Mange pour vivre (Libre)

Elle était arrivée dans les plaines tranquillement à peine essoufflée. Tandis qu’un grondement sonore lui rappela qu’il fallait peut-être se nourrir un peu, elle balaya de son regard péridot l’endroit et se mit le museau en l’air pour débusquer quelques proies.

Son nez fila enfin vers le sol suivant une piste, sa longue queue touffue dépassait largement des herbes hautes. Son corps fin fila agile entre la verdure s’arrêtant à un petit caillou, puis un buisson. Elle était concentrée et malgré le manque de fraicheur de la piste elle fini par remonter jusqu’à un petit terrier. Mais son occupant avait dû quitter les lieux un peu auparavant.

Elle tourna autour de la tanière et repéra le bon filon qu’elle se remit à suivre avec fébrilité, tout en restant à couvert du vent. Avançant doucement et scrutant les herbes avec patience, elle se stoppa lorsqu’un mouvement passa sous ses yeux.

Identifiant la créature comme un lapin elle le laissa aller un peu pus loin et s’approcha tout doucement avant d’entamer sa course poursuite en veillant à bien lui barrer la route.

Elle attrapa sa proie par les oreilles juste avant qu’il bifurque pour l’éviter et n’attendit pas plus longtemps pour lui tordre le cou. Satisfaite elle esquissa un sourire léger et pris sa proie avec elle pour la manger à l’écart.

Elle s’installa sur un rocher à découvert et planta ses crocs pour se sustenter. Occupée à manger elle ne fit pas attention ou en tout cas moins attention aux bruits qui l’entouraient. Si bien qu’elle ne se rendit pas compte que quelque chose ou peut-être quelqu’un l’observait, et encore moins que cela s’approchait.

Elle continua de manger, appuyant avec ses pattes avant et tirant avec ses crocs pour arracher la viande avant de la mâcher et de l‘engloutir avec satisfaction.

Artémis enfournait tout juste une bouchée dans sa gueule lorsqu’une masse non identifiée se colla soudain à son arrière-train. C’était quelque chose de doux mais glissant un peu froid par endroit.

«Que ?! Mais… qu’est-ce que ?! »

Ne l’ayant pas vu arriver et ne sachant ce dont il s’agissait la brune avala de travers et fit un bon de côté d’au moins un mettre de côté. En effet, la surprise avait été telle que les réflexes avaient parlé d’eux même la faisant lâcher sa carcasse sur le coup.

En toussant et crachotant, elle recula encore d’un bon pas pour prendre encore un peu de recul et pouvoir découvrir quel était l’instigateur de cette sacrée frayeur. Ainsi, sous ses iris de Jade, elle découvrit l’auteur de son malaise. Devant elle se tenait une créature à l’allure mi-lupin mi-requin, elle écarquilla légèrement les yeux encore un peu sous l’effet de la surprise et prit le temps de détailler davantage l’intrus. Après tout, depuis qu’ils avaient débarqué ici avec Alphonse, elle commençait à se faire aux particularités physiques de leurs habitants, pourquoi rester étonnée aussi longtemps ? Elle secoua légèrement la tête pour se reprendre.

De petite taille ? Ça oui. Était-ce encore un enfant ? Le doute était permis. Elle opta pour en effet plus jeune qu’elle quant à dire à quel point elle ne se prononça pas. Ce disant qu’il était quand même bien jeune, elle ravala quelque peu les injures qu’elle s’apprêtait à lâcher sur lui et s’adoucit.

Elle baissa la tête et se pencha pour se mettre à la hauteur de l’inconnu. L’observant encore un instant sans rien dire… Il lui sembla entendre le même grondement qui avait tiraillé son ventre quelques instants auparavant. Le petit être lui sembla même plutôt en détresse. D’une voix qu’elle voulait douce, elle s’adressa à lui.

« Faut pas me faire de frayeur comme ça, tu sais ? »

Un nouveau gargouillement lui confirma sa première intuition. Son regard chercha alors des yeux ce qu’il restait de son maigre repas. Il était bien là où elle l’avait laissé. Et bien qu’elle ait failli s’étouffer avec son morceau et qu’on eut interrompu son repas, elle se rapprocha de la carcasse et la pointa d’un mouvement du museau tout en s’enquérant de l’état de l’autre.

« Tout va bien ? Si tu as faim sers toi… J’en chasserai un autre. »

Elle resta penchée en attendant de voir ce qui allait se passait tout en retrouvant une respiration normale au fur et à mesure.

Au final, la petite créature qui l’avait percuté semblait encore plus confuse qu’elle.

Artémis s’attacha à rester à sa hauteur pour être plus accessible.

Il fallait bien l’avouer la bouille de l’aquatique, dans cet état, était assez touchante. Le visage de la brune s’adoucit alors davantage en le voyant aussi abasourdi et perdu. Elle l’observa interagir avec la viande et s’étonna de le voir réagir ainsi, mais elle devina bien vite qu’il ne devait pas connaître d’autant plus avec les quelques paroles qu’il prononça.

Se rapprochant de lui comme s’il s’agissait d’un enfant, un fin sourire aux babines, elle employa son ton le plus doux encore une fois.

«Effectivement, ce n’est pas du poisson… On appelle ça un lapin. Et il n’a pas d’arrête, mais des os... C’est à peu-près la même chose, il ne faut pas les manger. »

Rapprochant à nouveau la carcasse d’elle, elle en préleva délicatement un morceau qu’elle mâchonna tranquillement. En faisant cela elle espérait montrer à ce petit qu’il n’avait rien à craindre. Elle laissa même échapper un soupir d’aise à la fin de sa bouchée pour signifier que c’était très bon.

« Tu vois ? c’est bon pour les ventres affamés ! Tu peux goûter si tu veux. »

Elle rapprocha à nouveau la carcasse du requin d’un petit coup de patte. Puis se coucha devant, observant et se demandant s’il allait se laisser tenter ou pas.

Tout en l’observant, elle se demanda d’où il venait. Bon un milieu aquatique semblait s’imposer ça oui, mais le petit avait l’air perdu. Avait-il perdu sa famille ? Ses parents, est-ce qu’il avait besoin de retrouver un point d’eau pour vivre? Tant de questions qui bouillonnent et traversèrent son esprit. Elle le laissa découvrir la viande de lapin à son rythme et sans parler davantage. Après tout laisser l’autre respirer était souvent une bonne chose dans ce genre de situation.

Après un petit moment, elle se décida quand même à poser la question.

« Mais dis moi, tu as l’air perdu, tu as besoin d’aide ? »