Nice to meet you [PV Ska][Abandon]

Le gibier disparaissait et s’exilait vers des terres plus clémentes. Pourquoi pas les loups ? Kameo regrettait un peu que sa meute ne soit pas nomade comme certaines autres dont elle avait vaguement entendu parler. Mais la question ne se posait pas, c’était une tradition séculaire de canidés sauvages, rester en plan comme des nouilles à attendre que la vie passe. La femelle observait, sur une colline, la vaste plaine qu’elle avait tant rêvé de fouler de ses jeunes pattes. Une année qui avait parut durer des centaines, à vivre au crochet des autres, sans aucune indépendance. Maintenant, la jeune louve blanche pouvait jouir de sa liberté et partir en quête d’un ailleurs meilleur. Même si quitter sa famille ne faisait largement pas parti de ses plans.

Voilà deux jours que la femelle chassait dans ces broussailles. Le temps ne comptait plus vraiment et seul la joie et l’oubli arpentait son esprit. Jamais de sa vie, la louvette n’avait vu autant de gibier gambader tranquillement. Des tonnes de petites bestioles qui s’agitaient dans la douceur de ce monde en dehors du monde des loups. Un paradis de la chasse alors que l’hiver approchait, la neige menaçait bientôt les dolmens alors pouvoir galoper sans se les peler, imaginez.

Un lièvre et toute sa petite bande grignotaient dans les herbes sèches, paisiblement et sans s’attendre à ce qu’un monstre aux crocs acérés ne vienne les troubler. Ses entraînements lui avaient appris à se faire si discrète qu’aucune proie ne pouvait la repérer. A part si la demoiselle bondissait hors de sa cachette. Une énième course poursuite contre la mort, l’affolement général leva une nuée de volatiles. La musculature finement détaillée sous son pelage roulait à toute allure à chaque foulée. Ses prunelles violettes fixées sur le derrière blanc qui rebondissait toujours plus vite. Un claquement de dent dans le vide, puis deux, le rongeur avait de la technique pour fuir, une sacrée maîtrise du terrain et l’avantage de pouvoir se faufiler dans un trou au meilleur moment. Alors que l’animal disparut, Kameo hésita une fraction de seconde et ne vit l’arbre qu’à la dernière minute. Le tronc fendu en deux énormes branches, elle tenta de sauter dans l’interstice. Manque de chance ou coup du sort. Alors que la jeune fille se sentait voler, certaine de passer, une violente secousse fit vibrer son corps tout entier et bientôt, un recul s’opéra. Bien sûr, elle lâcha un cri de douleur du au choc mais le pire restait à venir.

« Aïeuh… »

Fit-elle, complètement relâchée sur l’écorce. Un vieux sac à patate qui pendouillait joyeusement. Une fois la douleur atténuée, Kam’ tenta de s’extirper… en vain. Pousser sur les pattes arrière, sur les avants, se tortiller dans tous les sens sans succès. Ah elle avait l’air fine la chasseuse, en plus ses pattes n’atteignaient pas le sol. Pendant quelques minutes, elle battit mollement ses membres contre le tronc rigide, espérant un miracle. Mais rien. Pour finir, elle se mit à hurler :

« AU SECOURS !!!!!! AIDEZ-MOI !!!!! »

Le cochon pendu attendit, jouant avec l’écorce sous ses yeux. Pas un bruit, aucune présence et l’ennui prit bien vite le pas. Kam’ se laissa pendre jusqu’à ce qu’on lui agrippe les pattes arrières. Interloquée, elle commença par donner des coups dans le vide, peut être par peur du prédateur. Après tout, il fallait se méfier des autres… ou pas, la lutte s’arrêta bien vite et la louve glissa vers l’arrière. Il avait de la force le bougre mais elle se coinça les antérieurs tout en expirant un gros ‘Hmpf’. Puis réfléchissant trente secondes, l’éclaireuse rentra les coudes et finit par voler hors de la prise douloureuse de l’arbre. La blanche se trouva sur le dos, une douleur énorme dans les côtes. Puis la voix de son sauveur résonna dans ses oreilles. Elle répondit tout en se remettant sur ses fesses :

« J’ai connu mieux mais ça va. »

Une fois bien assise, elle se malaxa la cage thoracique d’une patte. Ses paupières se fermèrent au contact avec ses bleus puis elles se rouvrirent sur un mâle imposant. Pour un peu elle aurait vu son père mais une fois le flou dissipé, elle reconnut un Brethen. Il n’avait ni glowstick ni rang de ce qu’elle se souvenait mais il était toujours coulé avec Suète. Et elle s’écria :

« Oh mais t’es l’élève de tatie Suète non ? Qu’est-ce que tu fais là ? »

Kam’ pencha la tête comme un enfant dans l’incompréhension, les yeux bien ronds et une moue interrogatrice ornait son visage. Le mâle était aussi blanc, et même plus, qu’elle mais tellement plus grand et costaud. Une chance qu’il fasse partie de la meute. La jeune femelle détourna le regard vers l’arbre fourchu où quelques touffes de poils, sa propre fourrure, trônait fièrement, ballotée par la brise. Par la suite, se rendant compte qu’il venait de la sauver, elle lança gaiement :

« Merci de m’avoir sorti de là ! Au fait moi c'est Kameo! »

Un grand sourire s’afficha, un peu bébête et les yeux plissés, sur ses babines.