Absences [PV Teddy]

-Ted-

Ils étaient rentrés au refuge après avoir fait des recherches extensives sur la malédiction qui affligeait Lugh, ainsi que sur comment changer son corps. La petite bulle dans laquelle ils s'étaient trouvés avait été presque insouciante, comme une sorte de cuillère de miel pur a déguster avec un bon thé. Mais à présent qu'ils étaient rentrés, Ted avait vu revenir ses inquiétudes d'avant, et regrettait presque d'être revenu ici. Pourtant, il avait encore beaucoup à accomplir, un voyage à finir, mais n'arrivait pas encore a savoir comment il pourrait laisser Lugh seul après tout ce qui s'était passé. Il ne savait d'ailleurs toujours pas bien si le loup était un ami, ou en train de devenir plus que cela, et a vrai dire, l'idée de risquer partir et ne jamais le retrouver l'angoissait sérieusement, et lui laissait un goût amer en gueule.

Et puis, il y avait Agathe. En rentrant, le cendré avait cherché sa trace, mais comme ces dernières semaines, il n'avait rien trouvé. Son absence se faisait longue, et malgré ses voeux de lui laisser autant de liberté que possible, Ted s'inquiétait. Devait-il partir sans savoir où elle était ? Laisser Lugh retrouver un corps a lui, laisser son père vieillir derrière lui, tout ça pour le grand froid et un ami qu'il n'avait pas reçu depuis des années ? Le choix était dur, et il n'y avait pas de solution parfaite. Ted avait toutefois décidé d'en parler avec papa, de lui dire au revoir, peut-être, s'il se décidait à partir.

Il était allé le trouver dans un de ses endroits qu'il aimait le plus, ne prenant pas trop de risques. Il avait fini par le trouver, et s'était approché pour le saluer :

Salut papa. Comment tu vas ?

Il sourit, sans vraiment grand entrain. Ses soucis transparaissaient sur son visage sans qu'il ne puisse les cacher a son paternel, qui de toute façon voyait a travers lui comme s'il l'avait fait.

-Ted-

Papa se tourne vers Ted, et pose une patte affectueuse sur sa joue. Il lui semblait qu'il avait encore vieillit, son père, ce qui en soit était normal. Les années transparaissaient sur lui plus que de coutume, et Ted ne pouvait plus essayer de l'ignorer. Il ferme les yeux un instant, s'abandonnant au contact réconfortant, à l'odeur qui détendait d'instinct tous ses muscles, avant de les rouvrir. Son papa s'inquiétait pour lui, comme souvent. Il se reconnaissait bien à travers lui, de plus en plus depuis qu'il avait rencontré Lùgh. C'était ça qui rendait, d'ailleurs, la situation si compliquée.


Il devrait être heureux, mais sa gorge serrée et ses sourcils froncés disaient le contraire. Pourtant, il avait attendu tant de temps pour ce voyage, et maintenant, sa cape était prête, il était entraîné, son sac était (presque) fait ... Mais il n'arrivait pas. Il baisse le museau. Il voulait partir, mais il ne voulait pas partir. Le choix, il était incapable de le faire, mais ne voulait pas juste abandonner : il s'en voudrait à jamais. Il peine un peu avec ses mots, comme il l'a toujours fait lorsque les émotions s'en mêlent, et finit par expliquer :


Il avait tout dit, d'un coup, sans rentrer dans les détails. Sans parler de Lùgh, qui risquait de perdre la vie en cherchant son corps, sans parler de son père, qu'il n'arrivait pas à laisser ici. Tout ça était trop compliqué. Et puis, il ne savait même pas si Fenouil était encre en vie, et s'il était dans le Nord. La raison lui disait qu'il était sûrement mort, après tout ce temps.

