La pêche pour les nuls [Libre]

Il fut un temps, pas si lointain, où beaucoup disaient que ce lac était mort. Mais quand il s’y pointa pour la première fois, il en fut bien désappointé. Il y découvrit la vie et les espoirs d’une meilleure vie. A croire qu’une meute pourrait s’y établir. De quoi le faire rire. Cette utopie que les solitaires et anciens membres d’une meute, dont il avait oublié le nom, projetait, pour lui ce n’était que de la poudre aux yeux, un vulgaire moyen de se sentir moins seul.

Seul.

Depuis combien de jours n’avait-il pas croisé quelqu’un d’ailleurs ? Robb haussa les épaules et continua de longer mollement la rivière pour atteindre le lac. Il n’avait guère mieux à faire par ce temps, trop de soleil, trop de bonheur alors que lui s’ennuyait ferme. Se chercher un petit passe temps, ça c’était une chose, une autre était de la trouver.

Le nabot mit un temps qui lui sembla si long mais enfin, il entrapercevait les bordures du lac. Des roseaux, des tas et des tas de roseaux, des oiseaux, des tas et des tas de piaf. La salive lui monta entre les crocs instinctivement. Un sourire malicieux aux creux de ses babines, et le voilà à couler le plus silencieusement possible derrière les tiges souples. Son corps se rassemble et d’un bond magistral pour lui, il traverse le mur végétal et se vautre dans la flotte. Sortant son museau de là, il se met à râler :

« Merde à la fin ! »

La nullité du solitaire pour la chasse n’était plus à faire et son ventre commençait à gronder. Il se mit à geindre :

« Pas des baies, pas encore ! »

Seule chose qu’il arrivait à chasser correctement avec les souris et les lézards. Mais tout ça n’était qu’un maigre tribut. Peut être devrait-il passer chez les Etelkrus ? Le souvenir de la louve bleu lui tira un sourire. Encore fallait il que le jeune sot se mette à glaner des infos utiles. Quelque chose lui glissa entre les pattes alors que son fessier restait gentiment calé dans l’eau entre les roseaux. Advienne que pourra, aujourd’hui la pêche serait de la partie. Robb se releva, mit ses lunettes sur son front laissant ses yeux d’azur au grand jour et attendit patiemment sans bouger. Une silhouette grise dandina et son museau claqua d’un coup sec dessus.