerveux, angoissé, paranoïa, fou peut-être.

Y-avait-il seulement encore la place pour deux ? Pouvait-il lui laisser une place ?
La queue du mâle fit balancier. Avait-il été contaminé par la récurrence de la louve sur les chemins de son existence, est-ce que maintenant son esprit s’en allait à s’imaginer d’autre chose. Etait-elle réelle ou un tourment de plus ? Son museau se pinça en de multiples plis, il voulait comprendre, il voulait des réponses. Il était en colère, non pas contre cette image, mais contre lui-même en proie à ses propres doutes, ceux-même qui l’avait conduit malgré lui à confronter Aiiro. La bulle de couleur et de lumière semblait se corrompre petit à petit, jusqu’à ce qu’elle soit elle-aussi plongée dans un monde bicolore.

« ... »

Quel avait- été ses mots déjà. Sur quoi avait-iel posé ses griffes.
Ha oui.

Il se souvient.
Un lien. Ce qu’il désirait. Mais qu’il ne voulait admettre et si c’était le lien, quelle en était sa nature.
Un lien, une attache se matérialise entre eux. Un lien dans ce monde comme il en existe un dans le monde réel.

« … est-il réel ? »

Il est réel.
Il en a la certitude, ce qu'il craint c'est qu’il ne soit que chaîne pour la louve, et si c’était elle qui brûlait du désir de le briser, ce lien qui pouvait sembler si lourd à porter.

Un glitch traversa l’espace autour d’eux, faisant trembler le monde environnant. Il était témoignage de son agacement, donc il n’exprimait l’escalade, de ce verre à la limite du débordement dont on aurait pu croire qu’il avait cessé de s’emplir. Mais il était sot de croire à sa pseudo tranquillité d’esprit. Il avait multiplié les efforts, s’était confié et maintenant, elle venait le confronter, semblait vouloir douter de ce lien qui désormais les unissait, cette seule réussite.

Pourtant, il prit le temps de répondre de sa voix monocorde sans la quitter du regard.

« Ce n’est pas tout à fait exact. »

Il ne désirait le briser.
Il soignait.
chacune de ses paroles, n’avait-il pris soin d’eux ?
Pour Les préserver.

Alors il décide d’intervertir les rôles. Parce qu’il était capable de jouer ce jeu aussi. Plutôt que de s’ouvrir, il reste fermé, plutôt que de se laisser interroger, il pose les questions, fait naître les doutes.

« N’est-ce toi qui m’a conseillé de nous faire mutuellement confiance ? Et maintenant tu apparais dans mes cauchemars. Pourquoi ?»

Qu’est-ce qu’iel t’as fait ?
Sa mine se fait plus sombre encore, l’absence de ses sourires lui pèse plus qu’il ne l’aurait cru. Il peinait à la reconnaître dans ce monde, mais ne pouvait que constater la constance du changement qu’il avait attribué à la fatigue lors de leur entretien plus tôt. Le pelage et les plumes gonflèrent de nouveaux, il était agacé. Car elle n’était la seule à avoir éprouvé un changement, et de ces variations, il ne pouvait prendre contrôle. Il ne s’adaptait pas bien au changement, jamais ne pourrait accepter ce qu’on lui avait volé, à elle.

N’avait-elle était souillé par lea deité ?
Une nouvelle fois, le monde tremble. À chaque tremblement, il comprenait un peu plus, pourquoi Mère lui avait toujours semblé un phare dans la nuit, pourquoi, elle avait toujours lié les siens, pourquoi son arrachement à lui l’avait tant fait souffrir. Et si cela se produisait de nouveau à cause d’Aiiro ? Devait-il l’accepter ? Il en était certain à présent, cela ne pouvait venir que d’iel.

J’ai peur oui.
Peur de perdre de nouveau.

« Qu’est-ce qu’Aiiro t’a fait ? »

Qu’est-ce que tu as accepté que
mon frère n’aurait pu refuser non plus.