-Ted-

Le contact avec papa le détend presque immédiatement. Son odeur de roses, de terre argileuse et de savane avait toujours été synonyme de son chez lui, de sa famille, des petits plats partagés avec les autres, des rires. Les paroles viennent panser son coeur, débloquer son esprit trop obnubilé par l'impression d'être acculé, autant par le temps que par les autres. Comme toujours, il avait raison : partir maintenant, ça serait regretter et s'inquiéter tout du long pour Agathe et Lùgh. Il devait être honnête, il n'avait pas envie de les laisser maintenant. Cela voulait-il dire qu'il ne partirait jamais ?

Probablement pas. Et même si c'était le cas, ce n'était pas grave, au moins il n'aurait pas rougir de sa décision. Il devait être fier, de rester, comme il sera fier de partir. Il souffle, s'apaisant un peu encore. Le ton doux de Teddy lui chuchote sans le dire que tout se passerait bien. Sa patte qui flatte ses cheveux lui donne de sa force, lui qui pourtant ne devrait plus en avoir besoin. Il relève les yeux, et répond :


Il le savait, que Lùgh s'en voudrait s'il le retardait. Pourtant ce n'était pas le cas : il en avait envie, de l'aider. Son rgard se fait plus grave lorsqu'il entend la suite : Agathe avait manqué à son sang. Elle s'était battue ? Ou bien quelqu'un l'avait agressée, oui, plutôt. Le coeur de Ted se serre, alors qu'il s'imagine sans le vouloir la scène. Un loup suffisamment fort pour pousser Agathe à bout ... Qu'est-ce qu'il lui avait fait ? Il ne savait même pas s'il avait envie de savoir. Et maintenant, elle avait disparu, sa trace perdue dans la plaine. Ça n'avait pas de sens. Il souffle, stressé. Si quelqu'un l'avait agressé, alors ...

Il fallait aller chercher sa sœur, mais elle s'était évaporée. Il valait mieux commencer par leur propre sécurité, ici. Il y avait des enfants ... Onyx, aussi, qui ne pouvait se battre, et Lùgh et sa malédiction. Ils étaient vulnérables, et jusqu'ici, Ted ne s'était même pas posé la question de comment faire en cas d'attaque. Il détestait devoir y penser, maintenant.

-Ted-

Le grand solitaire ignore -sans pouvoir cacher le léger teint rosé qui perce sous son pelage- les sous-entendus de son père. La décision de rester, pour Lùgh et pour Agathe, n'avait fait que renforcer l'idée qu'il suivait le bon chemin, celui du cœur. Ce que son cœur lui disait sur le loup beige, et bien ... Il verrait. Ils avaient encore un peu de temps, une sorte de sursis, si on voulait. La suite l'inquiète un peu plus : Teddy hésite. La figure de son père se veut rassurante, comme toujours, mais Ted est un adulte : il n'a plus le droit aux mensonges.

Il se redresse, le regard un peu fuyant. Il avait toujours connu Agathe intimidante, solitaire, extrême. Il n'avait jamais connu Agathe meurtrière. Son coeur se serre, d'angoisse et d'un peu de tristesse, sans parvenir à se trouver en colère. Il ne la trouvait jamais, cette colère qui lui permettrait d'aller en avant, de venger sa soeur ou ... Ce genre de choses que les héros faisaient dans ses livres de chevet. A la place, il avait le droit à la peur, et aux regrets. Heureusement, ils avaient encore espoir de la retrouver, et c'était ce à quoi il s'accrochait.


Il s'agite un peu. Les mots ont du mal à sortir ordonnés, les idées fusent, et le regard est toujours perdu vers l'ouest.

Ses crocs se serrent légèrement. Il n'y avait pas de temps à perdre.

-Ted-

Ted sourit, timidement. L'idée d'avoir un plan le rassurait, lui donnait une directive et apaisait cette angoisse sourde qui tiraillait ses entrailles. Au moins, il ferait quelque chose plutôt que de rester ici à en perdre la tête. Il souffle, détend un peu ses épaules contractées depuis qu'il était revenu, et rougit légèrement à la remarque de papa. Elle avait de la chance ... Mais pour lui c'était normal. Il était sûr qu'Agathe en aurait fait autant ... Non ? Sa voix s'est réduite à un murmure :


Il avait de la chance, lui, d'avoir une famille qui l'avait choisi. Même s'il n'était pas très proches de ses sœurs, car leurs personnalités entraient parfois en contradiction, ils savaient veiller les uns sur les autres. Il se redresse, un peu plus décidé.


