Des ombres dans la nuit - Famille Deznita

[ Antidaté aux alentours de mi-novembre, à leurs 4/5 mois ; au réveil du Punk'tober. ]

D'un petit cri qu'il ne peut retenir, Mylo s'éveille en sursaut, le cœur battant.
Dehors, il fait encore nuit : ses yeux grand ouverts le lui confirment très vite en se braquant vers la sortie de la tanière, là où tout est noir à l'exception de quelques rayons de lune venant peindre des tâches bleu clair dans un motif irrégulier.
Mais lui est bien réveillé ; essoufflé comme s'il avait couru longtemps, frissonnant malgré la chaleur de corps collés au sien, et encore enveloppé de sensations troublantes.
Des restes de peur, de tristesse, d'incompréhension - tant de sentiments qui s'accrochent à son esprit embrumé entre quelques souvenirs troubles et irréguliers, images vaporeuses qui dansent dans sa tête sans qu'il ne parvienne à les immobiliser.

Il comprend qu'il a fait un cauchemar, mais celui-ci n'avait pas été comme les autres.
Par bribes, davantage d'éléments lui reviennent et hantent sa mémoire : il se souvient y avoir vu son frère, ses sœurs, même Papa Dez.
Et beaucoup, beaucoup d'autres loups.
Quelque chose comme ça, un rêve aussi intense qui le marque et le perturbe... Ça ne lui est jamais arrivé.

Mylo commence à se tortiller un peu, à chercher le regard de sa fratrie : a -t-il été tout seul, à vivre ça ? Sont-ils réveillés aussi ? S'ils ne le sont pas, ses mouvements tout comme les faibles couinements qu'il commence à pousser ne tarderont pas à le faire. Ce n'est pas tout à fait involontaire ; il a besoin de réconfort.

Ce début d'agitation ne manqua pas de faire s'ouvrir des yeux violet, en tout cas : si Anita ne vécut pas ce cauchemar dont elle connut pourtant similaire expérience de nombreuses années auparavant, l'inhabituel trouble qui agite ses enfants ne passe pas inaperçu à ses instincts de mère.
Déjà elle redresse l'encolure pour approcher sa tête près d'eux et enroule un peu plus son corps autour des siens, prête à les réconforter.

— Mes trésors ? Que se passe-t-il ?

La voix est douce, encore un peu confuse de sommeil, quand les yeux et les oreilles sont déjà attentifs.

Il ne faut pas beaucoup de temps à tous ses enfants pour remuer d'une même torpeur, visiblement tous atteints d'un même mal-être qu'Anita ne cerne pas encore. Mais c'est la réaction de Basilic qui dissipera les dernières brumes de son sommeil et lui fera ouvrir des yeux alertes, un peu inquiets, quand celui-ci se met à régurgiter quelque chose. Sont-ils tous malades ? Elle approche le museau de ce qui est sorti de l'estomac de son jeune enfant et lève un sourcil surpris en y trouvant une pierre. Quand est-ce qu'il avait pu avaler une pierre ?
Elle s'apprête à lui poser la question, toujours autant confuse de la situation, quand Valériane intervient de ses jappements multiples et insistants. La fameuse pierre vole toute son attention, elle semble la reconnaître et veut expliquer la situation autant qu'elle malaxe ses adelphes, mais Anita peine encore à comprendre.
... Est-ce qu'ils ont juste tous les quatre mangé des pierres avant de s'endormir ?

C'est Mylo qui aidera à éclaircir la situation, quand un éclat de lucidité semble briller dans ses yeux suite aux piaillements de sa sœur et après regardé lui aussi - non sans une moue de dégoût - le caillou que 'Zil a vomi.

— -Mh ! Vali' a raison, m'man, y'avait d'pierres comme ça dans mon rêve !... Et... On'était tous les quatre, dans l'cauchemar ! Papa Dez aussi !

Mais pas toi, m'man. Il sait pas pourquoi, mais c'est p'têt pour ça qu'elle comprend pas trop ce qu'il se passe, alors que son frère et ses sœurs si ? Ça veut dire que... Il voudrait encore dire beaucoup d'aut' choses, il croit, mais la réalisation qui l'inonde que quasi toute sa famille s'est retrouvée dans le même cauchemar l'fait un peu flipper. Normalement les rêves c'est chacun pour soi, non ?! Il se tortille pour se rapprocher de tous les corps agglutinés et y chercher du réconfort, effrayé par tout ça qu'il pige pas, et réalise que quelque chose le gêne, là, sous lui. Il y découvre une pierre, similaire à celle qu'a vomi son frère. Un nouveau sursaut d'effroi, un glapissement.

— AH !

Bon, lui, au moins, il a pas eu besoin d'la vomir. Mais ça reste super chelou toute cette histoire.
Se grattant la tête d'une griffe, Anita se resserre autour de sa progéniture et leur offre tous les contacts nécessaires à les calmer pendant que doucement s'assemblent ses idées autour des informations qu'elle obtient peu à peu.

— Sshh, tout va bien, mes trésors. Je suis là, il n'y a plus de cauchemar. Ce que vous avez vécu cette nuit, je crois bien... Que c'est pas la première fois que ça arrive. J'ai eu un cauchemar comme ça moi aussi, il y a très longtemps. Avec votre Papa Dez et d'autres loups aussi. Ce n'était pas agréable, mais ce n'est pas revenu dans le monde réel, n'ayez pas peur. Nous aussi avons gardés quelques... Pouvoirs, parfois.

Elle darde un regard sur ces drôles de pierre dont l'origine commence ainsi à faire sens, en se demandant quelles peuvent être leurs spécificités.
Puis, maintenant complètement réveillée, sa posture se fait un peu plus droite et ouverte alors qu'elle pose ses yeux doux sur chacun de ses enfants, prête à répondre à leurs questions et à leurs doutes.

Si toute sa famille avait été projetée dans ce rêve terrifiant, elle se demandait pourquoi cette fois-ci elle n'y était pas retournée. Elle était au moins rassurée que son père ait pu être avec eux dans cette épreuve.

Etait-il réveillé, lui aussi, seul à sa tanière du Castel ? Avait-il fait ce même lien avec le vieux monde cauchemardesque du passé ? Chercherait-il à venir s'enquérir des suites ici, où quatre paires d'yeux plein d'incompréhensions brillaient dans l'obscurité ?