[Event] Pour Yurai !

C'était un sentiment.
Pas un mot, pas un bruit, pas un message, mais juste un sentiment. Le sentiment qu'aujourd'hui était un jour important, un jour de rassemblement, un jour où quelque chose allait se passer. Et il n'y avait pas mill choses qui le perturbaient en ce moment : les seuls événements dignes d'intérêt ces derniers jours avaient été les precursors et l'absence de Yurai. Le loup gris et vert regarda autour de lui. Il était à la forêt pluviale, couché dans un arbre donc les racines formaient une sorte de bac, endroit où il avait élu domicile ces dernières années. Il appréciait beaucoup de lieu, depuis qu'il l'avait découvert. Mais ces derniers temps, il s'était teinté d'une tristesse qu'il aurait aimé pouvoir fuir. Mais qu'en même temps il appréciait tout de même. Ca collait bien avec l'ambiance de ces derniers jours. La pluie en continue. Les couleurs sombres. Le scintillement des goutes sur les feuilles.

Quelques gouttes justement lui tombèrent sur le museau, glissant sur son poil doux avant de tomber au sol. Il se leva et s'ébroua, et tout autour de lui le sol se mit à se changer en boue. L'avantage de ces arbres à la large verdure, c'était que la pluie, à part à certains endroits où il y avait des éclaircies, n'atteignait pas le sol. C'était toujours paisible, et le silence envahissait tout.

Le loup commença à se diriger lentement vers la fontaine... L'ancienne fontaine. C'était un pincement dans sa chaire qui le dirigeait à cet endroit. Ses yeux se fixaient sur le bois sombre teinté d'orange et de noir en fonction de l'orientation. La pluie s'arrêta, et le clapotis qui résonnait sur la futaie avec. A la place, bientôt, quelques flocons atteignirent le loup gris. Sh'Eym eut un léger sourire. C'était un très bon temps. La neige allait étouffer les sons, et le brouillard qui était tombé allait aider à cette tâche... Tout était silence.

Tout n'était que silence.

Pris d'une vague de passion, il commença à trotter doucement vers sa destination, longeant la rivière qui alimentait d'un doux bruit d'eau sa course. Il glissait doucement autour des pierres, sautait par dessus les fourrés trop denses, et se glissait entre les troncs tel un gros chat des neiges. Il était fin et particulièrement agile pour un loup, même s'il valait mieux ne pas lui demander de porter des cailloux. Il risquait d'avoir autant d'efficacité qu'un poisson essayant de grimper à un arbre. Au bout de quelques minutes de cette marche, l'horizon, entre les arbres, commença à se teinter de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel... Ou presque. Le loup s'avança et se glissa entre les arbres, avant d'atteindre le lieu. Devant lui se dressait une immense statue. Une statue de Yurai, dotée de larges ailes, resplendissante de beauté. Et, tout autour, des dieux. Les dieux. Qui observaient les alentours. Il en manquait un - ou plutôt une - selon ses souvenirs, la orange. Il ne savait pas ce qu'il s'était passé, mais ça n'était pas bon signe... Il fronça les sourcils. Toutefois, il était particulièrement heureux de voir ces divinités rassemblées ici pour Yurai.

Il s'assit. Il n'osait pas s'avancer plus, lui qui était solitaire, sans clan, sans attache particulière, mais voulait seulement voir le retour de celle qu'il estimait plus que tout...

Fut un temps, Suète aurait pu être athée.
Désormais, cette simple perspective la faisait sourire. Après deux passages de glowstick et la rencontre du messager du Dieu Rouge pour le prier, aucune autre vérité ne dépassait à ses yeux celle que prônait la gente divine. C'était à cela qu'elle pensait en traversant la Forêt Pluviale, retournant vers le sanctuaire de la corneille après être allée voir Aka. Elle aussi, elle commençait à bien la connaître, cette forêt.

Quand elle traversa la cascade d'un souple bond félin - bien qu'un peu lourd sur la fin, la louve rouge n'était plus toute jeune - la guerrière n'en cru pas ses yeux. Cinq des sept divins se tenaient devant elle, droits et fiers, réels comme jamais elle ne les avait vus. Jusque là, elle avait été confrontée aux messagers d'Aka - et de lui seul, peut-être même aurait-elle pu douter de l'existence des cinq autres. Ils étaient alignés comme s'ils les attendaient, ou peut-être attendaient-ils la déesse orange, qui manquait à l'appel ?

Suète s'assit face à eux, respectueuse et silencieuse.

Aendil n'avait pas toujours été très pieux.
Lorsqu'il était encore un Zélote Séide, il priait à longueur de journée et vouait aux Divinités le plus grand respect. Puis, un jour, il s'était rendu coupable du plus grand des affronts. Il avait renié la meute crée par les Tout-puissants pour fonder la sienne, crachant au passage sur les valeurs qu'ils avaient insufflées à la marionnette destinée à diriger les Séides. Au début, il ne l'avait pas perçu comme une insolence, n'ayant même pas conscience de ce qu'étaient réellement les Séides. Maintenant, il ne pouvait s'empêcher de sourire à ce souvenir. Sans néanmoins le regretter : Les choses étaient faites et, malgré tout, ils avaient pu tendre une patte secourable à tous leurs camarades qui ne se sentaient pas à leur place dans la meute originelle. Devenu membre du conseil, il avait moins prié. Pas le temps pour ça. Peu à peu, ses pensées s'étaient détournées de ceux qu'il avait jadis adulés pour se porter sur ses propres problèmes. Il avait même perdu foi en eux lorsque l'hiver, le pire qu'il ait pu connaître, s'était installé sur leurs terres, les condamnant avoir faim et froid.

Maintenant, il ne savait plus ce qu'il en était. Il avait vieilli et perdu cette fascination de gosse pour tout ce qui le surpassait. Alors il marchait, il suivait ses camarades Brethens qui marchaient jusqu'à la forêt pour répondre à cet appel. C'était important, il le savait. Pour la déesse mauve et ses disciples. Si il avait pu, il se serait rendu dans le temple d'Ao pour la prier comme l'avaient fait d'autres avec leurs propres divinités. Hélas, son ancienne condition d'aveugle l'avait rendu incapable d'un tel voyage : A coup sûr il se serait perdu en chemin. Peut-être même aurait-il été tué par un prédateur.
De toutes manières, c'était trop tard.

Son œil bleu se promena sur les loups déjà arrivés. S'y trouvait une louve de feu, Valka et une petite louve qui lui ressemblait drôlement -sûrement sa fille, il se demandait bien qui était le père- un solitaire qu'il ne connaissait pas, le loup-manchot qu'il avait croisé quelques années plus tôt dans les ruines du désert et Suète. C'est de cette dernière qu'il s'approcha pour se glisser silencieusement à ses côtés.
Evidemment, les divins étaient là. Enfin presque tous, manquait Dairo et, évidemment -j'arrête avec les virgules, promis- Yurai. Ce n'était pas normal. La déesse orange se devait d'être là, parmi ses frères et sœurs.
Aendil ferma l’œil et pria silencieusement pour sa venue.

