Emporte le vent sur la falaise [Nirvana]

Samaël

Avec le temps, Samaël comprenait un peu mieux l'attrait que pouvait avoir certains Etelkru au fait d'aller se rendre au temple de leurs dieux. Il doutait cependant qu'ils soient suffisamment paradoxalement assez disciplinés pour réellement offrir honneur et prières à l'entité de leur culte mais comprenait la sensation d'apaisement au moins temporaire de venir y confier ses doutes et ses problèmes. Samaël n'était jamais retourné au temple depuis son épreuve, ne ferait pas l'affront à la déesse de retourner là où il avait échoué. Cependant, la broche qu'il avait obtenu à défaut de glowstick, qui lui rappelle tout de même une certaine légitimité lui permettait de pouvoir se vider un peu la tête lorsque le prince déchu s'accordait une promenade le long des falaises.
C'était un peu comme si le vent emportait avec lui les pensées qui pullulaient dans son crâne, comme s'il le nettoyait, rendait le réceptacle vide pour le laisser se remplir à nouveau toujours bien trop vite. Samaël appréciait aussi le fait qu'au final, le côté abrupte des falaises en faisait un terrain trop peu exploitable, chassant naturellement la plupart des Etelkrus qui n'y trouvaient pas forcément d'intérêt. Il aurait cependant manqué d'un tout petit peu de chaleur par moment mais lorsque le soleil était haut, le mâle brun pouvait simplement ce poser là, assis sur le bord d'un chemin étroit aux pierres un peu coupantes, museau au vent et les yeux clos appréciant les rayons de soleil qui venait taper sur la roche et le pelage. S'il parvenait à ignorer le sons des vagues et l'odeur de la mer, il pouvait presque retrouver quelques souvenirs regrettés.

Au final, la solitude avait quelque chose d’apaisant. Nirvana avait croisé le moins de loups possibles, se consacrant principalement aux visites au temple de Dairo. Tout devait l’éloigner d’Iris, car elle ne voulait pas le recroiser pour le moment. Ce qu’il avait dit, le fait que malgré toutes ces années, il ne comprenne pas…
Nirvana en était lasse.
Son dos reposant au fond de l’eau, son museau était tourné vers la surface, observant la lumière. Personne ne viendrait ici. Encore moins ses frères.
Elle ne savait pas depuis combien de temps elle reposait là, le temps était difficile à estimer.
Au bout du compte, être la seule Etelkrus à pouvoir être ici, c’est un avantage.
Personne pour empoisonner mes pensées.
Personne pour m’empoisonner.

Une bulle qui s’échappe de sa gueule, avant que la sirène ne regagne la surface. Son apparence reprenant petit à petit sa normalité.
Trempée, elle secoua sa tête pour ses cheveux. Les écailles sur ses pattes disparaissaient progressivement (même si à présent certaines restaient, devenant un peu plus voyantes). Dorénavant, la sirène se moquait que les autres sachent pour sa nature aquatique, ne se souciant guère des regards des autres.
Aussi, elle n’eut pas de réaction particulière en remarquant au loin un Etelkurs. Samaël. Pas totalement disciple de Dairo, mais plus légitime que certains.
Nirvana était toujours heureuse de voir des gens liés à Dairo.
Parce qu’ils avaient forcément un point en commun.

« — Bonjour Samaël ! »

Toi au moins tu ne portes pas ce rouge.
La louvette se rapprocha, un sourire étirant ses babines.

« — Tu viens pour voir Dairo ? »

Ou simplement observer l’océan ?
Quelle ironie, les Etelkrus détestent ceux liés à l’océan mais ne peuvent s’empêcher de regarder.

Samaël

Un roulis de pierre lui fit ouvrir l'oeil et ce fut sur la prêtresse de Dairo que le regard doré de Samaël s'arrêta bine avant qu'elle ne le salue. Puisque le mâle brun venait de temps en temps à proximité du temple de la falaise, ce n'était pas si rare qu'il croise la petite louve tachetée mais leurs échanges avaient rarement dépassé la salutation courtoise.

« Bonjour prêtresse Nirvana »

Samaël gardait cette tendance à se montrer parfois trop formel, notamment envers ceux portant les rangs qui se détachait des autres ou qui sied particulièrement à un individu, les tocs d'une vie passée. Nirvana semblait n'être trouvable qu'aux abords du temple de sa déesse ou de sa mère, il était difficile de l'imaginer autre chose que liée à son rang de prêtresse.

