Des histoires de fantômes | Evan

Tarko

Après son passage à la bibliothèque, Tarko continue son exploration de l’île chuchotante. Entre les arbres il distingue clairement la forme d’un autre bâtiment. Celui-ci ne semble pas aussi grand et imposant que la bibliothèque mais qu’importe, du moment qu’il renferme de mystérieux trésors. Tout excité à l’idée de fouiner entre ses murs, le punk s’empresse de trouver un moyen d’entrer.

Alors qu’il fait le tour de la bâtisse à l’extérieur décrépi, le mâle entend soudain un sifflement. Ses oreilles pointent vers la gauche puis vers la droite pour localiser l’origine de ce son. Cela semble venir de l’intérieur du bâtiment. Tarko prend du recul pour mieux voir le mur de pierre qui se dresse devant lui. À quelques mètres du sol il repère une ouverture bien découpée qui laisse passer la lumière  de l’extérieur à l’intérieur.

Tarko prend de l’élan et parvient à escalader la parois pour atteindre le rebord de la fenêtre aux vitraux cassés. Il passe la tête à l’intérieur et entend à nouveau le sifflement. Le bruit vient, en effet, de là. Le mâle se laisse tomber avec lourdeur dans la pièce et échappe un couinement de douleur. Sa patte fait encore des siennes. Une fois la douleur passée il recommence à suivre le mystérieux sifflement.

Mais le loup est vite confronté à un problème. À chaque fois qu’il s’engage dans un couloir le son change de direction et l’amène ailleurs. Comme si le sifflement était partout à la fois. Soudain, poussant une énième porte du bout du museau, Tarko sent sur sa truffe l’air frais de l’extérieur. Il entre dans une pièce plus lumineuse que les autres. Face à lui, de nombreuses ouvertures par lesquelles s’engouffre le vent qui fait tourbillonner la poussière. C’est alors qu’il l’entend plus distinctement. Là derrière cette grille collée au mur. Le sifflement. Tarko en est certain maintenant, le son vient de là.

La poussière de l’endroit chatouille le loup qui éternue. Son éternuement comme aspiré, par la grille se répercute soudainement partout autour de lui. Perplexe devant ce phénomène Tarko jappe timidement devant la grille. Cette fois encore, le son résonne partout dans la pièce et dans le couloir. Amusé il s’essaie à produire nombre de sons, de grognements et autres gargouillis pour les entendre faire écho dans toute la bâtisse.

Le mâle au pelage bleu et fauve trouve très amusant d’entendre les bruits qu’il produit s’amplifier, se tordre et faire écho autour de lui. Il passe ainsi un moment devant la grille à inventer des sons de plus en plus étranges et bizarres. Un peu comme un enfant qui peut jouer pour la première fois avec ses cadeaux de noël, il trépigne et rit, les oreilles pointées en avant.

Alors qu’il prépare son prochain gargouillement, un autre loup entre dans la même pièce que lui et se manifeste. Son gargouillis lui échappe et se transforme en couinement de peur. Tarko fait un bond sur le côté de surprise, soulevant, au passage, un nouveau nuage de poussière. Il pose sa patte gauche contre sa poitrine pour calmer son cœur qui palpite alors trop vite. Quelle frayeur ! Il était persuadé d’être seul !

— Oh ! Salut ! Dit-il alors que son rythme cardiaque redevient normal.

Devant lui, un nouveau loup-oiseau. Aussi coloré qu’Asclepia, pense le solitaire. Ça doit être un trait spécifique.

{ Beetlejuice ! Beetlejuice ! Beetlejuice ! }

Mais le mâle n’a pas le temps de s’attarder plus sur la description de ce nouvel arrivant qu’une grosse toile d’araignée se décroche du plafond et tombe entre eux.

Une fois de plus Tarko fait un petit saut sur le côté de frayeur. Il est alors secoué d’un petit rire nerveux.

— Woaw ! Ça tombe en ruine ici ! Ahah …

Et bon sang ce que cette toile est grosse ! Assez grande pour recouvrir un loup ! L’araignée qui l’a tissée doit être énorme. Pas certain que cette pensée le rassure pour la suite …

Cette première frayeur passée, le solitaire reprend ses esprits. L’aviaire coloré porte sur lui l’odeur de la meute. Celle des Nakhus. Tarko penche la tête mais ne voit pas la petite lueur caractéristique aux porteurs de glowstick. Étrange, il lui semble, qu’en général, les loups se pressent d’obtenir leur si précieux bijou. Le bleu est également surpris de voir que l’autre ne se montre pas agressif à son égard. Après tout il est sur son territoire. Enfin bon, Tarko ne va pas se plaindre. Si tous les Nakhus sont aussi enclin à laisser les inconnus sur leurs terres pourquoi ne pas en profiter jusqu’au bout ? Le solitaire conserve cette information dans un coin de sa tête et se présente à son tour.

Il contourne l’épaisse toile échouée sur le plancher qui grince et est bousculé par Evan quand soudain un hurlement leur perce les oreilles. À nouveau Tarko sursaute. Et puis-ce-que ce manoir réserve bien des surprises on va ajouter un compteur de « petits sauts » juuuste là.


Voilààà.

Le loup à plume s’excuse et le bleu et sable balance sa tête pour lui faire signe que ce n’est pas grave.

— J’ai … rien vu non plus … Silence. On … doit bouger de là !

Ni une ni deux, Tarko passe la porte et fait signe à Evan de le suivre.