Il était temps de faire renaitre la déesse violette.
Après être revenu de la fontaine de son dieu, Mido, Caïn avait quitté les deux autres mâles qui furent momentanément ses compagnons de prières, pour aller chasser une proie à offrir à son dieu. Il s'était retrouvé non loin de la lande, marchant dans l'herbe gelée par le froid, faisant craquer les brins sous ses coussinets.
Il avait aperçu un troupeau de moutons à la dense laine, les avait longtemps contemplé de sa place. Puis il l'avait remarqué, lui.
L'agneau.
Un lainage aussi blanc que la neige, mais plus éclatant encore. Il semblait narguer l'hiver, avec ce petit ventre rebondit caractéristique des enfants qui terminaient de se repaitre du lait maternel.
Lui.
Le loup avait dressé la tête, ses babines remontèrent pour dévoiler ses crocs blancs. Il fit le tour du troupeau à pas lent, ne forçant nullement sur sa patte. Pour mieux les regarder, apprécier la blancheur de ce petit être si pur, si innocent.
Et puis, petit à petit, il s'était rapproché. Il était resté tapi dans les herbes, s’aplatissant au sol pour ne pas se faire repérer. Il la jouait tout en finesse, en stratégie. Puis il avait jaillit, brusquement, attrapant entre ses crocs une frêle patte de l'animal. Les brebis prirent la fuite, certains béliers le chargèrent.
Mais trop tard, l'agneau, il avait déjà tué. Il avait profité de l'agitation pour lui briser la nuque, mettant un terme à sa si courte vie.
Et maintenant, le chasseur blessé repartait, trainant sa proie. Ses flancs étaient douloureux, un des mâles du troupeau était parvenu à le toucher. Soit, tout ceci était sans importance par rapport aux évènements qui se tramaient là.
Après plus d'une heure de marche, le gris rejoignit le delta embourbé. Il alla jusqu'à la fontaine de son dieu, y retournant à nouveau pour alors déposer l'agneau sur la pierre.
En guise de remerciement.

Une fois ceci fait, car il tenait réellement à ce que ça le soit, il repartit pour assister au dénouement de tout cela. Il devait y être, lui aussi. Il voulait y être.
C'est ainsi qu'il se retrouva dans la forêt pluviale, les traits fatigués et plusieurs parties de son corps douloureuses, notamment ses côtes et sa patte arrière gauche.
Dans une marche rapide, il rejoignit ce qui avait été la fontaine de Yurai, et qui devait le redevenir absolument.
Pour tous les loups et louves possédant le glowstick violet. Notamment Hylda, son amie d'enfance, celle qu'il considérait comme sa sœur.

Il traversa la cascade sans broncher lorsque l'eau froide vint rincer son poil gris, collant ses cheveux à son crâne.
A l'approche des dieux, Caïn ralentit un peu plus son pas. Ils étaient tous présents. Ou presque. La déesse orange, Dairo, manquait à l'appel. Le gris serra les crocs, mitigé face à cela. Apparemment, elle avait usé de beaucoup de force pour répondre à ses disciples. Et si les Precursors profitaient de cette faiblesse pour s'en prendre à sa fontaine ? Non, elle était une des originelles, ils ne feraient point une chose pareille.
Néanmoins, rien ne garantissait qu'ils ne briseraient pas à nouveau la fontaine de Yurai. Le Bêta Séide espérait que tout cela n'aurait pas était vain, que les dieux protègeraient la fontaine de leur sœur pour la protéger des attaques futures.
Il s'avança encore, jusqu'à se stopper lorsqu'il atteignit la petite foule de loup déjà présente. Il arqua le cou, baissant la tête en une révérence solennelle à l'égard des dieux, en guise de salutation. Il s'installa ensuite parmi ses semblables, attendant patiemment la suite des évènements, car de toute façon il ne pourrait rien faire de plus que faire acte de présence en ces lieux.
En attendant, il n'avait qu'à lever les yeux vers la nouvelle statue de la déesse Yurai, contemplant le somptueux travaille effectué par les dieux, promenant ses yeux sur les longues ailes qui grattaient presque le sommet de la cavité.

Il était vrai que Tequeela s'était un peu laissée dépasser par les évènements. Elle n'avait suivit que de loin les aller et venus de sa meute pour reconstruire. Elle aurait aimer aller parler à Ao, sa déesse Dragonne. Elle aurait aider aider Valka, la soutenir. Parce qu'en qualité d'amie, ce qui lui était rare tout de même, et surtout d'Alpha, elle savait ô combien cela affectait la Bêta brune. D'autant plus qu'elle était disciple de la Corneille disparue. Malheureusement, Pumpkeen, sa dernière-née âgée aujourd'hui d'environ six mois avait passé une semaine difficile, tombée malade après son escapade chez l'Esprit de Noël, entre fièvre et vomissements, la loupiote n'avait eu que très peu de repos et Tequeela avait eu du mal a soigner sa propre fille, trop inquiète pour réfléchir convenablement. Elle devait donc à Valka, Caïn, Fireheart et Hylda d'avoir été très présente pour la meute. De ce qu'elle en avait vu en tout cas. Et elle n'avait pas vu grand chose, ni grand monde, à part Pumpkeen, qui enfin, parvenait à respirer convenablement et marcher. Alors la louve anthracite avait décidé d'emmener ses enfants là où tout le monde se retrouvait. C'est donc entourée de Skaër, Pumpkeen, Leemoncello et Adèle qu'elle rejoignit la forêt pluviale. Enfin, elle le pensait. La réalité était tout autre car seule Pumpkeen suivait vraiment. Sans doute les autres traînaient-ils ? Ou bien ils avaient changés d'avis.

Leemoncello n'avait de toute façon plus confiance en lui et refusait presque systématiquement de se mêler au reste des Séides. Lorsque mère et fille arrivèrent, un silence de plomb rendait le lieu un peu glauque. Tequeela adressa un salut tout en déférence à sa déesse puis alla s'assoir auprès de Valka, sans un mot, mais en la saluant du museau avec un sourire mince. Elle savait que Valka avait besoin d'espoir. Elle aussi d'ailleurs, car si l'on ne parvenait pas à faire revenir Yurai, cela risquait d'engendrer de gros problèmes pour la suite. Enfin, sauf si Rengar avait raison. Pour penser à autre chose, l'Alpha au longs cheveux noirs fixa sa déesse un instant, puis remarqua que la Renarde manquait à l'appel. L'inquiètude traversa son regard. Ce n'était pas normal...
Quant à Pumpkeen, elle ne quitta pas les pattes de sa génitrice d'une semelle, trop impressionner par les divinités apparues devant les mortels. Néammoins, la déception la submergea alors qu'elle ,e voyait pas Dairo. Sans savoir ce qui se passait vraiment, la louvette au pelage gris et bordeau se mit à penser très fort à la déesse orange et à espérer qu'elle arrive très vite. Pumpkeen se sentait particulièrement proche de cette déesse futée et narquoise depuis que Maman lui avait raconter les histoires sur les dieux et lui avait expliqué tout ce qu'elle devait savoir sur eux.

Mâat et Sekmêt, elles, étaient là depuis un moment, en retrait et silencieuses, observatrices et priantes. Mâat priait Kiro surtout, dieu emblême de sa famille. Et Sekmêt, qui n'avait vraiment su encore, vers qui se tourner, priait pour tous, plus généralement, mais avec tout son coeur.Dans un autre coin de la grotte, silencieux et inquiet, était assis Both, officiellement Zélote de tout son coeur, officieusement glandeur et non-croyant. Voir les divinités en vrai, devant lui et aussi magistrales lui avaient coupé la chique. Both ne savait plus quoi dire ou penser et se rendait compte que ses actions de mauvaises fois pourraient bien lui retomber dessus. La disparition de Yurai ne le perturbait au contraire pas du tout. Seul Mido retenait toute son attention. Mido était celui de qui il avait obtenu son glowstick. Même s'il le cachait à tous, pour garder une part de mystère, c'était bien au Raptor qu'il était affilié. De toute façon, il n'aurait jamais accepté de dépendre d'une femelle, fût-elle déesse ou non. Donc Yurai, hein, pour ce qu'elle l'interessait...