Simple échange de salutations courtoises comme à chaque fois, mais peut-être que cette fois-ci, la louve n'avait particulièrement rien à faire, à moins que ce ne soit lui qui ne renvoie cette image mais la prêtresse poussa la conversation à une banalité supplémentaire. Samaël ne sut trop quoi répondre durant les premiers instants.

« Hé bien... Oui et non je suppose. Il n'est pas rare que je pousse la marche jusqu'aux falaises à cause de la présence du temple mais je ne m'y rend jamais véritablement. »

Il n'y allait plus depuis le semi échec de son épreuve, ne sachant trop où se placer mais n'y avait été qu'une seule fois pour cette dite épreuve également. Que pouvait elle bien en penser, la prêtresse de la renarde, d'un loup qui n'était pas parvenu à obtenir un véritable glowstick? Et les Etelkrus? Samaël ne cachait pourtant pas sa proche pour autant.

Hésitait-il ? Nirvana ne le pressa pas, le laissant chercher ses mots.

« — Veux-tu que nous nous y rendions ensembles ? »

Nul besoin de déranger Dairo, simplement lui rendre visite, montrer sa présence dans le temple. Pourquoi pas lui raconter des banalités ? Nirvana avait l’impression d’être la seule à faire cela, se confier à sa déesse. La Renarde n’avait aucun besoin d’utiliser son omniscience sur sa prêtresse, car cette dernière n’avait aucun secret, lui révélant absolument tout. Dans les moindres détails.
C’était ainsi depuis l’enfance.
Les amis étaient rares.
Les liens familiaux s’effritaient.
Mais la déesse, elle, toujours demeure.
Le regard pâle de la sirène fixe la broche de l’Etelkrus. Glowstick ou non, Samaël restait rattaché à Dairo, c’était tout ce qui importait. Le ton est calme, lorsqu'elle prend la parole.

« — T’ont-ils jugé ? »

Ces idiots.
Ils ne comprennent pas ce que c’est d’aimer un dieu.
Quand pour eux, tout se résume à se battre et offrir des trophées à leur divinité.

Samaël

Samaël laissa échapper un soupir, bien plus pour lui que pour Nirvana, ses longues oreilles tournées un peu basses. Parce qu'il s'offrait un instant où il se laissait un peu plus aller, il cachait un peu moins bien sa lassitude du quotidien et la fatigue profonde qu'il accumulait de toutes ces nuits de mauvais rêves.

« Je doute d'en être suffisamment légitime. »

Il n'avait pas de glowstick pour une bonne raison. Pas parce qu'il n'avait pas réussi l'épreuve, non, sa broche était la preuve de cette réussite mais parce qu'il n'avait pas su honorer la déesse comme il se devait. Pire, il avait sans doute, dans son abandon et épuisement de la vie, dans son attache qui demeurait encore bien trop loin de ces terres, gâcher l'épreuve de la Renarde.

Un spasme dans son pelage qui ne le hérisse pas totalement lorsque la prêtresse évoque les autres.
L'ont-ils jugé?
Pas directement mais il y avait eu des regards.

«Ce n'est pas un glowstick que je porte. »

Il y avait quelque chose qui n'était pas entier. A force d'y vivre, Samaël avait bien remarqué qu'on ne devenait véritablement adulte et accompli parmi les Etelkru lorsqu'on passait son épreuve et qu'on ramenait l'objet lumineux preuve de sa réussite. Il n'avait pas vu parmi eux de loups qui avaient échoué et parce qu'il ne parvenait pas non plus à se mélanger au clan, Samaël conservait cette place de semi étranger.
Le prince déchu n'avait pas de glowstick parce qu'il ne l'avait désiré que pour mieux être considéré parmi un clan dont il ne voulait pas véritablement faire parti, parce que l'errance tout comme son passé le poursuivaient au delà du désert, parce qu'il n'avait au final jamais su le quitter totalement.

Nirvana ne l’observe pas directement. Son expression semble indéchiffrable, alors qu’elle met un moment avant de reprendre la parole.

« — Ne te montres pas idiot. »

Pas comme eux.