{ Beetlejuice ! Beetlejuice ! Beetlejuice ! }

Le loup en sortant de la pièce passe devant un meuble sur lequel se tient une bouteille au contenu sombre. il fronce le museau. la dernière fois, qu'il a trouvé une bouteille inconnue et en a bu, c'était avec Tris et il se souvient que l'alcool lui est monté à la tête à une vitesse prodigieuse. Non, non, non, pas question d'en boire et de risquer de finir ivre à nouveau.

Visiblement aussi à l’aise que lui, Evan le rejoint sans attendre.
Ils se retrouvent tous deux au milieu d’un couloir sombre et poussiéreux. Chacun de leurs pas fait grincer le paquet. Les murs sont abîmés. Ici et là on y trouve de larges taches de moisissures qui s’étendent. Le sol est jonché d’objets en tout genre qui, aux yeux de Tarko, ne ressemblent en rien à ce qu’il a l’habitude de voir sur le continent.

Le petit mâle ouvre la marche. Bien qu’il soit accompagné par un congénère, il n’est pas rassuré et chaque craquement, chaque ombre, lui fait rater un battement. Il sent une présence qui les observe et cela fait se dresser ses poils sur son échine. Soudain, Evan se raidit sur place. Tarko s’arrête et se retourne. Sans qu’il n’ai besoin de pose la question, l’hybride lui explique avoir vu quelque chose. Des … fantômes ? Intérieurement, le solitaire tente de se convaincre que ça n’existe pas avant de déglutir avec difficulté.

— J’ai … j’ai rien vu … moi …

Ses yeux bleus cherchent ce qu’il a raté. Pas de trace de spectre. Cet endroit doit leur jouer des tours. Il suffit d’un jeu d’ombre et de lumière bien positionné pour voir apparaître des silhouettes. Auto-persuadé qu’ils sont seuls, Tarko reprend sa marche.

— Je visite l’île et j’ai trouvé cet endroit. Alors, j’suis entré. Et toi, qu’est-ce’tu fais ici ?

Parler lui fait oublier son angoisse. Cela focalise son attention sur une seule chose et lui permet d’oublier un peu qu’ils sont dans un étrange manoir hanté.

{ Beetlejuice ! Beetlejuice ! Beetlejuice ! }

En même temps qu'il parle, il ne prend pas garde où il pose les pattes et l'une d'elle heurte un objet. Le verre roule sur le sol. Bah tient, après la bouteille, voilà le verre, à croire que cet endroit le pousse à la consommation.

Ils avancent tous les deux de couloirs en couloirs et ça n’en fini pas. Ce manoir est un horrible labyrinthe. Pourtant, il semble à Tarko que ça n’était pas aussi tortueux à son arrivée. Tandis qu’il écoute Evan, il cherche du regard des points de repères. Jusqu’à présent rien n’indique qu’ils tournent en rond. C’est un bon point, mais c’est également assez étrange. En effet, il n’avait pas imaginé autant de pièces et de couloirs dans un manoir de cette taille.

— C’tais peut-être moi, ouais. Mais avec tout c’qui s’passe j’suis plus trop certain.

Se fiant à son instinct, le loup commence a envisager de quitter cet endroit qui lui fait froid dans le dos. Alors, il avance, longeant toujours le même mur, les oreilles dressées sur son crane comme un radar pistant le moindre son suspect. Autant vous dire que sa concentration est à son maximum et que, lorsqu’une fois de plus, l’esprit qui hante ses lieux vient leur crier dessus, le solitaire perd les pédales. À l’angoisse s’ajoute la colère de l’incompréhension. Tout son corps est en tension. D’ailleurs on peut ajouter un point à notre compteur vu la frousse qu’il vient de se taper et le bond qu’il a effectué sur le côté.

Petits sauts : 4

— Ch’ais pas mais j’te propose qu’on s’tire en vitesse.

Sous la -mauvaise- surprise tout son poil s’est gonflé lui donnant une allure d’oursin. Il jette un coup d’œil sur Evan qui est toujours vivant et lui indique de le suivre. Ses pas se font plus pressés et ses foulées plus longues. Cette fois c’est décidé : il sort d’ici.

{ Beetlejuice ! Beetlejuice ! Beetlejuice ! }

Dans sa précipitation, il bouscule un meuble avec force et fait tomber des objets en tout genre dont un très bizarre qui porte des flammes qui brulent quelques poils de son flanc. Foutue baraque !

Pour être honnête, Tarko ne se souvient pas du chemin. Et cette foutue baraque le fait flipper alors il perd un peu ses moyens. Tout ce dont il se souvient c’est une grande pièce avec une ouverture. Celle par laquelle il est rentré. Suivi par le loup plumé qui semble aussi perdu que lui, le solitaire tente de rassembler ses souvenirs. Malgré ses efforts, ces couloirs se ressemblent tous.

{ Beetlejuice ! Beetlejuice ! Beetlejuice ! }

Dans chaque pièces des objets tous aussi étranges les uns que les autres. Sérieux c’est quoi ça encore ? Un vieux tissus dégueux ? De toute façon ça va pas les aider à sortir. Alors le loup passe son chemin et continu d’avancer inlassablement.

Finalement, il sent à nouveau l’air frais de l’extérieur glisser sur sa truffe. Ils ne sont plus très loin ! Pressé de retrouver le soleil Tarko suit le courant d’air et retombe, enfin, à son point de départ. Il se jette sur le rebord de la fenêtre et presse Evan de le suivre avant de sauter à l’extérieur du manoir. Dans son besoin de s’échapper il n’avait pas envisagé la hauteur du mur et tombe sur le sol maladroitement. Et même si il a un peu mal, la joie de retrouver l’herbe verte et le chant des oiseaux est plus forte.

— Oh putain on est vivant ! Plus JAMAIS je repose mes pattes là dedans !