♦ Romance

Elle se demanda ce qu'elle faisait ici.
N'ayant jamais rien ressenti de tel, elle avait suivi son instinct lorsque ce petit quelque-chose au fond d'elle-même lui avait ordonné de guider ses pas vers la Forêt Pluviale. Sans trop savoir à quoi rattacher cette impression. Car au fond ce n'était que cela, une impression. La jeune louve s'était donc dirigée vers ladite forêt, constatant au fur et à mesure de son avancée que d'autres odeurs s'entremêlaient sur les sentes menant au coeur des bois. Le paysage était sublime. Des blocs de pierre se mêlaient aux troncs tordus des arbres, ruisselant par endroits de rigoles d'eau glacée. Les yeux de Romance étincelèrent candidement devant ce spectacle. Mais au fur et à mesure qu'elle s'enfonçait dans la forêt, celle-ci devenait plus silencieux. L'eau ne chantait plus, elle murmurait. Et les arbres mêmes semblaient immobiles. La grise savait que c'était ici que se trouvait feu le temple de Yurai, la déesse de la sagesse. Peut-être sa destruction avait-elle plongé ses abords dans une sorte de léthargie froide et silencieuse.Un frisson parcourut son échine et elle pressa le pas.

Désormais, les odeurs convergeaient vers l'une des grandes grottes, dont l'entrée était barrée par une cascade. En quelques bonds, la louve passa le rideau de l'onde, qui rabattit sur elle son pelage et ses longs cheveux clairs, et s'avança. A mesure que ses yeux s'habituaient à l'obscurité, elle distingua nombre de ses congénères, Séides comme Brethens. Tous respectaient un silence religieux.
Et pour cause.
A quelques dizaines de pas devant eux se tenaient les dieux. Romance s'arrêta, abasourdie, en retrait du groupe, le regard fiché sur les hautes silhouette colorées que se trouvaient par-delà la foule. Sa gorge s'assécha. Comment était-ce possible ? Comment avait-elle pu recevoir leur appel, eux qui ne l'avaient jamais appelée. Ses pensées voltigeaient et s'emmêlaient en un tourbillon terrible sous son crâne. Eux, elle ne pourrait les tromper avec ses marquages, que beaucoup sans doute prenaient pour un glowstick bleu. Eux savaient qu'elle n'avait jamais vraiment trouvé sa voie, mis à part celle de devenir guérisseuse et qui l'avait poussée à en apprendre d'avantage sur les choses tout à fait terres à terres qui permettaient de guérir les mots.
Elle n'avait jamais eu de contact direct avec les divins. Rien. Seulement du silence, des légendes, et des lumières accrochées au corps des autres loups et dont le sien était vierge. Alors que les dieux parcouraient les rassemblés des yeux de leur regards éthérés, elle se glissa entre deux silhouettes qu'elle ne prit pas la peine d'identifier, tant son attention était captée par ce qui se déroulait devant. La cicatrice qui barrait sa gorge ondula lorsqu'elle déglutit. Cinq dieux étaient là. Manquaient Dairo et, bien-sûr, Yurai. Yurai dont elle aurait sans doute pu être disciple, si celle-ci l'avait appelée. Ou peut-être se trompait-elle complètement. Elle n'avait jamais vraiment su.
Elle demeura immobile, silencieuse.

♦ Anthem

La silhouette de l'anthracite s'était coulée dans la grotte quelques instants avant celle de Romance, sans q'ils ne se croisent. Cela n'avait rien d'étrange pourtant. Le mâle était resté quelques instants au temple de Mido après le départ de ses deux compagnons de route. Le dieu n'était pas plus apparu pour lui qu'il n'était apparu pour le groupe, mais ces quelques instants dans le silence - durant lesquels lui même n'avait pas prononcé le moindre mot - avaient apaisé son esprit. Comme si la proximité de la source de son pouvoir l'atténuait, calmait cette ardeur de compréhension qui lui faisait décomposer chaque chose qu'il vivait pour en analyser les moindres détails et le comprendre jusqu'à la moelle. Il était resté assis, les yeux mi-clos et la tête basse, humble sous le regard des dieux. Puis il s'en était allé, et avait aperçu l'ombre de Caïn qui revenait faire une offrande au dieu.

Chacun avait repris son bout de chemin, jusqu'à cet étrange appel divin. Cela ressemblait à ce qu'il avait ressenti lorsqu'il avait été convoqué à l'épreuve du glowstick, mais plus confus, plus prenant, plus pressant surtout. Le grand loup s'était donc mis en route, comète de noir et de blanc, vers la Forêt Pluviale. Ce qu'il y trouva piqua son attention. le rassemblement des divins - cinq d'entre eux du moins, ne pouvait q'être annonciateur d'un bouleversement plus grand encore que celui provoqué par les Precursors. Désormais, on ne jouait plus à loups contre loups.
Les dieux étaient entrés dans la partie.

C'était le néant absolu.
Pas de bruit, pas de mouvement, aucune odeur, aucune sensation. Juste le sentiment imprécis d'exister encore un peu. Pas de forme, pas de corps, juste une impression de léviter, d'être comme profondément endormi et parfaitement réveillé, un entredeux déstabilisant et horriblement effrayant. Avait-elle déjà eu aussi peur de toute sa vie ? Avait-elle déjà eu une vie ? N'était-ce au final qu'un rêve horrible ? Non. Elle avait perdu la plupart des choses qui composaient son être, mais elle n'avait pas égaré sa conscience et son esprit affûté. Elle savait parfaitement où elle était.

Et ce n'était rien d'autre que ce à quoi ça ressemblait : le Néant.

Elle n'était pas seule. Autour d'elle gravitaient des milliers d'autres âmes, celles de dieux oubliés, perdus, morts, d'esprits damnés, perdus ici pour l'éternité. Avait-elle, au cours de son envol, croisé l'âme de Juno ? De Jaw ? C'eut été une belle ironie. Mais ici, ils étaient tous les mêmes, et ils étaient tout autant vulnérables et incapables de quoique ce soit.

Du moins, elle l'espérait.

Elle essaya de se concentrer et imagina son corps. Ses pattes, sa queue, ses oreilles. Elle essaya de matérialiser une enveloppe par la simple force de l'esprit. Elle chercha ses tympans, son cerveau, les imagina. Ça lui donnait l'impression de gérer la chose, mais ça n'enrayait pas la terreur qui broyait le vide, là où avant, il y avait eu un cœur. Toute sa concentration vola en éclat au moment où elle crut percevoir une voix. Elle l'avait entendue, elle en était sûre. Mais d'où provenait-elle ? Elle ouvrit la gueule, mais aucune corde vocale ne vibra, aucun son ne se produisit. Au comble de l'affolement, Dairo gesticula en tous sens, mais rien ne se produisit. Elle ne bougeait même pas. Elle n'avait pas de corps.

AKA ! AKA ! OU ES-TU, AKA ?!

Pas de réponse. Pourtant, c'était sa voix, elle en était certaine.

Kiro ? Mido ! Par pitié !

Toujours rien. Désespérée, Dairo cessa de réfléchir et de bouger, s'affaissa complètement et se laissa avaler doucement par le néant. Il n'y avait pas d'issue. Personne ne sortait d'ici.

Dairo.

Non. Personne.

Dairo.

Ce n'était pas la voix d'Aka, cette fois-ci ...
C'était celle de Yurai !
Elle ressentit tout d'abord un soulagement et une joie immense, en sachant que Yurai vivait encore - ou du moins, un minimum. Et toutes ces énergies positives furent balayées lorsqu'elle se rendit compte que si elle pouvait l'entendre ... C'était qu'elle se rapprochait d'elle. Et que, par conséquent, elle aussi était en train de mourir. A sa façon.

