Des cheveux blancs - Teddy

La truffe proche du sol, Hollyhock traquait.
C'était un besoin né de quelques soupçons, quelque chose qu'elle avait tenté d'occulter pour ne pas être trop intrusive dans la vie de ses enfants.
Oui mais voilà : Elle était mère, avant tout, et une mère inquiète. Il ne lui avait pas fallut longtemps -pensait-elle- pour comprendre que son fils possédait un goût prononcé pour les terres libres.
Il fallait qu'elle sache ce qu'il y faisait et qu'elle-même soit davantage consciente des risques qu'il prenait.

Et après... et après elle verrait comment elle pourrait lui en parler sans craindre de le braquer.

La piste l'avait guidée dans les plaines savanes, là où rodaient les prédateurs les plus dangereux et elle ne savait quoi d'autre. Le plus présent, dans sa tête, était le souvenir de ce lion, venu jusqu'à la Rougelande, qui l'avait mise dans un sale état.

La louve soupira.
Il allait lui donner davantage de cheveux blancs avant qu'elle ne soit vieille.

La présence du loup-bélier fut rapidement remarquée.
Elle non plus, ne l'avait pas oublié.

Il n'avait, de toutes manières, pas même essayé d'être discret, allant même jusqu'à la héler dans la savane. C'était étrange, il ne semblait pas lui en vouloir, pour leur dernière altercation et se montrait même plutôt... amical ?
La louve bleue releva la tête et se tourna vers lui, pour se rapprocher un peu.

- Bonjour. Non, pas cette fois.

Elle n'avait d'ailleurs pas revu Elely depuis leur dernière rencontre et c'était sûrement mieux comme ça.
Hollyhock hésita un peu. Il n'avait pas l'air méchant et, puisqu'elle n'avait pas eu à subir de nouveaux problèmes avec Elely, elle était tentée de lui faire un peu plus confiance... A tord, peut-être. Dans tous les cas, elle ne voyait pas grand monde, ici, qui pourrait mieux l'aider que lui.
Elle soupira.

- En vérité, c'est pour l'un des miens. Mon fils d'un an a quitté les terres Etelkrus pour les terres libres et ça m'inquiète. Ne l'auriez-vous pas aperçu ? C'est un grand loup au pelage bleu nuit et aux cheveux longs. Nous possédons des marquages plutôt similaires, au niveau des yeux.

Elle ne jugea pas utile de préciser qu'il ne savait pas se battre : il n'avait connu qu'une vie d'enfant aimé, choyé dans un cocon, sans qu'elle ne se préoccupe beaucoup de son entraînement.
Ca avait été une erreur, visiblement.

Elle soupira de soulagement.
Par quelques paroles, le mâle brun venait de confirmer ses pensées : Elle n'avait pas senti d'odeur de sang mêlée à celle de son fils et n'avait entendu, dans la savane, aucun cri.
Puisse t-il dire vrai. Elle ne saurait supporter de savoir son petit en danger ou, pire que ça, blessé comme elle l'avait elle même été.

- Il n'est pas censé partir seul, et il le sait.

Alors pourquoi le faisait-il, si il n'avait rien à cacher ?
Elle avait, parfois, perçu sur son pelage, des odeurs étranges, désagréables, alors qu'il revenait au Castel et qui la laissait penser que, peut-être, il se laissait berner par les douces paroles des Solitaires et celles de la vermine.
Mais n'était-elle pas, elle même, en train de discuter avec un Solitaire ?

C'était différent.
Elle, s'était suffisamment entraînée pour être capable de se défendre en cas de problèmes : Elle l'avait déjà prouvé.

- Je ne peux m'empêcher de l'imaginer dans une situation dangereuse et en détresse. Il est si jeune et à encore tant à apprendre avant de pouvoir mener ce genre d'excursion en sécurité relative... Si il n'est pas blessé, aujourd'hui, rien ne peut me garantir que ce ne sera pas le cas demain.
Vous êtes père, n'est-ce pas ? N'avez-vous jamais eu la peur au ventre, pour l'un de vos petits ?

Ou pour Elely, tout simplement.

- Il faut que j'y réfléchisse.

C'était dur, de lâcher prise.
Surtout lorsque l'on avait, à ce point, peur de perdre ceux que l'on aimait. Après avoir tant perdu, justement.
La louve bleue soupira et se redressa.

- Merci, pour le partage de vos réflexions.

Ce n'était pas simple non plus, d'élever des enfants. Vraiment pas.
Elle releva le nez.

- Je me dois de vous laisser. Au plaisir de vous recroiser. Et pas par ce que l'une de vos protégées sera venue chercher des ennuis.

Holly eut un sourire, léger mais présent.
Elle avait aimé cette discussion.