Demande d'asile [libre]

>> Manji se sentait honteuse de ce qu'elle allait faire, mais elle n'avait pas le choix.
Elle se tenait à l'entrée du Squat, repaire de la meute des Brethens. Elle s'était déjà tenue ici quelques jours plus tôt, ayant demandé de l'aide pour soigner ses blessures, avant de dire merci et de déguerpir sans demander son reste, trop peinée et fatiguée par la bataille contre le Coeur d'Everbloom.
Cependant, elle avait du se rendre à l'évidence : Elle était incapable de survivre seule dans son état actuel. Sur ses pattes, les brûlures causées par la sève corrosive étaient encore bien présentes, les chairs à vif recouverte d'un cataplasme qu'un guérisseur lui avait apprit rapidement à préparer. Sa fourrure ne repousserait probablement pas par dessus, mais c'était le cadet de ses soucis. Avec un peu d'obstination, elle aurait même pu chasser, mais un autre problème l'en empêchait. Lorsqu'Everbloom l'avait projetée au sol, sa tête avait violemment heurté une pierre. Le guérisseur avait nettoyé le sang séché et l'avait informé que la plaie n'était que superficielle, mais qu'elle avait en revanche subit un traumatisme crânien dont les séquelles disparaîtraient au bout de quelques temps. Manji était régulièrement prise de vertige et tout effort intense lui donnait un horrible mal de crâne. Elle était donc totalement incapable de chasser et n'avait que très peu mangé ces trois derniers jours, se contentant des restes d'une carcasse trouvée dans la savane.

Elle s'était rendue à l'évidence, il lui fallait le soutien d'un groupe, au moins le temps qu'elle se remette de son traumatisme. Il était hors de question pour elle d'aller chez les Séides, trop strictes et trop obtus à son gout. Il n'allaient probablement même pas l'accepter. Restaient donc les Brethens, contre qui elle n'avait rien, même si elle aurait préféré éviter les parages d'Esterno pendant quelques temps. La manière dont il l'avait ignorée après la bataille lui revint en mémoire,rajoutant une couche de regrets par dessus ceux qu'elle éprouvait déjà. Si elle n'avait pas donné cette idée à Twitchell, il n'aurait pas chargé dans la gueule d'Everbloom, droit vers sa mort. Si elle avait parlé à Esterno un peu plus tôt, si elle était restée avec sa meute d'origine, si elle avait passé son chemin, si elle était partie au lieu d'apprendre à ces loups à pêcher, si... Elle n'éprouverait pas tout ça.

Un vertige la saisit et elle s'assit, fermant les yeux en attendant que ça passe. Elle n'avait aucune idée de la personne à qui s'adresser pour sa requête, elle attendrait simplement qu'on lui demande ce qu'elle foutait là. Sa demande était simple : Que les Brethens l'autorisent à vivre avec eux pour l'aider à survivre le temps qu'elle se remette, en retour de quoi elle comptait offrir de chasser pour eux dès qu'elle en serait capable, et d'aider leur meute comme elle le pourrait en attendant. Restait à savoir à qui s'adresser.

>> Comme par hasard.

Manji...?

Manji ferma les yeux une seconde à l'appel de son nom. Elle reconnut instantanément la voix qui l'avait prononcé, et s'en voulu d'être venue ici.

Non mais tu croyais vraiment que t'allais pas le croiser dans sa propre meute ? Blessé comme il était, bien entendu qu'il serait là bas. Tu t'attendais à quoi d'autre, trimarde ?

Elle se décida finalement à lever les yeux pour affronter le regard d'Esterno. Elle eut un peu de mal à faire la mise au point sur ses yeux dorés, et dut cligner des yeux plusieurs fois pour y parvenir.

Je... Peux t'aider ?

"Non", manqua-t-elle de répondre pendant une fraction de seconde. "Pas plus maintenant que quand j'ai eu besoin de toi."
Mais elle n'en fit rien? D'abord parce que c'était injuste de l'accabler comme ça, et ensuite parce qu'elle savait très bien que si elle ne demandait pas l'aide des Brethen, il y avait des chances qu'elle ne survive pas à l'hiver. Le temps qu'elle recouvre ses forces et soit capable de chasser, elle serait morte de faim, de froid ou de maladie.
Esterno n'était pas mieux en point qu'elle, physiquement. Son ventre et ses flancs étaient enveloppés de bandages, et il présentait comme tous ceux qui y avaient participé, les stigmates de la bataille contre Everbloom. Il portait néanmoins une sacoche, ce qui laissait imaginer qu'il était en route pour l'extérieur, probablement pour cueillir des herbes ou récolter des... Stop. Concentre toi.

Incapable de supporter son regard plus de quelques secondes, Manji se remit à fixer ses pattes.

-Je... Je suis désolée de... De déranger mais...

