Reflet [Tiramisu // Libre]

[GALATYN]

Elle s'ennuie, ce matin, la jeune Galatyn.

La louve était allongée contre le sable de la plage, profitant du temps bien dégagé pour se faire un bon bain de soleil. Il faisait moins chaud que ces derniers temps, alors, elle profitait de pouvoir se prélasser à la lumière du jour sans avoir trop peur de prendre un coup de chaud. En vrai, elle aurait presque pu commencer à avoir froid avec certains coups de vent, si son épaisse fourrure ne la couvrait pas… Mine de rien, elle avait bien grandi. Atteindre l’âge adulte était une étape qui semblait bien proche, à présent. Elle avait si bien grandi ! Son souci d’apprendre à voler, cependant… bon, lui était toujours assez présent, mais lorsque son papa Chausson visitait, il faisait de son mieux pour l’aider à apprendre à voler. Ils étaient similaires, après tout- avec cette même fumée, il était plus aisé de se comprendre au sujet du vol.

Dans son coin, elle aimait s’entraîner, pour un jour surprendre sa famille en leur montrant qu’elle pouvait voler. Mais ce jour-là ne serait pas aujourd’hui pour elle. Non, en ce moment, elle n'était pas motivée à grand chose. L’ennui la plongeait dans une certaine incapacité à faire grand chose de productif. Même l’idée de jouer avec ses sœurs ne la tentait pas. Et la jeune ne se voyait pas partager son chant comme habituellement aux poissons et aux mouettes. Mais… rester ici à rien faire de la journée l’embêtait tout autant : gaspiller ses journées à se tourner les pouces, ce n’était pas son truc.

Alors, Galatyn se pousse à se lever, même si le cœur n’y était pas vraiment. La louve s’étire un peu, pour réveiller son corps ; et finit par décider de se dégourdir avec une petite marche. Au moins, c’est toujours mieux que de rien faire, pas vrai ? La gamine finit par se balader pendant au moins 15 bonnes minutes, à errer sans but particulier sur la plage- elle levait parfois la tête pour regarder les mouettes voler au-dessus de l’Atoll, parfois elle regardait la mer et ses poissons qui sautaient hors de l’eau, non-loin : mais rien de vraiment particulier lui sauta aux yeux… enfin, jusqu’à ce que quelque chose se mette à l’éblouir, lui brûlant un très court instant sa rétine avant de se décaler de cette intense lumière.

Et c’est là qu’elle vit, ces nombreux coquillages nacrés que la mer rejetait contre le sable. Si blanc, si scintillants, qu’ils reflètaient la lumière presque aussi fort qu’un rayon direct du soleil. Ça pique quand même- mais il n’y avait pas à dire, cela restait de jolis coquillages. La louve à la fumée scintillante finit par s’approcher de ces derniers, avant d’en prendre un : cela lui rappelait, quand sa chère sœur, Miraj, l’avait transformée en princesse de la mer et avait décoré ses cheveux de nombreux accessoires marins, de nacres, de coquilles saint-jacques. Mais Galatyn n’était pas des plus douées pour manier les accessoires d’elle-même, et ne s’imaginait pas tenter de recréer sa coupe de ses propres pattes. Doux souvenirs que jamais elle ne pourrait répéter sans sa sœur chérie, elle sourit quand même aux souvenirs de sa danse et de son chant qu'elle avait partagé sur la plage ensemble, ce jour-là, sous la lumière magique que Miraj avait réussi à créer rien que pour ce moment.

La louve finit par s'asseoir, sa queue balayant doucement le sable fin, tandis que son regard se concentra de nouveau sur ces morceaux scintillants. Au fond, elle ressentait cette envie de s’amuser qui la brûlait. Mais, que faire, seule, avec ces petits accessoires ? Ses sœurs étaient ailleurs, maman aussi, ses papas n’étaient pas là… Elle n’avait pas vraiment d’amis avec qui jouer, comme ça. Un long soupir s’échappe de ses lèvres, la frustration de l’ennui commençant à la prendre- et d’un geste rapide de la patte, elle jette son coquillage derrière elle, le pauvre coquillage se retrouvant coincé entre les feuilles d’un palmier. Bien que c’était un geste sur le coup, peu réfléchi, Galatyn ne put s’empêcher de garder son regard planté dans ce même arbre, l’espace de quelques instants.