« — Ce n’est pas une malédiction que t’as donné Dairo.
Ce n’est peut-être pas un glowstick, mais c’est une marque.
Tu as été digne de son intérêt,
Pas d’être son disciple au moment de son épreuve,
Mais digne de porter le orange. »

Sous une forme ou une autre.
Broche ou glowstick.
Les autres, ne voient que le pouvoir dans cet objet brillant, quand il faut y voir le lien avec le dieu.
Qu’importe le Glowstick, quand tu n’es aucunement dévoué.

« — N’accordes pas d’attention, à ceux qui te jugeront, ils ne comprennent pas.
Ils ne peuvent pas.
Eux, tout leur semble acquis, ils ne pensent n’avoir rien à prouver. »

Quand pourtant, ils n’ont rien fait.
Cette fois, la prêtresse tourne son museau vers le loup sable, un sourire venant étirer ses babines.

« — Tu seras toujours chez toi, dans le temple de Dairo. »

Et tu ne seras jamais seul.

Samaël

Plus que la récompense d'une épreuve qui avait tout de même été réussi, il portait donc sous la forme de cette broche l'intérêt que lui portait la Renarde. Lui, l'avait choisi par dépit, la déesse lui avait dit que c'était la raison de pourquoi il n'avait pas obtenu de glowstick. Peut-être l'avait-il attristé dans le fond.

« C'est parce qu'ils n'ont encore rien perdu. »

Samaël ne peut leur vouloir, il était après tout initialement destiné à être ce genre de prince potiche qu'on envoyait aux fêtes diplomatiques pour faire bonne figure et qu'on aurait marié à la fille d'une autre famille en échange d'un accord signé. Par son sang au dessus de tout les autres, il aurait du avoir le droit à une vie dans un palais, à la douceur des tissus fins et aux grands banquets raffinés. Aujourd'hui, il se retrouvait à être l'étranger au milieu d'un peuple qui vivaient encore dans des grottes, parce que son pays d'origine était un pays de guerres internes, prisonnier avec lui même au milieu d'un désert qui dévorait un peu plus chaque jour leur cité.

« La vie des Etelkrus est plutôt tranquille. »

Ils n'avaient pas besoin de réfléchir plus loin que la prochaine proie qu'ils auraient à abattre. Un peuple primitif qui se satisfaisait de cet état sans chercher à s'élever autrement qu'en tuant des trucs plus gros à chaque fois.
Ses cauchemars devaient leur paraître bien absurdes et dérisoires.

Une notion de chez soit est évoqué, encore, c'était un sujet que les etelkrus appréciaient. Comme toujours, Samaël ne peut empêcher le hérissement de son pelage. Il laisse quelques secondes passées avant de tout de même répondre.

« Merci. »

Mais trop coincé dans le passé, il ne parvenait toujours pas être prêt.

« Qu'as tu eu à prouver pour savoir que tout n'est pas acquis ? »

Toi qui pourtant est etelkru depuis la plus tendre enfance.

Un sourire, qui vient étirer les babines de la louvette. Bien tranquille la vie des Etelkrus ? C’était là, ce que tous pensaient, ne voyant que la cohésion du clan.
Quand pourtant, c’était un élément quasi-absent à présent.

« — Observes-les bien, Samaël, les Etelkrus.
Regardes comment les membres se comportent entre eux.
Comment ils s’éclipsent discrètement pensant que nul ne les remarque.
Comment ils gardent leurs secrets. »

Le museau se tourne vers l’océan.

« — Les Etelkrus ne sont pas tranquilles, ils en ont juste l’apparence.
Au moindre événement, tu verras les fourmis s’agiter. »

Protester.
Une crainte que sa mère lui avait confié, en baissant Iberis. Cela s’était vu dans l’histoire, la contestation des Etelkrus. L’instabilité dans le clan, qui avait permis aux solitaires et Raeder de se saisir de cette opportunité.
Cela ne devait plus se reproduire.
Un silence à la question. Rien ne lui avait été acquis. Avoir été adoptée par Hollyhock, n’avait pas été la meilleure des choses.
Car elle avait souhaité protéger ses enfants de tout.

« — Je ne suis pas Etelkrus de naissance.
À eux tous, je voulais prouver que j’étais digne de ce clan.
Avant de comprendre que seule Dairo compte.
Ce n’est pas aux Etelkrus que je me dois de prouver quoique ce soit, uniquement à ma déesse.
Chaque jour, je lui prouve ma dévotion, l’amour que je lui porte.
Je ne cesserais jamais de le lui prouver. »

Nirvana afficha cette fois un sourire joyeux.
Qu’importe la sacrifice, sa déesse primait sur tout.

