Grains de sable sur la plage (ft Edessa)

La plage, ça lui avait un peu manqué, ce n'était certes pas l'endroit le plus utiles pour chasser, surtout qu'elle ne savait pas pêcher, l'échec cuisant avec Tarko le lui avait bien montré, mais cette légèreté, ce sentiment de calme alors qu'elle pourrait totalement se faire bouffer par une des bestioles du Nord, ça lui avait manqué, bon, faut dire aussi pour les immenses bestioles, elle était pas des masses au nord là.
Elle se couche, remue ses pattes dans le sable, profite avant d'aller chasser, c'est quand même pas mal d'être solitaire, pas besoin de nourrir les autres, pas besoin de patrouiller les frontières, elle pouvait régulièrement faire des pauses comme celle-ci, elle ferme les yeux, sentant le soleil matinal déjà haut dans le ciel, lui réchauffer le dos, et soupira, elle avait beau avoir un pelage couleur plage, elle venait rarement ici, et c'était pour une bonne raison, elle n'avait jamais envie d'en partir, alors pour s'épargner de douloureux adieux avec l'océan et le sable, elle se tenait à l'écart de ces lieux, en plus c'était là qu'on trouvait le plus de gens bizarres, les pirates sur leur île de l'autre côté, Fenouil écrasé par terre à l'Atoll, manque plus qu'un requin qui marche et elle aurait fait le tour.

Elle se relève, bon, temps d'aller chasser ce coup-ci, Elle regarde la mer, se détourne et soupire encore une fois, elle avait du sable dans les cheveux, ok, ça aussi c'était une bonne raison de pas s'allonger ici, s'éloignant un peu de l'eau, elle alla s'assoir un peu plus loin, tourna la tête de manière à bien voir les cheveux blonds et bleus, puis, après avoir secoué ses pattes avant, démêla à coup de griffes les mèches, faisant de son mieux pour ne pas grimacer quand ça tirait trop fort. Alors seulement elle les remit en place et se releva et étira ses pattes trop longtemps tenue en l'air, ce mouvement, elle aurait peut-être dû s'en passer car ce fut lui qui souleva un tas de sable qu'elle n'avait pas remarqué, et qui, coup de chance et de malchance à la fois, abritait un crabe, pas son repas préféré mais elle faisait avec ce qu'elle avait, elle tenta donc d'attraper l'animal, se jetant dessus patte en avant, mais la bestiole, et on ne pouvait pas lui en vouloir ce n'était que de l’instinct de survie, riposta, bon, bilan du "combat", une blessure au museau et un crabe mort. Et c'est la qu'elle la vit, la louve presque toute bleue, qui, de toute évidence, l'avait déjà vu, pas la peine de se cacher donc, ce qu'elle n'aurait pas fait soyons bien d'accord, alors elle s'en approcha sa proie dans la gueule, car pour tant faire parler ne lui ferait pas de mal, pas plus que le pincement du crabe en tout cas.
Elle s'arrêta à à peu près un mètre de la louve, la regardant directement dans les yeux, sans la détailler de manière flippante, pas besoin, elle avait remarqué ce dont elle avait besoin quand elle n'était pas aussi proche, comme la dague à sa ceinture par exemple.

-Hum, bonjour ?

-Edessa-

La louve au pelage frisé trottait sur le sable, sa longue tresse battant le vent dans son dos. Elle avait prévu de pécher dans la matinée, mais la mer en avait voulu autrement : versatile et changeante, les courants étaient trop forts pour Edessa, et le simple fait de nager l'avait vite épuisée. Elle s'était séchée au soleil, mais la faim demeurait. Heureusement, la louve s'était habituée à la plage, et connaissait tout un tas d'endroits ou elle pouvait trouver des crustacées, des coquillages et des algues pour se nourrir. Concentrée, elle avait remonté la bande sableuse, le son de la mer rythmant ses pas et le soleil du printemps caressant son pelage à peine sec. La vie était belle, ici, mais il manquait quelque chose à Edessa.

