Quel bel endroit que cette terre couverte de roses et d'autres fleurs magnifiques.
Il y avait quelque chose d'ironique, dans le mépris que sa mère portait aux valeurs de Moiro, lorsqu'elle aimait les fleurs et que celles de cette île étaient si jolies : A coup sûr, elle aurait aimé cette terre, peut-être même plus qu'il ne l'appréciait, lui.
Dans tous les cas, il ne regrettait pas son excursion du jour.

Sa présence ici n'était, d'ailleurs, point liée au plus grand des hasards. Quand bien même le rose n'était pas une couleur Etelkru, lui s'y intéressait, quelque part, bien plus qu'au orange, qu'au jeune et, évidemment, qu'au rouge.
La grâce et le charme ne faisait-ils pas partie de sa personne ?

Quand bien même cette couleur lui était interdite, Iberis s'était particulièrement apprêté pour l'occasion : Son poil ondulé et ses cheveux soyeux, brillants, se paraient des plus beaux reflets.
D'un pas souple, il paradais parmi les roses, le menton légèrement relevé.
Fier.

Perdu dans ses pensées, il fut presque surpris de la présence de ce très vieux loup.
Un disciple.
Vieux, mais visiblement, toujours doté d'une certaine prestance. Iberis lui adressa un sourire aimable.

- Bonjour, Sire. Vous devinez bien : C'est pour Moiro, que je suis ici. Je me nomme Iberis, fils de l'Alpha Etelkru Hollyhock.

Son odeur ne saurait masquer son appartenance.

Son regard se para subitement d'un éclat colérique et il serra les crocs.
Un instant, avant qu'il ne refoule, au fond de lui ce sentiment désagréable qui menaçait de déformer, d'une façon hideuse, son si joli minois.

- J'ignorais qu'elle était, à ce point, inquiète à mon sujet.

Pardon, Maman, de ne point être aussi parfait que ne l'est Iris. Pardon de ne pas te demander, systématiquement, si j'ai le droit de quitter la tanière.
Te déçois-je à ce point, pour que tu ressentes le besoin de te confier à mon sujet auprès de l'un de ces Solitaires que tu méprises tant ?

- J'aime croire aux signes du destin. C'est peut-être la Déesse elle-même, qui fit que nos chemins se croisent, aujourd'hui, qui sait ?
Dans tous les cas, et même dans celui ou je me trompe, je m'admet chanceux, de faire votre rencontre.

Il avait repris son sourire aimable pour lui dire tout cela.

- Ma naissance me prédestine au rouge d'Aka, au jaune de Kiro ou au orange de Dairo. Je pense, néanmoins, davantage me retrouver dans les valeurs qui sont celles de Moiro.

Hélas, aucun Etelkru, et encore moins sa mère, ne consentirait à lui parler de la tigresse de façon élogieuse.

L'affirmation du vieux loup le laissa quelque peu sceptique.
Il ignorait si toutes les mères étaient comme la sienne puisqu'il en avait bien peu connu. Il y avait la sienne, mais aussi Perrine qui lui semblait être une maman convenable et ne savait pas si l'on pouvait nommer mère, cette Maps qui abandonna son enfant.
Y avait-il seulement un modèle unique de mère ?

Iberis laissa néanmoins ces préoccupations de côté pour se concentrer sur ce qui l'intéressait bien plus : Moiro.
Ainsi, pour le loup chocolat, il était bien loin d'être exclu que la déesse consente à faire d'un Etelkru comme lui son disciple. Voilà un constat qui lui plaisait.
De même que de s'entendre dire qu'il était beau.

Qu'était-il d'autre, cependant ?
Un apprenti panseur ?
Un apprenti d'Alpha ?
Un futur conseiller ou, mieux encore, successeur de sa mère ?

- Je ne suis, pour le moment, qu'un Coeur Etelkru qui apprend auprès des siens. Mais j'aspire à un avenir brillant.

Il y parviendrait, n'est-ce pas ? C'était tant de travail, que de s'imposer un double apprentissage. L'on reconnaitra forcément, un jour, son investissement.