Samaël

Il ne peut empêcher un rictus pointer sur son visage face à la cause du dédain que la prêtresse orange avait sur son propre clan. Ce qu'elle reprochait aux autres n'était rien de plus que de la pure banalité. Si les Etelkrus pouvaient s'offir ce genre de petites choses, c'était bien parce que le peuple avait une vie tranquille, même une vie plus difficile ne l'aurait empêché.

« Ce n'est pas ça qui fera disparaître votre peuple. »

Son pelage se hérisse un instant alors qu'il a un manquement sur le choix du possessif. Tant pis, à cet instant, il serait ce prince déchu qui venait de loin. Samaël avait tant de difficultés de toute manière à être autre chose.

« Vos terres sont riches, elles ne diminuent pas non plus de jour en jour sous un soleil brûlant. Il n'y a pas le fléau d'une maladie qui pèse au dessus de vous comme une épée de Damoclès. Malgré les petites chamailleries internes, il n'y a personne non plus pour convoiter et arracher le pouvoir à une hiérarchie vieillissante. Même si vous ne vous entendez pas, aucun de vous ne craint que l'autre ne vienne l'égorger dans son sommeil. »

Les Etelkrus n'étaient qu'un clan barbare qui s'ennuyait.

« Il suffit d'une quête commune contre un ennemi extérieur pour que chacun marche à nouveau dans la même direction, au moins l'espace d'un instant et ce même si les ordres supérieurs sont brouillons et grossiers. »

Même si l'un des généraux n'était qu'une pure imbécile obnubiler par sa propre violence contenue, au moins avait-elle l'intelligence de ne pas l'orienter en interne.

« Les Etelkrus ont une vie tranquille et même si elle leur déplaît, ils ne font que s'en contenter. »

Ils n'essayaient ni de s'auto détruire, ni de se grandir, conservant leur misérable petite vie animale sans chercher à devenir une civilisation.
Tu n'es pas mieux prêtresse, à simplement déplacer ton manque sur quelque chose qui paraît supérieur en haïssant les autres.

« Tu es prêtresse, si tu veux rassembler les Etelkrus, qu'ils cessent d'être simplement oisifs dans leurs conditions, tu peux faire grandir ton culte. »

Il se releva, s'étira pour faire descendre la tension de ses propres souvenirs, se préparant peut-être à reprendre sa ronde.

« La religion est une bonne base pour faire naître des civilisations. »

De celles dont on se rappelle.

Samaël parle. Beaucoup. Nirvana prête une oreille attentive à son discours, c’était intéressant les points de vue. Lui venait d’un autre pays, avait vu d’autres civilisations.
Un sourire qui vient étirer les babines de la prêtresse. Un ennemi commun. Ce n’était pas les ennemis qui manquaient, simplement qu’on s’y intéresse, sans forcément leur taper directement dessus.

« — L’entité, était un bon ennemi. Trop peu s’y sont intéressés.
Les disciples d’Aka ont préféré frappé les ennemis plus proches, pour s’amuser.
C’est aux disciples de Dairo de s’occuper de lui. »

Parce que nul autre ne s’y intéresse.
Les oranges, n’étaient qu’une poignée. Trop peu en comparaison des disciples d’Aka et de Kiro. Pour autant…
Ton culte.
Le culte de Dairo.

« — M’y aideras-tu ? »

Ou n’es-tu là qu’en donneur d’idées ?

Samaël

Il lui parle de civilisation, d'élever sa condition, celle de son culte, celle des Etelkrus mais ce n'est pas ce que retient la petite tachetée. Elle critique les autres membres de sa meute, ce qu'ils sont mais est exactement comme eux et comme eux, tout ce qu'elle désire c'est de vaincre quelque chose. Sauf que visiblement, Nirvana est seule dans sa quête et c'est sans doute ça, comme dans un caprice, qui la frustre le plus. Elle n'avait au final envers lui d'intérêt que pour sa valeur guerrière sans doute, ou simplement parce qu'il se promenait avec une broche en forme de renard.
Samaël soupira, un peu déçu il fallait bien l'avouer. Il avait cru, un instant, avec le discours de la prêtresse qu'elle était un peu différente, qu'elle s'élevait suffisamment pour être au dessus des autres mais au final, n'était rien de plus que l'un des membres d'une meute qui ne rêvait que de grandes oppositions face à un ennemi.

