Face down - Théodore Madig

Elle était revenue de l'expédition chez les Nakhus pour les tatouages. Tout ne s'était (probablement) pas déroulé comme elle s'y attendait, mais pour le moment il n'y avait aucun signe d'une Maps fâchée qui arriverait pour la traîner jusqu'à chez elle. Louarn l'avait amenée au Refuge : c'était sa maison ! Il habitait ici avec ses papas, dont elle n'avait pas encore fait la rencontre. En fait, ils étaient arrivés il y avait quelques minutes, et Louarn était allé faire autre chose, et lui avait demandé de ne pas partir trop loin, qu'il la retrouverait ici.

Roxane s'était dit qu'il allait désamorcer un potentiel conflit avec ses papas ou quelque chose comme ça, mais il était pas encore revenu et elle s'ennuyait. C'était un terrible paradoxe : d'un côté, elle ne voulait pas s'éloigner, car il lui avait demandé de rester. Louarn était son ami, elle ne voulait rien faire qui puisse endommager leur amitié. Rien de rien. Tout devait se passer comme il voulait, sinon, elle avait peur qu'il ne veuille plus être son ami, et qu'il ne veuille plus la voir.
De l'autre côté, il se passait rien, ici. Il était allé vers là bas, plus bas, un chemin qui passait entre deux falaises rocheuses. Ici il n'y avait eu qu'un rapace vaguement distrayant depuis 10 minutes. C'était trop long. Elle hésita encore un peu, puis souffla sur sa mèche noire qui tombait devant le côté droit de son museau et prit ce même chemin.

Elle lui dirait qu'elle avait été obligée, ou quelque chose comme ça !
Elle passa entre les falaises en regardant vers le haut, ne pouvant pas s'empêcher d'être curieuse malgré son détachement qui devait rester son trait de personnalité phare. Soudain, elle était dans une allée entre les parois rocheuses, et de part et d'autre il y avait des grottes. Elle entendait des voix, et voyait des loups au loin. Elle s'arrêta, soudain mal à l'aise. Est ce qu'elle avait le droit d'être ici ? Elle n'avait pourtant senti aucune frontière... mais son éducation et sa peur lui soufflaient que c'était pas chez elle ici. Elle pouvait pas juste arriver comme ça.

Soudain, les loups commencèrent à bouger vers elle, et elle paniqua. Oh non, ils allaient la trouver ! La jeter dehors ! Il fallait qu'elle se cache. Elle regarde à droite, à gauche, et avise une grotte qui lui paraît vide. Elle bondit à l'intérieur, et se cache derrière le mur, observant les passants aussi discrètement que possible depuis l'intérieur. Pfiou, c'était juste ! Elle pouvait passer maintenant.
Elle jeta un coup d’œil à la grotte avant de sortir ... et s'arrêta. Il y avait des objets, des lits, des livres ... c'était clairement chez quelqu'un. Elle déglutit, et tira sa capuche sur son museau, embarrassée. Ah c'était pas possible, il fallait qu'elle sorte d'ici le plus vite possible, sinon -

Mais sa pensée fut interrompue. Car sur le pas de la grotte, un loup brun et blanc était apparu.

Elle s'arrêta, et le rouge lui monta immédiatement aux joues. Oh non, on venait de la trouver à un endroit où elle ne devait pas être. Elle ouvrit la gueule avec un air très embarrassé, tirant sur sa capuche pour se cacher le museau, super mal à l'aise.

"J-je suis désolée, je suis rentrée juste comme ça ... je savais pas que c'était chez vous, je ne voulais pas rentrer chez vous sans votre accord."
Elle s'excuse avec profusion, un air profondément anxieux sur le museau, mais soudain en relevant les yeux bleus de sous sa capuche, elle rencontre le regard ambré en face d'elle. Il n'as pas l'air fâché du tout. Il vient même de lui dire bonjour.

Roxane cligne des yeux, confuse. Il n'était pas fâché, alors qu'elle était rentrée comme ça chez lui ? Elle avale sa salive en le regardant, puis baisse la capuche de ses oreilles rouges, dévoilant sa multitude de piercings, et les gros mots cousus sur son choker et sa capuche.

"Euhm, salut." dit-elle avec un léger sourire timide.

Elle avait jamais rencontré quelqu'un d'aussi souriant au premier abord.

Il l'excuse juste comme ça. Elle cligne de nouveau des paupières de surprise, puis le regarde la contourner sans bouger, comme si elle avait soudain oublié comment se mouvoir. Il sourit, et il parle. Pas comme Louarn, qui était aussi du Refuge, et qui disait des trucs cools. Lui ... Madig, du coup, semblait ... gentil. Mais c'était pas du tout dérogatoire, l'entendre parler aussi joyeusement lui faisait monter comme une grosse bulle de chaleur dans le coeur.

"C'est vrai ? C'est moi qui l'ai fait ! Si tu veux je t'en fait un aussi ! Sauf si tu veux pas." dit-elle, les mots se déversant si vite qu'ils se tombaient presque les uns sur les autres.

Puis elle hoche la tête, et un sourire commence à illuminer son visage maussade.
"Oui, j'ai jamais été ici ! J'accompagne un pote !" dit-elle sans sa réserve habituelle. C'est bizarre, ça lui échappe d'un coup : mais il semble si gentil et avenant qu'elle n'hésite pas quand elle lui parle. Elle a pas l'impression d'être jugée, ou de pas être assez bien. C'est la première fois que ça lui arrive: quelqu'un qui l'accepte immédiatement, même dans ses erreurs, sans lui en vouloir.

