Un pied dans les flammes | Epreuve de vie, solo

Finalement, sa condition ici-même allait se trouver plus amusante que toutes ses vies précédentes, d'un côté un révolutionnaire aux desseins sombres et lugubres, et de l'autre, l'association avec ce qu'il fut il y a bien des années pour mener le bien, la justice, l'éradication des malfaiteurs.


Ici, il y avait bien des malpolis qui prenaient la place et l'air de plus sages. Et il s'en désolait terriblement. Ils rendaient évidemment les choses plus ennuyeuses et n'aidait pas à juger ce monde comme bon, méritant. Tant pis pour les plus saints ! Il ne semblait pas y avoir de trace de repentis, ou de véritables parleurs de la bien-pensance. Alors, sans doute qu'il avait une mission, ils avaient un rôle.

La lumière avait toujours régné sur les ombres, pour preuve, le soleil chassait la nuit, tandis que cette dernière était plus opportuniste et s'étalait autant que possible.

Azazel reprit une inspiration, soufflant, et rouvre les yeux.

Son présumé rôle était tout tracé. Rien qui ne soit au-dessus de quelque chose d'autre ; Même pas lui, même pas son allié. Le monde idéal, en somme. Le détail principal, c'était d'éradiquer ceux qui s'opposent à la justice et l'absence d'autorité quelconque. N'était-ce pas là un paradoxe, de réduire les chefs au silence par la violence et en les surplombant, faire taire leurs successeurs avec une pression telle ?

C'était nécessaire. Ensuite, les rênes seraient de plus en plus lâches, jusqu'à ne plus être pertinentes. Alors d'abord, il fallait écraser ceux qui se proclament plus forts, plus intelligents, plus avantagés. Récupérer les terres et les êtres vivants pour leur offrir la liberté qu'ils méritaient, en échange des fauteurs de trouble.

Sa tête tourne un peu, un semblant de migraine qui n'était pas encore totalement là. Depuis combien de temps marchait-il ? Ses pas l'avaient guidé sur l'un des territoires pacifiques du coin, en prouvait l'odeur différente de ses coins favoris qui trainait dans l'air, et surtout, toutes avaient un petit truc en commun.

Il frissonne, soudainement.

Ses entrailles le font s'arrêter, comme un déjà vu, l'impression d'avoir quelque chose à faire ici qu'il avait oublié, perdu dans ses pensées d'organisation et surtout d'argument de taille pour revenir voir Garbann, exposer sa vision des choses, rassembler, faire le bien.

De son museau sort une fumée blanche et opaque. C'est qu'il faisait bien froid. Des voix lui parvenaient, pleurant leurs destinées. Le loup fronce les sourcils, et analyse les alentours. Non loin, un cabanon de fortune qui se voulait fantomatique, bien que réel pour sûr. Il reste immobile un temps, un vent étrange souffle entre ses oreilles, lui caresse le dos. Et il se mis en marche, silencieux, méfiant, vers l'abri. Plus il s'en approche, plus son enveloppe corporelle réagit.

Des frissons, une sensation de picotement, mais il s'approche de quelque chose. En tournant la tête vers l'intérieur du cabanon, des traces de quelque chose de mauvais ayant été fait il y a bien longtemps, mais pas assez pour que tout ne disparaisse.

D'âme curieuse de nature, il s'approche, bien que toujours sur ses gardes. Un miroir, un essai de feu, un petit couteau qui avait commencé à rouiller. Un rituel, sans aucun doute, mais il y en avait tant, et les objectifs étaient si nombreux. La rage mise pour éparpiller toute la scène semblait tout de même retenue.

Son créateur ne devait plus être dans le coin depuis longtemps, et en observant un peu plus, il y voit des mots brouillons, et rien ne semblait avoir été au-delà. Rapidement, l'ange pense à un simple abandon avant la saignée pour pactiser avec ... quelqu'un, quelque chose ? Tout semblait hasardeux, mais en même temps, tout était devant son nez pour quémander aux forces occultes et divines quelque chose. Un pouvoir de persuasion, un souffle de courage.

Il s'en amuse un peu, d'ailleurs. Et pour continuer dans sa lancée curieuse et maniaque, le loup noir récupère le tout, le replace au milieu de l'abri. Au milieu, le miroir brisé avec la dague, et avec les cendres, il fait un cercle autour. Avec le reste, il fait quatre tout petits tas en un carré sur le cercle. Un jeu qui lui vide l'esprit, agissant plus par mécanisme qu'en pleine conscience. Une image qu'il pensait avoir déjà vu quelque part. Ne restait qu'à placer les bougies : une au Nord, une au Sud, une autre à l'Est et la dernière à l'Ouest.

