Leet's take a break and take a moment to celebrate! [tout les Readers]

C'était fantastique, c'était... Mieux encore que dans ses rêves les plus sombres. Elle était vraiment revenue, la puissante Gardienne des Abysses aux écailles rouge ruisselantes des larmes de l'océan -comme si sa peau était faite de gouttelettes de sang-. Et Céto tenait sa promesse, en échange de leurs larcins, elle leur offrait la liberté. Des possibilités nouvelles explosèrent dans l'esprit un peu embrumé du mâle anthracite, sa haute consommation de pavot et autres herbes médicinales lui faisaient parfois oublier les limites du raisonnable. Bah Morbleu ! La folie était une forme de courage et de passion ! Douce folie d'ailleurs, qui induisait dans l'encéphale du pirate convalescent des rêves de grandeur. Maintenant qu'ils avaient un bateau pouvant les conduire par delà les mers, qu'ils avaient la possibilité de ne plus mourir calciner sur place en posant pattes sur la plage de leurs ancêtres passé six ans... Tellement de choses leur était à nouveau possibles !! Un large sourire, un peu béat, s'épanouie sur les babines charbonneuse du loup de mer. Il délaissa les trois prisonnières pour s'approcher en claudiquant sur ses deux pattes valides et sa patte de bois de ses frères, fixant avec envie et fascination le beau bâtiment sorti des flots. Ses voiles déchirées claquaient dans le vent, ses mats grinçaient, et de loin le navire semblait encore trembler comme s'il s'étirait, s'éveillant d'un sieste de plusieurs décennies. Un long frisson parcouru l'échine du gris. Ils avaient réussis. Les Raeders avaient eu leur part du trésor. Un hurlement de joie un peu fanatique s'échappa de la gorge sèche du Canonnier en réponse aux paroles de son Capitaine et frère.

Sayuri était effectivement bien une forbante et elle l'avait prouvé a de nombreuses reprises maintenant. Elle méritait sa part de gloire. Autant que chacun d'eux, peut-être même plus. Sauf pour sa part. Fallait pas abuser non plus. Creek se rengorgea en attendant les mots de Kéran à son égard. Sa queue fraîchement sectionnée battant l'air en cadence avec les tambours de fête. Il grimaça. Ca faisait un mal de chien ça encore... Le loup lança un regard noir à ce bout de moignon dépoilé avant de regarder son frangin. Le Capitaine venait de lancer les festivités, et s'approchait maintenant de lui avec toute la considération d'un grand frère inquiet. Kéran oubliait-il qui était le premier né de la portée ? Bon ok, aucun des trois ne savait qui était né en premier, n'empêche que si Creek n'avait pas eu son accident petit, il aurait probablement été le plus grand des trois. Ca croissance en ayant prit un coup, il se retrouvait à être à la même hauteur de museau, quoi qu'il était un peu plus râblé. Peut-être qu'en se redressant bien il gagnerait quelques centimètres qui lui feraient regarder les autres pirates de haut ? Bah. L'esprit joyeux, le coeur en fête, le mâle à aux pattes folles lança un rictus au Capitaine.

" On ne peut mieux Cap' ! Il en faut plus que ça pour m'achever ! "

Creek grinça des crocs, mais le ton était badin, amusé. Il reprit en riant :

" Vous ne serez pas débarrassé de ma carcasse avant que je n'ai pu récupérer les trésors enfouis dans le fort ! "

Sur ces mots, il récupéra trois grosses coques de noix de coco et les plongea dans le baril d'alcool au fumet si délicat. Il fit un signe de tête à Tatch, puis à Kéran, leur proposant ainsi de trinquer à leur nouvelle liberté gagnée.a

Mouahah.