Le monde est instable, il tangue. Des étincelles flânent dans l’air, électricité en suspend, qui crépite et éclate en myriade scintillante. La menace est palpable. L’orage approche. La tension , de l’intention, ou bien de l’instant alors qu’il reste attentif, Passif, se contente d'assertivité en penchant la tête après chaque phrase comme pour lui signifier la fin de sa lecture, l’inviter à poursuivre.

Je comprend.
Puisque c’est ainsi.
Il devrait pouvoir changer.

Puisque qu'elle le dit, cela lui semble option envisageable.
Les aigrettes se redressent, les yeux se ferment. Il essaie, de s’apaiser, enfouir ses sentiments contradictoires, la colère, la manie, la paranoïa. Les paupières se plissent, mais lorsqu’il ouvre de nouveau les yeux et tend son museau vers le ciel, de nouveau, il se brise, se fracasse. Les pupilles s’animent, observent ce monde qui les assaille en détail. Puis abaisse le museau, courbe l’échine, déçu par son incompétence.

Changer, je n’y arrive pas.
Je n’ai pas de contrôle sur ce monde.
Elle a fait une erreur.

Il hésite, saisit de sidération. Devait-il avouer son incompétence à faire le trie, vider son esprit et son cœur ? à mettre de côté ses doutes, ses peurs, sa colère ? ou bien l'avait-elle déjà deviné qu'il était victime de sueurs froides ?

rêver, je n'y ai pas droit,
il n'y a que cauchemars pour moi.

Un regard lourd s’appuie sur lui, regard qu’il fuit, obliquant son propre regard vers les sédiments monochrome qui forment la surface de ce monde. Il grimace. Il sait qu’elle sait. Ne pouvait plus lui cacher quel assentiment il développait à l’égard de la déité. Ses vibrisses s’agitent en un tressaillement nerveux alors que ses mâchoires claquent l’air comme pour reprendre son souffle. Un souffle volé qu’il s’autorise après avoir retenu son souffle si longtemps pour retenir mot et pensée qu’il n’aurait du développer.

« Ne va pas croire que c’est par lubie que je me suis forgé un avis négatif sur ta déité. Même si j’étais nourri de doute dés l'instant où elle s'est écroulé sur la chapelle, j'ai suivi tes conseillè, lui ait laissé le bénéfice du doute et lui ai concédé une chance. Par trois fois, ma confiance a été bafouée.»

Il ne la laisserait pas croire, il ne laisserai planer le doute. Elle devait comprendre qu’il ne pouvait lui céder plus de trois

« La Deité a pénétré mes pensées. À lu au travers de mon esprit sans interroger mon consentement, c’est par caprice qu’iel a voulu savoir, comprendre, ainsi iel a brisé la promesse que l’on s’était faite de ne pas lui demander pour la bourgeon de pomme d’or.  »

Il s’avance. Aurait pu sembler menaçant portant ses longues plumes noires et opaques comme une longue traîne.

« Mon frère a passé un tel contrat. je crois.J'ai vu la corneille sous son coude. Plus tard, j’ai cru qu’il allait me dévorer, ou m’écharper. Il semblait vouloir faire de sa proie, lui s’était fait prédateur sanguinaire à l’apparence féline sous couvert de la lueur indigo. Si je n’était parvenu à gagner suffisamment de temps, ma vie aurait été mise en jeu. »

Les griffes s'enfoncent dans la poussière. Il ne comprend pas.

« Iel n’aurait pas du te changer, si cela devait te causer du tort. »

Ce n'était qu'une conclusion qui lui appartenait à lui.

Ils n'étaient compatibles,
Iel se faisait changement,
Lui éprouvait des difficulté à appréhender l'imprévu parmi ses actions irréfléchies.

« Tes doutes que te dictent-ils me concernant ? N'as-tu envie de me laisser toi-aussi ? Ou de me chasser ?»

Ce ne serait qu'une de plus. Une perte, un abandon.

[ Dé : stabilité du rêve ]

Il ne comprenait pas.

Ses griffes raclaient le sol nerveusement, ramenant à lui un peu de cendre tout en fracturant le sol. Il avait toujours été ainsi anxieux, nerveux, comme suspendu au dessus du vide, empêché par ses angoisses, ballotté par ses doutes qui ne faisait que court-circuiter sa réflexion, le rendant à fleur de peau, et même s’il s’arrangeait parfois pour faire plier la balance et la chance dans un sens ou dans l’autre en fonction des besoins, il en demeurait vulnérable.