Son regard reste bloqué sur le miroir et les mots. Il semblait y lire quelque chose en rapport avec de la terreur, du sang et du feu. Y avait-il une logique, là-dedans ? Le feu des bougies, la colère évidente qui avait causé l'abandon des objets, et le sang ...

Celui d'un pacte.

Azazel fronce un peu plus les sourcils. La terreur l'interloquait beaucoup. Comme si la demande était tournée vers un besoin de trouver plus de courage pour faire front, qu'importait les tenants et aboutissants. Une demande de courage, en somme. Quel être faible pour vendre son âme pour si peu. Il soupire, et raye un caractère des mots inscrits avec la dague, en ajoute un également.


Un pacte plus lumineux que précédemment. Peut-être même la clé vers son propre souhait, d'ailleurs ? Les voix confirment. Avec l'un des rochers, il frappe une paroi saillante et tranchante dans l'espoir de créer une étincelle, et allumer les bougies.

La magie opère. La roche se fait conscilliante, et lui offre la flamme recherchée du premier coup. Les bougies sont allumées une par une avec un soin méticuleux, beaucoup de respect. Quelques chuchottements, encore, des voix qui sortaient du feu en pleurant.

La migraine se fait plus insistante. Et sa tête voit les choses en une fumée opaque. Il ne voyait que le mal. Le mal qui a été fait sur ces terres. Azazel se met en colère à cette idée. Des guerres et des innocents assassinés gratuitement. Les voix se font plus bruyantes, plus nombreuses, puis, le noir complet. Les bougies s'éteignent toutes en même temps.

Les voix cessent, mais l'ambiance reste lourde.

L'impression d'être observé.

Au sol, les écritures ne sont plus. Balayées elles aussi comme les flammes précédemment. Quelque chose avait fonctionné, et avait répondu présent. L'air est lourd. Une ombre invisible surveille, attend, mais quelles sont ses intentions ? Le regard du loup se redresse silencieusement, droit devant lui. Il sentait sa présence. Il sentait ses méfaits, ses réflexions qui pouvaient se rendre mauvaises. Mais il ne craignait pas. Quelqu'un était venu ici pour l'invoquer, et avait lâchement avorté sa venue.

Qui ne serait pas frustré ?

-Esiasch, zarman g.

Son air se veut sérieux et neutre. Ni enjoué, ni surpris, ni appeuré. Après tout, peut être que cette autre entité lui était connue, et il serait une bonne occasion de revoir d'anciens amis. Une seule façon de le savoir : si l'ombre comprenait le langage angélique, il n'y aurait plus de doute.

Son instinct de loup mortel lui indiquait de se méfier, sa nature de divinité lui insuflait de ne rien craindre.

Et avec la dague, il signerait un pacte de sang. Son identité contre celle de l'autre. La dague d'une patte, il referme ses longs doigts sur la lame avant de tirer le petit couteau pour l'extirper de sa prise. Une douleur qu'il trouvait agréable et envoûtante, une sensation de froid alors que du liquide chaud et rosé s'échappait de sa paume. Le sang s'écoule toujours au milieu de l'autel de fortune.

- Arp ol cnila ca ah gift.

Un grand frisson lui lèche le dos, redressant son poil lourd.

Le silence.

Encore et toujours.

...

Quelque chose de peu agréable qui fige son enveloppe physique mais son âme vagabonde se sens enlacé, protégé, possédé. Une aura lourde mais qui ne lui est pas agréable, à laquelle il se soustrait sans chercher à se défendre.

Ne serait-ce pas ridicule de tenter de lutter contre quelque chose qui ne peut être blessé ?

Tu ne comprends pas, Brume.

Mais lui, il t'entend et t'écoute. Les voix traduisent, même si elles embuent son esprit qui peu à peu devient tien. Autour du loup, quelque chose bouge, s'affole plus que tout à l'heure. Le miroir brisé reflète quelque chose qu'il tente de suivre pour montrer à Azazel ce qu'il se trame, ici.

Une âme pure avec ses raisons et ses vices ; Sa bienveillance cachant dans son dos les pires répercussions. Tu ne lui sembles pas si différent de lui, après tout. Les yeux de lave de l'ange se rouvrent, revenant à la dure réalité. Te regarder.

Az' inspecte les environs. Le miroir ... Il te cherche aussi. Alors il en prend possession de sa patte ensanglantée encore coulante, et jamais ne se retourne, par méfiance, par ruse. Il ne t'a pas vu encore de face. Le verre argenté devient les yeux dans son dos, lui qui permet de percevoir tes mouvements, et il te cherche, Brume, il suit ta voix torturée, et parvient à y voir quelque chose de troublant ... et trouble aussi la vision du vrai monde.