Enfin, leurs efforts avaient porté leurs fruits. Les raeders voyaient enfin le bout du tunnel avec cette récompense. Un bateau, maintenant, ils avaient un navire. Des médaillons aussi. Désormais, ils pouvaient bien voir au-delà de tout ce en quoi ils avaient pu espéré jusque-là. Attentive, Lewis écouta les paroles de leur Capitaine. Safran était morte avant la naissance de la loupiote. Dommage. Elle aurait bien aimé la rencontrer, voir à quoi ressemblait leur second. Vint ensuite l’hommage à Creek, un air innocent sur son p’tit minois, Lewis adressa un large sourire au pirate à la patte de bois. Sautillant presque sur place à l’annonce d’une fête, la petite laissa libre court à son excitation. Jusqu’à ce que son regard se pose sur elle. Celle qui avait osé dévorer Poe, blessant profondément la fille d’Alys qui avait dû se trouver rapidement un autre compagnon.

Prenant exemple sur Creek, la jeune pirate plongea un récipient en noix de coco dans le rhum, dont l’odeur lui chatouilla la truffe avant de se diriger vers l’une des prisonnière, la chauve-souris n’étant que de piètre intérêt à ses yeux. Il était difficile de savoir ce que l‘enfant derrière la tête, n’exprimant aucune émotion, l’on aurait pu supposer un instant que Lewis s’en prendrait au Moustique. Toutefois, elle posa son récipient entre elles deux, sans quitter son interlocutrice des yeux.

« — Tu t’en ai pris à Poe, Celle-qui-se-tient-tranquille-dans-la-mort, mais Poe te pardonne, pour cette fois. »

La pirate serra la grenouille contre elle, observant avec un certain agacement la louve des continents. Certes, l’amphibien n’était pas irremplaçable, mais cela causait toujours autant de peine à l’enfant de s’en retrouver séparée. Après tout, ce petit animal était bien la seule chose qu’il resté de familier à la petite, privée de ses parents, de sa soeur. Pendant une fraction de seconde, une lueur de tristesse brilla au fond de ses prunelles améthystes, puis disparut aussitôt.

Alors, la pirate sourit en se remémorant leur rencontre, leurs dialogues. Ses yeux mauves semblaient briller un peu plus fort, alors que ses griffes le bol en noix de coco. Lewis avait compris que Meslucioles — entre autre — était le nom de cette étrange enfant, qu’Augure était cette étrange bestiole logeant dans le crâne de Tamort, que c’était toute sa fratrie qui logeait sur elle. Un cimetière à elle toute seule ce moustique.

« — Mes lucioles à moi sont de bien meilleures présages  que toi, mais ne sont pas en mesure de faire ça… » La loupiote poussa la noix de coco emplie de rhum en direction de son interlocutrice. « Alors, bois ce breuvage, et trinquons à nos étranges découvertes futures ! »

Qui sait ? Pourquoi pas une baleine ou un requin la prochaine fois ? Voir même quelque chose bien plus proche d’eux, à quoi ressemblait un loup de l’intérieur ?

Une seule arme l’emprisonnait, la contraignait à voir uniquement la lumière au travers des barreaux et regarder comme le ciel est beau.

La chauve-souris demeurait immobile, ne prenant à peine garde aux propos qui se disaient. Les murmures ne lui provoquaient que migraines. La concentration ne faisait que raviver la douleur. Sheina ressentait encore l’haleine emplie d’alcool d’un de ses geôlier qui au lieu de la punir pour sa résistance, avait tenté de lui apporté de l’aide. La bourse gisait toujours entre les pattes de l’Etelkrus qui ne pouvait se résoudre à l’utiliser. Et si cela ne faisait qu’intensifier la douleur ? Et si cela n’était que ruse pour la punir un peu plus de son audace ? Les crocs serrés, elle attendait, que son heure vienne. Que ces pirates se décident enfin à terminer ce qu’ils avaient achevé. Sur les trois prisonnières, elles n’étaient plus que deux, la disciple de Kiro et cette enfant à l’odeur Lazulis, la troisième avait visiblement trouvé un échappatoire, que grand bien lui fasse.

Plus le temps s’écoulait, plus Sheina avait chaud. Son aile repliée ne semblait cessé de vouloir la torturer un peu plus. Devait-elle faire confiance à ce pirate ? Cela la perdrait probablement… Mais après tout, elle n’était pas dévouée à la déesse de la ruse et de l’intelligence, mais au dieu de l’agilité. Non. La disciple de Kiro ne pouvait pas se résoudre d’abandonner, pas ici, pas maintenant. Détachant le cordon de la bourse la louve tenta de se souvenir des recommandations de ce pirate à patte de bois, avalant quelques graines noires. Cela lui ferait passer la douleur, il le fallait, même si ce n’était pas une bonne chose.