Lorsqu'elle comprit cela, un déluge de voix pénétrèrent à l'intérieur de son esprit. Elle ne les reconnut pas toutes, car elles étaient entremêlées. Mais douces, chaudes, apaisantes, puissantes. Elles lui donnaient une force incalculable qu'elle ressentait dans toutes les fibres brisées de son être, qui peu à peu, se recomposèrent. Elle eut l'impression d'être aspirée vers l'arrière, et un flamboiement irradia tout autour d'elle : elle en sentit la morsure glaciale et la chaleur étouffante au moment en même temps. Puis elle perdit complètement conscience.

Elle ouvrit les yeux.

Tout était atrocement aveuglant - elle referma les paupières en grimaçant. Elle patienta un moment, et les rouvrit très lentement. Des lumières de toutes les couleurs agressaient ses pupilles endolories. Du rouge, du vert, du bleu, du rose, du jaune ... Il y avait les voix aussi, celle qu'elle avait entendues, et d'autres encore ... Mais tout était si flou ...

- DAIRO !
- Laisse-là, ne la touche pas, laisse-la reprendre ses esprits.
- Oh, quelle horreur ! Regardez, elle ne brille presque plus ...
- Donnez lui cinq damnées minutes pour se remettre, par tous les saints. Elle revient de loin.

Aka n'entendait plus rien. Il était fou de joie. Il rompit le cercle harmonique et se précipita au chevet de Dairo, le visage sculpté par une incroyable sensation de paix et de soulagement. A cet instant, le dieu de la Force sembla incroyablement mortel, tant les émotions qui traversaient son visage étaient communes. Et il n'y avait pas que lui. Tous dardaient sur leur sœur des regards maternels, sereins, remplis d'amour. Aka se coucha face à la Renarde, pressa ses pattes avant contre les siennes et posa le menton au sol. Sa truffe toucha la sienne. Petit à petit, l'éclat d'Aka faiblit, jusqu'à être réduit de moitié. Mais dans le même temps, celui de Dairo reprenait en vigueur, et petit à petit, ses paupières s'ouvrirent en grand, et elle put relever la tête.

Son esprit était réchauffé par les prières, et son corps avait reprit en puissance grâce au transfert de pouvoir du dieu de la Force. Elle était éveillée, et de retour. Sa gueule se fendit en un radieux sourire, d'abord adressé à Aka, puis au reste des divinités, qui se dressèrent sur leurs pattes pour saluer son retour. Elle les imita et se tourna vers chacun des loups présents, arrêtant son regard sur chacun.

- Merci ... Merci ...

Les dieux se rassirent en silence, mais Dairo prit un peu plus de temps. Elle n'avait pas vu une telle démonstration de foi depuis trop longtemps ... Elle observa longuement Marcus, puis Aendil, puis Valka, Tequeela, Romance, Caïn ... Et imita les autres en prenant sa place dans le cercle.

- Je sais que cela va paraître très abrupt, vu ce qu'il vient de t'arriver, Dairo, mais nous devons absolument commencer.
- Oui, je sais. Ça ira.

Chaque dieu se redressa de toute sa hauteur. Assis en cercle parfait, les mortels derrière eux, ils observèrent quelques instants de silence avant que Mido ne prenne la parole.

- Loups, le rituel ne peut plus souffrir le moindre retard. Nous allons créer une essence divine en mélangeant nos six pouvoirs. Nous insufflerons cette orbe d'énergie à la fontaine. Ce processus, combiné à vos prières, devrait permettre de créer une sorte de portail, qui aura une chance de nous ramener notre chère Yurai. Et non, je ne garantis malheureusement rien. Tout dépendra de la puissance de votre foi, et du nombre que nous serons à honorer ce rituel.

Ils étaient bien peu. Même pas le tiers de la population de l'ile ... Personne ne pouvait l'ignorer.
Néanmoins, chaque dieu ferma les yeux et ouvrit la gueule : un éclair coloré s'échappa de chacune. Au point de rencontre se forma une boule d'énergie multicolore, d'abord minuscule, mais qui prenait en taille à chaque instant. La voix de Kiro continua de raisonner dans l'esprit des loups.

Écoutez. Deux d'entre vous vont être appelés à s'approcher de la statue pour procéder à l'offrande. " Trois fleurs d'ancolie, disposées en triangle, pointe vers le haut. Au centre de ce triangle, le second placera une orbe vide ".

Si personne n'avait daigné apporté ces objets, le rituel était voué à l'échec.
Et tous les disciples qui avaient rendu visite aux dieux n'étaient pas encore présents ...

Ça se présente plutôt mal.

Caïn.

Petit à petit, la salle se remplissait de loups venus de divers horizons. Des Brethens, des Séides, peut-être même quelques solitaires, qu'en savait-il. Ils étaient une masse grouillante de mortelle face à cinq immortels colorés et luminescents.
Et même s'ils étaient clairement en surnombre, ils étaient tous subjugué par les entités, soumis à la puissance qu'ils dégageaient sans même à avoir se forcer.
Caïn ne les quittait pas des yeux, attend avec patience la suite des évènements. Il aperçut un peu plus loin Illa faire son apparition, en compagnie des enfants et d'autres Brethens. Il leur adressa un petit sourire, sans savoir si oui ou non ils l'avaient remarqués. Soit, ça n'avait guère d'importance, ils n'étaient pas ici pour faire une réunion de famille après tout.
Bientôt, les choses semblèrent bouger.
Dairo, la déesse orange, fit alors son apparition. A sa vue, le Bêta Séide fronça les sourcils. Elle semblait si faible, si mal ! Un instant, il eut peur que sa fontaine fut elle aussi détruite, et qu'elle ne meure sous leurs yeux. Même si mourir était un bien grand mot, il ne savait trop ce qu'il advenait lorsque des êtres aussi supérieurs disparaissaient.
Quoi qu'il en soit, la Renarde revenait de loin.
Il serra les crocs, priant silencieusement pour qu'elle s'en sorte, qu'il n'y ait pas une nouvelle tragédie. Et puis, Aka fit alors un geste fort appréciable : il lui conféra, semblait-il, la moitié de sa puissance, régénérant sa sœur qui brilla un peu plus fort tandis que le rouge se faisait plus terne.
Les dieux étaient solidaires, et cela faisait plaisir à voir.
Mido prit alors la parole, puissant, lui faisant hérisser un brin l'échine. Il leur intima alors, à tous, de prier, pendant que les dieux formeraient une essence divine, amalgame de leurs pouvoirs, pour l'envoyer dans la fontaine.
Kiro intervint mentalement, espérant que trois fleurs d'ancolie ainsi que l'orbe vide auraient été apporté. Deux loups seraient appelés pour procéder à l'offrande. De qui pouvait-il bien s'agir ? Il pensait directement à Valka, celle qui avait été à l'origine de la découverte de la vérité, et semblait très lié à sa déesse. Quant à la seconde personne, il n'en avait pas la moindre idée. Hylda ou Raw, peut-être.

Le gris jeta un bref regard autour de lui, espérait que quelqu'un eut apporté l'offrande. Mido ne leur en avait pas parlé, de cela, aussi il savait déjà que ni lui ni ses comparses l'ayant accompagné pour le sollicité n'avaient un de ces objets.
Soit, en attendant, il devait prier.
Tout dépendait d'eux, chacun devait y mettre du sien, sans exception.