Ce quelque chose, c'était les autres. Depuis qu'elle avait quitté sa famille, elle était restée seule. Au début, ce fut une libération : elle pouvait enfin faire ce qu'elle voulait, dormir et manquer quand elle voulait, faire pousser ses cheveux et ses poils sans aucun restrictions. Mais bien trop vite, la solitude se mit à lui peser. Edessa n'était pas une louve solitaire, même si ses relations étaient parfois conflictuelles. Elle avait besoin des autres, ne serait-ce que pour avoir quelqu'un avec qui se disputer gentiment. Elle en vint presque à regretter sa fratrie, c'était dire. Alors lorsqu'elle vit une silhouette sur la plage, sa plage, elle s'arrêta net. Son instinct lui conseillait de s'éloigner : les autres pouvaient être dangereux, et elle n'était clairement pas en mesure de tenir tête à un loup plus fort ou plus dominant. Mais son cœur lui hurlait d'aller voir, ne serait-ce que pour avoir quelqu'un avec qui parler. De loin, elle voyait l'autre chasser un crabe, et ne semblait pas agressif. Sa décision fut vite prise : elle irait.

Elle s'avança doucement, la tête basse, les yeux méfiants. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas parlé à quelqu'un, préférant éviter les autres. Elle n'avait néanmoins pas oublié les codes : la queue basse, la démarche souple, pas d'agressivité. L'autre finit par la voir, et se rapprocher un peu, le crabe dans sa gueule. Elle la salua, et Edessa se figea, tojours un peu méfiante. Elle répondit :


C'était un sujet de conversation comme un autre, juste pour tester la femelle en face. Edessa plissa très légèrement les yeux, détaillant la réaction de l'autre. Il n'y avai à priori aucun danger, mais ça serait trop simple, non ?

L'autre aussi avait l'air méfiante, mais pas agressive, une bonne chose déjà, même si son esprit restait aux aguets, son corps se détendit, et un faible sourire se dessina sur ses babines, nul besoin de lui montrer ses précautions puisque la louve en face était calme et saine d'esprit, d'autant plus qu'elle lui donnait directement sa demande.
Mais n'étant pas une grande chasseuse de crabe, la beige n'avait strictement aucune idée de comment en attraper. Fallait faire avec, désolé louve probablement affamée.

-Dans ma gueule ? Non plus sérieusement c'était un coup de chance celui là, désolé.

Et enfin elle se décida à poser la pauvre bête par terre, sans quitter la bleue des yeux car au cas où, puis elle pensa à quelque chose pour passer outre sa méfiance.
Alors elle pointa le crabe au sol:
-Mais si t'en veux te gêne pas, promis il est comestible, enfin je crois...

Finalement, ses capacités à discuter n'étaient pas si mauvaises, surtout en ce qui était de jouer l'idiote, c'était peut-être juste à cause de Fenouil alors, ce qui pourrait se comprendre, et elle y avait déjà pensé, un loup dinosaure qui cherche d'autre loups dinosaures ça avait de quoi surprendre. Elle était heureuse de voir que finalement, elle arrivait à se faire comprendre, elle était plus à l'aise quand les autres ne se méfiait pas d'elle car ils avaient moins de chances d'essayer de l'égorger, ce qui ne l'empêcherait pas de ne pas lui tourner le dos ni d'arrêter de faire la conne.

Elle disait volontiers adieu à une partie du crabe, en manger la moitié lui suffisait, puisque de toutes manières, elle devrait chasser autre chose avec, le crabe étant trop petit pour la nourrir complètement.

-Edessa-

La louve lui répondit bon grés mal grés, le crabe dans sa gueule, qu'elle avait attrapé celui-ci d'un coup de chance. Mmmh, dommage, Edessa n'aurait pas dit non à un repas déjà tout trouvé, mais elle saurait se débrouiller. Elle avait vécu un peu de temps déjà sur la plage, ne cherchant pas à s'aventurer plus loin car l'océan lui suffisait comme seule demeure. La louve posa le crabe au sol, puis lui proposa un morceau. Edessa baissa les yeux sur l'animal vivant, un vent de méfiance la prenant. Et si elle l'avait empoisonné ? Il y avait peu de chance, mais ... Elle ne pouvait pas prendre le risque.


