Petit crabe [Potiron]

Elle avait fait acquisition d’un bien bel objet, l’avait utilisé le long des rochers de l’île, sur les algues qu’elle trouvait parfois séchée le long de la plage, sur d’autres loups qu’elle avait voulu maquiller et même sur elle-même, et fut obligée de constater que l’encre était indélébile, malgré l’air salin qui aurait du ronger peu à peu les gribouillis qu’elle avait tracé un peu partout, ses écrits – ou toute autre chose qu’elle avait voulu dessiner ou communiquer -, restait là. Il lui était alors venu en tête l’idée de prendre le temps de rédiger une lettre pour ses parents et une pour le roi de la mer afin de correspondre avec ceux-ci. Seul problème, elle ne savait ni lire, ni écrire, ni même compter. Pour un problème, cela n’en était pas vraiment un, elle se contenterai de quelque dessin, leur compréhension ferait le reste.

Elle avait trouvé deux vieux parchemins au dos desquels semblaient avoir été tracé des cartes de navigations qui pour elle n’était rien de plus que des dessins qu’elle pouvait envoyer aussi à ses parents qui seraient certainement ravis de le placarder sur la porte du frigo -ou bien de le caler au fin fond d’un tiroir d’où il ne reverrait jamais le soleil-. Au dos des cartes, dessina Paquot et les raeders, un soleil et une île -qui a vu d’oeil avec les proportions d’un radeau flottant sur l’océan-, le dessin était remarquablement enfantin et simpliste, ce n’était que quelques figures et formes qui tentaient vainement de ressembler à quelque chose, sans toute fois y parvenir de plus l’humidité commençait à gagner le parchemin, le reléguant au rang de vulgaire mouchoir. Mais cela n’avait pas d’importance, la petite louve, était ravie de sa production. Alors quand sa grande sœur vint la chercher en hurlant, elle releva à peine sa face de son dessin.

« Attends attends, j’ai pas encore tout à fait fini. »

Il n’aurait quand même pas fallu oublier la généreuse moustache de M. Paquot quand même.

« Presque, voilà. »

Elle avait fini. Elle montra fièrement ses dessins à sa supérieure.

« Celui-ci, il est pour mes parents et celui-ci il est pour M.Paquot. »

Elle n’avait plus qu’à glisser ses deux dessins dans deux bouteilles de Rhume vide et à les lancer dans l’Océan, elle avait la certitude que ces deux bouteilles qui semblaient couler à pique atteindraient leur destination. Maintenant que c’était chose faite, toute son attention se pointa vers la louve au pelage citron. Elle lui adressa un grand sourire.

« Qu’est-ce que tu veux me montrer ? »

« Merci c’est gentil, mais je sais que ce n’est pas très ressemblant »

Pourtant, elle y avait mis tout son cœur de petite louve.

Le ‘’museau’’ de la petite louve à la tête de citrouille se pointa dans la direction de la plus grande, elle semblait peinée de n’avoir reçu de dessin de la part de la petite louve. La louvette se sentait encensée par tant d’admiration à l’égard de ses gribouillis dont la réalisation était des plus hasardeuse et relevait plus de la tâche d’encre miraculeusement atterrie sur la feuille que de la véritable œuvre d’art figurative. Elle lui tapota sur l’épaule en se mettant sur ses pattes arrières. * poc poc*

Ne t’en fais pas grande sœur, tu seras l’héroïne de mes prochains dessins.
Mon héroïne.

« Bien sûr, je t’en ferais pleins ! Et puis il me reste pleine de feuilles avec des dessins bizarres dessus ! » >o<

Elle pencha la tête sur la côté, faisant tanguer la courge. Puis d’un coup, son expression sembla s’éclairer.

« J’ai une idée, on pourrait faire un journal de voyage toute les deux. Comme ça, on pourra raconter toute nos aventures !»

et je conterai tes exploits aux quatre vents.

« On y va ? J’ai hâte que tu me montres les crabes ! »

La queue de la petite louve s’agita de nouveaux.