L’Etelkrus n’avait pas le temps pour un cataplasme, elle devait profiter du fait que les pirates partaient en fête pour trouver un échappatoire et vite. Sinon, ce n’était pas que ses ailes qu’elle perdrait…

Ils avaient réussi, ils avaient gagné ! Maintenant ils avaient avec eux un bateau qui flottait sur l'eau - Limule doutait un peu que celui empalé sur les falaises de Morne-oeil puisse repartir un jour- Ils avaient même un trésor qui leur permettrait d'aller plus longtemps sur le continent, ils ne seraient plus aussi coupé du monde qu'avant, ils en feraient parti et peut-être même qu'ils auraient le rôle des méchants. Kéran décida alors d'ouvrir des festivités, ramenant un tonneau rempli du rhum de l'île et une bonne partie du butin de pêche du jour. Il invita tout le monde à se réjouir, officialisant l'intégration de Sayuri aux Raeders, bien que Limule l'avait toujours vu comme tel, elle l'avait toujours vu sur l'île. Cependant, alors que joie et sourire s'afficha sur le visage de tous, les yeux bleus de la jeune blanche se ternirent d'un léger voile de tristesse au nom de sa sœur. Elle n'avait plus personne avec qui elle voulait se réjouir. Oh Safran serait probablement restée trop sérieuse mais elle avait toujours été là. Son père lui manquait aussi mais celui qui aurait pu être là, celui qu'elle préférait à tous, son absence était la plus douloureuse de tous. Ajani n'était même pas mort, c'était juste lui, qui avait préféré ne pas être là, lui qui les avait abandonné et elle qui ne savait même pas pour quoi.
Mais qui aurait pu savoir quel était l'état actuel du cœur de Limule ? En tout cas, elle ne laissa rien paraître et sautilla joyeusement vers la nourriture ramené que la plus petite des prisonnières prenait soin d'engloutir à ne plus en finir. Limule attrapa un crabe assez moyen en taille et à la carapace foncée, une étrille qu'elle ramena à la louve chauve-souris qu'elle avait décidé de prendre en affection. Le crustacé tentait mollement de se défendre, étirant inutilement ses pinces devant lui alors que la jeune louve le tenait délicatement par la carapace. Arrivée à côte de la louve, Limule alla s'asseoir à côté d'elle, remuant légèrement la queue, étirant un sourire sur ses babines. Sans un mot, elle planta ses crocs à des points précis de la carapace de sa proie avant de l'ouvrir dans un craquement osseux. Puis elle fit glissé la bête dépouillé de sa coque, chair et organes à l'air, reposant sur le ventre au milieu des pattes comme une petite assiette vers l'hybride.

« Je suis sûre que sur le continent, vous savez pas bien ouvrir les crabes. Au début j'y arrivais pas trop aussi, j'ai perdu deux de mes premiers crocs dessus ! Mais celui-ci est pas très grand, je pense que tu vas toujours avoir faim. »

Elle parut réfléchir quelques instants. En réalité, elle ignorait si elle était écoutée, elle en doutait un peu et probablement qu'elle y gagnerait plus à aller s'amuser avec Lewis ou un des trois frères, même avec Cendrillon si ça se trouvait mais Limule ne voulait pas qu'un des Raeders devine qu'elle était un peu triste au fond d'elle.

« Oh ! Je crois que j'ai vu un poulpe aussi ! Tu vas voir, c'est marrant, on les sent encore bouger lorsqu'on les mâchouille »

Et elle repartie vers la gros de la fête.