Elle releva le regard, se sentant un peu rude avec l'autre. Pourtant elle n'avait pas envie de partir tout de suite, pour une fois qu'elle avait trouvé quelqu'un avec qui parler qui ne semblait pas agressif. Alors, un peu gênée et ne sachant pas vraiment continuer la conversation, elle continua :

Elle haussa les épaules, restant un peu déçue, même si elle aurait peut-être réagit pareil. Elle baissa enfin les yeux de son interlocutrice pour casser la carapace du crabe et en prendre une bouchée, puis elle releva le regard, ne voulant pas être impolie ou vexante.

-Non, c'est... assez rare en fait.

Et c'était vrai, elle ne donna pas plus de détails, car c'était inutile, elle n'avait pas grand chose à raconter, la louve bleue, par contre, même si elle était plus prudente, n'avait pas du tout l'air du coin, et la louve blonde avait bien envie de savoir ce qui avait pu la faire partir de là où elle vivait, si elle avait fait un crime assez horrible pour lui valoir un exil, ou si comme certains ici, elle avait fait face à des créatures immenses bien trop dangereuses pour les pauvres loups qu'ils étaient.

-T'as pas non plus l'air du coin... tu viens d'où ?

Sincère curiosité dans ces paroles, même si elles n'étaient pas teintées d'innocence.

-Edessa-

La louve entreprit de commencer son crabe à coup de crocs. Leur carapace était dure, mais l'intérieur était plus tendre que n'importe quel lapin ou oiseau. La louve à la tresse la regarda faire, regrettant un peu de ne pas avoir accepté. Mais à présent il en allait de son honneur, elle ne pouvait plus reculer. Et puis, qui sait, si ça se trouve la louve en face avait bel et bien empoisonné le truc, et était immunisée à son poison ? Non, elle ne prenait pas de risque. Elle ne savait pas si sa famille lui en voulait encore d'être partie, mais c'était probable. Ses parents étaient bien trop pétochards pour venir la chercher, mais ses frères peut-être ? Ou bien embaucher quelqu'un pour la faire disparaître, elle et ses maudits gènes de mouton ? Oui, c'était possible ça.

Alors que ses pensées se concentraient sur son assassinat certain, la louve confirma n'avoir que rarement arpenté la zone. Ce qui expliquait pourquoi elle n'avait jamais croisé la routé d'Edessa. La rousse n'allait pas vers la détente, et la question de l'autre raviva encore ses suspicions : voulait-elle savoir d'ou elle venait pour être sûre qu'elle était bien celle à tuer ? D'un coup d'oeil, Edessa évalua ses chances. Elle n'avait pas l'ai très forte, mais la louve à la tresse ne l'était pas non pus. Peut-être en fuyant ... Mais non, elle la retrouverait. Que faire ? Sur la défensive, la louve ne réfléchit pas tellement avant de répondre, d'un ton plus sec :


Elle plissa les yeux, suspicieuse, évaluant sa réaction. D'une voix lente, elle continua, sentant ses muscles se préparer soit au combat, soit à la fuite.

Cette fois-ci, plus de sourire, face à cette agressivité, la louve relève la tête, pour vérifier si elle est en danger, et ça ne la rassure pas, car elle voit les muscles de l'autres se tendre sous la fourrure bouclée, elle n'arrive pas à savoir si la bleue a peur, mais elle ne voit pas d'autre provenance possible de cette attitude, elle oublie le crabe, comme si il n'était plus là, ce n'était plus la priorité, ses paroles avait été une erreur, elle s'en rend compte, mais elle aurait du le prévoir, elle recule d'un pas, car ce qu'elle allait dire était risqué, elle qui ne savait pas de quoi son opposante avait peur, mais elle tenait à savoir à quel point elle était dans la merde, et l'affrontement n'était pas forcément évitable, elle essaierait cela dit...

-Ca peut me faire que si t'as tué quelqu'un j'te veux pas ici.

Son ton était calme, froid, absolument plus amical comme juste avant, car la méfiance s'était transformée en crainte, et que Tris n'allait pas se laisser attaquer.

-Si t'as l'intention d'attaquer, perds pas ton temps, sinon, explique.

Elle restait prête à recevoir un coup, ou à l'esquiver, car la bouclée ne semblait pas prête de retrouver son sang froid.

