Coupe printanière [Potiron]

Elle n’avait jamais quitté l’île sur laquelle elle avait échoué. Elle avait longtemps attendu, allumé des flambeaux, tracé des messages sur le sable et envoyé des lettres dans l’espoir que ses parents tentent de le recontactée pour même vienne la chercher, mais toutes ces tentatives, tous ses messages avaient été vains, ils s’étaient perdus au gré des courants, s’était effacé lorsque la marée était montée ou même s’était tout simplement éteint lorsque l’huile avait été consommée. La louve n’avait pourtant pas renoncé à cette idée fixe selon laquelle ses parents s’étaient seulement perdu en chemin et qu’ils mettraient juste un peu plus de temps à venir que ce qu’elle avait prévu.

Les autres par-contre semblaient peu à peu renoncer à cette idée selon laquelle elle serait encore désirée et chercher par ses parents, étrangement, leur comportement avait un peu changé à son égard, elle faisait désormais parti entière des meubles, était considérée comme l’une des leurs. Et son comportement nonchalant et peu travailleur avait tôt fait de provoquer la contrariété. Les attentes avaient changés, la louve devait se mettre au travail.

C’est pour toute ces raisons qu’elle avait mis les pieds sur le continent et qu’elle dut constater que cette ile était bien plus étendue que son ile de naissance ou même que l’île des raeders qui pourtant lui semblait déjà plutôt impressionnante – il fallait plus d’une heure pour en faire le tour, c’est sûr, c’était bien plus que ce qu’elle était en mesure de compter par elle-même.

Que ce soit sur l’ile ou le continent, la petite louve se faisait l’ombre de sa comparse, de celle qui était devenu du jour au lendemain sa sœur à elle – et à personne d’autre que ce soit bien clair pour tout le monde. Elle était devenue un peu comme son faire-valoir et elle bien évidemment son modèle en toute chose.

« Bien, Grande sœur capt’ain Geeti »

C’était autant de titre qu’elle portait désormais.
La louvette secoua la tête de haut en bas comme pour confirmer les dires de son aînée. Puis se saisissant gauchement de l’outil, porta une patte à sa tempe dans un salut des plus réglementaires.

Elle avait tout compris, tout entendu, ne pas se couper, ça devrait être possible oui. La louve renifla bruyamment, on ne fait pas trop comment. Puis elle prit de l’élan et secoua la serpe dans tous les sens.

« Merci, mais tu te débrouilles mieux que moi, je crois. »

C’est même certain.

Alors qu’elle était pas loin d’éborgner Geeti avec la faucille, ou même de se trancher une patte ou une part de potiron. La louvette parvint par accident à trancher une touffe d’herbe, elle était fière, rayonnait d’orgueil en voyant son œuvre dont on retiendrait que la découpe était parfaitement volontaire. Encore fallait-il ficeler sa prise, simple en apparence, mais la logistique afin de ne pas s’emmêler les pattes dans le fils était plus complexe qu’il n’y paraissait. Il lui fallu bien quatre boucles et trois tours autour de la touffe d’herbe avant qu’un nœud somme toute … convenable -ou faisant son travail du moins, daigne ne pas se dénouer à la seconde où elle posait son fardeau près des autres touffes. Non sans générer un peu d’exaspération chez la courge.

« Voilà. »

Son présent à la meute bien emballé, elle se mit de nouveau au travail, remuant une nouvelle fois son outil dans le vide en espérant que par miracle, il ferait son office une nouvelle fois pour son plus grand plaisir. Elle s’élança en quelques tours sur elle-même, dans un style tout à fait contestable.

« Chaud devant ! »

« Pas d'problème, Capitaine. »

Le potiron pivota sans changer l'inclinaison de ses épaules, à la manière d'une marionnette désarticulée. Elle lui esquissa un sourire.

Pour Potiron, il n'y avait jamais vraiment de problème, elle trouvait toujours une solution des plus originales, pour se sortir du pétrin. Se couper une patte, c'était le dernier de ses problèmes, c'était quelques choses qui pourraient arriver, un incident mineur dont elle n'avait conscience. Même si un accident était vite arrivé surtout avec une telle pratique armée. Mais blesser sa grande-sœur par accident par contre aurait été plus dérangeant pour la petite louve.