Hochant doucement la tête, la pirate se pencha à son tour au-dessus du bol, sa langue lapant doucement le liquide ambrée. En face, le Moustique ingérait bien rapidement, sans prendre en compte les effets du rhum maudit. Un sourire aux babines, Lewis fit mine de boire beaucoup lorsqu’en réalité… C’était La Luciole qui vidait principalement la noix de coco, perdant doucement en lucidité. L’insecte qui accompagnait Celle-qui-se-tient-tranquille-dans-la-mort but aussi, visiblement l’insecte était tenace, assez pour supporter l’alcool ambré. Ce n’était malheureusement pas le cas de Poe. Lewis l’avait déjà retrouvé une fois, son coeur flottant à la surface d’un baril. Visiblement l’alcool avait été fatale à ce Poe là, mais la pirate ne referait pas la même erreur. Trouver des grenouilles sur cette île était assez compliqué, sans même parler des quelques recherches sur le continent. C’est qu’il y en avait des grenouilles bizarres, de pleins de couleurs différentes, aux propriétés plus dangereuses les une que les autres.

Les sens de la pirate n’étaient pas encore totalement embrouillés, même si elle avait bien plus chaud qu’avant. L’enfant du continent ne marche plus droit, comme si tournait autour d’elle. Ravie, Lewis se saisit d’un poisson, plongeant ses petites dents de laits dans la chair tendre.

« — Déjà à terre rien qu’avec la première tournée ? »

Cela aurait pu durer une éternité, cette sensation de s’amuser réellement, de lâcher prise sur tout, auprès des siens. Toutefois, il y a toujours une ombre au tableau. La pirate finit par délaisser son poisson tournant sa tête en direction de cette silhouette étrangère, dont l’odeur en disait long sur l’origine. Fronçant doucement les sourcils, la petite affiche un air contrarié.

« — Intrus !»

Pas possible de passer une fête tranquille sur ce rafiot ? Poe croasse, tandis que la jeune Raeder se tourne vers Méluciole qui a bien trop picolé. Clairement, ce n’était pas sur elle qu’il faudrait compter pour un coup de patte, restait que les adultes… si ils n’étaient pas complètement torchés.

Fuir.

Cela devenait la préoccupation principale de Sheina. Les graines de pavots ne feraient pas éternellement effet, le mal de tête reviendrait plus fort que jamais, la douleur l’assaillirait. Pourtant… Pourtant. L’hybride écouta la pirate au pelage blanc lui parler, parce que sa compagnie lui plaisait mine de rien, parce que au fond, c’était probablement celle qui illustrait l’humanité de sa meute. Les griffes de Sheina touchèrent le crustacé parfaitement décortiquer. La Raeder mettait tant d’effort à préserver la chauve-souris que cette dernière en ressentait presque de la peine de la laisser en ces terres. Mais la disciple de Kiro ne pouvait demeurer sur cette île, pas après tout ça. Saisissant délicatement le crabe entre ses crocs, l’hybride le mâchouilla avant de retirer un de ses multiples bracelets à pique. C’était son cadeau d’adieu, de remerciements. Bien maigre certes comparé à tous les efforts fournis par la petite Limule qui avait de nouveau disparu. L'avertissement d'une gamine mauve vu le signal de départ de l'Etelkrus.

« — Pardonne-moi Limule. »

Alors Sheina se fondit dans l’obscurité, disparaissant dans les hautes herbes, longeant la plage en tentant de se cacher. La douleur revenait, la peur de se faire capturer de nouveau s’intensifiait. De nombreux points de son évasion n’avaient été abordés, la nage serait son unique chance, mais y parviendrait-elle ? La prêtresse ne pouvait rester, elle ne devait plus rester. Son clan devait apprendre les nouveaux atouts des Raeders, mais la disciple de Kiro devait tout faire pour que cela ne tourne pas à l’affrontement. Plus de sang versé, par pitié. Ce sera ça mon cadeau Limule, je ferais tout pour éviter que toi et les tiens, ne soyez victime de la vengeance.

C’était sa mission.

Leikn serrait les crocs, avançant seule dans ces terres étrangères. Tout ceci, ne lui disait rien de bon. Anianka l’avait proposé pour distraire les pirates, alors que ce n’était pas la plus discrète. Qu’importe, si cela pouvait aider Teddy… C’était le bonheur de ce dernier qui lui importait par-dessus tout, qu’importe les plans de la prêtresses, le jugement des autres. L’ancienne solitaire avait retiré son collier à piques directement relié à sa cape et ses plaques dorées aux épaules. Bien, au moins maintenant aurait-elle clairement l’apparence d’une solitaire, d’une bête famélique errant sur des terres qui lui étaient pourtant interdites. Au moins, si le combat n’était pas un des atouts de la louve, l’ingéniosité en faisait parti.

