Remonter [Lied]

Lied.
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Elle gratte. Elle gratte, gratte et gratte le sol, penche la tête sur le côté, hume et inspire à pleins poumons, son cerveau tournant à plein régime pour identifier l'origine de l'odeur qu'elle décèle. Les fragrances se chaînent et se superposent et rendent l'exercice difficile, mais elle connaît ces lieux comme sa poche.

Mais cette odeur. Cette odeur, elle ne la connaissait pas. Ca ressemblait... A un amalgame de plantes, un zeste de loup (???), un relent un peu sombre de. Sombre ? Elle n'osait dire charogne, le terme était peu flatteur, mais. Mais il y avait un mais. C'était quand même le seul terme qui lui venait à l'esprit. Mais le tout était tellement... Imbibé de plantes, d'eau, de... Mousse ?

Elle gratte encore un peu, l'eau dévalant sur ses épaules, nourricière mais malvenue à cet instant. Elle grimace, et la cape lui chatouille le cou pour de ses petites pattes venir enserrer ses épaules et protéger sa tête. Elle sait qu'elle ne ressemble à rien, comme ça, mais au moins elle est un peu au sec.

Bon.

C'est une piste, elle en est plutôt certaine, mais une piste si étrange et dérangeante qu'elle n'est pas sûre de vouloir ni de pouvoir la suivre.

Ahah.

Que vous croyiez. Rien ne fera jamais barrage à sa curiosité nourrie d'ingéniosité, et Lied tapote Doudou du bout d'une patte.

Alors Doudou, gauche, ou droite ?

Elle tourne la tête, hésite, hume le sol de nouveau.

Mmh. Droite. Et si ça foire, on remontera de l'autre côté. Ca n'a pas l'air d'aller très vite.

Une patte après l'autre, le nez au ras du sol mais les yeux scrutant le lointain, elle trottine. S'arrête, vérifie la piste, vérifie deux fois parce que c'est vraiment pas simple, et parce que vérifier deux fois évite de se tromper une fois... Et gagne de nouveaux trois mètres.

En s'approchant, ou en s'éloignant, sous la pluie battante elle n'en est pas encore sûre, mais ça n'est pas cette incertitude qui va la décourager.

Lied.
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Le chemin est plutôt laborieux, mais rapidement l'odeur devient plus forte et la conforte dans son choix. Elle est certaine de déceler là-dessous un peu de lupin, mais c'est si ténu... Bon, vu la gueule des lupins qu'elle a pu croiser, c'est pas si absurde que ça. La louve s'arrête devant un terrier de renard et en fixe le fond. Elle écarquille les yeux, les plisse, les écarquille de nouveau, essaye de voir dans le noir d'encre qu'elle contemple.

Qui la contemple en retour.

Deux yeux d'un azur infini, opalescents dans l'ombre.

Elle recule de quelques pas, et l'être sort. Elle ne peut le qualifier autrement, alors qu'il s'extrait avec difficulté de ce trou trop petit pour lui, alors qu'il la contemple avec une sorte de fascination. Son regard quitte ses yeux pour trouver tout ceux qui parcourent son corps. Lied rentre un peu le cou dans ses épaules, gênée par le brûlant de son regard ; en réponse tous les yeux sur son pelage clignent et s'alignent, certains se ferment et d'autres s'ouvrent, fluides et mouvants.

Il s'incline, ses longs cheveux indigo frôlant et raclant le sol humide.

La cape de Lied libère son visage et se contracte, les yeux aussi animés que son pelage, formant une petite cape sur son col et la libérant. Elle s'humecte les babines.

Bonjour ?

Il ressemble à un sauvageon perdu, et lui inspire une méfiance infinie. Elle l'imagine aisément se jeter sur sa gorge et d'un coup de crocs lui ouvrir la jugulaire.

Mais à la méfiance se mêle sa curiosité infinie.

Lied.
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Il savait parler. Il la comprenait. Il comprenait ses mots. Mais sa réponse n'était en rien rassurante. Un frisson d'effroi remonte le long de l'échine de Lied tel un doigt glacé. Elle se force malgré tout à ne pas découvrir ses babines. La déférence ignorante dont il la baignait. Une seconde et une seule l'idée que quelque personne moins bien intentionnée qu'elle pouvait tirer profit de cette déférence la dégouta profondément. Elle a envie de vomir du peu de considération que ce loup a pour lui-même - ou du trop plein pour ses proches.

Tu peux m'appeler Lied.

Elle hésite, et penche la tête sur le côté. Ose.

Ô, loup dont les plantes se nourrissent.

Car elle le remarque maintenant avec clarté, la mousse qui orne son dos et son arrière train, sa joue, encadre ses yeux d'azur. Elle croyait son poil négligé ou caché de ces végétaux, mais elles poussent en lui... Fascinée autant qu'effrayée, elle fixe ce bout de joue qui disparaît sous le vert luxuriant, à peine masqué par le rideau de pluie qui les entoure.

S'agit-il d'une plante en particulier ? Peut-être planter certaines choses dans son corps ? Si la plante meurt, sa santé s'en ressent-elle ? S'il est malade, périclit-elle ? Tire-t-elle de lui ses nutriments, a-t-elle besoin de lumière,

Comment !

Il pose une question. Une question assez simple, il ne lui faut que quelques secondes pour y répondre :

Le Gouffre aux Rapaces.

Incertaine quant au fait que la réponse se suffise à elle-même, elle précise :

C'est un gros trou un peu sec toujours rempli de rapaces, de gros oiseaux, quand il fait chaud. Il y a aussi beaucoup de niches.

Pour l'instant, elle ne préfère pas parler du refuge. C'est pas l'auberge ici ! Par contre, ils se trempent peu à peu, et elle ne dirait pas non à un toit si ils continuent de discuter.

Tu veux pas qu'on trouve un abri ?

A moins que, comme une plante, il soit à son meilleur sous l'eau tombant en trombes ? Peut-être qu'elle était en train de lui suggérer de se priver d'un repas ? Buh, que de questions épineuses qu'elle avait hâte de lui poser directement !