Alors, Caïn se mit à prier.
Les yeux clos, la tête légèrement baissée. Il sanctifia le nom des Dieux, leur rendit grâce. Ils étaient tous si sacrés, si nobles. Les remercia de leur accordé un ersatz de leur grandeur à travers les glowsticks, de veiller sur eux constamment. De leur apporter leur aide, de ne point les abandonner face aux difficultés.
Et puis, il espéra de tout cœur que Yurai revint. La Corneille, qui manquait terriblement à ses dévots disciples. Sur les terres, elle offrait la preuve de la justice et de la tempérance. Son absence leur coûtait à tous, même s'ils n'étaient pourtant pas sous sa tutelle. Les dieux étaient solidaires entre eux, en vénérer un revenait à tous les respecter de toute façon.
L'ancien chasseur continua ainsi, rassemblant ses pensées en une suite logique de bénédictions et de prières à l'adresses des dieux, redoublant d'efforts pour trouver quoi dire, qui vénérer, pour quelles raisons.
Et jusqu'à ce qu'il faille s'arrêter, jusqu'à ce que la foi de tous soit suffisamment révélé aux yeux des divinités.
Jusqu'à ce que Yurai revienne.

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Twitchell.

C'était un jour particulier.
Pourtant, de jours, il n'en avait pas encore connu beaucoup. Il n'avait que quelques mois, étant bien plus proche du jour de sa naissance que de celui de sa mort. Mais il savait, que ce jour-ci serait bien différents des prochains et de ceux déjà passés. Qu'il s'en souviendrait longtemps, si sa mémoire ne lui faisait pas défaut.
Leur mère, Illa, les allait réveillé de bon matin. Elle semblait pressée, elle ne leur avait pas laissé le temps de bailler qu'ils s'étaient déjà mis en route. Le jeune louveteau rosé tâchait de garder une allure, suivant en de petites foulées sa génitrice. Deux autres loups les accompagnaient aussi. La nounou, Asha, ainsi qu'un des loups qui les soignait parfois, Sean.
Il tachait de garder une allure convenable, ignorant la fatigue même s'il ne parvenait à la tromper longtemps. Alors, sa mère l'attraper pour le glisser sur son dos, si ce n'était pas un des autres adultes qui s'en chargeait. Il reposait ainsi ses coussinets, jusqu'à ce qu'on le remette sur le sol pour qu'il puisse reprendre seul sa marche.
Il trouvait le chemin long et fastidieux, et se demandant quand ils arriveraient à destination.

Enfin, ils y parvinrent, entrant dans un lieu qu'il ne connaissait pas. Il s'agissait de la fontaine de Yurai, ou du moins ce qu'il en restait, à ce qu'il comprit. Il y avait déjà beaucoup de monde, et Tweet en fut quelque peu impressionné. De peur de se perdre, il se colla à sa mère, tremblant. Et puis, il les remarqua.
Les dieux.
Il redressa la tête, les yeux tout ronds, totalement ébahie face à cette divine présence. Eux.
Sa gueule s'ouvrit, mais aucun mot n'en sortit. Ils semblait tellement fort, tellement intelligent, tellement agile, beau, grandiose ! Il ne savait plus où donner de la tête. Et dire qu'un jour, il les verrait d'un peu plus près, pour espérer l'obtention d'un glowstick. A qui voudrait-il bien prêter allégeance d'ailleurs ?
Il passa son regard sur eux.
Et puis, d'un coup, un sixième dieu fit son apparition. Ou plutôt, une déesse. Elle ne semblait pas aller très bien, et Tweet se sentit triste en la voyant ainsi. Son cœur se serra quand une lourde question traversa son esprit d'enfant : est-ce qu'elle allait mourir, la déesse orange ? Ses yeux le piquèrent, il renifla doucement en se collant un peu plus à sa génitrice, tentant de se rassurer du mieux qu'il le pouvait.
Non, elle n'allait pas mourir. Parce que les dieux étaient solidaires entre eux. Alors, son frère rouge vint vers elle, lui offrant de son énergie pour qu'elle se sente mieux. Le jeune en fut ébahi, se décollant légèrement du poil maternel pour mieux observer la scène.
Oui,oui, elle était un peu soignée !

A être ainsi focalisé sur cette déesse, il en oublia d'écouter les paroles des autres dieux. Ce n'est que lorsque sa mère lui intima de prier pour ramener à la vie une autre déesse, celle qui était représentée par cette splendide statue reconstruite par les Dieux, Yurai.
En jetant un petit regard à ses deux ainés, qui s'étaient déjà attelé à la tâche en fermant les yeux, Twitchell en fit de même.
La tête baissé et les yeux exagérément clos, de peur de les rouvrir, il pensa très fort à cette déesse, même s'il ne la connaissait pas très bien. C'était sans importance de toute façon, tant qu'il lui montrait qu'il croyait en elle, et que se serait un véritable honneur que de la voir en face, bien "vivante".

Adèle ~
L'ours délicat...

Les disciples d'Aka devaient à présent partir pour la Forêt Pluvial pour le rituel. Adèle se tourna vers les deux Brethens qui semblaient déjà se mettre en route sans réellement faire attention à sa présence. Cela l’irrita quelque peut mais elle ne sans formalisa pas pour autant, il n'était pas ami et pas de la même meute. Elle ne pouvait donc pas leur en vouloir d'être aussi froid et distant. La femelle anthracite se contenta simplement de les suivre à bonne distance, puis au fils des pas, elle se rendit compte que l'écart entre elle et eux qui se creuser petit à petit, puis ils finirent par disparaitre entre les arbres. La Séides s’aperçut de la différence qui y avait entre elle, simple maternelle douée d'une force peut commune, et de vraies guerriers. La louve avait beau avoir se don, elle n'était rien face à ses machines de combats. Elle se laissa aller au grès de ses pas ne cherchant pas à les rattraper.

Une grande cascade se dressa devant elle, c'était donc ici que demeurait la Corneille. Adèle l'observa un petit moment, elle n'était jamais venu ici au part avant et elle ne savait pas non plus comment était l’intérieur. D'ailleurs, en y pensant, c'était à l’intérieur que tout se passer. La louve sombre se pressa alors d'y rentrée en espérant ne pas arriver trop en avance ou trop en retard. La maternelle se fit violence pour passer le mur d'eau, elle n'avait aucune envie de choppé la mort par un temps pareille. C'est à contre cœur qu'elle se mouilla, même pour une bonne cause. Le liquide passa dans son pelage et la refroidit jusqu'à l'os. Son entrée fût digne de la bimbo qui sort de la mer entre toute dégoulinante d'eau ultra sexy dans son bikini, saut que pour Adèle ce n'était pas voulu. Elle aurait été une louve moche cela ne lui aurait pas pauser de problème. La louve s'ébroua énergiquement avant de poser ses yeux dorée sur l'assemblé. Il y avait du monde, beaucoup de loups qu'elle connaissait et d'autres qui lui étaient inconnu. Étrangement le faite de voir les Dieux ne la marqua pas plus que cela. Adèle estimer que cela était normal qu'ils soient présent, vu que cela les concerné aussi de très près. Et puis, ce n'est pas comme si les Dieux n’apparaissaient jamais. Tout bon croyant avait au moins vu une fois son Dieu lors de la remise de Glowstick. Bien sûr pour elle cela n'avait rien de normal, c'était fantastique de les voir "tous" réuni, c'était même un privilège de les voir. La femelle anthracite reconnu sa famille dans l'attroupement et alla calmement se pauser parmi eux. Elle salua Leemon' d'un signe de tête et prit le temps d'accorder une petite lape à ses cadets et à ses parents.

