Le meilleur Papi - Teddy

Hey, Papa

Est-ce que toi aussi, t’as pleuré, quand t’as appris qu’on était là, avec Gathou et Prudy ?
Est-ce que tu seras heureux, en apprenant qu’il est là ?

Elle avait lu dans un livre que les bébés pouvaient entendre les sons extérieurs.
Alors elle fredonnait, souvent, en cachette, des chansons douces, rien que pour lui.

C’était un il, elle le sentait, et elle le gardait secret, sous sa longue cape, presque jalousement.
Son tout petit.
Leur tout petit, à elle, et à Violette, que rien ni personne ne viendrait leur prendre.

Sa gueule s’ouvrit.
Encore, elle chanta pour lui, les yeux humide et le coeur battant, si fort, débordant d’amour pour cet enfant à naître.
Son tout petit.

C’était le cas de le dire, il était encore tout petit qu’il se faisait discret. Son corps subissait des changements presque imperceptibles, pour un œil qui n’aurait pas été exercé, ou pour quelqu’un qui n’aurait jamais senti l’odeur d’une louve portant la vie.
Pour la licorne, c’était bouleversant.
La fatigue et les nausées n’étaient qu’un moindre mal et elle les lui pardonnait, bien sûr.

Tout n’était pas rose pour autant : Elle avait peur, parfois, de ces autres changements qu’apporteraient l’arrivée de cette petite vie, tant espérée, et des questions qui se posaient, aussi. Est-ce qu’elle sera une bonne maman ? Est-ce qu’il sera heureux, dans ce monde, comme elle même l’était ?
Violette, lui, sera génial, comme il l’avait toujours été.

Est ce que t’as eu ces peurs là aussi, Papa ?

Onyx se tut, un sourire sur les lèvres, et traversa le refuge, sa cape retombant sur ses flancs.

Ce qui était, pour l’instant, secret ne le serait plus longtemps. Elle avait préféré attendre d’être certaine, et d’accepter que ce soit réel, aussi, avant d’en parler, par peur de s’emballer, trop vite, de décevoir et de se décevoir aussi.
Mais il était là, son tout petit, c’était certain, maintenant.

J’aimerais tellement que tu puisses le rencontrer, j’suis certaine que tu feras un super Papi.

Il était fatigué, son Papa, et c’était pour ça aussi, peut-être, qu’elle ne voulait plus garder ce joli secret plus longtemps.  
Elle n’avait pas vraiment réfléchi à la façon dont elle souhaitait lui révéler sa grossesse : Ca ne lui ressemblait pas, de toutes manières, elle avait toujours été spontanée.
‘Faudrait juste faire attention de pas le faire claquer.

Est-ce que tu seras surpris, Papa ?
Ou est-ce que tu t’y attends, même un peu ?

Onyx s’avança, droite, un sourire radieux sur les babines.

- Papa ! J’ai un truc super cool, et super important à te dire ! J’crois que t’es pas prêt, alors tiens toi bien sur tes quatre papattes !

Y’a un sourire sur tes babines et l’éclat des larmes qui montent dans tes yeux…
T’as vite compris, que l’annonce ne sera pas anodine.

C’était le moment, celui qu’elle n’avait pas préparé et pourtant, elle était prête à se jeter à l’eau avec toute la spontanéité qui la caractérisait, sans crainte.
Y’avait pas de peurs a avoir, face à son papa qui avait su accepter ses pires erreurs.
Il ne pourrait que s’enthousiasmer d’une réussite.

La petite louve s’assit face à lui, sans se défaire de son sourire, les yeux brillants, pourtant, comme un miroir de ceux de son vieux père.

- Alors voilà. Tu connais p’tet Violette, Vio. C’est un grand loup noir et… violet, qui passe souvent au refuge. C’est mon meilleur ami, depuis super longtemps, un ami comme tout le monde devrait avoir !

Y’avait pas d’ambiguïté à avoir, là dessus, et elle préférait poser les bases pour la suite de son récit, toujours dans l’objectif de préparer son vieux père.

- Et ça va ptet te paraître dingue mais…

Elle rit de la façon dont elle s’apprêtait a annoncer les choses.

- J’lui ai demandé si il serait ok pour qu’on ai un enfant ensemble. Il a été surpris, mais il a dit oui, ce fou ! Il a déjà deux filles mais encore tellement d’amour à donner.

Cette fois, les larmes perlèrent aux coins de ses yeux.

