Be my ritual [Ft. Moiro][Ne pas archiver]

Be my Ritual
Prêtresse Anianka & Moiro

Plus le temps passait, plus les journées s'allongeaient et la nuit tardait à couvrir la terre de son manteau d'ombre. Il faisait chaud sur le territoire, le vent marin était agréable en cette période. A travers la nuit limpide, la pâle lueur de la lune rependait ses rayons et se reflétait sur la mer mouvante. L'astre nocturne  était particulièrement bas cette nuit, il étincelait, grand et rond, teintant la terre d'une atmosphère fantomatique.

Anianka marchait en direction du temple de sa démarche lente et féline. L'odeur des roses en aurait émerveillé plus d'un, mais elle, elle était habituée maintenant depuis toutes ses années. Elle passait tellement de temps sur l'île et dans la roseraie que l'odeur des roses était devenue sienne. C'était son emprunte désormais, son effluve, à la fois douce et piquante. Comme une rose, elle était une beauté venimeuse.

Rhaégar était presque un adulte maintenant, il avait grandit si vite qu'on le reconnaissait à peine. Il dépassait la majorité des canidés du territoire si ce n'est pas tous. Pourtant, il n'était qu'à l'âge de l'adolescence, le pire des âges.. Anianka espérait qu'il n'aurait pas à subir sa malédiction, ce serait regrettable qu'il devienne encore plus mauvais qu'elle.. Mais maintenant que Gloriel avait accepté de le prendre sous son aile, c'était un apaisement pour la prêtresse.

Elle coupa ses pensées lorsque son corps pénétra dans le magnifique temple de sa déesse, la tête, la poitrine et la queue bien hautes. Tout était exactement à sa place comme à chacune de ses visites. C'était comme une maison pour elle, elle y passait la majorité de son temps, que ce soit pour utiliser la source sacrée, pour prier la déesse ou simplement pour s'y reposer. Même les imposants félins qui gardaient l'entrée lui apportaient chaleur et protection dans son coeur à chaque fois qu'elle les admirait, ici elle s'y sentait chez elle, à sa place.
Ses yeux d'ambre d'une profondeur insondable scrutèrent les alentours et elle se dirigea vers la salle secrète qui lui était réservée, située dans le fond derrière un mur recouverts de roses, de ronces et de lierres. Là, elle tourna autour de la source sacrée et finit par s'asseoir face à elle. L'eau y était transparente, sa surface était si calme, si lisse, que sans le reflet de la prêtresse on aurait pas pu distinguer l'eau du réceptacle de pierre. Penchant sa tête par dessus, elle lapa doucement le liquide de sa délicate langue pendant quelques instants, puis elle s'éloigna et s'allongea dans un coin. Les rayons lunaires transperçaient les murs de ronces et s’infiltraient dans la roseraie sous forme de grands traits opalins, baignent la pièce d'une douce couleur argentée et faisant scintiller le bout des pétales des roses immortelles comme si une poussière d'étoile s'y était déposée.
Installée confortablement sur le flanc, elle médita un instant, fermant simplement les yeux comme si elle somnolait sur place. Cela faisait un moment que Moiro ne s'était pas manifestée, peut-être que cette nuit changerait, avec les récents évènements.. Anianka savait, elle savait que la déesse pouvait lire en elle, qu'elle pouvait voir ce qu'il se passait sur le territoire. Mais Anianka n'avait pas changé, elle était toujours la même : la femelle manipulatrice et redoutable qui joue de ses charmes pour obtenir ce qu'elle désire. Elle ne craignait aucun jugement car lorsque la déesse l'avait choisi, elle était déjà cette louve là, c'est ce qui faisait d'elle une louve à la fois séductrice et féroce, c'est ce qui faisait d'elle la rose.

Son esprit se perdit dans les limbes et elle se laissa transporter par le bruit de la fontaine, par le vent qui lui caressait le pelage. Son corps se détendit, ses paupières étaient de plus en plus lourdes. Il n'y avait plus rien autour d'elle désormais, il n'y avait plus qu'elle et sa déesse.

La pâle lueur de la pleine lune donnait à la Roseraie une teinte perlée, laiteuse. Seul un petit rayon atteignait , à travers l'épais mur de rosiers, la source cachée dans laquelle Prêtresse Anianka vint se recueillir. Derrière les lourdes paupières de la femelle, des couleurs se mirent à danser, formant doucement des images. Dehors, près de la fontaine, d'étranges lueurs rosées se mirent à danser autour des statues, comme autant d'aurores boréales terrestres.

Un louveteau sanglote, blotti contre le corps froid et raidi de sa mère.
Les pages jaunies d'un livre ancien, arrachées, déchirées.
Un cercle de sages loups dans la pénombre, le regard déçu.