Je devrais déjà m’être éveillé.

Chaque fois que la colère enflait un peu plus en lui, des étincelles menaçantes jaillissaient et s’agitaient tout autour d’eux. Ils étaient nombreux ces feux-follets appelant la foudre, à s’agiter tout autant que puisse l’être l’esprit d’un loup en proie aux tourments. Le ciel s’était noirci, les nuages densifiés, rendant ce monde opaque, dévorant les derniers rayons. Il claqua des dents nerveusement, une nouvelle fois, ce mouvement se faisait récurent, marquant le temps comme un métronome bien réglé, se faisait en rythme régulier et répétition.

C'est normal de s'inquiéter.
Alors pourquoi tant de doutes, tant de reproches. Pourquoi toujours cette fuite en avant, pourquoi avait-il toujours l’impression de perdre pied ?

Combien de temps nous reste-t-il ?

Après ce premier pas, le second mouvement se fit attendre, un peu comme si l’appréhension d’un contre-coup pour avoir osé songer à prendre cette initiative le faisait hésiter de nouveau. Il l’avait envisagé pourtant Chaque second pesant. Lorsqu'on lui parle de son frère, lorsqu'on l'accuse de quelques suppositions hâtives ou préjugés innocent, ses yeux s'ouvrirent plus grand.

« Je ne le pense pas. Et Il ne sait. Pour l’incident. »

Je n’ai pas voulu l’effrayer.

Il n’exprimait aucune honte quant-aux non-dits.
Les prunelles or et bleues noyées dans sa sclérose noire se plongent dans les deux émeraudes de la louve, il soupesa sa réaction, tenta d’identifier le moindre de ses mouvements, du tressaillement d’oreille au battement de paupière. Seul, il avait pris la décision de taire ce qui était arrivé. Il ne savait s’il y avait eu une bonne ou une mauvaise réponse à donné dans l’instant, mais le hasard avait décidé pour lui. Dans le feu de l’action, face à l’attente d’une explication, l’omission lui avait semblé préférable. L’on aurait pu croire qu’il agissait pour nuire, ou manipuler, mais c’était là tout autre raisonnement qui l’avait mené ici. Il ne voulait le parasiter de son mal être, permettre à ses propres craintes de gagner son unique frère et avait eu besoin de temps pour réaliser ce qui s’était passé. Et au final, il s’en était sorti, il ne lui tenait aucun reproche, aucune responsabilité.

Et moi je ... Je ne suis pas faites pour vivre dans un monde comme ça.
Un profond entaille lacéra son cœur. Il eut l’impression que le lien s’était resserrer autour de sa gorge, ou bien que la cicatrice qu’il portait le long de sa gorge s’était rouverte, mais lorsqu’il entrouvrit la gueule, il ne ressentit aucune effluve allant en ce sens, ce n’était que son imagination sans doute. Secourant la tête pour en chasser les doutes, il eut un mouvement de recule avant que sa poitrine se soulève d’un soupire. Des doutes différents qui naissent, des soupçons contre ses propres intentions, et s’il n’était qu’un maux envers les siens. Il eut soudainement envie de se dérober à son regard. Antagoniste qu’il était, aux antipodes ce qu’elle pouvait être, c’était lui, la menace qui planait sur elle.

Si ce n’était lui qui porterait le premier coup, qui nourrirait les regrets entre eux, peut-être était-elle. Il releva la tête, la fixant de nouveau avec intérêt. Pourtant, il ne pouvait nier qu’une certaine confiance s’était installé entre eux.

à quoi bon, ils peuvent bien tous me détruire.

Il y eut comme un écho qui se rependit telle une onde contre la surface de l’eau. Fatigué de lutter, il abandonna. Le monde se mit en pause, l’orage se figea bien avant de les frapper tout deux. C’était là un peu de lâché-prise, une faille dans son cauchemars qu’il ne remarqua pas, figé qu’il était dans son introspection.