Malgré sa nouvelle position cachée, la louve arrivait toujours à le voir- parce que celui-ci arrivait toujours à recevoir la lumière du soleil. Et de ce fait… le côté nacré pouvait se permettre de refléter cet éclat de lumière, de toujours exister en brillant de mille feux.

Cela la fait réfléchir, l’espace d’un instant. Ce coquillage lui rappelle un peu sa fumée brillante : quoiqu’elle faisait, cette partie d’elle brillait toujours, quel que soit le moment de la journée. Réussir à louper sa présence la nuit relevait d’une sacrée malchance, ou d’un très gros problème d’attention. Mais tout le reste était si discret, sans cette lumière. La gamine se demandait bien ce qui se passerait, si tout brillait constamment comme elle. Est-ce qu’on la verrait encore ?

Et puis… la gamine commença à regarder de nouveau les coquillages échoués. Puis, le coquillage dans l’arbre. Son regard fit quelques allers-retours entre les deux- et une idée se créa dans sa petite tête. Enfin quelque chose qui lui donnait de la motivation, une envie d’être… productive à sa manière. Sans attendre, se relevant à vive allure pour courir, Galatyn retourne en vitesse chez elle, récupérer quelque chose : du fil. On trouvait tant de choses qui s'échouaient sur le bord de la mer- tout pouvait devenir un jouet ou un jeu, quand on était enfant. Et adulte, tout peut avoir son utilité. Une fois l’objet recherché attrapé dans sa gueule en grande quantité, la jeune louve se rua de nouveau dans le sens inverse du chemin qu’elle venait de prendre, pleine d’énergie à l’idée d’exécuter son petit rêve du moment. Sa course maladroite, pressé, failli la faire trébucher et tomber à de maintes reprises- mais cela n’avait pas d’importance pour elle, elle n’avait plus envie de retomber dans les bras de l’ennui.

Une fois le coin à coquillages en vue, la louve en fut assez distraite pour se louper une fois de trop et plongea presque dans le sable, glissant un court instant à se retrouver pleine de sable : mais rien de bien méchant, Galatyn n’a qu'à secouer son poil et battre un peu ses ailes de fumée, et le plus gros fut débarrassé ainsi. La louve savait que ce qu’elle allait faire allait prendre un moment- il fallait donc être le plus à l’aise possible. De ses griffes, qu’elles soient celles de ses pattes avant ou de ses ailes, la gamine pousse, balaye les coquillages sur le sable pour trouver ce qu’elle cherchait : les plus beaux coquillages. Le moment où elle mettait la patte sur l’un d’entre eux, Galatyn se laissa un moment pour les observer, avant de le coincer entre deux griffes.

Et tac. Un trou était créé dans le coquillage.

Le fil était ensuite récupéré : elle le coupa avec l’aide de ses crocs pour en récupérer un très long morceau, avant d’y attacher le premier coquillage tout au bout, bien fermement, avec plusieurs nœuds pour s’assurer de la solidité. Une fois que Galatyn était sûre de son travail, elle créa un espace libre entre le premier nœud tenant le coquillage, et un second nœud créé pour bloquer cet espace. Doucement, d’autres coquillages furent trouvés, récupérés, percés, chacun son tour. Chacun eut le droit de se voir troué, avant de se faire glisser sur le fil, et d’avoir un nœud pour les coincer à leur place.

La louve s’amusait à faire une guirlande… une jolie guirlande de coquillages nacrés, des plus beaux : seuls ceux qui pouvaient bien refléter le soleil auraient le droit de briller avec les meilleurs. Et Galatyn voulait s’assurer que son travail soit bien fait. Elle voulait la perfection dans sa création. Toute son énergie et son attention étaient donné à ce projet coup-de-tête ; ses rares pauses n’étaient là que pour se dégourdir quand son corps commençait à souffrir des répétitions de ses gestes et réclamait du mouvement, ou pour se permettre de se désaltérer et manger ce qu’elle pouvait grignoter dans la jungle de l’Atoll. Mais jamais elle n’allait trop loin, pour ne pas perdre sa guirlande.