Une vague immense d'affection pour ce Théodore Madig s'empare d'elle, et ses yeux brillent de joie.
"C'est trop beau comme prénoms ! Et toi aussi tu es trop beau !"
Ca aussi ça lui échappe, sauf que cette fois-ci elle commence à bafouiller de nouveau, embarrassée de cette pensée qui lui saute de la tête aux babines sans le filtre cool.

"Euhhh"
Elle manque de répartie, c'est terrible.
Et toujours aux pires moments, comme par hasard.

"... C'est quoi ?" demande-elle en montrant le livre qu'il vient de poser.

"C'est vrai ? Ouh ! "
Elle se redresse un peu sur la pointe des pattes pour observer le chapeau et le harnais, puis recule un peu. Comment est ce qu'elle poussait, la mousse ? Elle avait pas de terre. Elle sourit et secoue négativement la tête à la question d'après.

"Um-um" dit-elle, se faisant mignonne comme elle peut. Puis il la complimente et elle se recoiffe d'une patte avec un grand sourire gêné en le regardant sur le côté. Ca lui faisait super plaisir ! Elle avait jamais vraiment essayé d'être jolie, mais maintenant qu'il lui disait, elle se demandait si elle ne le serait pas un peu ?

"Roxane ! Mais tu peux m’appeler Rox si tu veux, ou Roxie ! Enfin tu m’appelles comme tu veux. "
Juste pour lui, elle faisait des propositions de surnoms, faisant miroir à ce qu'il avait dit lui. Et puis elle rougissait par la même occasion. C'était la première fois qu'on lui faisait autant de compliments, et ça lui montait à la tête de la seule manière qu'elle pouvait le comprendre : elle était amoureuse, c'était sur.

Il lui montre l'herbier et elle admire. Oh c'était JOLI. Et elle ne disait pas juste ça pour faire plaisir : les lettres étaient écrites soigneusement, les dessins étaient détaillés et colorés, et son museau se peint immédiatement d'admiration.

"C'est toi qui a fait ça, vraiment vraiment ? C'est trop beau ... wah, tu dois être super intelligent ... et tu as un talent au dessin ..." dit-elle d'une voix basse admirative.
C'était un crush.

"Dis euhm, si t'as du temps, tu voudrais bien me montrer ici ?" demande-elle en faisant un geste d'une patte avant vers l'extérieur.
Il avait posé la question, alors elle espérait qu'il allait lui proposer, mais juste au cas où, elle préférait proposer d'abord. Comme ça elle avait une excuse pour passer plus de temps avec lui. Juste tous les deux <3

Est ce que lui aussi était amoureux d'elle ? Elle lance un petit regard interrogatif sans contexte.

Elle lui sourit en rayonnant. Elle avait presque jamais proposé à quelqu'un de premier abord de l'appeler par un surnom, mais dès que Madig l'appela Roxie elle parut joyeuse. C'était hyper sympa, ça donnait l'impression qu'ils se connaissaient déjà un peu mieux quoi. Elle, elle l’appellerait Mad, décida-elle. Fallait juste réussir à le caser dans la conversation.
Il semble ravie d'être complimenté, et face à sa joie elle aussi agite la queue avec ses oreilles bien droites. Qu'est ce qu'il était joli et cool ohlala. Les autres considérations n'entraient pas vraiment en considération dans son crush. Il lui proposa ensuite de visiter, et elle fondait presque littéralement. Il était si gentil, et pourtant elle avait rien fait : elle s'était pas prouvée, elle avait pas du faire plein d'efforts pour paraître attrayante, ou différente de qui elle était. Est ce que c'était lui du coup, le vrai de vrai amour unique de toute sa vie ? Elle n'avait pas vraiment d 'élément de comparaison: en l'absence, ça lui paraissait bien être le cas.

"Vous avez des ruches, avec des abeilles ?" demande-elle, soudain tirée de son obsession débutante. Elle savait que les abeilles avaient des maisons avec d'autres abeilles, mais elle ne savait pas qu'on pouvait les avoir chez soi !

"Les ruches !"

Ils s'y rendent rapidement. Très rapidement, il est beaucoup plus grand qu'elle. Elle trottine avec ses pattes beaucoup plus moyennes pour rester à sa hauteur, puis s'arrête à ses côtés pour observer les ruches? C'était des espèces de boites en bois avec quelques petites ouvertures. Les abeilles volaient partout autour avec un bourdonnement tranquille. Roxane n'avait pas trop peur des insectes, alors elle écoute avec curiosité.

"Oh c'est mignon !" dit-elle joyeusement, lorsqu'il parle des abeilles qui dorment dans les fleurs.
Puis elle regarde de ses yeux bleus l'abeille qui vient faire un tour autour de Mad'. Elle s'approche d'elle et Roxane se raidit pour rester immobile, la regardant voleter en tournant lentement la tête pour pas la brusquer.

"Tu t'es déjà fait piquer ?" demande-elle, anxieuse de lui montrer qu'elle s'intéressait à lui.
Elle voulait tout savoir sur lui: tout, maintenant. Elle sent l'abeille voleter autour de l'une de ses oreilles et se retient de l'agiter.

"C'est quoi ton insecte préféré ?"
Qu'il lui dise plein de choses sur lui, pour qu'elle puisse lui plaire.