Mes doutes me confient que je peux te faire confiance.

Peut-être pas.

Il était blessé. Craignait de la blesser par extension, se sachant rancunier, il se connaissait que trop bien pour ne pouvoir mettre le doigt sur ses propres travers.

Entre ses crocs, un murmure sans parole.

Je te fais confiance

Elle demeurait. Sans qu’il puisse la repousser.
Immobile, silencieuse, tout autant que lui, ne faisant qu’enserrer entre ses doigts, ce lien qui les rassemblent, qui les rendent constitutif l’un de l’autre. Lien auquel il se sent dépendant, enchaîné, vulnérable presque, et pourtant qu’il abandonnait entre ses mains.

Elle peut bien en faire ce qu’elle souhaite.

Le renoncement ne naît pas du désintérêt.
Il était plutôt enfant de cette incompréhension qui demeurait en lui, qui malgré l’attention particulière qu’il lui portait ne trouvait de réponse en écho à ses silences, à son attente. De cette craint qui le possédait, celle de faire plus de mal encore qu’il ne l’aurait souhaité. Une inquiétude légitime en somme, engendrée maladroitement lorsque par mégarde, il trouvait attachement en l’autre. À cette seule condition il pouvait se sentir blessé, à cette seule condition, il pouvait éprouver ce qui s’apparentait à la peine, une douleur lancinante qui le traversait, qui n’était ni tout à fait physique, ni tout à fait psychique. Celle-là même qu’il lui semblait entrapercevoir dans cette retenue qu’elle avait adoptée pour ne point se retrouvée broyée par l’orage.

Par ses silences.
Elle n’était pas de son monde. Soit. Il l’acceptait. Il n’avait jamais souhaité qu’elle se trouve submergé par son propre monde, c’était arrivé, comme par accident. Et maintenant, il devait se rendre à l’évidence, il pouvait être atteint par ses mots, et cela aussi, il l’acceptait.

Elle pouvait bien le blesser, cela lui importait peu tant qu’il ne la blessait en retour.
S’il ne voulait changer, il changerait tout de même, pour mettre plus de distance entre eux si cela s’avérait nécessaire.

Lorsque les mots furent lâchés, alors il retint sous souffle, gonflant ses plumes par la même occasion sans y prendre garde. En réponse, il lui sembla presque entendre une voix, sa voix, sans doute fut-elle imaginaire, création en son esprit, pourtant, elle avait en son timbre chantant quelque chose de rassure auquel, il voulait croire.

Qu’est-ce qu’elle pouvait attendre qu’il ne puisse donner ce soir. Allaient-ils encore longtemps se tenir ainsi en chien de faïence.
S’il avait toujours cru à quelques jeux de hasards venus le tourmenté, il ne pouvait décemment attribuer au hasard une telle rencontre rendue possible uniquement par l’usage de la magie divine.

Sa tête s’inclina légèrement tandis qu’un sourcil se soulève pour ponctuer son interrogation. Plutôt que vouloir s’approcher, naissait en lui cette terrible envie d’accroître cette distance entre eux, prendre du recule qu’il crut bon pour eux. Pour Elle, pour lui. Pourtant, s’en remettant à elle et à son seul jugement, il demeura là, tout autant attentif qu’il pouvait l’être dans la position qui fut la sienne. Que devait-il faire maintenant ? Il n’en avait l’ombre d’une idée

Il ne savait pourquoi, son sourire resplendissait à nouveau. Par ce simple changement, parce ce qui semble être acceptation, adhésion, ou bien autre chose.

Une aube surnaturelle semblait mettre fin à la nuit, par sa candeur qui vint timidement rehausser d’un ton chaleureux la palette du paysage. Il ne savait, si c’était déjà l’aube dehors qui point à l’horizon, alors il ne disposerait que de peu de temps pour trouver réponse à ses questions, chercher quelques éclaircissements.
Car c’était ce qu’ils était et après tout, lui n’était qu’un pantin, un pion contrebalançant dans l’échange au travers du contrat sur lequel ils s’étaient tout trois accordé. À moins que cela ne fasse parti du contrat. Ses yeux se figèrent en deux fentes parallèles toute deux posées sur elle alors qu’il l’interroge. Soudainement, il pense avoir compris, il tressaute sur ses quatre patte d’indignation, pensant avoir enfin percé le mystère.

