Bois flotté et pluie dorée [Safran]

Chulhei aimait s'approprier les choses et le vieux galion échoué sur les rochers était peut-être ce qu'il essayait le plus de revendiquer. En tout cas, il avait suffisamment bien réussi à le faire pour transformer les anciens quartiers du capitaine en tanière confortable où il pouvait entasser tout son joyeux bordel, des pièges à la poudre à canon sans oublier les explosifs. Rendre moins humide avait été difficile et le manque de matériel de l'île avait rendu les réparations assez périlleuses mais là, aujourd'hui, il pouvait se vanter d'avoir boucher toute les fuites.
Dans un coin de la pièce, une espèce de grosse caisse pleine de tissus et de poil. Le bateau offrait une certaine distance avec la meute qui permettait d'élever sa fille Safran sans trop de problème malgré le grand nombre d'adolescents Thyozan turbulents. Et au fond de cette caisse, installée bien au chaud, la petite louvette qui finissait sa nuit alors que le mâle estropié était parti chercher un petit déjeuné et potentiellement ramener un oncle grincheux de couleur bleue.

Lorsqu'elle entendit du bruit, Safran dans un premier instinct se recroquevilla sur elle même, désireuse de rester encore dans le chaud cocon pour dormir même si pourtant, elle se réveillait doucement. Un bruit de meuble qu'on traîne lui fit tout de même dresser les oreilles alors, encore la tête dans le coaltar, elle redressa pour balayer la pièce de ses yeux encore fatigués, ne voyant que du flou.

« Papa ? Il pleut dehors ? »

Elle bailla dans un petit couinement de louveteau avant de se pencher de la caisse pour chercher son chapeau qu'elle enlevait pour dormir bien qu'elle ne le trouva pas. Cela l'incita à se concentrer et à mieux se réveiller. C'est à ce moment là qu'elle fronça les sourcils en ce rendant compte que la pluie était contre le bois intérieur et pas contre celui du pont qui le servait de toit ou contre les fenêtres à demi brisée. En relevant la tête, le corps à demi basculé hors de la caisse mais le cul encore dedans, elle vit alors que l'être qui était rentré n'était pas son père, ni son oncle, ni même un Raeders en fait ce qui l'incita à froncer encore plus les sourcils.
Cependant ce qui la rendit vraiment mécontente ce n'était pas la présence de l'inconnue dans sa maison mais plutôt celle du nuage qui détrempait le sol.

« Héééé c'est quoi ça ! »

Voix aiguë de jeune enfant, elle n'était pourtant pas trouillarde. Elle était une pirate après tout ! Alors abandonnant la recherche du chapeau, Safran sauta de sa couche pour courir vers la louve grise, le pelage tout hérissé bien que ses poils courts de ses gênes lointain ne la rendait pas bien menaçante.

« Reste pas là avec ton nuage tout mouillé, tu vas gâcher la poudre ! »

Et elle essaya de pousser du haut de sa petite personne, la grande personne qui foutait le bordel.

« En plus les trucs magiques, Illidan il a dit qu'il en voulait pas ! »

Et si Illidan le disait alors fallait écouter, parce que c'était le Capitaine quand même.

L'adulte ne semblait pas avoir très envie de bouger, s'adonnant à des explications qui passaient un peu au dessus de la tête de la jeune Safran qui fronça les sourcils dans une tentative de faire du clair dans sa tête. Alors comme ça ce n'était pas son nuage et le propriétaire la poursuivait. Ce n'était pas une très bonne voleuse si elle s'était fait voir, elle serait une très mauvaise chapardeuse mais heureusement, elle n'était pas Raeders. Safran elle, se promettait d'être plus douée.
L'adulte lui parla alors de papillons. Sérieusement des papillons ? Elle parlait de jolies créatures à une future pirate fière et féroce.

« C'est pour les nuls les papillons. Nous on est les Maudits de l'île, les papillons on les mange d'abord ! »

Petit sourire carnassier, ça ça allait lui en boucher un coin à la madame, même si celle-ci la poussa d'une patte avec une facilité telle que Safran en fut vexer. Hé bien elle mangerait un papillon juste devant elle pour la peine voilà ! Et surtout, pluie dorée ou non, ça réglait pas le problème, elle allait vraiment finir par gâcher le travail de son Papa avec son nuage.

« C'est pas grave si c'est doré, nous on en a plein des trucs dorés dans la Grotte. Mais toi, tu vas mouiller la poudre, et pas celle des papillons nuls mais celle de mon Papa. Comment veux tu que ça prenne feu si c'est mouillé ? Ça n'explosera jamais ! »

Safran laissa alors la louve grise pour pousser un sac de devant une porte, non sans effort, glissant à plusieurs reprise avant de réussir à le faire rouler sur le côté et libérer l'ouverture. Un vent frai s'engouffra à l’intérieur de la pièce, emmenant avec lui l'odeur salée du large, une odeur que Safran connaissait parfaitement bien et qui emplissait son propre pelage d'une marque forte qui se mélangeait parfaitement avec ce décors mais qui se repérait tout de suite sur le continent.

« T'as qu'à aller sur le pont, comme ça en plus on pourra voir le méchant arriver de loin ! »

Et sur ces mots, comme excitée de l'aventure à venir, la gamine disparu sur le dit pont dehors, se précipitant vers le bord du bateau pour voir venir l'intrus bien que rapidement, elle rentra de nouveau lançant un regard pétillant à la louve grise.

« Hééé est-ce que le méchant il a un... Elle butta sur le mot, Papa disait comment déjà ? Un glôstik ? Ou alors il te poursuit parce que tu l'as volé c'est ça ? Faut trop l'apporter à Illidan ! »

Il serait fier de voir qu'un de ces trucs magiques avait été volé, même qu'il pourrait le casser lui même s'il voulait et même peut-être qu'il pourrait un peu mieux voir si ça se trouve !