Une zone qui semblait glitchée, qui a toute son attention et sa curiosité. Il n'y a que toi qui compte en ce moment-là. Et il préfère te chuchoter, ta voix torturée résonnant encore dans ses oreilles.

- Qui es-tu, inconnu ?

Et que lui veux-tu, désormais ? Azazel est un esprit qui en veut toujours plus, avide, et là est la raison de sa présence dans ce monde. Et il veut, exige en savoir plus. Pourquoi ce rituel, pourquoi est-il question de flammes et de sang ? Que t'on-t-ils faits ? Une mine vengeresse dans le regard plus que de la peur ou de l'inquiétude. Si les mots ne fonctionnent pas, alors il te renvoit des images traduisant tout ce qui lui vient en tête. Et il est persuadé que ça pouvait fonctionner.

Enfin, quelque chose pour se fixer. Des regards, plein de regards, tous différents mais qui provoquent un malaise certain, des nausées, comme un mal de mer. Les couleurs et les flashs n'aident pas à se concentrer, mais Az' tient les yeux tant bien que mal, inquisiteur comme à son habitude.

Après des secondes qui semblaient durer une éternité, la tornade se calme enfin après avoir donné un énième rictus amusé. Ah ! Ca te fait rire, Brume ?

Ou plutôt, Chuchoteur. Un prénom qui te va à merveille, se dit le loup.

Il se tétanise encore en un frisson, comme un courant d'air venant embrasser son échine voyante, l'obligeant à se redresser. L'ambiance autour est ... lourde, mais également douce. Un sentiment de sérénité, le premier contact est établi, et bien qu'Azazel soit surexcité par cette découverte, une rencontre qui changeait de toutes les autres, il s'efforce de ne rien montrer.

Juste des yeux de sang qui restent figés dans ce miroir, en direction de toi, Chuchoteur.

La mention de la vérité revient sur le tapis. La vérité de sang et de feu. Il refusait que ces éléments soient mêlés à la terreur, comme initialement prévu. Il analyse les mots, son histoire qui revient, marchander. Evidemment, un sourire. Vous êtes sur la même longueur d'ondes.

- Ce monde mérite-t-il d'être ?

Un air plus doux, et à son tour intéressé. Ce monde, avec ses facettes horribles, la quête incessante du pouvoir par les cris, les larmes, la douleur.
Par la domination, comme si eux étaient des dieux qu'il fallait élever.

- Mes histoires ont tant à te raconter, à ce même sujet.

Et la réponse était peut être déjà même toute faite. Il t'adresse à son tour un sourire, Chuchoteur, et ne cache pas sa curiosité pour ta réponse à cette question. Les âmes semblaient bien sombres, et les coeurs des plus téméraires semblait battre pour les mêmes ombres.

- Que convoites-tu ?

A son tour, les mots ne sortent qu'en un souffle, un susurrement doux et paisible qui se veut être une promesse.

L'atmosphère restait floue. Et Az' se sentait comme aspiré dans cette drôle de dimensions, alors que Chuchoteur répond par la négative. Cela ne rate pas d'ennuyer l'ange déchu, qui hausse un sourcil, peu convaincu.

Sa concentration reste limitée, partagée entre ce que racontaient les autres chuchoteurs, et toi, qui savait parler plus proche encore de ses oreilles. Il fronce son air, d'un coup moins confiant.

- Je ne peux te laisser me consumer ainsi, Chuchoteur.

Tu ne peux me prendre ce qui fait ce que je suis.

Le miroir se baisse, et le regard du loup se ferme. Après tout, ces migraines ... Devenaient douces. Il s'y habituait, malgré la douleur, le brouillard épais. Il reste focus sur toi tout de même, ces souffles glaciaux dans son dos. Rien n'était jamais bien agréable.

- Peut-être pourrions-nous nous unir. Qu'en penses-tu ?

Tes voix diatoniques seront toujours plus agréables que cette radio mal réglée qui ne lui renvoyait que des idées floues, après tout. Un fin sourire, il se laisse chuter sur le dos, épuisé de lutter contre cette brume que tu lui infliges. Il ne lui semble pas voir de visage cependant, en regardant vers la sortie de l'abri.

- Ainsi, tu pourras profiter de mes souvenirs, histoires, lamentations comme bon te semble et en user pour attirer de nouvelles proies. Et en retour, tu peux me fournir une plus grande vue encore de ce monde, de ce que tu sais et ce que l'on t'a déjà conté.