La sans-glowstick étudia le navire, tapie dans les herbes. Il n’y aurait pas cinquante manière de faire diversion avec des pirates, du moins aucune assez voyante pour permettre aux autres membres de son groupe de s’emparer de la petite Méluciole. Après ça, Mister Bélier avait plus qu’intérêt à lui apporter le p’tit déjeuner dans leur tanière tous les jours… ou poser de nouvelles vacances. En soupirant, la Lazulis décida d’y aller franchement, histoire de donner une raison valable aux pirates de ne se préoccuper que d’elle. Bondissant sur le pont, là où semblait se dérouler la petite fête, Leikn adopta une posture défensive, tandis que ses cornes renversèrent l’une des barils qui dégageaient une odeur forte. Au moins, aurait-elle toute l’attention des pirates. Ses yeux émeraudes se posèrent un instant sur la silhouette de Méluciole, qui semblait bizarre… Les pirates lui avaient-ils donné une sorte de drogue ?

Cette distraction ne durerait pas longtemps, mais suffisamment pour que les membres de son groupe puissent s’emparer de l’enfant. Leikn trouverait bien un échappatoire, ce n’était pas les idées qui manquaient. Ne faites rien de stupide par pitié…

Un instant, limule dressa tête et oreilles à l'alerte de Lewis. Elle était sur le point de revenir vers la chauve-souris, un poulpe fermement maintenu entre ses crocs, les tentacules s'enroulant autour de son museau dans l'espoir d'une échappatoire. L'absence de la prisonnière détourna complètement la pirate blanche de l'alerte et ce qu'elle apportait. Là où aurait du se trouver la louve ailé ne restait plus que la carcasse du crabe à peine mâchouillé de l'étrille et une bracelet à pique. Lâchant sa proie qui en profita pour tenter de retrouver sa liberté, Limule s'approcha de la place qu'occupait plus tôt la femelle, reniflant le sol.  Elle pouvait encore ressentir contre sa truffe, la chaleur d'un corps qui venait à peine de partir. Relevant la tête, elle balaya le paysage du regard, sans un mots, le corps tendu, tentant de capter la moindre molécule odorante dans l'air. Elle trouva la direction emprunté, un instant son regard bleu changea de couleur avant de reprendre celle d'origine, Limule était meilleur chasseuse et meilleur traqueuse la nuit, s'améliorant au fur et à mesure que la lune grossissait dans le ciel. Elle ne devenait pas meilleur qu'un autre loup mais au moins... elle restait concentrée.
Elle attrapa le bracelet entre ses crocs et disparue à la suite de celle qui s'enfuyait entre les hautes herbes.

La louve blanche ne fit pas attention aux bruits et aux odeurs qui s'ajoutaient à la fête des pirates, elle ignorait complètement ce qu'il se passait ou s'y passerait, sa concentration étant tournée sur autre chose. Elle avançait comme un prédateur en chasse et pourtant, elle ne voulait rien à la louve mauve, ça ne l'étonnait même pas qu'elle puisse vouloir essayer de s'enfuir mais cette louve... elle ne savait pas. Limule devait la retrouver, avant qu'elle n'essaye de s'échapper par la mer, et avant que l'Océan ne décide de la dévorer pour sa faiblesse.
Parce qu'elle ne pourrait pas traverser seule, elle le savait, elle avait vu les blessures aux ailes, elle avait vu la fatigue de la chauve-souris, elle savait très bien que exténués étaient les proies préférés des flots.
Elle accéléra le pas jusqu'à sentir, mélangée à la piste qu'elle suivait, d'autres odeurs s'y mélanger. Des odeurs étranges, un peu forcées, une odeur d'Océan qui ne s'y mêlait pas vraiment.