« Le contrat que nous avons passé, il ne vous convient plus. »

Pourtant, il avait eu grand soin à le rédiger, à rendre son écriture la plus liée et lisible qu’elle puisse être. Une moue se ficha sur son visage, camouflant la fatigue derrière son air renfrogné avant qu’il ne porte une patte jusqu’à son front, repoussant une mèche de cheveux bicolore qui avait le don de l’agacer à force de lui cacher le visage.

« Tu veux que j’en rédige un autre ? J’ai tout un tas de plumes pour cela et la bibliothèque ne manque pas de papier.»

Je pense que tu en seras un bon.

Un bon parent.
Il redressa le museau et entrouvrit la gueule. Bien que cette phrase faisait écho à un autre conversation qu’il avait entretenu avec Hölzer, jamais il ne se serait attendu à lire ces mots en ce sens le concernant. Un bon père, comment pouvait-elle en être si certaine, en rire même. S’était-elle inquiète de fait qu’il puisse l’abandonner elle, et sa marmaille une fois le résultat de son expérience obtenu. Peut-être. Pourtant, il lui avait fait cadeau d’une pierre lui permettant de l’appeler au besoin. Cela ne faisait que peu de sens pour lui, mais ne pouvait se transposer à la louve, il devait se contenter de ce qu’il pouvait entrevoir.

Il ne savait pas vraiment ce qu’il avait pu dire pour lui faire penser cela, il ne s’était jamais reconnu comme étant un bon parent, ne s’était toujours vu que comme celui qui engendrait un nouvel héritage, une nouvelle génération, sans vraiment s’être attardé sur le rôle qui serait le sien. S’il n’y était pas fermé, il demeurait des inconnus, des choses qu’il ne connaissait pas, des questions dont il ne connaissait pas les réponses. Ses yeux la fixèrent.

Devait-il reproduire ces schéma de pensée, les imiter, est-ce que c’était ce qu’elle voulait.

« Je ne pense pas être Lestat. Nous sommes bien différent lui et moi. Tu penses que je ressemble à Violette ? Hölzer m'a dit qu'ils étaient de bon père. »

Il n’aurai jamais pu avouer la ressemblance qui existait entre lui et son père, Pourtant ses tentatives pour se séparer de son image demeurait vaine et futile. Alors peut-être ressemblerait-il à quelqu’un d’autre et parmi les pères dont on lui avait parlé, il n’y avait que lui.

Sa voix habituellement monocorde, chevrote légèrement. Il ne savait exactement ce qu’il disait et sur quel chemin il s’engageait. Il ne savait pas ce qu’était la définition d’une bonne mère, alors s’en inventa une pour lui-même, sa propre définition.

C’était un pincement au cœur chaque fois qu’il y pensait. Il serra brièvement les crocs, grinça des dents. Les deuils étaient si douloureux, même pour lui, il ne souhaitait plus éprouver ces sentiments d’abandon, de perte, cette tristesse venu labourer son subconscient et secouer son esprit.

« Il est parfois difficile de trouver quelle est sa place. Nous seront parent à trois et je ne souhaite pas me mettre entre vous. »

Il cligna des paupières. Un souffle lui échappa, après la surprise et ces révélations, il se sent un peu plus léger. Elle ne tenait pas à discuter le contrat. Il n’avait échoué à les satisfaire toutes les deux, elles n’avaient remis en doute le projet lorsqu’il avait du s’absenter. Lorsqu’il rouvrit les yeux, c’est un pas qu’il fit. Puis un autre. Chaque pas se fait écho, se décompose, accélère, glitch jusqu’à ce qu’il s’immobilise enfin, son museau enfouit contre son épaule. Ne pouvait ni voir, ni entendre, il se contenta de fermer les yeux, lui murmurant à l’oreille.


Une invitation peut-être. Il disparut sans attendre de réponse. Ne laissant sur place qu’une poignée de plumes et quelques lucioles. La rêve prit fin.