Le cristal comme prison. | ft. Riptide

Le cristal comme prison.
w/ Riptide

On lui avait dit d’aller y jeter un œil, que ça en valait la peine. On lui avait dit qu’on pouvait se perdre sur l’immense plaine blanche tant l’endroit était immense et plat. Il y faisait extrêmement froid, avec un vent qui transperçait la peau. L’eau volait également un peu dans tous les sens, notamment sur la peau de ceux qui s’aventuraient ici. En bref, pour Gab’, ce n’était pas un lieu de prédilection, bien au contraire. Il regrettait presque d’avoir cru à une si belle histoire. La seule chose qu’il pouvait admettre, c’était la beauté du paysage. Monotone, mais relaxant.

Il n’avait pas pris le temps de prendre une petite laine. Enfin, il n’y avait pas réfléchi, et il se sentait bête en y repensant une fois sur place. Qu’attendait-il en entendant parler de la « grève gelée » ? Une plage cuisante ? Un soleil à éblouir un aveugle ? Débile qu’il était. Heureusement que son dos et son derrière était recouverts de poils vifs, au moins, c’était toujours ça de plus ou moins protégé.

Donc il était là, à trottiner sur la glace qui lui brûlait les coussinets tant c’était froid. Par moment, il parvenait à se figer, le sol étant si dur que le gel était moins mordant. Le blanc repartait cavaler une fois moins sensible des pattes, et trouva même une sorte de grotte. Une véritable aubaine ! Le vent ne passerait plus autant, et on voyait de la terre en s’aventurant un peu plus dans ce trou. Il y faisait très sombre.

Bientôt, Gab’ ne vit plus grand-chose. Juste quelques reflets qui s’atténuaient de pas en pas. Le loup cassa sa griffe, et créa une boule de lumière. Au fur et à mesure, la chose éclairait les murs … De la glace aussi ici ? Il regarda ces derniers, et fit un saut de côté. Dans les pains de glace, des créatures venus tout droit de Jurassic Park avaient été piégés par le gel. Et ce, tout autour de Gabryël. Il ne savait pas trop quoi faire, hurler, respirer, déguerpir… Il était bloqué. Dans son dos, il pouvait entendre des pas résonner dans la petite chatière qui descendait dans les tréfonds de la terre. Et lui était là, paralysé. S'il avait su, il n'aurait jamais suivi les conseils de ce vieux fou.

Le bruit en arrière-plan augmentait progressivement, tandis que la lumière de sa bestiole commençait à se tamiser. Les reflets sur la glace et ses prisonniers devenaient vraiment glauques. Gab’ pu se retourner doucement, son corps tremblant à cause du froid ou de la crainte, il ne savait pas vraiment. Arrivé à la moitié de son demi-tour, une voix le fit faire un bond de fou, ce qui le rendait un peu ridicule, ne sachant plus quoi faire de ses pattes le temps de quelques millisecondes.

Mais tu es complètement folle !

Grondait-il. D’autant c’était un ange habituellement, d’autant il pouvait être un vieil ours mal léché, ce qui n’avait pas loupé dans le cas présent. La créature vint à son contact, et il la repoussa sans même rechigner. C’est donc les yeux grands ouverts, les oreilles couchées et tout son poil redressé sur son dos qu’il zieutait sa comparse. Une louve probablement, violette et orange. Entre la glace doucement éclairée et la lumière faible émise par la luciole, on ne la voyait pratiquement pas.

Je n’aurais pas dit redoutable, mais sournoise.

On pouvait voir de temps en temps ses canines. Encore un peu secoué par la frayeur qu’il avait eue, Gabryël ronchonnait encore et toujours. Il scrutait encore les lieux, sur ses gardes.

C’est chez toi ?

Gaby n’appréciait pas sa façon de répondre, un peu insolente, bien qu’elle avait l’air sincère dans ses paroles. Le jeune mâle se contenta de se calmer au mieux qu’il pouvait. Déjà, son poil s’était bien lissé entre temps, et ses pattes étaient moins bandées. Il finissait même presque par accepter le contact physique, bien qu’il gardait toujours un œil sur la louve au cas-où. De toute façon, il avait bien compris que plus il allait s’en éloigner, plus elle allait la coller. Tant pis.

En la regardant d’un peu trop plus près, Gabryël notait qu’elle n’était pas bien mastoc non plus, donc même si elle essayait de la lui faire à l’envers, il n’aurait pas grand mal à la retourner et déguerpir. La louve n’avait pas l’air méchante de toute façon, et il acceptait finalement de rester pour papoter. Et puis, avec le froid dehors, une présence calme et peut-être agréable lui réchauffait le cœur. Elle semblait intéressée par le petit collier du loup.

Effectivement, je suis du clan des Etelkrus. Ma déesse, Dairo, est très vive.

Il sourit à cette pensée. Il se souvenait du jour de leur rencontre, lors de l’attribution de son glowstick et de son pouvoir. Elle l’avait guidé dans un endroit étrange, assez sombre, et il devait se dépatouiller de là. A l’époque, un peu bêbête, il prit l’épreuve pour un jeu de découverte et d’agilité, bien qu’il connaissait l’enjeu de tout ça. Il s’était donné juste assez pour réussir avec brio. La renarde l’attendait au bout du chemin avec cette fameuse pierre orange, et disparu presque aussi vite qu’elle ne l’avait emporté ici.

Je l’apprécie beaucoup, et je ne veux être sous aucune autre aile. Et toi, qu’en penses-tu de tout ça ? Qu'est-ce que ça fait de vivre à l'écart de ce genre de monde ?

Gab' était curieux de la vie en solitaire. Parfois, avec les quelques accrocs qu'il avait avec les siens, il y songeait tout en balayant cette idée de la tête. Il posa son derrière sur le sol froid, sans jamais la lâcher du regard. Du moment qu’elle n’essaye pas de le grignoter, il ne devrait pas y avoir de problème …