Randonnée sous la lune | Manji

Le Lieutenant roux-beige aux allures de chevalier, et aux cheveux bouclés d'un noir si sombre qu'il ne semblait pas naturel était allé au temple, pour être tranquille, quelques instants. Il savait qu'il avait été déconseillé de se balader seul, surtout pendant la nuit, mais il faisait si bon, et franchement, Agravain était bien armé, bien que lesdites armes étaient solidement attachées à sa ceinture, puisque, avec les fluctuations du pouvoir de son glowstick, il avait peur que ces dernières lui échappent, et soient un problème pour la sécurité des autres Brethens.

Il était donc sorti du Squat le plus discrètement possible, sortant dans les plaines, où voletaient les lucioles, et où le vent caressait en un murmure les longues herbes . Tout seul, au milieu de la vaste étendue d'herbe, qui ressemblait à un océan de vert, sur lequel le vent faisait naître des vagues, dans la lumière argentée de la demi-lune, il ne pouvait s'empêcher de se sentir moins stressé qu'il ne l'avait été depuis quelques temps.
Avec toutes les inquiétudes sur l'arrivée de Precursors, les problèmes de glowstick, l'ambiance du clan avait été tendue, et il se doutait que c'était ce que recherchait ces nouveaux assaillants, puisqu'ils seraient plus faibles s'ils étaient pas soudés.
Il fallait que les Brethens restent soudés par leurs liens si forts de respect, de solidarité, d'amitié …
Il regarda au loin en réfléchissant.

Il avaient besoin de chefs forts, qui ne seraient pas pour autant des dictateurs.
Mais Agravain avait du mal à se voir en tant que tel. Il avait jamais possédé l'éloquence ni le charme de Méléagant, et était inquiet de ne pas autre le bon loup pour ce poste. Il avait peur de les décevoir.

Soudain, un bruissement derrière lui l’alerta d'une autre présence. Il doutait pas que Mel serait resté stoïc, calme, demandant qui passait là sans même se retourner, mais Agra' tourna la tête, et aperçut une forme toute aussi rousse que lui, même plus, coiffée d'or.
Il l'avait aperçu plusieurs fois, dans le Squat, Esterno lui avant donné le droit de résider parmi eux.

« Dame Manji ? » demanda-il avec un sourire de bienvenue.

« Que faites vous dehors à cette heure ? »

Il n'était pas fâché, après tout, lui aussi brisait la règle du 'on ne sort pas trop tard, et si oui, on y va surtout pas tout seul'.
Il était heureux d'un peu de compagnie.

Il lui sourit, puis retourna son museau vers l'étendue d'herbe qui bordait l'imposant Palais.

« Ne vous sentez pas obligée de me nommer ainsi, c'était une tradition, chez moi, de nommer les loups ainsi lorsqu'on était chevalier. » avoua-il.

En effet, c'était ses longues années d'éducation en tant que chevalier qui avait donné cela, ça, effectivement, même chez lui, les loups normaux se tutoyaient. Seuls les chevaliers traitaient chaque individu avec autant de respect. Mais il concevait que ça pouvait mettre ceux qui n'y étaient pas habitués mal à l'aise. Donc il tourna son visage vers elle … Mais elle continua sur sa lancée.
Ainsi, elle aussi était sortie pour réfléchir.

« De même. C'est toujours plus facile quand on est seul … »
Et en effet, l'introspection était toujours plus simple quand on était détaché du monde.
Derrière eux, les énormes murs du palais s'élevaient vers le ciel, alors que en face, les plaines d'herbe étaient illuminées de toutes petites lucioles, qui voletaient, éclairant le vaste espace vert.
Agravain détacha son regard du paysage pour le poser sur la louve.
« Accepteriez-vous de rester avec moi ? » demanda-il ses yeux brun calmes mais souriants.

« On serait plus en sécurité à deux, et de plus je ne voudrais pas qu'il vous arrive quelque chose, bien que je ne doute pas de votre capacité à vous battre ! Vous êtes peut être pas Brethen, mais vous êtes des nôtres. » dit-il avec un sourire.

Elle n'avait effectivement pas le titre de Brethen, car on ne l'avait pas acceptée dans la meute, mais il savait bien que tous posaient un regard amical sur elle, et que bien d'entre eux l'avaient acceptée entre eux. Et puis il y avait de bonnes raisons pour cela. Le calme et le silence recouvrirent de nouveau les plaines, le bruit du vent dans l'herbe et des insectes provoquant une agréable atmosphère de sérénité.

Le roux retourna son regard vers les lucioles, avant de le glisser vers l'énorme bâtisse dédiée aux dieux, qui siégeait derrière eux.
« Mon but était tout de même d'aller dans le palais. Il y a moins de bruit, et tellement de choses incompréhensibles dedans qu'elles me font oublier mes soucis quotidiens. » avoua-il.
Il se tourna vers la louve et sourit.

« Me feriez-vous l'honneur de m'y accompagner, ou préférez-vous rester dehors ? »

Le grand loup roux aux sombres cheveux sourit à la Solitaire, et se leva pour la suivre, son pas calme et mesuré, alors qu'il levait son regard noisette vers l'imposant palais, qui sortait de sol comme un monolithe, incroyablement grand. Il donnait aux loups cette impression d'être tout petit et insignifiant, et remettait facilement en question la position des loups dans l'univers.