Rhaegar

Ses yeux étaient si plissés que ses iris ambrés étaient à peine visibles derrière ses paupières. Rhaegar était là, droit comme un pic sur le sable à observer la scène qui se déroulait non loin de lui, sur le bateau où festoyaient apparemment les pirates. Festivités qui n'allaient pas duré longtemps.. Les muscles contractés, il était prêt à réagir, prêt à intercepter Teddy si il tombait, ou à se jeter dans la mer pour grimper sur ce tas de bois flottant en cas de dérapage. 
Mais il n'eut pas à faire grand chose en fin de compte. Teddy revint, avec quelques difficultés, mais il avait réussi car il portait la petite Méluciole également. La diversion avait été suffisante, même si ce n'était pas ce qu'avait pensé Anianka. La gamine semblait dans un état second, mais elle était bien vivante au moins. Était-elle malade ? Empoisonnée ?? Si Teddy réclamait une vengeance pour cet abus envers sa nièce, ils agiraient, là, tout de suite, et détruirait ce navire tout neuf. Cette mission avait été beaucoup trop facile en fin de compte.

Rhaegar attendit un instant alors que Teddy était revenu, il hésitait à repartir, c'était bien trop simple. Il avait envie de passer à l'acte, de réclamer justice pour leurs crimes. Il voulait leur montrer que s'introduire chez les Lazulis et les agresser n'était pas sans prix. Un sourire moqueur s'élargit sur ses babines jusqu'à dévoiler ses crocs aiguisés, il fixait le navire de ces vauriens avec une lueur dans les prunelles. Son visage entier jouissait au nez des pirates. Il repensa à Ajani, ce pirate qu'il avait invité sur son territoire. Pas de doutes qu'il l'avait trahi et qu'il festoyait avec les autres. Il n'avait rien à perdre maintenant que sa mère s'était jetée à la mer, mais Rhaegar comptait bien réclamer des comptes, le trahir n'était pas sans conséquences. L'adrénaline montait petit à petit, ses veines grossissaient à vu d'oeil. Il était prêt, prêt à les accueillir.

La fête battait son plein. Entre les gorgées de boisson frelatée qui s'enchaînaient gaiement et les amuse-gueules de crabes et de poissons entassés sur une planche, rien ne semblait pouvoir venir perturber leur victoire. Ils célébraient tous ensemble, les pirates partageant même sans hésitations leurs vivres avec leurs convives forcés. Bien sûr, ils étaient des pseudos prisonniers à peine surveillés, mais qui s'en souciait alors que le temps était à la joie ? Creek trinqua avec ses frères, appréciant la brûlure caractéristique du rhum, se délectant de ce trait de feu dans son gosier et de la détente que cela apportait à son corps. La douleur semblait même le fuir alors que plus rien ne l'atteignait que le son des tambours et les rires de ses frangins. Lorsque Kéran reprit la parole plus sérieusement, le loup antracite le regarda longuement sans un mot. A la fois surpris, dubitatif, mais heureux. Il n'était pas au mieux de sa forme, et le Capitaine et le Maître des Rituels savaient mieux que quiconque qu'une convalescence pouvait être longue et fastidieuse. Cela dit, la proposition de Kéran le Grand souligna sa confiance en son frère et son absolue certitude qu'il allait se remettre sur patte. Un large sourire fendit la poire du pirate sombre alors qu'il bomba fièrement le torse.

« Toujours là pour assurer tes arrières mon frère ! »

Clama t-il dans un rire gras. La fièvre de l'alcool le prit finalement et il se laissa entraîner avec les autres Raeders dans la cohue sur le pont du navire. Il vit du coin de l'oeil le Capitaine disparaître et fronça les sourcils. Se détachant du groupe, il gravit les quelques marches le menant sur le pont supérieur et observa dans la nuit les ombres furtives qui s'éloignaient. Ainsi les incités rentraient chez eux. Grand bien leur fasse, qu'ils n'oublient pas le traitement décent qu'ils avaient reçu ici, en dépit du conflit que leurs meutes leur opposaient -presque- sans raisons. Son regard cobalt fixa un instant les fuyards, alors que son sourire s'élargissait. Volez petits oiseaux du continent. Nulle mouette ne saurait survivre par delà l'horizon de toute façon, et ce beau bateau promettait bien des aventures !