- Y’a… y’a quelques jours, j’ai compris que j’suis enceinte et bordel j’suis tellement contente et il est tellement content aussi ! Bon du coup j’annonce même si tu l’as sûrement compris : Tu vas être Papi !

Sa voix s’étrangla et Onyx s’essuya les yeux du revers de la patte.
Elle avait beaucoup parlé, comme à son habitude mais, eh, y’avait tellement à raconter, tellement de sentiments, si puissants, qu’elle ne savait pas comment exprimer autrement.
Tant de moments heureux à venir.

Hey, Papi, alors, toi aussi, t’es content ?

Ta voix tremble autant que la mienne, sous l’émotion.
En ce moment, Père comme fille, nous n’avons plus l’air si bravaches.

Ses courtes pattes se resserrèrent autour des épaules solides de son Papa qui, bien sûr, et elle avait eu raison de n’pas en douter, se ravissait de cette nouvelle sûrement surprenante.
Y’avait eu que cet ami, le père de son tout petit, à qui elle avait avoué la frustration de ne pas avoir pu adopter et de voir les autres s’entourer d’enfants, quand elle ne pouvait pas, encore, envisager d’en concevoir.

C’était peut-être de la folie, de porter la vie, lorsque l’on était si petite…
Mais c’était alors une folie si douce qui faisait couler des larmes de joie sur les joues, et qui, doucement, d’un contact aussi délicat que les ailes d’un papillon, là, dans son ventre, lui disait que tout était possible, pour celle qui combattait ses peurs.

Elle s’accrochait à cette idée.

Onyx rit, entre les larmes, son visage mouillé enfoui dans le pelage épais de son Papa.
Du Papi de son tout petit.

- C’est un garçon, j’en suis sûre, je le ressens. J’aimerais que tu lui donnes un prénom, si tu veux bien.

Désolée, Violette, mais c’est peut-être, c’est une possibilité que je n’espère pas, mais qui existe, la seule chose que pourra lui offrir son Papi, à notre tout petit.

- Pour avoir une tripotée de p’tits enfants, il aurait fallu me faire un peu plus grande, mon p’tit Papa !

Mais v’la qu’il lui foutait le doute, son Papa.
Elle s’y connaissait pas des masses, Onyx, en reproduction, gestation et… Ce genre de choses. Ainsi, elle avait pensé que, puisqu’elle était petite, bien plus que les autres louves, elle n’aurait pas été capable de porter plus qu’un louveteau.
Ce qui ne semblait pas acquis, pour son père.
Ah.

Un peu perturbée, elle réagit à peine à la boutade, mais bien plus au nom donné.


Marty.
Ce sera son nom, alors.
Marty.

- C’est parfait, Marty.

Elle espérait que ce nom là plairait aussi à Violette.
Il lui tenait tant à coeur qu’il soit celui de son tout petit désormais. C’était bien plus que quelques lettres qui sonnaient joliment à l’oreille, pour elle.

Son sourire s’élargit, lorsqu’elle le sentit bouger.
Lui, ou un autre : Le doute était tenace, désormais.

- Je crois que ça lui va, aussi.

Ils seraient, ainsi, sur trois générations, dotés d’un y dans leur prénom, aussi.
C’était amusant, ça lui plaisait.

- Papa, j’vais te paraître bête mais… C’est possible qu’il y en ai plusieurs ?

Son coeur s’emballa, un peu, par ce qu’elle n’avait pas vraiment envisagé cette éventualité et par ce qu’elle ne savait pas si elle devait s’en réjouir ou s’en inquiéter.
Peut-être que ce serait bien, que Marty ne soit pas tout seul.

Son coeur, qui avait connu tant de choses ces derniers temps, se mit à battre un peu plus fort.
Sans se lancer dans de grands discours sur la biologie, ou ce qui s’en rapprochait, son père venait de balayer, pour de bon, ce qui pour Onyx avait été une certitude.
Elle se sentit bête, un peu, d’avoir pensé que le nombre de bébés était proportionnel à la taille de la maman. Combien de choses ignorait-elle encore ?

Il avait été soigneur, ou quelque chose qui s’en rapprochait et dont elle avait oublié le nom lorsqu’elle était… une louve qui vivait et pensait seulement à travers des sensations, des sentiments, des interprétations.
Elle écoutait son corps, mais son corps, justement, semblait capable de lui faire de belles surprises.

Sa gueule se fendit d’un sourire franc.

- Alors levons c’doute une bonne fois pour toute !