« Méééé aller, reste pas là avec ton nuage »

Safran ne laissait aucun répit.

Euh... les enfants étaient des êtres doux, innocents, câlins et amusants. Ils aimaient les choses simples de la vie comme les papillons ou jouer à cache-cache. Ils n'étaient pas censés manger les papillons et surtout ne pas jouer avec des explosifs ! Les yeux d'Hanna s'arrondirent comme des soucoupes à l'explication de la fameuse poudre. Sérieusement ?! Une poudre qui provoquait des explosions !? Ici, tout autour d'elle ! Elle jeta des regards effrayés autour d'elle, essayant de deviner quel tonneau ou quel sac pouvait contenir ce dangereux ingrédient. Peut être même qu'elle avait marché dedans ! La peur s'emparant d'elle, elle utilisa la pluie dorée pour se nettoyer consciemment les pattes. Elle se mit également à regretter que le nuage ne soit pas plus gros pour noyer toute la pièce. En relevant la tête, elle vit que la petite avait dégagé un passage. Elle était vraiment une habituée des lieux pour en connaître ces moindres recoins. Mais elle restait complètement inconsciente des risques présents. Elle continuait d'ailleurs à babiller sur le fameux méchant. La Solitaire ne lui répondit pas, car elle était trop concentrée sur le danger. Elle s'approcha lentement de la sortie, en marchant comme sur des œufs. Ce coin n'était plus sûr du tout, elle préférait retrouver son poursuivant plutôt que de rester une minute de plus ici. Elle finit par retrouver sa voix et fit l'entendre.

« Mais c'est super dangereux ton truc ! Il faut vraiment être irresponsable pour laisser un louveteau comme toi dans un endroit pareil ! Tu pourrais mourir à tout moment et moi aussi d'ailleurs ! Il faut sortir d'ici immédiatement ! »

Sans ménagement, elle poussa sa jeune interlocutrice pour l'inciter à aller à l'extérieur. Que la louvette l'ait suivie ou ait glissée entre ses pattes lui importait peu. Dans la situation actuelle, Hanna était bien trop troublée pour penser à autre chose que sa propre survie. Une fois sur le pont, elle se prit une baffe de brise marine. Cela ne la calma pas trop, au contraire. Son côté parano n'en fut que renforcé. Il y avait trop de choses et d'attitudes bizarres. Trop de dangers, trop d'ennemis potentiels. Sur ses gardes, elle se retourna brusquement et fixa avec incertitude la "Dure à cuir".

« En fait, je suis tombée sur l'Île où on envoie les fous. Les loups marginaux qui sont un danger pour le continent. Parce qu’ils jouent avec des explosifs par exemple ! Oui, çà doit être çà... Et toi, tu ne réagis guère comme un louveteau normal. Peut être même qu'en réalité tu n'es pas une enfant mais un loup de clan ayant le pouvoir de rajeunir ! »

Elle allait loin dans son délire, mais l'évocation sereine de la poudre l'avait bien traumatisée. Elle n'était plus sûr de rien concernant cette île et ses habitants. La spirale de doute tournoyait autour d'elle et de son esprit.

Elle était marrante cette louve, soit elle disait des bêtises sans intérêt, soit des évidences. Safran ne savait pas si elle l'aimait bien ou non mais elle la trouvait amusante alors elle voulait bien la considérer comme une alliée, au moins temporaire, pour mettre une bonne racler au méchant qu'elle avait rapporter avec elle. Alors que la jeune louve brune se faisait pousser par la grise, son petit derrière poilu glissant sur les planches en bois grâce à l'humidité provoquée par le nuage, elle expliqua à cette drôle d'adulte ses évidences.

« Bah oui, c'est normal que c'est dangereux, sinon Papa en ferait pas. Parce qu'il est canonnier alors il doit défendre l'équipage tu vois ? Mais moi j'habite ici alors je sais faire attention mais Angelica et Gurebi elles ont pas le droit de venir elles parce qu'elles font que des bêtises. »

Une fois dehors, Safran s'éloigna à petits bonds enjoués, quittant les pattes de la grise pour regarder l'horizon, posant ses deux pattes avant sur le dessus du bord et se soulever du planché du pont, étant encore trop petite pour y voir par dessus les quatre pattes au sol. Elle voulait voir si quelqu'un arrivait mais elle ne vit rien. Ah peut-être si elle prenait la longue vue ! Elle sauta de sa place pour aller à nouveau dans la cabine récupéré l'objet lorsque les dernières paroles de la grise arrêtèrent le jeune louveteau qui fronça les sourcils. Elle se retourna vers l'adulte, l'expression un peu indignée.

« On n'est pas des fous ! On est des maudits je t'ai dis, tu écoutes pas beaucoup hein ? Puis on est pas dangereux que pour le continent mais pour partout d'abord! Parce qu'on est des pirates ! »

Safran fit alors la grimace, retroussant légèrement ses babines pour laisser apercevoir ses petites canines blanches de bébé. Elle était presque une mini Illidan comme ça bien qu'en réalité, elle ne faisait que copier l'expression qu'il affichait quand le sujet était évoqué.

« Et puis j'ai pas de pouvoir nul de loup de clan nul ! Quand je serais vieille comme Papi Eeno ou Thyara et Hyozan, bah j'aurais des pouvoirs de la mer même que mais faut attendre. »

Elle retourna sur le bord du bateau, oubliant la longue vue.

« Dis, il ressemble à quoi ton méchant ? Tu crois qu'il faut mieux l'exploser maintenant ou faire un prisonnier ? »