-Edessa-

Le ton avait changé. L'atmosphère aussi. Malgré le soleil qui frappait le sable, il faisait soudain plus froid entre les deux louves, qui ne se quittaient plus du regard. Le crabe avait quitté les esprits des deux solitaires, obnubilées par le potentiel danger de la situation. Et dans l'esprit d'Edessa soudain, le doute : avait-elle fait le bon choix ? D'aborder cette louve, de s'approcher, de se rendre plus vulnérable qu'elle ne l'était ? La louve frisée n'arrivait pas à savoir si réellement elle avait quelque chose à voir avec ses parents ou sa fratrie, car seule la suspicion pouvait se lire dans ses yeux. Une suspicion qu'Edessa partageait envers l'inconnue. Au moins, ça leur faisait un point commun.

La louve recula d'un pas. Elle n'allait pas attaquer, si c'était ça la question. La situation entière se pouvait d'être un énorme malentendu, après tout : si la louve était belle et bien envoyée par sa famille, pourquoi ne l'avait-elle pas déjà attaquée, profitant de la surprise ? Cela n'avait pas de sens. mais Edessa faisait confiance à son instinct plus qu'aux paroles d'une louve qu'elle venait à peine de rencontrer. Elle répondit, d'une voix lente et basse :


Une mouette dans le ciel lança un cri perçant. Le vent courut dans les cheveux frisés d'Edessa, comme en anticipation. Le calme avant la tempête ? La solitaire ne s'était jamais battue, préférant fuir ou éviter tout simplement les dangers. Mais elle savait ses crocs acérés, et défendrait sa vie coûte que coûte si besoin était. Elle n'était pas venu sur cette plage pour mourir.

La frisée recula d'un pas aussi, toujours aussi suspicieuse, Tris n'y réagit pas, attendant d'abord une réponse, qu'elle obtint assez vite. Plus concentrée sur les gestes de l'autre, elle ne comprit pas tout de suite et pencha légèrement la tête sur le côté d'incompréhension.

-Oh...

Ses yeux s'arrondirent quand elle comprit, et sa posture se laissa quelques instants emporter par la surprise, la faisant se redresser, mais elle se corrigea et se remit en position de manière à pouvoir réagir en cas d'attaque. Son esprit tournait à plein régime, elle doutait que l'autre l'attaque si elle ne faisait ni ne disait rien de plus, mais sans savoir ce qui s'était visiblement passé avant que la bleue vienne ici, elle ne pouvait rien confirmer.

-Non.

La blonde lui aurait bien montré sa bonne foi, mais ce n'était clairement pas le moment pour faire un geste suspect et la plupart des gestes pouvait paraître suspect quand on avait peur de se faire tuer, quelque soit la raison pour laquelle la louve avait des mercenaires sur le dos, ou craignait d'en avoir, la solitaire attendrait de voir si elle se calmerait au moins un peu avant de poser la question.

-Edessa-

Alors que la frisée avait répondu, la louve en face se détendit un peu. Une expression surprise se peignit sur sa face, ce qui étonna un peu Edessa. Elle pensait vraiment avoir l'allure d'une tueuse ? Il était vrai qu'elle avait une dague à la ceinture, dague qu'elle avait confectionné elle-même à partir d'un vieux morceau de métal et de bouts de bois, pour se défendre. Elle n'avait jamais vraiment eu à l'utiliser, même si elle s'y était entraînée, un peu. En un sens, cela flattait son égo, de paraitre aussi dangereuse. En un autre, elle se doutait que la solitaire était peut-être aussi flippée qu'elle sur les inconnus.

Edessa sonda les iris de la louve, cherchant une trace de mensonge, mais elle n'en trouva pas. Elle se détendit un peu. Il y avait énormément de chances qu'elle ne soit qu'une solitaire comme elle, et pas envoyés par ses frères. Mais la frisée ne voulait pas se détendre entièrement. Elle détourna les yeux, regardant la mer, tout en surveillant la louve dans un coin de son regard. D'une voix plus posée, elle répondit :


Elle coula un regard un peu en coin à la louve. Clairement, elle restait sur ses gardes, mais un statut quo avait été trouvé. Elle aurait pu partir maintenant, mais la méfiance de la solitaire l'interrogeait. Elle demanda :

L'autre parut se calmer, pas totalement car Tris voyait bien ses yeux jaunes fixé sur elle, alors la beige fit de même, se mit plus confortablement, toujours debout, mais les muscles moins tendus, les pattes plus serrées, intérieurement par contre, rien ne changea, le comportement de l'inconnue était devenu agressif trop rapidement, il était donc dangereux pour elle de se laisser distraire par quoi que ce soit.