Valka observait alternativement chaque Dieu sans se lasser.
Rencontrer leurs messagers aux temples était déjà en soi une bénédiction. En de rares occasions, elle avait pu avoir une image très nette de certaines divinités, car en sa qualité de Zélote, elle avait parfois l'honneur d'avoir un réel face à face avec eux. Mais nulle rencontre ne pouvait égaler celle-ci, en dépit des circonstances. Son cœur était miné de désespoir face au petit nombre de loups présents, par rapport à la population totale qui vivait sur l'île, sous les auspices des dieux. On pouvait les aimer ou non, mais aux yeux de Valka, les respecter pour ce qu'ils avaient construit et pour les pouvoirs qu'ils leur donnaient était bien là le minimum. Aussi éprouvait-elle autant de gratitude et d'amour pour ceux qui étaient présents, que d'exaspération et de haine envers ceux qui manquaient à l'appel. Mais elle ne dit rien, et ne manifesta rien de plus. Ça ne servait à rien.

Elle se contentait de prier pour le retour de Dairo. Sans son pouvoir, elle avait plus de mal à entrer dans le monde de l'esprit. Lui restait ses années de pratique et ses habitudes, mais sans fibre magique, elle avait les pattes liées. Lorsque la déesse réapparut, affaiblie, mais bien là, elle sentit une vague d'espoir traverser son corps, et lorsque le rituel débuta, Valka se ressaisit. Ils avaient peut-être encore une chance, quoi qu’infime, de rétablir l'ordre des choses.

Elle déchanta très rapidement lorsqu'elle s'aperçut que personne n'avait encore ramené les outils nécessaires. Là, elle se dressa sur ses pattes et gronda furieusement, le pelage hérissé. Elle ne pouvait pas tout faire ! Kiro avait donné des directives à ses disciples, ils n'avaient qu'à les honorer ! Soudain ivre de rage, Valka ouvrit la gueule, sans doute prête à incendier l'assemblée, lorsqu'une louve pénétra à l'intérieur de la caverne en haletant. Elle avait le pelage roux et portait des accessoires chamaniques très semblables à ceux de la Bêta Séide. Celle-ci posa son regard de glace sur elle, et baissa légèrement la tête, détendant les muscles de ses épaules. Elle s'approcha d'elle pour vérifier le contenu et pressa très brièvement sa truffe contre sa joue.

- Très beau travail. C'est parfait.

D'autres loups arrivaient au compte-goutte. Le bruit de leurs pas ne perturbaient qu'à peine ceux qui s'étaient plongés dans un profond mutisme, entièrement absorbés par leurs prières. Valka avisa la dernière à être entrée, qui fendit la foule d'un air supérieur, arrangea les fleurs en triangle et posa l'orbe par-dessus. Ivre de colère, Valka se dirigea vers elle et la repoussa avec aigreur.

- Merci d'avoir amené l'orbe ... Tu n'as pas été appelée par les dieux. Et ce n'est pas à toi de procéder au rituel. Rejoins les autres.

Elle la repoussa doucement mais fermement et s'assura que l'orbe était dans le meilleur des états possible, avant de se tourner vers Kiro et de hocher la tête. Elle se tourna vers l'assitance, qu'elle balaya rapidement du regard avant de prendre la parole à voix basse.

- Rappelez-vous, Amis. Deux d'entre nous vont être appelés à procéder au rituel. Le premier devra disposer les trois fleurs en triangle dans le réceptacle de la fontaine. Le second déposera l'orbe vide au centre de ce triangle. A partir de là, les dieux insuffleront l'essence dans l'orbe. Joint à nos prières, ce pouvoir devrait être suffisant pour nous ramener notre déesse.

Elle s'écarta des divinités pour rejoindre les autres, qui formaient un large cercle autour de celui formé par les dieux eux-mêmes. Elle reprit sa place à côté de Leemoncello et ferma les yeux, avant de commencer à prier à voix très basse.

Le contrecoup de tout l'énergie qu'il avait offerte à Dairo commençait à se faire sentir, surtout alors que la création de l'Essence dévorait ses dernières ressources avec un acharnement grandissant. A travers ses yeux à demi clos, Aka observait ses frères et ses soeurs, tous concentrés sur leur tâche, imperturbables, sourds et aveugles à ce qui se passait autour d'eux. A l'exception de Kiro, qui avait plissé les yeux lorsque la Bêta Séide s'était tournée vers lui. Le dieu de la force s'assura, du coin de l'oeil, que les éléments étaient bien présents : les fleurs, et l'orbe vide. Semblable à un Glowstick rond, elle brillait légèrement, et chacune de leurs couleurs se reflétait dedans. Il sentit une légère inquiétude le traverser. Et si ça ne suffisait pas ? Il n'y aurait pas de solution miracle. Le pouvoir de Yurai serait perdu à jamais, et ses disciples devraient changer de voie. Après tout, ils avaient déjà vécu sans elle. Ils réapprendraient à le faire.

Kiro essayait de garder un oeil dans le réel et l'autre sur la création de l'Essence, mais ce n'était en rien facile. Il choisit de faire confiance à Valka pour guider le rituel et se laissa absorber par sa tâche. L'Essence grandissait à vue d’œil, portée par leurs pouvoirs conjugués et par les prières des loups. Ça fonctionnait. Ça allait fonctioner. C'était évident. Il fallait juste continuer ainsi ...

Mido restait très sceptique. Jamais ils n'avaient conduit de tel rituel, jamais ils n'avaient eu affaire à un cas tel que celui-ci, et il doutait du succès de leur manoeuvre. Pour autant, il n'était pas disposé à ne pas tenter sa chance, et puisait au plus profond de son être pour créer l'Essence la plus parfaite, contribuant à sa création avec vigueur. S'il y avait la moindre chance de faire revenir Yurai, il fallait essayer. Mais il n'y croyait que très peu.

Moiro, de son côté, brûlait d'espoir. Elle se persuadait que l'Essence serait assez puissante pour faire revenir Yurai, mais à ses yeux, ce n'était pas là l'élément clé. C'était la foi. L'atmosphère autour d'eux était chargé d'espoir et d'amour, et c'était bien ça le vrai pouvoir - jamais elle ne l'aurait répété assez. Toutes ces prières qui trouvaient un écho dans son esprit allaient forcément donner la force nécessaire à Yurai pour revenir. Elle n'en doutait pas.

Dans l'esprit d'Ao, c'était le silence. Tout juste indisposé par les crépitements de l'Essence qui commençait à devenir aussi grande que la tête d'un loup. Des éclairs jaillissaient et brillaient dans ses grands yeux vides. Les oreilles légèrement orientées vers l'arrière, la Dragonne se concentrait sur son travail sans tergiverser plus avant. Cela fonctionnerait, ou non, elle ne pouvait pas le prévoir - son omniscience s'arrêtait là où l'improbable commençait. Sans trop d'espoir, elle suivait simplement le mouvement.

Dairo vacillait.
L'éclair qui partait de sa gueule jusqu'à l'amalgame de pouvoir était le plus faible, et constater cette infériorité la rendait aigre. Pour autant, elle ne pouvait pas se permettre de laisser l'angoisse et la colère consumer le peu d'énergie qui lui restait. Elle puisa loin, très loin en elle, pour aller jusqu'au bout du rituel. Puis, lorsque les liens entre elle, les autres dieux et l'Essence cédèrent brusquement dans un crissement suraigu, elle poussa un profond soupir et lutta pour ne pas s'écrouler de fatigue.