C'était le plus rapide et le plus logique, mais Ted n'avait pas l'habitude de donner des directives à son vieux père.

-Ted-

Ted hoche la tête, un peu plus décidé. C'était un bon plan, oui : lui allait chercher Prudence, et eux commençaient les recherches. La phrase d'après lui fait relever la tête, un peu surpris : son père avait quelque chose à lui dire, mais surtout, il n'avait jamais trouvé quand lui dire. Il était intrigué à présent, et se relève pour prendre la suite de son père, qui s'en va vers sa tanière. Il fouille un peu, et en ressort un objet en verre, qui semblait être ...


Il tend les pattes pour la saisir avec délicatesse. Il la fait tourner dans ses doigts : elle indiquait ... Le Nord ? Apparemment pas, de ce que son père lui disait. Elle indiquait ... Quelque chose d'autre. Il relève les yeux vers son papa, et fronce légèrement les sourcils, cherchant à comprendre :

-Ted-

Les yeux de Ted s'agrandissent, avant qu'il ne comprenne que son père plaisantait. Après tout, Teddy était connu comme l'Immortel, cela n'aurait même pas étonné Ted qu'il se soit un jour frotté à un dragon. Ses pattes se resserrent un peu sur la boussole lorsqu'il entend son papa lui expliquer comment il l'vait trouvée, comment il avait senti qu'elle était importante, en un sens, mais aussi comment il s'inquiétait pour lui. Ted hoche la tête lentement : il comprenait, lui aussi s'inquiétait pour ceux qu'il aimait, parfois trop. Il baisse les yeux sur l'objet, cachant l'émotion qui lui serre un instant le coeur.


Sa voix est un peu étranglée. Il tourne l'objet entre ses doigts, avant de la poser sur sa patte. L'aiguille semblait indiquer le Nord : peut-être était-ce simplement une boussole normale. Ou bien, peut-être qu'elle pointait le Nord car c'était vers là qu'il se dirigeait. Ses doigts se resserrent autour de l'objet qui se réchauffait doucement contre ses coussinnets.


Il souffle et se détend un peu, après la gratitude qui l'avait secoué. Il relève les yeux vers Teddy, en demandant, curieux :

-Ted-

Ted laisse son père l'attirer à lui dans une étreinte où il se réfugie, un peu à la manière d'un enfant. Il gorge sa truffe de son odeur, profite du réconfort instinctif qui vient détendre son ventre en essayant d'ignorer l'angoisse qui lui venait lorsqu'il se demandait si ce câlin serait le dernier. Ils restent un peu comme ça, peut-être un peu trop, avant de se séparer. Ted garde le regard baissé au sol, mais un sourire doux flotte sur ses babines. Oui, il irait dans le Nord, il l'avait décidé. Mais peut-être que Teddy ne serait pas là pour le voir.

Il soupire, heureusement le conte de son papa le tire de sa torpeur désagréable. Il écoute l'histoire avec de plus en plus d'attention, sentant un drôle de fourmillement le prendre lorsqu'il réalise que l'histoire était parfaite à conter. Peut-être pourrait-elle devenir son premier récit noté ? Il était certain que son père en serait ravi. Il sourit, et se rend encore plus attentif pour se souvenir des détails. La conclusion le fait se tendre, puis sourire : c'était une très belle histoire ! Il pourrait s'occuper de la narrer, de la romancer ... Peut-être que son père pourra l'aider à avoir les détails justes. Il regard l'objet, avant de regarder son père et de demander :


Ses yeux pétillent, plein d'espoir. Son père était un peu son héros, et il savait déjà qu'en l'écrivant, il en ferait un personnage principal avec toutes ses qualités : courageux, charmeur, et surtout, extrêmement gentil et dévoué. Il avait hâte.