Elle prenait son travail particulièrement au sérieux,La petite louve, regardant l’outil entre ses pattes et se mordant la langue de n’être parvenu à mener son dernier assaut contre les touffes d’herbes folles. Elle apparut quelques peu dépitées jusqu’à ce que sa grande sœur vienne lui tapoter la tête. Alors, elle retrouva bien vite le sourire, elle ne devait pas la décevoir après tout, elle devait se montrer forte, aussi forte qu’elle, alors elle bomba le torse. Se redressa sur ses courtes pattes sans perdre une miette de explications qui suivirent.


Mais même si elle avait bien compris l’enchaînement des mouvements que répétait Geeti. Elle n’en restait pas moins maladroite, alors qu’elle exerçait une rotation avec sa faux, celle-ci s’échappa, traversant les hautes herbes pour aller se perdre dans la végétation. Hébétée, la loupiote ouvrit de grand yeux, lâchant un petit « oups » embêtée.

« J’vais aller la chercher, elle ne doit pas être bien loin. »

Et c’est un cul surmonté d’une longue queue qui disparut entre les hautes herbes.

La faucille, elle la retrouva plantée dans une motte de terre, bien en évidence comme l’aurait été un trophée sur son promontoire. Sans hésitation, s’approcha d’elle et tendit le cou pour la sortir de son socle de terre sèche, comme si elle retirait Excalibur de son rocher. La petite n’eut besoin que de quelques efforts pour récupérer son bien d’emprunt. Ce qui lui prit le plus de temps fut de retrouver la trace de la plus grande alors que les herbes la dépassait d’au moins un tête.

Qu’à cela ne tienne, puisque c’était ainsi, elle allait tracer son propre chemin à travers le rideau végétal qui lui faisait face. Elle empoignant la faucille solidement et commença à trancher dans le vif à grand renfort de balancement de tête. Elle ne ménagea pas ses efforts et pourtant, ne pu crier victoire, car le chemin qu’elle traçait à l’aveugle, plutôt qu’être linéaire était parfaitement circulaire et semblable à un cercle tracé de la taille d’une tortue de mer.

Lorsqu’elle se rendit compte de la machination qui œuvrait contre elle-même, elle fronça les sourcils avec colère. Un bien vilain tour qui lui avait été tendu. Ce n’est que lorsque la voix de la future capitaine raeders retenti dans les herbes qu’elle put enfin identifier la direction à prendre. Plutôt que perdre la face et revenir bredouille, elle rassembla les herbes qu’elle venait de faucher, les noua avec l’une des longues tiges en un fagot bien serres, puis le glissa sur son dos.

« J’arriveeeeeeuuuhhh ». Elle hurla, alors qu’elle n’était qu’à quelques metres tout au plus.

Elle ne mit pas longtemps avant de débouler, perdant presque son chargement dans un dérapage dont la trajectoire incontrôlée était des plus contestable. Lorsque le regard bleuté croise le sien, son sourire s’élargit, et elle tressauta sur place avant de crier.

« Tu as vu ça ! »

Lança la petite louve, gonflant son poitrail pelucheux, sa queue toute droite derrière elle. Elle était fière, oui, fière du chargement qu’elle vint déposer aux pattes de sa sœur. Lorsque les encouragements pleuvent et que sa grande sœur se met à l’applaudir tout rompre, la petite louve se mis subitement à avoir chaud, très chaud. Une pointe de gène s’étant mêle à la fierté.

Lorsque la capitaine annonça le plan de bataille, Potiron tendit l’oreille autant qu’elle le pouvait.

« Fatigué, moi, jamais !  Je resterai sur le pont jusqu’au bout de la nuit, capitaine.»

Elle ne voulait la décevoir, souhaitant voir de nouveau briller la fierté dans les yeux de la plus grande. Pourtant, elle avait laissé échappé un bâillement par mégarde, avant de porter une patte bien haute au dessus de sa tête de courge. Elle prit une grande bouffée d’air pour se donner du courage avant de remuer sa faux dans ses mouvements hétéroclites. La lame n’atteins rien, elle se contenta de trancher le vide qui se trouvait devant ses pattes.