Une journée comme une autre [ft Anita ]

C'était en effet une journée comme une autre.

Avec la routine habituelle qui s'était installée cette dernière année, bien plus structurée qu'elle n'avait pu l'être auparavant - et qu'Anita ne l'a souhaitait, en réalité.
Heureusement qu'il lui restait malgré tout certaines journées moins occupées que d'autres, certains jours où elle trouvait des creux qu'elle pouvait occuper comme bon lui semblait avant de redonner une étincelle d'inattendu dans ses activités.

Bon, avec la naissance des enfants de Holly quelques jours plus tôt, elle se devait de rester plus vigilante encore afin de prêter attention à tout problème dont elle pouvait elle-même s'occuper sans déranger la bleue, le temps que celle-ci se repose.
Alors ses hautes oreilles étaient dressées encore plus que d'habitude si cela était seulement possible, et feraient en sorte de devenir l'équivalent de quatre oreilles.
Qui ne tardèrent pas à être sollicitées quand une petite créature accourut vers elle.
Ça la surprenait toujours un peu de voir des enfants se précipiter dans les allées du Castel - combien d'années sans autant de naissances concentrées sur un même moment ?
Beaucoup de nouvelles têtes à mémoriser, et une surveillance qui se devait d'être renforcée tant que ces créatures rodaient encore dans les confins des terres.

L'hybride s'assit et accueillit l'arrivée de l'enfant rose avec un sourire et un sourcil haussé. Celle-ci était Litchi si sa mémoire ne lui faisait pas défaut, et ses yeux pétillants levés vers elle ne semblaient réclamer qu'une chose : du divertissement.
Eh bien, pourquoi pas ? Son passage quotidien à la Moere n'avait pas encore été effectué, y emmener la jeune enfant ne changerait pas grand chose.

Ainsi se mirent-elles en route, Anita découvrant un peu plus à chaque pas cette nouvelle âme Etelkrus - pleine d'énergie, curieuse et entreprenante.
À sa question elle laissa tomber son regard - loin, loin vers le sol- pour capter le visage de Litchi.

— Tous ? Non. En fait, je connais assez peu les noms, je me souviens surtout d'à quoi ils ressemblent.

Et après toutes ces années à parcourir la Moere et d'autres territoires dans lesquels leurs longs corps se glissaient, elle en avait vu un certain nombre. Sans compter tous ceux qu'elle n'avait vu qu'en dessin ou description dans les livres et qu'elle doutait de pouvoir tous observer un jour.
Et puis, le monde était si vaste.


— Je sais même pas si c'est possible de tous les connaître, il y en a beaucoup, même en-dehors de ces terres.

A un quart de monde d'ici, il y en avait des beaucoup plus gros et beaucoup plus colorés, en tout cas.
C'était ce que Dez avait dit.

— Tu veux qu'on en cherche ?

La Prêtresse fit halte, le temps d'avoir la réponse de la petite et de balayer les environs du regard pour se repérer.

Si on ne pouvait jamais tout à fait dire sous quelle cachette en trouver, certains endroits étaient néanmoins plus propices que d'autres.

Un rire l'agita et elle secoua doucement la tête à la réponse enthousiaste de la petite louve rose, apparemment déterminée à apprendre l'existence de tous les serpents du monde. Elle ne la contredit pas pour autant : c'était important de se construire des objectifs, aussi improbables soient-ils. Qui savait, après tout, de quoi certains étaient capables par passion ? Elle connaissait quelques loups dont le savoir la fascinait déjà chaque jour tant il était poussé et complexe.
Litchi était peut-être une petite étoile montante, qui brillerait sur son empire des noms de serpents.

Dans tous les cas, ça la tiendrait occupée de longues heures durant - si elle ne changeait pas brusquement de centre d'intérêt au bout de quelques jours, car ainsi étaient les enfants - et Anita ne pouvait que supposer que ce serait une bonne nouvelle pour Perrine d'avoir au moins une boule d'énergie à peu près canalisée.