« Je suis bouclier parmi les Etelkrus, et puisque que je suis relié d'une certaine façon à la Renarde, je suppose qu'il est de mon rôle et de mon rang de donner réponse à ce genre de requête lorsque sa prêtresse le demande. »

Il n'y aurait pas de grands projets, d'histoires à graver sans la pierre. Les Etelkrus n'étaient rien de plus qu'une tribu oubliable.
Il avance de quelques pas vers le chemin descendant, indiquant son souhait de finir cette conversation. Il laisse cependant, un instant, son regard à l'oeil unique se poser à nouveau sur la prêtresse tachetée.

« Mais si comptes me déployer sur un front, ne perds pas de temps. Le miens est devenu bien restreint. »

Entre l'âge et l'errance, il ne lui restait plus tant de temps que ça. Alors il fallait qu'elle se dépêche la prêtresse de Dairo, qu'elle l'envoie achever sa course sur la quête qu'elle exigeait tant avant que l'errance ne le rattrape.

Pour un ancien solitaire, Samaël se montrait bien plus respectueux que certains Etelkrus de naissance. Un sourire qui vient étirer les babines de la prêtresse. Oh, elle ne comptait pas déployer le loup contre l’entité. C’était là sa propre lutte, quand les disciples d’Aka s’en était détournés.
Trop peu s’y était intéressés.
Elle terminerait ce qui avait été commencé, avec la collaboration des Nakhus.

« — Je ne compte pas employer tes connaissances dans cette lutte, ne t’inquiètes pas. »

L’entité était dangereuse, bien trop pour risquer la vie d’enfants de Dairo, même à demi.

« — Je ne veux pas que les disciples de Dairo soient associés à l’image de barbare qu’ont les Etelkrus.
Notre déesse est censée représenter la ruse et l’intelligence.
C’est dans ce but là, que je veux mettre tes connaissances à profit. »

Samaël

Bien qu'elle lui ait présenté l'Entité en premier, comme un centre d'intérêt supérieur au reste, la prêtresse de Dairo avait d'autres plans en ce qui le concernait lui. Samaël releva un sourcil, à mi chemin entre l'étonnement et la curiosité, le mâle brun n'était pas en général le loup qu'on intégrait à ses plans pour ses objectifs. Dairo avait assez peu de disciple, il fallait supposer que Nirvana faisait avec ce qu'elle avait à disposition.
Elle veut changer l'image renvoyée, si ce n'était pas celle des Etelkrus, ce serait au moins de ceux reliés à la déesse Renarde. Ce n'était pas une chose que reprocherait Samaël, il savait à quel point le paraître aux regards des autres était primordial. Cela jouait sur une sphère plus politique, un ensemble en amont avant les batailles qui découlaient ensuite, n'en déplaisent aux esprits les plus simples qui ne demandaient que de voir le sang couler dans la sueur.

« Que prévois tu ? »

Quelles étaient ces connaissances à utiliser ? Quel était l'objectif clair de la prêtresse ?
Les deux longues oreilles du prince déchu orientée vers la petite tachetée, il lui accordait la totalité de son attention.

Un léger soupir qui franchit ses babines, alors que ses yeux pâles se posent sur un groupe de mouettes.

« — Les alphas ne vont pas tarder à changer, c’est inévitable.
Je me dois de m’assurer que la voix de Dairo sera écoutée.
Que ce soit dans notre clan ou en dehors. »

Mère n’a jamais bien illustrée la Renarde.
Je refuse que seul Aka soit à la tête de clan, avec cette mentalité guerrière.
Quelle place dans ce cas pour Dairo ?

« — Notre clan est majoritairement composé d’enfants d’Aka ou de loups qui en ont la mentalité. Les disciples oranges manquent. Je suis prêtresse de Dairo, pas des Etelkrus.
Je dois chercher la lumière de la Renarde partout, même au-delà de nos frontières. »

Cela signifiait donner une chance aux solitaires. Nirvana était prête à défendre cela devant les alphas actuels, les prochains… même Dairo si cela était nécessaire. Si Kiro laissait certains de ses disciples être solitaires, pourquoi pas d’autres ?
Le museau se tourne vers le loup du désert, un sourire étirant ses babines, alors que sa petite queue remue doucement.

