De père en fils - Feat. Sushi

L'or de l'aube coulait entre deux oreilles bleues, dégoulinant de sa lumière liquide jusqu'à la pointe des cheveux rebelles, s'accumulant en lac brillant dans un creux de tissu du béret militaire. Touchant, tel un pinceau invisible, les yeux fatigués, les yeux paternels, laissant dans son sillage quelques notes brillantes dans l'orangé de son regard. Père nouveau Kalashnikov se retrouvait une fois de plus, et ses muscles et son âme bâillaient dans l'espoir d'un peu de repos. Cependant, cette aube-ci n'étais point réservée au sommeil, ni aux cris enfantins du quatuor dont il devait désormais s'occuper. Cette aube, cet or liquide qui épousait les sommets des pins, c'était pour un autre de ses enfants. Né d'une portée chamboulée par des événements durs, mis au monde dans le tumulte d'une meute prête à la guerre, le prêtre regrettait de n'avoir su être plus présent pour eux, désormais grands et prêts à affronter le monde. L'amour n'avait pas manqué, non. Pas pour eux. Mais devoirs de Prêtre et de membre du Heaume oblige, le militaire n'avait pu passer autant de temps qu'il aurait souhaité à leurs côtés, résultant à sa grande inquiétude en des caractères... particuliers pour chacun de ses enfants avec Bamboo. Atsuko passait son temps à suivre les ombres du Castel, enfilant ses masques pour mettre à bien des projets qu'elle seule semblait connaître. Il n'avait pas vu Mint depuis des semaines, ne laissant dans son sillage que des animaux disséqués avec une précision chirurgicale troublante. Quant à Sushi, Kalash' s'étonnait de la voie que son deuxième fils avait pris, bien différent des allures brutales de ses parents. C'était pour lui que ce jour était dédié, ayant eu vent rapidement qu'il souhaitait s'entraîner avec son père, ce qui avait été surprenant pour le militaire vieillissant vu les préférences de son fils pour tout ce qui était plus délicat. Il en saurait davantage aujourd'hui, ou du moins, il l'espérait.

Le point de rendez-vous avait été clair; non loin de l'ancienne tanière familiale, là où les rochers forment aujourd'hui une protection rudimentaire contre les éléments, maison du Prêtre. On voyait percer à une heure de marche les colonnes du temple du Grizzli, camouflée par les troncs larges et les nombreuses ramures de conifères. Le paternel lécha quelques gorgées d'une eau claire coulant d'un petit ruisseau à proximité, nettoya ses babines d'un grand coup de langue, puis s'assied pour pousser un long hurlement grave, un appel chaleureux à son fils qu'il se doutait ne devait plus être bien loin.

Il apparu non loin, sa silhouette grandie se découpant par-dessus les couleurs terre et chlorophylle de la forêt environnante. Longs cheveux brillants, robe de satin, fourrure soignée ; son fils arbhorait une apparence et un soin physique impeccable. Il sembla hésiter à s'approcher, comme s'il s'agissait d'un inconnu, mais le paternel ne lui en voulu pas une seconde. Après tout, il était vrai qu'il n'avait pas passé autant de temps avec ses enfants qu'il l'aurait voulu, et encore moins dans leur adolescence ou chacun était davantage indépendant, grandissant, s'éloignant de leur père petit à petit. C'est un sourire chaleureux qui s'accrocha pourtant aux babines du militaire. Même s'il n'approuvait que peu les allures trop soignées en général, les trouvant peu pratique et inutiles, la joie de revoir son fils ainsi, le visage et les traits un peu plus matures, le remplissait pleinement. Ainsi ne fit-il pas de remarques sur l'habillement de son fils, ni même un regard un peu réprimandeur. Seul son sourire illuminait son visage comme un soleil, éclipsant un peu la fatigue de ses yeux.

Il se leva pour le saluer, sa queue battant doucement l'air humide de la forêt.

« Rebienvenue chez toi, mon fils », répondit-il chaudement à la salutation.

Le jeune remarqua malgré tout la fatigue qui l'habitait, sur quoi il chassa le tout en blaguant d'un balayement de patte qui souleva quelques épines tombées.

« Oh, ce n'est rien... Tes jeunes frères et soeurs demandent beaucoup d'énergie, tu sais. » Un nouveau sourire, presque en excuse. Le militaire n'aimait pas que cette fatigue mentale transparaîsse à travers le language de son corps. Il n'avait pas le droit de ralentir, pas encore. Toujours prêtre, il devait se montrer fort jusqu'à la toute fin pour sa meute et ses enfants.

« Et moi de même. C'est un bel honneur que tu m'offres de me demander comme mentor. Le plus bel honneur qu'un père saurait rêver. »

Les adeptes du Grizzli n'étant que peu enclins à demander conseil auprès de lui, c'était une réelle joie de pouvoir transmettre un peu de son savoir à la nouvelle génération. Ainsi se sentait-il de nouveau utile. Il invita Sushi d'un léger coup de tête à avancer à ses côtés vers une éclaircie dégagée à quelques pas de là.

« Ainsi souhaites-tu apprendre les arts du combat ? N'y prend point offense, mais je t'avais imaginé emprunter une autre voie ». Le ton du paternel était doux, une simple invitation à la discussion avec son enfant.