Pour une boule d'énergie, elle en était une.
L'hybride avait anticipé une réaction enthousiaste de la part de la petite, mais son effusion de joie fut au delà de ses espérances. La Prêtresse avait l'impression de pouvoir presque palper les flux électriques qui alimentaient l'enfant, véritable pile électrique aux cris stridents et aux yeux exhorbités d'anticipation.
Un sentiment de nervosité descendit le long de son échine le court espace d'une seconde. Alors c'était ça, qu'ils avaient tous les quatre fait subir à leurs mères ?

Bon, au moins Litchi resta-t-elle solidement ancrée à l'une de ses pattes au lieu de bondir dans le décor pour disparaître dans la fosse la plus proche, c'était un bon point.
Anita laissa son sourire s'agrandir et se pencha pour mettre son museau à portée du visage de la louvette.


— On va essayer de les débusquer dans leurs cachettes, mais d'abord, quelques règles.

Voici venue l'heure du barbant point sécurité.
À regarder l'enfant, elle avait peu d'espoir que ses consignes n'aient une espérance de vie plus longue que le temps nécessaire à traverser son cerveau en entrant d'une oreille pour ressortir par l'autre, mais elle aurait au moins la bonne conscience d'avoir essayé, et si la gamine se faisait mordre, et bien... Elle n'aurait qu'à la ramener le plus vite possible au Castel pour la confier à un panseur. À sa connaissance, la Moere ne comptait pas de serpent au venin assez agressif pour tuer un loup en quelques minutes.

À sa connaissance.

Enfin, elle ferait tout de même son maximum pour que ça n'arrive pas, ne souhaitant ni s'attirer les foudres de ses parents, ni la douleur de Litchi.
Mais elle voyait l'écho d'un reflet d'un autre temps dans ces yeux pâles, d'elle-même - et de sa sœur- à son âge. Ça l'aiderait peut-être à anticiper les dérapages, mais ça ne la rassurait pas.

— Les serpents, certains sont dangereux, tu le sais. Alors je vais te dire quels endroits on va devoir repérer, et tu vas chercher, mais c'est moi qui irai regarder avant de te dire si tu peux t'approcher. D'accord ?

Elle haussa des sourcils inquisiteurs et fit de son mieux pour lisser son visage dans une expression de sévérité sérieuse.

— Si tu me désobéis, je t'attrape et je t'attache puis je t'accroche deux heures à une branche avant de te ramener à ta mère, en espérant qu'aucune bestiole ne t'auras pris pour un gros fruit et mangée avant.

La louve plissa les yeux sans pouvoir tout à fait masquer son amusement, mais le ton de sa voix n'était pas celui d'une plaisanterie.
Parce qu'elle n'aurait aucun scrupule à mettre sa menace à exécution.
Le premier motif étant qu'elle le pouvait, et sûrement le devait, pour que l'enfant comprenne qu'on ne rigolait pas avec les consignes de sécurité quand on pesait encore pas plus lourd qu'une chenille, et que ses paroles n'étaient pas simplement des mots dispersés dans le vent.
Et le second ?
Ça l'amuserait, énormément.

Ce n'était pas tous les jours qu'on pouvait suspendre des louveteaux aux arbres en se sentant légitime à le faire.

L'expression de l'enfant passa par plusieurs étapes et degrés face à ses règles.  
D'abord une frustration évidente à laquelle elle s'était attendue, puis... Un rire ? Bon, ça ne la surprit pas non plus. Il y avait dans ces yeux clairs une lueur de défi qui ne lui était pas étrangère. Avec un peu plus d'insolence que d'habitude peut-être, mais ça ne l'impressionait pas.
Au contraire. Il y avait chez Anita une part d'enfant qui refusait de mourir, malgré le contrecoup des années et des événements qui avait tendance à le mettre à mal et à le retrancher dans des coins plus reculés.