Un rictus amusé après avoir posé ces mots d'une voix douce, assurée. Oui. C'était ce dont il avait besoin, les connaissances des chuchoteurs qui lui insuflaient des pleurs d'âmes qui s'étaient perdues, et qui maintenant guidaient les esprits perdus.

Rapidement, la transition agréable se transforme en nausées oppressantes qui vont jusqu'à tordre les entrailles du loup, toujours allongé sur le dos, contemplant le plafond de la tanière. Encore un refus ... Il souffle sans trop s'en cacher, et peine à comprendre ce que les âmes veulent de lui exactement, quelle question attendent-elles.

Ses yeux vitreux et malades se rouvrent en une pensée. La vérité, sang et feu. Les mots tournent autant que sa tête. Il veut savoir ce qui mouve ces terres.

- Tes âmes, ont-elles souffert ici ?

Tu dois bien avoir la réponse, elles sont tiennes, non ?

- Par les flammes, la douleur, la peur ?

Un bref instant, pour reprendre sa respiration.

- Elles semblent me sussurer cela, pour me guider jusqu'à toi, jusqu'à cet autel créé par un inconscient. Des âmes blessées et perdues, dont la paix ne peut être assurée, beaucoup sont venues jusqu'à moi jadis, pour laisser entendre leurs complaintes.

Un regard vers l'endroit supposé de Chuchoteur, plus neutre encore, si c'est une histoire que tu souhaites ...

- Très peu restent ainsi bloquées dans le monde des mortels heureuses. Sinon, elles nous rejoignent dans les cieux pour profiter d'avantage de leurs libertés. Vois-tu leur fond doit être bon, léger. Un esprit en peine, aveuglée par des pensées néfastes ou pesantes, ne peut trouver le chemin jusqu'à leur salut.

Un bref rire. Ca l'amusait, le loup, de remarquer que la naïveté de tout être, que leur façon de trop réfléchir aux causes et conséquences ne pouvait les guider jusqu'à l'oisiveté que pourtant tous convoitaient. Ceux qui doutaient en ayant écho de ces histoires restaient, elles aussi, bloquées entre deux mondes.

- Périr sans le vouloir, sans aucun but si ce n'est qu'éttablir d'avantages les ombres est bien triste. En parallèle, il est amusant, pour nous divinités, de vous voir vous mélanger, peu importe vos feu enveloppes.

Azazel se redresse, et reprend un bout de miroir, bien que maladroit dans son équilibre. Ah ! Ces âmes torturées qui ne voulaient qu'établir le mal par pure vengeance ! Le bout de verre inspecte encore l'endroit.

- Et avec tout cela, je ne vois que toi, Chuchoteur. Je n'entends que toi, le plus clairement. Toi, Guide des esprits perdus. Toi qui te compose de ces dizaines de lamentations ... As-tu souffert des vivants d'ici, lorsqu'ils le furent ?

L'amas de voix se joue des mots, enfin, est-ce seulement un jeu ? Les silences sont aussi désagréables que lorsqu'il parle. Le miroir retrouve ce qui semble être une forme un minima ordonnée, et le solitaire regarde. Il écoute, et il comprend. Une main se tend, Az' referme son visage.

Enfin, une question trouve réponse.

- Bien entendu.

Il chuchote doucement. Réfléchit, regarde devant lui. Comment était-il arrivé ici ? Il aurait aimé répondre "par hasard", mais c'était un raccourci bien facile. Non. Un temps de réflexion court, comment était-il tombé de son paradis ? Un soupire.

- Les cieux ont sans doute moins de pitié que les enfers.

Un bref sourire, se remémorant bien des choses qui désormais étaient prises avec légèreté, qui l'étaient moins au moment T.

- Ange déchu je suis, Azazel, Prince des âmes sacrifiées, leur Guide, celui qui les apaise et rend leur vie éteinte non vaine. L'on m'a reproché d'être trop orgueilleux, négligeant, prenant les choses pour acquises et s'en vantant.

Ses yeux passent du miroir au plafond de la tanière de l'autel, un rictus franc toujours dessiné sur la gueule.

- De quelle fougue ai-je été victime ! Et l'on m'a ainsi puni aux entrailles chaudes de mon monde pour purger ma peine, et les démons n'ont trouvé que de jeu de me balader entre ciel et enfer, avant que d'un commun accord, il ait été trouvé judicieux que la meilleure des punitions pour un ange serait de venir goûter à l'errance d'un corps mortel. Un corps qui se meure dans la douleur, dans l'indifférence, qui connait les affres de la nature et des siens, et puis, si cela ne convient pas au théâtre du Ciel, recommencer ailleurs, dans un autre corps, un autre monde, prédateur ou prédaté.