-Ca dépend, dans les solitaires, je crois pas, mais dans les meutes, je peux rien te promettre, après, tant que tu leurs cherche pas d'ennuis, ils viendront pas te chercher ici.

Elle ne faisait toujours pas confiance aux meutes, même en ayant croisé des etelkrus assez bien élevés, à l'exception des nakhus, elle avait entendus trop d'histoire sanglantes sur eux de la part de son mentor, et quand bien même il aurait pu en inventer, elle préférait se méfier d'eux, ils avaient quand même des dieux qui distribuaient ouvertement des pouvoirs à des loups territorialistes et égoïstes. Et pour les pirates et bien, disons qu'elle était bien d'accord pour qu'ils gardent leur malédiction et qu'ils laissent les loups normaux en paix.

-Quoique, t'as fais quoi pour en avoir sur le dos ? Y'en a p'têtre qui t'ont suivi ...

Sérieusement ... Dans quoi est-ce qu'elle s'était embarquée, Tris, elle voulait juste parler deux minutes à quelqu'un et bouffer son crabe... Tiens d'ailleurs en parlant du crabe, qu'est-ce qu'il devenait, lui ? Elle irait peut-être le chercher plus tard, ne voulant pas s'approcher plus que de nécessaire de la louve bleue.

-Edessa-

Edessa écouta attentivement la louve beige, récoltant les informations tout en restant critique. Mais elle pensait avoir cerné un peu la louve solitaire, du moins, elle pensait pouvoir lui faire un minimum confiance. Rien ne collait pour la laisser penser à un danger potentiel avec elle, si ce n'est simplement sa propre agressivité. Alors, elle préférait détendre un peu l'atmosphère plutôt que de chercher à tout prix l'erreur de l'autre. Et avec tout ça, elle avait toujours faim. Apparemment, le danger venant des solitaires était peu probable, les claniques eux restaient chez eux. La frisée hocha la tête, c'était ce qu'elle avait cru comprendre. Elle était passée très proche du territoire d'une des meutes en venant, et de ce qu'elle avait vu, personne n'était venu lui chercher des noises. Mais elle avait fait attention à bien rester chez elle et à ne pas trop s'approcher des marquages puissants de la meute.

A la question de la solitaire, Edessa releva les oreilles et les yeux. Ce qu'elle avait fait ? Pas grand chose à vrai dire. Son seul tord était probablement d'être bien trop méfiante, mais pouvait-on vraiment le lui reprocher ? Elle secoua la tête, sa longue natte tombant sur son épaule. Elle ne savait pas si on l'avait suivi, elle en avait eu l'impression mais c'était peut-être simplement son imagination qui parlait. Elle avait tendance à toujours suivre son instinct, et ici, elle se sentait en danger sans qu'elle ne sache vraiment pourquoi.


Elle lança un petit sourire à la louve, espérant gagner un peu de sympathie de sa part. Elle se doutait avoir déjà ruiné toute chance de faire de la louve beige une amie, mais au moins, elle n'en ferait pas une ennemie. Et puis, c'était bien connu : en période de chaleur, certaines louves étaient ... tendues, sur les nerf. Edessa était de celles-ci, surtout depuis qu'elle avait quitté la sécurité de son ancien foyer.

Ah, pas faux, Tris n'étant pas aussi tendue pendant les chaleurs, elle n'avait pas pensé que cette période puisse lui créer des ennuis avec une femelle aussi, quoiqu'elle n'était à l'abri de rien...

-Hmmm... Oui, pas faux.

Le sourire de la bleue n'inspirait pas vraiment confiance à la beige même si l'atmosphère s'était détendue, mais elle comprenait son problème, si elle était un brin parano naturellement et que le monde lui donnait toutes les raisons de l'être encore plus, pas étonnant qu'elle se braque facilement. La blonde baissa un peu la tête, soupira, elle n'était pas bien mieux, elle aussi n'avait pas réagi de la manière la plus... adaptée, mais à l'origine, elle voulait juste manger son crabe et discuter un peu, bon, ce n'est jamais trop tard pour manger...
Elle marcha lentement, attrapant son crabe par la pince pour le traîner là où elle se trouvait à l'instant, fallait pas rêver, même si c'était pas sa priorité tout à l'heure, elle allait pas l'oublier, lui. Elle ne quittait pas la louve des yeux, restant sur ses gardes. Une fois ce déplacement fait, elle releva la tête, préférant demander avant de manger.