- Bien peu de choses, en vérité. Les Etelkrus parlent bien peu des divinités qui ne sont pas les notres. Mais sans doute pourriez vous m'éclairer à ce sujet ?

- Je devrais m'en sortir.

Il était confiant quand à ses capacités.
Si d'autres loups foulaient ces terres en portant, sur eux, un glowstick rose, alors, pourquoi pas lui ? N'avait-il pas tout pour plaire, celui qui avait séduit sa femme au si jeune âge de cinq mois et parvenait encore à entretenir la flamme ?
Et puis, le vieux mâle l'avait dit : il était beau, et il était un garçon.
Tout irait bien.

Pour ce qui était du cadeau, il sortit, de derrière son épaulière, une corne à la couleur irisée.

- J'espère que ce bel objet saura lui plaire.

N'était-ce pas un présent plus délicat, et plus original, que ne l'était un simple bouquet de belles fleurs ? Il l'espérait et espérait, également, que le second exemplaire qu'il avait en sa possession plairait également à sa femme, lorsqu'il le lui offrirait.

Iberis secoua la tête.

- Non. Cette merveille n'avait plus de propriétaire.

Ou alors ce propriétaire n'était plus de ce monde, sans que cela ne soit de sa faute. Il ignorait si les licornes pouvaient perdre leurs cornes d'une autre manière et cela ne l'intéressait finalement que bien peu.
Lui, était bien content de pouvoir profiter des joyaux qu'elles laissaient derrière elle.

Il emboita le pas du loup brun, jusqu'au temple et s'inclina respectueusement devant la statue de la déesse, laissant l'inconnu s'exprimer le premier.

Aux côtés du vieux mâle et devant la fontaine de la déesse, Iberis baissa également respectueusement la tête.
Il apprécia que son guide du jour relève, encore une fois, son évidente beauté et espéra que la Déesse serait en accord avec cette opinion.
Le jeune mâle redressa la tête, fier, le regard porté vers la fontaine.

- Déesse Moiro, c'est un grand honneur pour moi d'avoir été mené devant votre fontaine par l'un de vos disciples les plus fidèles. J'ose espérer que ma visite saura vous plaire, ainsi que ce présent que je vous apporte.

Il déposa, devant la fontaine, la corne aux reflets irisés.

Il avait appris, avec sa mère, qu'il était important de toujours respecter les Dieux. Et si le fait qu'il soit là, devant cette instant, dans le temple d'une divinité non Etelkru ne ravirait certainement pas la louve bleue, il n'en oubliait pas les enseignements qui l'arrangeaient et lui intimaient de se montrer d'une compagnie qui se voulait agréable.

- Je me prénomme Iberis, pour vous servir.

Ses babines se soulevèrent en un sourire confiant.

Moiro était magnifique.
Ce fut ce que se dit Iberis, lorsque son regard se posa sur la déesse aussi rose qu'il était bleu, et il fut ravi de constater que son présent lui plaisait.
Il retint son souffle, quelques instants, et hocha doucement la tête.
Rien n'était gagné et il se devait, désormais, de faire ses preuves. Le jeune mâle releva légèrement le menton.

- Iberis est mon nom, et si nous sommes, naturellement, par le nom que l'on nous offre à la naissance, il n'est, évidemment, pas celui qui fait notre tout.

Il cilla et remit en place l'une de ses mèches de cheveux.

- Il serait également inconvenant de me limiter, dans cette présentation, au sang qui coule dans mes veines : Il est celui d'une louve qui se voulut puissante mais qui, hélas, ne me dispensera pas de quelques efforts si je veux, à mon tour, étinceler. Et pour cela, j'agis, j'apprend, je cherche l'accomplissement, en passant par l'apprentissage des notions importantes de ce monde.

Un doux sourire étira ses babines.

- Plus que cela, je suis, je pense et l'espère, un mari dévoué, qui aime. Je sais et saurai rester fidèles à ceux qui me font chers.