Une grimace. Un dégoût certain. Un sentiment d'injustice, là où il aurait pu venir chercher rédemption sur terre et accomplir ses missions pour regagner les faveurs des siens, il n'avait été que chiffon baladé de mains en mains, et il en voulait aux autres divinités pour cela.

- J'aurais aimé te conter aussi combien les cieux sont beaux, comme dans vos histoires ici-bas. Mais ce serait parfaire les choses alors qu'elle ne le sont pas toujours.

Un bref soupire par le nez, avant de revenir sur le bout de verre.

- Ainsi me voilà, à discuter avec toi, avec vous, avec des esprits malheureux dans ce monde. Que ce soit celui-ci ou d'autres, d'ailleurs, vois-tu, ton monde n'est qu'un parmi d'autres.

Son sourire revient. Là était sans doute la raison de ses résurections. Il y avait bien pensé, plusieurs fois, à chercher une quête, une mission à accomplir pour purifier les terres foulées. Mais il avait toujours appris à ne pas interférer avec le monde des vivants, pour ne pas en perturber le quotidien.

Et toi, Chuchoteur ?

Un moment plutôt calme pour que la tempête reprenne autour de lui. Des voix, partout, qui parlent, chuchottent aussi, qui ne semblent plus aussi accordées pour ne faire qu'une. Les yeux de l'ange se ferment brusquement, soumis à son corps, ne pouvant le contrôler. Et le sol n'aura jamais été aussi douloureux, bien que cela semble si irréel.

Le déchu revient, sonde les horizons. Il n'était plus devant l'autel. Autour de lui, des détails en tout genre, des voix semblant vouloir conter bien des choses, mais il couche ses longues oreilles pour mieux apprécier ce qu'il voit. Ses yeux, c'était son outil principal. Ne pouvaient y échapper les émotions vocalisées qui se mélangent.

Un bâtiment, des drôles d'oiseaux et une âme paisible. D'autres hybrides, qui posent trop de question, semblant en vouloir aux divinités. Une ombre qui semble provoquer un brouillard immense. D'autres cris dans des images diffuses, qu'Azazel perçoit comme multiples. Le brouillars se fait de plus en plus épais, déchirant le sourire du loup en une grimace déformée, son crâne souffrant, menaçant d'imploser. Des lumières puissantes et colorées devinées alors que ses yeux s'embuent de larmes tant la douleur se fait forte.

Et il finit par chuter, tandis que les pleurs et les rires s'envolent dans le vent. Une brise.

Une voix. Une énième, moins floue. La vérité.

Les flammes et le sang.

~

Lorsque l'âme revient au monde réel, il se sent pâteux, douloureux, encore entre rêve et réalité. Qu'avait-il vu ? Et surtout, pourquoi tout ça ? Un râle agacé, et il se redresse doucement entre tous les bouts de miroir. Le calme est revenu, le silence est même pesant. Chuchoteur n'est plus là. Az' regarde de nouveau autour de lui, confus, accueille tout de même ces images et sons pour les analyser. Les lumières colorées, l'église, les personnages ...

Ce peuple semblait souffrir, et le mal avait déjà un pied sur la pureté que pouvait apporter bien des choses. L'image des corneilles, le sourire. Les loups qui se défendent tous à juste titre contre la peur, au péril de leur vie. Ce qui lui semblait être une image divine, les couleurs, omniprésentes pour soutenir leurs enfants.

Un soupire. Il voulait prendre l'air. Les choses semblaient trop précises pour que ce ne soit quelque chose monté de toute pièce pour lui faire peur.

Ses pas le dirigent à l'air libre, emplissant ses poumons avant de tout ressortir. Ses billes rougent scannent les environs. Cette ombre ... Elle était le mal, emmenant la brume et des nécrophages avec elle. Ses sourcils se froncent un peu. Les ombres semblaient prendre le dessus sur le reste, petit à petit, et ces âmes lumineuses tenter de se battre pour se préserver.

Il lui fallait trouver cette église.
Se renseigner d'avantage sur ces couleurs.
Les interroger.
Devenir l'un des leurs, défendre leurs enfants ?

En comprendre le souhait.

Il lui faudrait tout noter, une fois revenu à sa tanière. Ne rien oublier. Refaire ces liens, les ombres étaient bien là, et la lumière ne semblait pas si égoïste qu'aux premiers récits. Entre les deux, les vivants, grisés, porteurs du bien et de compassion, ayant leurs travers.

Reprendre du service.

Oui, il devait guider.