« Je vous suis ! » dit-il, en emboîtant le pas de la dame rousse aux cheveux blonds, pour finalement marcher à ses côtés, dans la courte étendues d'herbe.
Il franchirent enfin l'énorme arc de pierre qui marquait l'entrée, dont les anciennes portes de chêne lourd étaient repoussée contre les murs, invitant tout être à entrer dans ce lieu saint.

Agravain rentra, puis s'approcha d'un mur, et prit l'une des torches entre ses crocs., l'enlevant délicatement du mur, avec toute intention de la reposer quand ils ressortiraient. C'était un lieu où les lucioles ne s'aventuraient pas, et malgré quelques grands vitraux qui laissaient entrer la lumière de la Lune, et les torches qui ornaient les murs tous les quelques mètres, la longue allée de colonnes à la romaine étaient illuminée que par l'astre nocturne, et une torche ne serait pas de trop.
Ils marchèrent entre les énormes blocs de pierre taillées qui montaient vers un plafond que, de nuit, on n'apercevait même pas.
Seule la lumière vacillante de la torche éclairait leurs environs, et projetait les ombres des colonnes sur les murs d'une manière tout à fait inquiétante. Agravain sentit son pelage se hérisser sur son dos.

Il se tourna vers la louve orangée et dorée et agita ses oreilles.
« Dame Manji, est ce que vous avez un dieu que vous préférez ? On m'as dit que chacun à ici une pièce qui lui est dédiée, peut être pourrait-on les visiter ? »

Lui même, ça lui avait pris quelques temps pour s'habituer à l'idée de figures toutes puissantes, omniscientes, qui veillaient sur eux, mais à présent qu'il avait un glowstick, et qu'il y avait des problèmes avec lesdits dieux, il était inquiet pour ses individus, et voulait en savoir plus sur eux, pour voir si il n'y avait pas un moyen de les sauver. Ce temps semblait être le parfait endroit pour se renseigner, tout en faisant du tourisme.

Il hocha la tête et sourit à la louve, en découvrant qu'il partageaient la même déesse préférée, après tout, le roux ne serait pas aller passer l'épreuve de la Renarde si il ne la considérait pas différemment des autres dieux.

« Ch'est également elle que chaimerai vichiter, du moins en premier. » lui avoua-il avec un sourire, malgré la torche qu'il conservait entre ses crocs, avant de se tourner vers des grandes ouvertures, des portes dans le mur, derrière les arches. Il y avait bien plus de potes qu'il n'y avait de dieux. Agravain agita ses oreilles, et se dirigea vers un portion de mur, entre deux portes, puis se releva sur ses pattes arrières, appuyant celles d'avant sur la paroi de roche, pour glisser la torche dans une espèce d'accroche sur le mur, d'où elle illuminait le couloir entre portes et colonnes. Son regard glissa sur la dizaine de portes, avant qu'il se retourne vers la louve rousse aux mèches blondes.

Il était bien heureux de l'avoir rencontrée, ça lui changeait agréablement des soirées solitaires qu'il avait l'habitude de passer. Il se retourna vers les grandes portes de bois, après lui avoir sourit, et les ouvrit lentement …
Un faisceau de lumière lui barra le museau, s'échappant de toute évidence de la pièce dans laquelle ils tentaient de rentrer. Il finit par mettre son épaule contre la large porte, qui était bien lourde et massive, puis l'ouvrit entièrement.
C'était une grande pièce éclairée par de nombreuses torches à la lumière bleue, et au centre de celle ci, comme une reine imposante, trônait un statue d'une grande et fine louve, au regard froid comme la glace, mais à la démarche puissante.
Sur le mur, derrière elle, un énorme dragon, bleu, aux longs crocs blancs et aux énormes ailes s'étendait sur tout une partie du mur. En dessous, des peintures de loups qui semblait effrayés, ou au contraire décidés, déterminés. Quelque chose de légèrement inquiétant se dégageait de cette pièce. Elle avait tout l'air d'être un lieu de puissance, mais aussi d'incroyable douleur et également de peur.
Agravain regarda autour de lui, puis leva son museau vers la statue de pierre, dont le regard était tourné vers la porte comme si elle attendait qu'on vienne la visiter.
« Je me détrompe peut être, mais je pense que cette pièce est celle d'Ao. »

La lumière bleue, changeante, illuminait étrangement la statue, faisant passer des ombres sur son museau, lui donnant parfois une expression froide, parfois un air inquiet, troublé. Il agita ses oreilles, avant de remarquer quelque chose, sur les murs. Il y avait des petites écritures taillées dans la pierre, en dessous de la frise de loups. Il s'approcha, puis les considéra avec curiosité. C'était probablement des noms, peut être des loups qui avaient un jour eu le glowstick de la dragonne.
Il se les lu.
«  Kydah … Romance … Azura … Quartz … Hyo..zan ? »
Il s'arrêta sur le dernier nom, puisqu'il y avait comme un coup de griffe dessus, comme si quelqu'un, dans un élan de fureur, avant tenté de se débarrasser du nom inscrit sur la pierre. Il pencha la tête. Qu'est ce que cela voulait dire ? Quelqu'un qui avait osé enrager un dieu ? Qui l'avait fâché ? Était ce donc un Precursor ?

Il leva la tête, et regarda Manji, consterné. Que voulait dire cette rature ?
Il finit par s'approcher de nouveau de la louve, puis de tourner la tête, regardant autour d'eux. Il y avait deux portes, une de chaque côté de la pièce ovale, en plus de la grande porte par laquelle ils étaient rentrés.
Il sourit à la louve.
« Je vous laisse le choix allons-nous à gauche, ou à droite ? » demanda-il.
Qui savait ou ça les mènerait, après tout.