-Il s'est passé quelque chose pour que tu parte de chez toi ou c'est juste l'appel de l'aventure ?

De la manière dont elle parla de l'aventure, on pouvait comprendre que ça lui paraissait stupide, des loups qui sans aucune raisons quittait famille et amis pour jouer dehors et après chouinait parce que ohlala iel a croisé quelqu'un de méchant, faut dire que c'était logique, tous les loups adoraient qu'on les fasses chier. Elle n'aimait pas non plus beaucoup que les petits etelkrus quittent leur meute, pareil pour les raeders, leur éducation ne devait pas être adaptée au monde des solitaires. Ou alors la louve bleue était comme elle, comme Méridor ou Fenouil, peut-être n'avait-elle pas eu le choix, soit de partir, soit de naître seule et nomade, peut-être que ceux qui s'occupait d'elle petite ne méritait pas qu'elle reste, elle aurait compris, elle aurait été pareilles, mais Tris ne se contentait pas d'un peut-être, elle se méfiait toujours, sans doute un peu trop mais l'attitude explosive de la louve ne lui avait pas vachement aidée sur ce coup là, quoi qu'il en soit, la beige doutait de la louve et voulait savoir, si c'était une faute ou une injustice, si la louve mentait, elle le verrait, dans ses yeux, car elle savait le voir, elle n'espérait juste pas que ça la rebraquerait et que ça retourne en tension.

-Edessa-

Les paroles de la louve frisée semblèrent avoir fait plus ou moins mouche. Les chaleurs touchaient presque toutes les femelles, et beaucoup étaient inconfortables, sans même parler des agressions potentielles lorsqu'elles étaient solitaires. Mais cela n'était pas suffisant pour que les deux femelles se fassent confiance. L'atmosphère était toujours tendue, et Edessa commençait à être à court de choses à dire pour vraiment améliorer les choses. Mais est-ce qu'elle le voulait vraiment, améliorer les choses ? Il valait mieux que les deux femelles se séparent, c'était plus sur maintenant. La frisée avait faim, et elle avait l'impression que la solitaire ne l'attaquerait pas. C'était suffisant pour se séparer à présent.

La question de la beige la prit un peu au dépourvu : elle cherchait à savoir les raisons qui poussaient Edessa à être partie. La louve bleue, méfiante, ne répondit pas tout de suite, essayant de jauger celle d'en face. Elle n'avait pas l'intention de lui dire quoi que ce soit sur elle, c'était pas ses affaires après tout. Elle renifla, les embruns marins emplissant sa truffe avec délice, avant de répondre en haussant les épaules, évasive :


Elle tourna la tête avant de renchérir :


Elle lui lança un dernier regard, neutre, avant de s'en retourner pour chercher d'autres crabes à se mettre sous la dent.

Belle esquive
Elle devait le reconnaître, elle préférait qu'elle évite la question plutôt qu'elle ne s'énerve à nouveau, alors elle n'insista pas, quoi qu'il se soit passé, l'autre n'allait pas le lui dire et Tris n'était pas prête à risquer des blessures par curiosité, elle laissait tomber, ne réagit pas, tout comme elle ne réagit pas quand elle dit qu'elle s'en allait pour manger, peut-être que c'était vrai, peut-être pas, mais qu'elle lui mente pour ça la dérangeait moins puisqu'elle partait, emportant le danger qu'elle représentait loin d'elle.

-Et je m'appelle Tris. Au revoir je suppose ...

Elle put se détendre, et un sourire, faible mais bien présent, apparu sur ses lèvres, comme pour le faire remarquer, bien que ce ne soit pas l'intention première de la louve.

La beige porta son crabe plus loin, en faisant le moins tomber possible, puis le posa pour le déguster tranquillement, son museau commençait à la piquer, faudrait qu'elle nettoie ça histoire de pas avoir de cicatrice.
La rencontre avec Edessa n'était pas oubliée, mais le flot de ses pensées reprenait puisqu'il n'y avait pas eu mort de loup.