Face à un autre louveteau, il ne pouvait que se reconnaitre, s'identifier et surgir de sa cage.
Alors la réponse de la petite lui parut presque comme une provocation qu'elle eut envie de renchérir de sa propre bravade.
Elle se retint cependant quand la jeune fille affirma au final qu'elle ferait un effort .
Bien, ce serait à voir ! De toute façon, les différentes idées et façons qu'elle aurait de se venger si la gamine se mettait en danger sous sa garde trottaient dans sa tête sans disparaître et elle serait prête à parer tout manquement.
Le sourire revint sur son visage, davantage dubitatif que doux.

—  Sage decision. Bon, alors je te montre, t'écoutes bien.

L'hybride tourna les talons et trotta un peu plus loin vers une zone caillouteuse où de nombreuses pierres disposées les unes proches des autres profitaient des occasionnels rayons du soleil pour mettre leur mousse en valeur.
Pas de serpent en vue, mais un habitat idéal pour les reptiles en tout genre, dont les longues et souples créatures qu'elles cherchaient.

Anita se retourna vers Litchi en pointant la zone du bout de la patte.

— Les serpents ont besoin de se chauffer grâce au soleil pour vivre. Là c'est le milieu de la journée, ça tape trop fort, tu les trouveras pas en pleine exposition mais plutôt dans des cachettes comme ça, un peu à l'ombre.


Son museau désigna d'un mouvement vague toutes les zones où l'ombre large de la dense canopée offrait des abris pour se soustraire à la brûlure trop intense des rayons direct d'un soleil estival.

—  Ça leur arrive de traverser les sentiers mais la plupart du temps ils préfèrent être au calme, alors on les verra à côté des endroits où ils aiment se cacher. C'est pour ça qu'il faut s'approcher doucement pour pas les surprendre, et pas se faire mordre.

Afin d'être sûre de se faire comprendre par l'enfant, l'hybride fléchit les articulations et se deplaça avec légèreté du bout de ses doigts appuyés avec juste ce qu'il fallait pour assurer stabilité tout en restant silencieuse sur le sol.

—  On cherche des endroits qui peuvent leur plaire pour avoir plus de chances d'en voir. C'est à dire les cailloux comme ici, les zones de végétation assez denses, les troncs tombés ou les souches... Ah, et peut yen avoir quelques uns dans l'eau aussi, donc regarde où tu mets les pattes.

Les flaques d'eau stagnante étaient présentes un peu partout. Après tout, c'était un marais.
Les yeux d'Anita s'attardèrent quelques secondes sur la petite rose, comme pour s'assurer qu'elle avait au moins écouté, avant qu'elle ne se mette lentement en marche autour du périmètre, oreilles pointées à l'affût du moindre son qui aurait trahi l'un des reptiles, le regard occupé à de fréquents allers-retours entre son environnement et la fille de Perrine.

Peu de temps fut nécessaire à l’enfant pour qu’elle se mette à l’imiter, se déplaçant à son tour avec une concentration nécessaire pour accomplir l’exploit d’une marche sans grand bruit.
A son âge, l’exercice allait requérir toute son attention et ses efforts mais si elle s’y appliquait fréquemment, Litchi n’aurait sans doute aucun mal à adopter l’attitude dans sa démarche quotidienne d’ici quelques mois. Sans savoir si c’était son attrait pour les serpents, l’énergie malicieuse et fluide qui se dégageait d’elle ou l’application qu’elle mettait dans la tâche, Anita avait comme le pressentiment que la jeune rose chercherait à s’épanouir sur le chemin de l’Anaconda – et c’était une perspective qui la ravissait.
En tant que Prêtresse du Dieu Serpent, après tout, elle ne pouvait qu’attendre avec un certain engouement que de nouveaux disciples ne trouvent leur voie vers sa lumière jaune.

Alors que son propre regard analysait des plantes grimpantes à l’ombre d’épaisses racines, ses oreilles remarquèrent une interruption dans la régularité cyclique du bruit qui l’entourait.
Il y avait les vrombissements des insectes et les clapotis de l’eau sous le vent, les lianes qui bruissaient contre les troncs et les feuilles, mais surtout il y avait les pas de l’enfant qu’elle se devait de surveiller.
Anita se retourna, prête à la capturer sans pitié si elle s’était éloignée en douce, mais son regard la trouva encore proche.
Figée, la fierté dans les yeux.
Car non loin d’elle ondulait sans hâte un serpent brun, pas très long ni très épais, lancé dans sa trajectoire sans avoir remarqué les deux louves.