Une obscurité épaisse englouti la caverne. C'était comme si des murs épais avaient entouré le temple pour le couper du reste du monde. Comme si une autre dimension venait de s'ouvrir, et les avait tous engloutis, sans qu'ils ne se rendent compte de rien. Un hurlement déchirant fit voler le silence solennel qui planait en éclats, avant qu'il ne revienne, rempli d'effroi. Personne n'osait parler. Il n'y avait de toutes façons rien à dire. Il n'y avait qu'à attendre. Ce que Dairo prit pour une brise surnaturelle était en fait un murmure, dont elle ne saisi absolument aucun sens.

Mido l'entendait, lui aussi. Machinalement, il se tourna vers Kiro, même s'il ne pouvait pas le voir. Ce devait être l'appel qu'il avait mentionné ... Mais d'où venait-il ?

Moiro en était certaine. C'était la voix de Yurai.

Esterno.
Valka.

L'Essence divine crépitait, lévitait et tournait lentement sur elle-même au-dessus de leurs têtes. Elle n'attendait plus que l'ouverture de l'orbe et l'accomplissement de la part des mortels pour se transférer à l'intérieur, et ainsi permettre le retour hypothétique de la déesse.

C'était à eux de jouer, désormais.

Cette voix ...

Elle avait failli passer complètement à côté, tant l'étrangeté de l'atmosphère l'avait perturbée. Cette bulle de silence presque hermétique qui la coupait de toute réalité, la présence des autres autour d'elle qui semblait être altérée, comme s'ils étaient là, et en même temps, très, très loin, cette impression de flottement, tout était si étrange qu'elle avait perdu sa concentration.

Lorsque le murmure effleura ses oreilles, son corps fut parcourut d'un léger frémissement. Son nom avait été prononcé. Mais par qui ? Cette voix, elle ne la connaissait que trop bien, mais elle n'osait y croire. Avait-elle réellement été choisie ? Avait-elle réellement entendu Sa voix, où était-ce simplement son imagination qui lui jouait des tours ? Au vu des circonstances, et de son épuisement sans limite, ça n'aurait pas été impossible. Même si tous ses instincts lui dictaient des ordres contraires, elle se sentit se dresser machinalement sur ses pattes sans cesser de psalmodier entre ses crocs. Elle s'avança vers la fontaine, dont elle ne distinguait que très vaguement les contours dans l'obscurité, en particulier ceux des ailes de corneille. Au passage, elle saisit très délicatement l'orbe entre ses crocs, qui elle lui apparaissait avec une netteté toute particulière, comme si le monde entier ne s'était plus réduit qu'à ce petit objet. Puis elle progressa vers le réceptacle, ses griffes cliquetant contre le sol de grès. Là, elle déposa avec toutes les précautions du monde l'orbe au milieu du triangle de fleur assemblé par Esterno, qui l'avait accompagnée à la Grève Gelée pour récupérer la roche qui avait permit de reconstruire le Temple. Yurai n'avait pas choisi ses élus par hasard.

La chamane observa, mais l'orbe n'eut aucune réaction. Valka recula jusqu'au fond de la caverne et baissa la tête, les yeux luisant dans le noir. Au centre du cercle formé par les dieux, l'Essence devenait de plus en plus fébrile, et il était clair qu'ils éprouvaient de la difficulté à la garder sous contrôle. Était-ce bon, ou mauvais signe ? Elle n'en savait pas grand-chose. Son savoir s'arrêtait là où celui des divins commençait. La caverne acheva de se remplir d'ombres, et bientôt, seule l'essence fournissait assez de lumière pour y voir. L'aura des dieux était complètement éteinte.

La Zélote retînt son souffle.

Tout se déroulait comme les dieux l'avait indiqué. L'Essence qu'ils avaient créé, les éléments du rituel qui avaient été apportés par deux de ses camarades, les ordres exécutés par les deux appelés. Il n'y avait pas eu la moindre erreur de parcours. Le pelage de la chamane se hérissa de crainte, et ses yeux de glace convergèrent en direction des dieux. Elle ne les distinguait qu'à peine. Seule l'Essence déchainée les éclairait de son aura multicolore.

Pourquoi ne se passait-il rien ?

Elle lévitait lentement vers le haut - du moins, c'était la sensation qu'elle éprouvait.

Très lentement, comme si elle avait été attirée par une espèce de puissance magnétique qui l'emmenait doucement, mais sûrement ailleurs. Si elle avait été capable de percevoir l'espace d'un instant la présence de Dairo, elle se sentait désormais terriblement seule. Elle avait usé de toute sa volonté pour essayer d'atteindre l'esprit de deux des mortels qui avaient contribué à son retour - Esterno, le jeune Brethen, et Valka, la Séide - sans être parfaitement certaine qu'elle avait réussi. Il ne lui restait plus que l'attente, une attente mortelle qui secouait tout son être d'un désespoir et d'une angoisse tranchants à chaque seconde qui s'écoulait.

Loin, très loin de-là, sur l'île, l'Essence frémissait, tourbillonnait, et lançait des éclairs aveuglants dans tous les sens. Elle finit par engloutir les six dieux dans toute sa masse, qui disparurent à la vue des loups mortels. Puis, avec une grande violence qui ébranla la caverne jusque dans ses fondations, elle projeta un rayon en direction de l'orbe. Petit à petit, l'intégralité de l'essence y pénétra - comment une telle forme d'énergie, aussi immense, pouvait-elle rentrer dans un réceptacle si petit, si fragile ?

Alors, l'orbe multicolore devînt blanche, puis se teinta de pourpre.
L'éclat recouvrit d'abord les griffes, puis les pattes, puis le reste du corps sculpté de Yurai. Les ombres qui dansaient donnaient l'impression que la statue battait des ailes. Trois rayons dansèrent un bref instant, avant de s'éteindre. L'orbe perdait peu à peu de sa vigueur.
Puis elle se liquéfia.
Elle roula sur le côté et perdit de son volume pour devenir de plus en plus fluide. Le liquide violet remplit lentement le réceptacle de pierre, et s'arrêta à ras-bord.
Les yeux de la statue s'ouvrirent dans un très léger crissement. Des orbites de pierre se dégageait une lumière vive, de couleur pourpre elle aussi.

Le silence qui suivit ne dura pas longtemps : il fut troublé par un cri.
Mais il est très difficile le décrire ...
Ça ressemblait d'abord à un cri de douleur : une affreuse, une horrible douleur, comme aucun mortel n'en aurait éprouvé depuis la création jusqu'à nos jours. Une souffrance sans nom, qui lacère autant la chair que l'âme. Mais dans ce hurlement bestial, il y avait aussi une forme de félicité. De joie. Comme une bête enchaînée depuis des siècles qui se libère enfin de sa prison, qui scarifie perpétuellement sa chair en tirant sur ses liens de fer, au prix de la liberté.

Un déluge de lumière pourpre englouti la caverne, et ce fut l'intégralité de la statue qui se mit à luire, alors que le chant lugubre diminuait peu à peu.

Puis à nouveau, le silence ...

Les six divinités étaient étendues au sol, ventre à terre, le menton glissé entre leurs pattes antérieures, les oreilles rabattues contre leur crâne, dans une position identique, comme un seul être. Ils avaient reprit leur aura de lumière ordinaire - excepté Dairo et Aka, qui brillaient un peu plus faiblement que les autres. Au centre se tenait un septième dieu, lové en position fœtale, les yeux ouverts sur le vide. Il brillait, mais très légèrement, comme si le moindre souffle aurait suffi à en balayer l'éclat faiblard.