Même parler, elle avait du mal. La louve n'avait pas réussit à faire une phrase complète sans se reprendre aux moins deux ou trois fois depuis la bataille. Elle avait peur d'éprouver ces difficultés pour le restant de ses jours. C'était aussi frustrant qu’effrayant.

-J'arrive pas à... attraper... à chasser. Et je... j'ai besoin d'une... D'un groupe.

Un nouveau vertige la saisit et elle se recroquevilla quelque peu sur elle même. Elle n'osait pas imaginer quel triste spectacle elle présentait à ses yeux, aux yeux de tous ceux qui pouvaient la voir. Mais valait mieux avoir l'air pitoyable qu'être morte.

-Je peux aider en retour. Je peux juste... juste pas chasser. Et... Et Twit-

Le chagrin qui lui étreignit le cœur à la simple mention de son ami l'empêcha de continuer et elle eut besoin de quelques secondes pour se reprendre. Lorsqu'elle termina sa phrase, ce fut d'une voix tremblante.

-Twitchell m'avait dit une f-fois que... Si j'avais be-besoin je pourrais... Dormir... Non, venir... Ici.

Woa. C'était laborieux.Elle se retint d'expirer de soulagement une fois sa phrase complétée, s'absorbant plutôt dans la contemplation d'un de ses bracelets. La petite tresse verte à sa patte droite avait viré au marron à cause du sang qui avait pénétré les fils.

>> Esterno s'approcha lentement et Manji se retint de reculer. Peut-être que si elle choppait un glowstick, elle aurait le pouvoir de disparaître dans le sol ?

- Ne t'inquiète pas, on va t'aider. Viens avec moi, j'ai ce qu'il faut pour te soigner dans mon antre.

Manji se contenta de hocher la tête. Esterno s'approcha encore, assez pour qu'elle sente la chaleur qu'il dégageait pénétrer son pelage. Elle se relaxa un peu, malgré elle. La louve se leva lentement, réprimant une grimace lorsque ses bracelets frottèrent contre ses chairs à vif.
Elle suivit Esterno, mettant un point d'honneur à marcher sans son aide, malgré l'offre tentante de son épaule. Elle avait envie de poser plein de questions, qui se bousculaient dans sa tête sans franchir la barrière de ses crocs serrés.

Pourquoi tu es parti aussi vite après la bataille ? Je compte si peu pour toi ? Est-ce que si je t'avais montré mon affection plus tôt, tu serais resté pour moi ? Est-ce que tu m'aides par pitié ? Pour soulager ta conscience ? Si je n'étais pas venue, te serais-tu soucié de moi ? Et si...

Manji n'osa rien demander. Elle se sentait bien trop fatiguée, bien trop lasse, et elle ne voulait pas blesser Esterno. Il avait d'autres problèmes, et elle ne pouvait pas changer grand chose à la situation de toute façon. Elle avait peur qu'une seule de ces questions n'empire la situation. Alors elle resta silencieuse, le suivant jusqu'à sa tanière.

- Merci... Souffla-t-elle finalement.

[C'est court, désolée ._.]

J'ai guidé en silence la louve au pelage roux vers ma tanière. Celle-ci était toujours remplie de plantes en tout genre mais bien rangées sur des petites étagères en pierre. L'odeur de verdure embaumait la pièce et un lit de mousse était installé dans un coin avec quelques livres sur les plantes empilés à côté. Je me suis approché d'une étagère, attrapant une fiole remplie d'eau pour en vider une partie sur un morceau de tissu pour l'humidifier. Ceci étant fait, je suis revenu vers Manji puis j'ai observé ses pattes un instant, tenant le morceau de tissus entre mes crocs. Ses blessures avaient commencé à s'infecter mais ça ne semblait pas trop grave malgré tout. Les brûlure n'étaient pas trop profonde et une fois nettoyées, elles guériront vite.

J'ai lentement retirer les bracelets que Manji portait au pattes, conscient que ça ne devait pas être très agréable, puis j'ai commencé à frotter avec le tissu humide les blessures de la louve blonde. Un silence s'était installé dans la pièce, ce qui devenait presque gênant. Pour le briser, je me suis débarrassé de ce que j'avais sur le cœur :

"Je suis terriblement désolé."

J'ai fais demi-tour pour attraper une feuille d'Aloès avant de commencer à l’écraser avec une pierre dans une petite coupelle. Est-ce que je restais de dos parce que j'avais du mal à garder le contact visuel avec elle ? Oui. J'assumais peu ma lâcheté à la fin du combat contre Everbloom maintenant que j'étais redevenu lucide. Et j'avais l'air bien tourmenté pour un loup qui était censé être devenu si sûr de soit.
Une fois la feuille totalement écrasée, je suis retournée vers Manji sans dire un mot, sans levé les yeux vers elle, et j'ai commencé à appliqué la pommade sur les brûlures.