La Prêtresse accorda un sourire ravi à Litchi et la rejoignit de deux foulées amples et discrètes, ses pattes trouvant avec une méthode répétée devenue naturelle les points d’appuis qui lui permettraient d’avancer vite et sans perturbation.
Puis elle s’accroupit à ses côtés, la grande louve, les yeux rivés sur le corps humide et longiligne et ses deux yeux ronds.

— C’est une couleuvre ! Elle ne te fera pas de mal, tu peux essayer de t’approcher. Mais si tu lui fais peur, elle s’enfuira.

L’occasion se présentait d’elle-même de continuer à exercer sa discrétion et sa légèreté si elle voulait avoir une meilleure vue sur la créature.

L'enfant s'appliqua à suivre le chemin du serpent, l'adulte ne bougea pas.
Elle resta assise et silencieuse et observa plutôt les déplacements de Litchi, plutôt impressionnée par la concentration dont elle faisait preuve et par l'application qu'elle parvenait à déployer pour se déplacer sans faire fuir la couleuvre.
Elle lui rappelait un peu elle-même, enfant ; à paraître intenable tant le monde entier captivait son regard et l'appelait à bondir d'arbre en rocher, mais capable de se plonger dans la contemplation admirative de toute chose fascinante qui croisait son chemin.

La jeune fut finalement bloquée dans sa progression quand le reptile disparut sous une souche, son corps brun absorbé par les teintes similaires dans l'ombre des entrailles de la Moere.
Et l'enfant de revenir en bondissant, des étoiles dans les yeux.
Anita eut un petit rire face à son enthousiasme, avant de hocher la tête.

— On va pas s'arrêter en si bonne voie !

L'hybride se releva et prit une direction différente, vers une zone plus humide encore des marécages, là où les flaques étaient plutôt des mares d'une certaine envergure qu'il était difficile d'enjamber.
Avec ses hautes pattes, la Prêtresse n'avait pas trop de mal à passer d'une racine à l'autre dans une démarche de voltigeuse aérienne, mais ce serait plus délicat pour la petite au pelage rose.
Encore une occasion d'exercer son agilité, elle qui semblait en être déjà dotée.

D'autant qu'elle avait déjà prévenu - des serpents d'eau il fallait ici se méfier un peu plus que de leurs cousins qui fréquentaient la terre.

— Attention où tu mets les pattes.

Un petit rappel ne ferait pas de mal.
Pendant ce temps ses yeux se mirent à balayer les milles richesses et merveilles qui les entouraient de part et d'autre, pupilles bondissantes d'un point à un autre quand un mouvement attrapait son attention, à la recherche d'un autre corps humide et longiligne à débusquer.

Mais rien pour l'instant - seul l'envol de grosses libellules et le saut occasionnel d'une grenouille se jetant à l'eau s'offraient en spectacle, aussi continua-t-elle de progresser à un rythme tranquille et ponctué des quelques coups d'œil qu'elle jetait à Litchi pour s'assurer de sa présence.

— Et à part les serpents, qu'est-ce que tu voulais voir à la Moere ?

Ils étaient certes intéressant, mais l'orchestre de la nature qui jouait dans son ensemble autour d'elles la subjuguait déjà - serpent ou non.

La petite ne faiblissait pas et la suivait toujours, de racines en pont végétal, de rocher en talus. Anita gardait attentifs ses yeux comme ses oreilles - c'était déjà de coutume pour elle, mais la présence d'une enfant exigeait qu'elle redouble de concentration pour ne pas la mettre en danger.
Si Anita n'avait eu qu'une seule - mais mémorable - mauvaise expérience avec plus gros qu'elle à la Moere, elle savait aussi que certains prédateurs y rôdaient et pouvaient prendre un louveteau pour cible si elle s'éloignait trop.
Mais Litchi avait l'air de se satisfaire de la promenade que la Prêtresse menait car elle ne tentait pas de s'échapper à sa vigilance : elle concentrait plutôt ses efforts à découvrir un peu plus cette Moere qui chez elle aussi exerçait son envoûtement.
L'hybride hocha la tête avec un sourire quand elle pointa un autre reptile, tranquillement installé entre les racines.