Un mouvement convulsif agita ses pattes. Ses paupières battirent une fois, puis une autre, jusqu'à ce que son regard ne quitte le néant pour prendre conscience du monde réel qui l'entourait. Un à un, les dieux se redressèrent, posant leurs regards sur leur sœur qui s'éveillait petit à petit. Epuisé par le rituel, ils n'étaient plus capables de grand-chose. Ils se dressèrent sur leurs pattes avec raideur et s'approchèrent de Yurai, effleurant son corps de leur truffe, avant de reculer afin d'agrandir très largement le cercle.

- Approchez, Loups, murmura Mido d'une voix très sourde.
- Rejoignez-nous, renchérit Moiro. Sans vous, jamais elle n'aurait pu revenir.
- Vous méritez votre place à nos côtés, approuva Aka.

Yurai plissait les yeux, mais ne parvenait toujours pas à bouger.
Elle semblait si frêle, si fragile ... Difficile alors de croire qu'il s'agissait bel et bien d'un dieu, au même tire que les autres. Ses yeux blancs et vides glissaient sur chacun d'eux, mais se fixèrent bien vite sur les rangs qui se trouvaient derrière.

Vers les mortels.

Elle chercha d'abord les élus qu'elle avait désigné, puis s'attarda sur chacun d'entre eux. Mais ils étaient trop loin, ils étaient trop flous.

Je veux vous voir. Approchez. Approchez-donc.

Kiro se retourna et, d'un geste du menton, incita les derniers loups les plus timides et les plus réticents à s'approcher. Dairo, malgré son épuisement, les considérait tous avec une grande chaleur. Son regard s'attarda sur Marcus, puis sur Fireheart, avant de se poser de nouveau sur Yurai avec tendresse.

- Nous avons réussi !

Le silence était revenu.
Après le vacarme, les cris, les prières, les orbes étincelantes et les fleurs, le calme semblait être revenu dans la caverne. Les Dieux se tenaient en cercles, six âmes jumelles unies comme un seul être à travers cette position, le museau tendu vers une forme hésitante et tremblotante qui occupait le centre de leur attention. La forme remua, envoyant sur les parois des reflets pourpre et lavande, tentant de retrouver un semblant d'équilibre. A leur tour, les Dieux remuèrent, agitant l'échine et les épaules, tous brillant d'un même éclat, bien que Aka et Dairo semblaient un peu plus faibles que les autres.

Ainsi donc, ça avait marché.

Les divins se retournèrent, enjoignant leurs disciples à les rejoindre, les uns après les autres, à faire corps autour de ce dieu naissant, de cette corneille nouvelle-née qui semblait faire ses premiers pas dans le monde des loups. Visiblement trop faible pour remuer davantage, encore. Suète, qui était restée en retrait pendant toute la durée du rituel, se redressa. Aka avait appelé ses disciples, et elle se devait naturellement de répondre à l'appel. Toujours silencieuse, la grande louve se mit en marche la première, comme pour inciter ses semblables à la suivre, et se plaça à la droite de Aka.

Ils avaient réussi.

Caïn

Le Bêta Séide continua à prier, les yeux clos, la tête baissée.
Il fallait qu'elle revienne. Absolument. Eux, mortels, ne devaient pas échouer. Eux, morts, ne pouvaient pas échouer.
Les deux élus furent alors nommer. Valka, bien entendu, et Ernesto, un jeune Brethen qu'il ne connaissait pas. Pour l'équité des clans et des sexes, le choix était quelque peu judicieux. Mais cela n'avait pas d'importance, de toute façon, tant que ces deux loups mèneraient à bien la mission que les dieux leur donnait là.
Ils s'avancèrent, et l'offrande eut lieu.
La suite des évènements s'enchaina très vite.
L'orbe qui mêlait toutes les couleurs des six dieux présents passa alors au blanc, le resta un court instant puis changea une dernière fois pour devenir d'un pourpre prononcé. La couleur de Yurai.
A cet instant précis, Caïn ne put qu'être soulagé.
Ses épaules s'affaissèrent, et ses muscles se détendirent. Il cessa de bousculer ses pensées pour prier, ne se concentrant plus que sur l'évènement présent.
Le liquide violet remplit à nouveau la fontaine, jusqu'à ce qu'elle soit pleine à ras-bord. Il n'avait pas besoin de tourner les yeux pour savoir que, sans doute, les glowsticks violets de ses compagnons brillaient désormais d'un vif éclat.
Mais un cri survint alors. Un cri qui mêlait souffrance et joie, félicité et bestialité.
Le gris redressa la tête, les yeux grand ouverts, les oreilles tournées vers l'arrière. Que se passait-il, y avait-il un problème finalement ?!
Non.
Le silence retomba.
Le temple fut alors inondé d'une vive lumière, les baignant tous dans cet éclat soudain. Lorsque l'intensité des rayons diminuèrent, Caïn put alors percevoir les six dieux, couchés sur le sol dans une position identique.
Et au centre, enroulé à la manière d'un louveteau nouveau-né, Yurai.
Son éclat était si faible, mais elle était bien vivante.

Le souffle court, le gris contemplait cette scène, tout aussi silencieux que les loups qui l'entouraient.
Ils avaient réussis. Pour de bon.
A l'appel des dieux, qui les incitaient tous à venir prêt d'eux, Caïn se leva. En boitillant, il suivit la lente allure de ses camarades qui s'avançaient vers les divinités, trainant sa patte définitivement blessée en serrant les crocs. Bientôt, il rejoignit les dieux, non sans avoir lancé avec un petit sourire soulagé un regard fatigué à sa famille. Il se positionna alors là où était sa place : aux côtés de Mido, dieu auquel il avait jadis prêté allégeance et à qui il vouait un profond respect.
A son approche, il lui adressa un signe de tête respectueux, et alla s'assoir derrière lui.
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Twitchell

Le louveteau Brethen restait collé à sa mère, tremblant un peu, les yeux toujours aussi clos que précédemment. Il devait prier, alors il priait !
Même si en gardant ainsi les yeux fermés, il ratait la plupart des évènements. De toute façon, il n'aurait pu y voir clair, il était bien trop petit et entouré de loup bien trop grand. Il perçut juste les rayons multicolores, qui traversaient ses paupières, puis cette vive lumière blanche qui vira par la suite au violet.
Avant d'entendre raisonner ce cri.
Ce cri qui le terrifia, hérissant le moindre de ses poils au maximum. Qui criait ? Et pourquoi ?! Il coupa sa respiration, en proie à une profonde angoisse. Il ne se sentait pas bien, il voulait sortir d'ici. Il étouffait entre ces loups de tous clans, à entendre raisonner ce lugubre hurlement. Il se sentait aussi profondément triste, d'entendre une telle voix. Il se colla un peu plus à sa mère, l'appelant faiblement en lui demandant de sortir, désireux d'être rassuré ailleurs qu'en cet étrange endroit.
Mais bientôt, la voix cessa.
Et le silence revint.
Twitchell reprit sa respiration, les oreilles toujours couchées contre son crâne. C'était finit ? Pour de vrai ? Il se risqua à ouvrir les yeux, avant de les refermer aussitôt lorsqu'une vive lumière vint l'éblouir.
Lorsqu'il put enfin voir, certains loups commençaient déjà à se mouver dans la direction des dieux. Le jeune se releva lui aussi, jetant un petit regard à sa génitrice. Il s'avança à ses côtés, le cœur battant en sachant qu'il était de plus en plus à proximité des divinités.
Jusqu'à arriver à leurs côtés.

Alors, il l'aperçut.
Là, roulé en boule au milieu des six autres dieux, encore plus faible que la déesse orange et le dieu rouge. Une déesse violette, presque éteinte.
C'était donc elle, qu'ils avaient dû tous priés.
Il resta aux côtés de sa maman, en se demandant ce qu'il allait se passer maintenant.