C'était pour cela, qu'il n'avait pas vraiment de scrupules à contrarier les Etelkrus.
Mais c'était, là, des choses fâcheuses, un peu, qu'il préférait laisser de côté et qui justifiait, sûrement, qu'il soit le seul assez audacieux pour passer les frontières et s'intéresser à une déesse qui n'était ni rouge, ni orange, ni jaune.

- Serait-ce trop trop audacieux, d'à mon tour, oser vous demander de me parler de vous, Moiro ? Quelles sont les choses de ce monde que vous appréciez, au delà des cornes irisées ?

Il fut presque déroutant de réaliser avec quelle facilité la Déesse pouvait sonder ses pensées pour si bien connaître sa tendre épouse et de constater de ce talent qu’avaient les divinités pour faire paraître réel ce qui ne l’était pas vraiment.
Car jamais, Iberis ne se serait permis de complimenter une autre femelle devant sa femme.
Et peut-être plus du tout, en toutes circonstances.

La voir pleurer lui était toujours insupportable.
Le mâle sombre s’approcha d’elle, sans la toucher, cependant. Pas maintenant.

- Ma tendre Miraj, il me désole que ces quelques mots flatteurs à l’égard d’une autre fassent couler sur tes joues tant de larmes. Je souhaitais me montrer d’agréable compagnie, rien de plus.
Pardonne moi, si je t’ai blessée. Ceci m’est insupportable et, sois sûre que je me garderai bien de le refaire.

L’on ne l’y reprendra plus, en soi.
Si l’on avait pu l’y prendre, mais soit, là était l’épreuve, triompher d’une situation délicate, qu’il se se serait bien gardé de provoquer.
Sauf si le fait de complimenter Moiro pouvait être offensant, pour son épouse.

- Il est évident que tu es, en tous points, la louve la plus grandiose que j’ai pu rencontrer. Il ne se passe point un jour sans que je me considère chanceux, si chanceux, de marcher à côté d’une louve si radieuse et ne me réjouisse à penser à la famille que je souhaite fonder avec toi.
En évoquant ces pensées, je découvris, lors d’une promenade en forêt, un objet magnifique qui m’évoqua ta personne.

Il sortit, de l’arrière de son épaulière, la seconde corne irisée, trouvée ce jour là, dans la sylve et la tendit vers elle, un fin sourire sur les babines

-J’ai immédiatement souhaité te l’offrir et songeait t’en faire la surprise, un peu plus tard… Il semblerait que l’occasion se soit présentée un peu plus tôt.
Je t’aime, ma chère femme, sois en certaine. Laisse moi sécher ces larmes et faire renaître ton magnifique sourire.

Charmant, n'œuvrait-il pas pour l'être à chaque instant ?
Le compliment de la Déesse étira ses babines en un sourire satisfait.

Iberis lutta pour le conserver, lorsque vint la question suivante, et la gueule divine près de son oreille.
Moiro, omnisciente, sondait probablement chacune de ses pensées : De ce fait, il ne pourrait rien lui cacher et était-ce réellement, si l'occasion s'était présentée, ce genre de bases qu'il souhaitait construire ?

- Je n'étais âgé que de quelques mois, lorsque je fis la connaissance de mon épouse. Vous imaginerez sans peine à quel point elle m'est chère.
Loin de moi l'envie de seulement prononcer les mots que vous souhaitez entendre, je ne vous infligerais pas tel affront. L'affection sera différente et quand à son intensité, je ne demande qu'à mieux vous connaître pour vous aimer, Déesse Moiro.

Il cilla.

- Au moins, puis-je vous promettre ma loyauté sans hésitation, et de souvent vous revenir.

- Je me garderai bien de cela.

Iberis savait ce qui arrivait à ceux qui offensait les Dieux : Il avait entendu mère parler de ce Sushi, mis dans un piteux état par Aka par ce qu'il l'avait offensé et de la lueur affaiblie par Dairo du glowstick de Maps.
Lui, ne finira pas ainsi.

Ce fut avec délicatesse qu'il prit dans sa patte le glowstick qui lui était proposé.
Il s'inclina, respectueusement, sourire aux babines.

- Je vous remercie, chère Déesse.