— C'est un serpent cuivré, je crois. Il doit être en embuscade, il se cache et attend qu'une proie passe. C'est un de ceux qui mordent, alors on va pas s'approcher.

Ainsi continuèrent-elles leur chemin. Litchi, en réponse à sa question, lui confia son intérêt grandissant pour l'endroit et Anita ne put qu'approuver, un large sourire - aux airs de triomphe- sur les lèvres.

— Je te garantis que tu ne t'ennuieras pas en y restant des jours entiers. J'ai grandi ici et j'y passe encore beaucoup de temps, et pourtant je découvre toujours des nouvelles choses. Et le maître des lieux fera lui aussi en sorte de te garder en forme.

L'hybride lança un clin d'œil à l'enfant. Si la rose s'intéressait à la Moere elle ne tarderait pas non plus à se pencher vers Kiro, si ce n'était pas déjà fait.

— Tu sais déjà quelle couleur viser ?

Une question presque innocente.

La louve hocha doucement la tête, sourire aux lèvres. Elle avait encore le temps mais elle finirait bien par trouver, oui. Il ne devait pas y avoir beaucoup de loups qui vivaient une entière existence sans se sentir développer d'attaches pour un lieu plus qu'un autre. Vis à vis de sa question pour le Dieu, elle surprit le regard pâle de l'enfant et retint un rire. La réponse n'allait sans doute pas lui déplaire. Et elle ne manqua pas de lui confirmer.

— Excellent choix !

Eut-elle le temps de dire avant que la rose ne continue sa phrase pour lui poser sa fameuse question. Anita redressa les oreilles, surprise. Elle, mentor ? Elle n'avait pas encore pensé au fait qu'à elle aussi, comme aux générations précédentes, cette question finirait par être posée. L'hybride fit mine de réfléchir, museau levé en l'air, mais elle ne dupait personne - pouvait-elle vraiment refuser de prendre en charge une future fille de Kiro ?

— C'est d'accord. Mais t'es encore un peu trop petite, on va attendre quelques mois avant de s'y mettre pour de vrai.

Anita lui fit un clin d’œil. Après tout, elle n'avait que quelques mois : il lui faudrait encore grandir un peu pour consolider ce corps prometteur et pouvoir le travailler. Enfin, elle n'allait pas s'ennuyer pour autant.

— Mais tu pourras te préparer en attendant, de la même manière que ce que l'on vient de faire. Passe du temps à parcourir des terrains différents, affronte ton environnement... Sans te faire mal.

Qu'on ne lui reproche pas de donner de mauvais conseils à la jeunesse.
De ce qu'elle avait pu voir de Litchi aujourd'hui, elle ne se faisait pas d'illusions : la fille de Perrine n'avait pas l'air faite pour rester bien sagement en place dans un coin du Castel et qu'elle le lui ait dit ou non, elle allait sortir et s'intéresser au monde. Ce qui voulait aussi dire trébucher, tomber, se griffer... Mais aussi apprendre, évoluer, s'adapter.
Anita posa un regard déjà fier sur sa future apprentie. Elle ne doutait pas qu'elle ferait honneur à l'Anaconda quand son temps serait venu.

— Allez, rentrons au Castel, que je te rende à ta mère. Sinon elle va croire que je t'ai nourrie aux serpents.

L'hybride tira la langue et fit demi-tour, gracile, pour reprendre une trajectoire qui les ramènerait à la forteresse sans se presser - sur le chemin du retour, elles verraient encore bien des choses à regarder avant de dire au revoir à la Moere pour aujourd'hui.