Si il s’avérait que Marty avait une soeur ou un frère caché, il faudrait alors préparer cette arrivée là aussi.
En commençant par lui trouver un super prénom.

Et la voilà à espérer, porter plus qu’une seule vie.

Découvrir qu’elle portait la vie avait été un grand bouleversement.
Découvrir qu’elle portait deux vies, lui procura le même sentiment qui mouilla ses yeux, noua sa gorge et fit battre son coeur un peu plus fort.

Il y avait son tout petit, mais aussi un autre, encore plus petit.
Guidée, par son père, Onyx fit sa connaissance

- Oh-

Les crocs serrés, elle ne parvint pas à s’exprimer, pas tout de suite, et s’essuya les yeux, du revers de la patte.
Et elle rit, en même temps qu’elle pleurait.
Encore.

- Je suis si contente ! C’est une si belle surprise.

En cet instant, la crainte de la mise bas fut oubliée au profit de quelque chose de bien plus beau, alors que la licorne ne cessait de se répéter, dans sa tête, ce nombre qui lui paraissait incroyable.
Deux.
C’était un bonheur deux fois plus grand.

Cessant d’essuyer des larmes qui n’étaient, de toutes manières, pas décidées à s’arrêter d’inonder ses joues, elle préféra user de ses pattes pour enlacer, à nouveau, son vieux père.

- Merci, merci pour tout mon papa !

Sans lui, elle n’aurait pas su avant la naissance, peut-être. Mais ça, c’était encore anecdotique, pas grand chose par rapport à tout ce qu’il avait pu lui apporter et la joie qu’elle avait de partager cet instant, si grand dans sa vie avec lui, et d’en avoir partagé bien d’autres, auparavant.

Tout comme il l’avait été pour elle, elle s’efforcera de devenir cette présence aimée et rassurante avec ses propres enfants.

Elle eut un petit rire, entre les larmes, le museau contre le pelage tout doux de son papa.
Tu es bien décidé à me faire pleurer, aujourd'hui, hein papa ?

- Ca me fait plaisir de le partager avec toi, ce moment. Vraiment !
Je crois que je peux pas imaginer, non, ce que c'est... Par ce que tu vois, ils sont pas nés, encore, mais je les aime déjà tellement. Alors, qu'est ce que ce sera, quand ils seront là ? J'ai hâte de découvrir qui ils sont, ce qu'ils aiment, ce qui les feront rêver, et de les accompagner dans cette aventure incroyable qu'est la vie...

Onyx releva des yeux brillants vers lui.

- Comme tu l'as fait pour nous. J'n'aurais pu espérer avoir meilleur daron. C'est ce que j'dis à tous ceux que je croise et qui sont assez sympas pour m'écouter.
T'as toujours été là pour nous, pour moi, même quand j'ai fait des grosses bêtises. T'as toujours été un pilier et tu m'as sûrement évité d'en faire d'autres, des bêtises.

Tout ça, c'est précieux. Ma vie n'peut qu'être belle, quand elle est comblée par tant d'amour et de belles choses.

Il avait forgé celle qu'elle était aujourd'hui et la mère qu'elle sera demain, en lui transmettant tant d'amour et de belles valeurs.
Onyx prit ses pattes avant entre les siennes.

- J'nous en souhaite bien d'autres, des moments heureux, mon papa.

Des moments ensemble, de rire et de larmes de joies.
Des moments en famille, avec eux, les petits qu'elle portait, avec 'Gathou, avec Prudence, avec Ted et tous ceux qu'ils aimaient.

C'était ça, qu'elle leur souhaitait.
N'était-ce pas sa définition d'un bonheur parfait ?

L'Amulette.
Elle avait toujours vu son père la porter : Peut-être par ce qu'il la possédait bien avant qu'elle ne vienne au monde.
Elle avait vécu, cette amulette, polie, dégradée par le temps. Peut-être par la pluie et la boue, aussi, et trop d'aventures vécues, sans jamais être utilisée.
C'était un objet, de base, précieux, qui avait pour Onyx une valeur encore plus singulière.
L'Amulette de Papa.

Onyx la garda un instant contre ses coussinets, les doigts de sa patte délicatement refermées sur ce qu'ils pouvaient saisir. Sa vue se brouilla, encore, et un sourire ému tordit ses babines.
Elle porta l'objet contre son coeur, mêlant le fil qui le retenait à ceux qu'elle avait déjà à l'avant de sa cape.

- Je l'aime tellement !
Merci Papa.

Elle s'avança pour l'étreindre.