Toute la journée fut consacrée à sa création. La louve n’avait même pas hésité à décorer un peu plus sa longue guirlande, avec d’autres coquillages moins scintillants entre les nacrés mais avec leur petit charme. Certains n’étaient même pas brillants- mais ce n’était pas grave, ils aideraient à mettre en valeur ceux qui sont les plus jolis. Une longue création, dont sa création s’était étirée sur l’après-midi, puis le soir. Si long, oui, mais… pour Galatyn, cela valait le coup. Elle n’était pas très douée pour créer, mais cette création la rendait heureuse, y ayant versé coeur et âme dedans même si tout était parti d’une bête idée. Et la dernière étape…

La louve à la fumée scintillante finit par se lever, trainant avec elle un bout de la guirlande dans sa gueule, avant d’approcher le palmier dans lequel le premier coquillage avait été projeté. Son regard se leva un instant jusqu’au plus haut de l’arbre, avant d’hocher la tête- elle allait le faire, elle allait faire briller cet arbre comme elle brillait ! Elle fait un premier tour autour du tronc, préparant à l’enrouler de sa guirlande de coquillages, et plusieurs autres tours étaient fait, sans pour autant serrer encore : après tout, il fallait ensuite amener la corde tout en haut. Et cela… Galatyn tenta de grimper à l’arbre, avec l’aide de ses griffes : mais cela n’était pas des plus simples, tant elle était grande et peu agile. Alors, elle déploya ses ailes pour y planter ses griffes supplémentaires, au moins comme support ; et utilisant toutes ses forces en elle, la louve se hissa, serrant toujours le bout de la guirlande. Jamais elle ne devait lâcher, ou il faudrait tout refaire. Doucement, avec Galatyn, le reste de la guirlande la suivit, s’enroulant contre le tronc de l’arbre au fur et à mesure qu’elle grimpait.

A défaut d’être agile ou de savoir encore bien voler, elle était forte, endurante. Grimper cet arbre n’allait pas être la pire chose qu’elle ait eu à faire. Doucement mais sûrement, les griffes plantées dans l’écorce, la gamine s’avança, grimpa, atteignant enfin le coquillage envoyé en premier- et les longues feuilles du palmier, avec cela. Cette fois, c’était aux griffes sur ses ailes de bien s’accrocher, tandis qu’elle libéra une de ses pattes pour prendre la corde, l’attachant solidement à l’une des feuilles, avant de la faire passer entre les autres feuilles. Et enfin…

Galatyn se laissa tomber, battant des ailes avec force pour tenter d’alléger la chute, même si elle ne put s’empêcher de tomber sur le dos malgré tout, un peu lourdement, avec un petit cri. Ça fait mal, le sable pour tenter d'arrêter une chute, mine de rien… La louve à paillettes se releva malgré tout, avant de tourner son regard vers le palmier décoré.

Autour de celui-ci et de ses feuilles, les coquillages l'encerclaient, le décoraient- et ces mêmes coquillages reflétaient le soleil qui avait commencé à se coucher, en se cachant de l’autre côté du ciel, derrière la mer. Galatyn sourit, rigole, avant de rouler pour se mettre sur le ventre et regarder un peu sa création. Certains coquillages n’étaient pas assez chanceux pour avoir le soleil, d’autres l’étaient et renvoyaient au soleil ses derniers rayons de la journée. Ah, qu’elle aurait voulu le voir briller plus longtemps aujourd’hui, son palmier ! Mais cette création avait été longue. Peut-être que demain, elle pourra le voir briller toute la journée.

Un court instant, son regard part vers l’horizon, dans la même direction que celle du soleil orangé.

Galatyn se demandait si le soleil verrait aussi bien son arbre que lui voyait sa lumière, comme un second petit soleil.

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