« — Nous pourrions mettre en place une fête pour la déesse.
Je veux que les porteurs d’oranges ou ceux y aspirant se sentent intégrés à une famille unie. »

C’est un nous.
Car il est le premier à s’intéresser autant.

« — Si tu as des suggestions, Samaël, je serais ravie de les entendre. »

Samaël

Cette fois-ci, il faut bien l'avouer, la petite prêtresse tachetée le surprend. Alors que Samaël écoute son discours, ses inquiétudes, son regard dérive vers le même groupe de mouettes. Les oiseaux sont bruyants, ils attirent l'attention lorsqu'on ne savait où poser l'oeil.

« C'est un discours bien audacieux à avoir au sein de ce clan. La plupart des Etelkrus ne sont pas vraiment ouverts au monde au delà de leurs frontières. »

Leurs si petites frontières qu'un ordre général donné aux épées et aux boucliers demandent de garder férocement pour que rien qui ne soit pas Etelkru puisse approcher en toute quiétude.
Pourtant, Samaël ne juge pas négativement cette idée de Nirvana d'ouvrir la foi orange à plus de monde, cette pensée qui dénote avec celle commune du reste du clan a d'ailleurs le mérite d'attirer son attention. On ne grandit pas en restant enfermer, les peuples isolés ne faisaient que pourrir dans sa propre peste, ça aussi, le prince déchu en savait quelque chose.

« Un fête est une bonne idée, le peuple aime ce genre de chose. Cela permet de l'unir et de calmer ses frustrations. »

Un excellent moyen de contrôle, les souverains étaient plus appréciés s'ils ouvraient des festivités pour leurs sujets. Une culte ne marchait pas bien différemment et la foi est plus grande si on la mettait en valeur.

« Ce que le peuple apprécie en général, c'est de pouvoir bien manger. C'est assez grotesque mais même les plus grandes négociations politique contiennent au moins un banquet à un moment donner. »

Ils restaient des animaux et les loups les plus simples bien plus que tout les autres.

« Pour un culte, il faut un événement qui célèbre son apogée comme le sacrifice d'offrandes ou la vénération d'idole. Peut-être faire faire un pèlerinage à une représentation de la déesse jusqu'à son temple ? »

Les loups pourront suivre le convoi, enviez peut-être ceux qui porteront la représentation sacrée, offrir leurs offrandes aux pieds de l'idole une fois celle-ci installée dans le temple.

Audacieux, oui. Sa mère n’aurait probablement pas approuvé ce discours, mais aucune importance. Nirvana était avant tout prêtresse, guide des oranges, son rôle n’était pas de plaire aux principes des alphas.


« — Alors nous trouverons de la nourriture en quantité suffisante. »

Viande. Baies. Fruits. Coquillages.
Mais pas de poisson, cela était proscrit.
Nirvana écouta la suite. Oui, c’était une idée intéressante, sans être forcément barbare. Ils pourraient lâcher des lanternes pour éclairer leur chemin, tout en menant jusqu’au temple quelques renards (qui seraient libres par la suite de reprendre leur route). Un hommage à la représentation de la déesse, ainsi qu’à sa couleur.

« — Cela me semble être une bonne idée en effet.
Il me tarde de travailler sur ce projet ! »

Un sourire qui étire ses babines alors que du museau, elle tapote l’épaule de l’ancien solitaire.

« — Et si nous rentrions au Castel ? »

À moins que tu ne veuilles te recueillir seul ?

Samaël

De ces idées, la prêtresse semble s'en satisfaire. Il n'était pas nécessaire de faire compliqué dans un premier temps, surtout lorsqu'il n'y avait jamais eu de vrais célébrations auparavant. Il fallait faire naître des traditions pour qu'un cherche à préserver son histoire culturel un peu plus loin que le simple gardiennage de frontière que même des bêtes étaient capables de faire.
Une fête, un festival, la célébration d'un culte... C'était le genre de choses qu'on réservait au peuple pour le satisfaire, pour que lui aussi puisse se réjouir quelques jours dans sa vie misérable quand les grands s'accordaient des réunions plus sophistiquées. Cela ferait énormément de bien pourtant, pour lui aussi, de se laisser à ce genre de chose durant quelques heures d'une journée.

La prêtresse proposa de rentrer. L'après midi finissait, quelques nuages avaient fini par cacher ces rayons de soleil agréables.

« Rentrons »