La prédiction de Mido

Maintenant que l'adrénaline des premiers instants était redescendue, le grand loup se mit lui aussi à respirer plus laborieusement. Il s'aplatit au sol, les yeux mi-clos, et écouta résonna dans son esprit les pensées venues du lien entre les quatre loups. Un bref instant, juste le temps de comprendre où il fallait aller. L'aile Ouest. Ils iraient vers l'aile Ouest. Il sentait près de lui la présence de Freya, plus petite, qui avait été moins touchée que lui par la fumée noire qui s'agglutinait sous les hautes arches du plafond, qui saturait l'air et encrassait les gorges et les poumons. Mais ils ne pouvaient pas s'arrêter, pas maintenant. C'était leurs terres, c'était leur Famille qui s'affairait.

"L'aile Ouest !" Articula-t-il à Freya, en la remerciant du regard autant que par l'aura qui se répandait en flots invisibles mais ô combien perceptibles autour de lui.

[Dé FOR pour Ajani, pour emmener le tonneau rempli par Freya jusqu'au début d'incendie de l'aile Ouest]

Avec un grognement, il tira à nouveau sa haute silhouette pour se redresser et appuya de tout son poids son poitrail, ses épaules, son large front contre le tonneau pour le faire rouler, tout en gardant le museau le plus près possible du sol. Son pelage était recouvert de suie, taché de larges marbrures sombres qui étaient de la suie ou du poil brûlé. Il sentait à peine la chaleur de la pierre trop brûlante qui irritait ses coussinets, entièrement focalisé sur sa tâche.

Pas après pas, le tonneau avança. Sans savoir si c'était par ses oreilles ou par d'autres auxquelles il était relié, il entendit des paroles qui s'inscrivirent en lettres brûlantes dans son esprit. Des mots qui parlaient de s'enfuir, alors que les Nakhus s'échinaient à leurs risques et périls pour endiguer l'incendie. Des paroles venues de voix à qui ils avaient tendu une patte. Ses pupilles étaient réduite à un point, et son aura soudain se fit un peu moins lumineuse, alors qu'à la détermination s'ajoutait quelque-chose de plus sombre. Comme un arrière-goût âpre de trahison, sous celui omniprésent du feu et de bois brûlé. Il ne s'arrêta pas, redoubla même d'efforts. A chaque respiration il laissa échapper une toux rauque ou un grondement d'effort dont le son se perdait dans le boucan qui les noyait.

Au moment où ils atteignaient l'aile Ouest - enfin ! - une nouvelle voix vint s'ajouter au lien, et une vague de joie émana de lui. Nocera était arrivée. Il n'eut pas le temps de se concentrer sur ses mots - son esprit devenait de plus en plus embrouillé, et il priait pour que cela ne contamine pas trop la vivacité de celui des autres - que déjà la voix claire de Kerguelen revenait. Il renversa le tonneau d'un mouvement d'épaules et s'affaira à répandre les cendres chaudes sur les foyers pour les arrêter. Cela lui sembla durer une éternité, comme si le temps se ralentissait autour d'eux. Finalement, couvert de cendre et de suie, il se laissa à nouveau tomber couché au sol et lança à Freya d'une voix à peine distinguable tant elle était rauque :

"Il faut sortir... Et rejoindre Kerguelen... Et Nocera."

Il chercha son regard, chercha comment elle allait, chercha la détermination qui les emmènerait tous les deux au-dehors. Et dans un élan de concentration qui lui parut difficile, si difficile, il transmis aux autres l'images de l'Aile Ouest.

Lorsque le hurlement avait retenti, elle se trouvait loin, très loin de l'Île Chuchotante. C'était une nuit, alors la chouette ne dormait pas. Sa silhouette d'albâtre s'en était allée se fondre dans l'obscurité, se faire spectre, loin des siens et de leurs préoccupations diurnes. Elle avait même été un peu trop loin, un peu trop haute dans le ciel, pour qu'il fût possible que l'appel parvienne à ses oreilles. En revanche, alors qu'elle virait sur l'aile, la lueur rougeoyante qui s'élevait de l'Île attira son attention. Tout comme le panache de fumée noire qu'elle répandait dans le ciel, laissant peu de doute sur son origine. Comme beaucoup de loups du continent, Hedwige n'avait jamais été témoin d'un incendie. Mais son instinct savait, connaissait le feu et ses crocs brûlants, lui criait que c'était dangereux. Et son esprit lui, lui faisait défiler devant les yeux les visages de ceux qui pouvaient s'y trouver.

Sans hésiter, la jeune louve battit des ailes pour prendre la direction de l'île. A mesure qu'elle s'approchait, l'air devenait piquant. Elle redescendit un peu, et ses grands yeux dorés comprirent que le feu était localisé au niveau de la Bibliothèque. Comment la Bibliothèque avait-elle pu prendre feu ? Elle l'avait toujours crue sous la garde de créatures mystérieuses qui s'occupaient de ranger les livres, de secouer les coussins et d'entretenir les foyers qui l'éclairaient. La louve piqua vers le bois qui entourait l'endroit, les ailes contre le corps, retenant une toux menaçante. Désormais l'air était sec, plus sec qu'elle ne l'avait jamais respiré. Elle se posa étonnement bien vu e contexte, et galopa en direction des hautes portes.

De nombreuses silhouettes se découpaient sur le fond des flammes rouges, comme des ombres chinoises, agitées, criant et toussant. Elle reconnut celle de Kerguelen et se précipita vers elle. La vue de ses camarades qui respiraient si mal, qui étaient recouverts de suie, lui serra la gorge.

"Kerguelen !" Cria-t-elle en arrivant à sa hauteur. "Kerguelen, qu'est-ce qu'il se passe ? Qu'est-ce que je peux faire ?"

Moins que jamais elle voulait se montrer inutile.

Leikn se mordilla la babine, avisant l’étrange bestiole qui régurgitait de la boue. Une goule. Techniquement c’était pas vivant ces trucs là… mais si… si il y avait une énième chance que quelque chose lui arrive à cette bestiole…
La Licorne couvre son corps de sa lourde cape encore trempée. Le feu finirait par la faire sécher, mais cela lui laissait encore un peu de temps pour manoeuvrer… sinon… Essayant de ne pas toucher les autres loups qui l’accompagnaient, la solitaire chercha la source du feu. Ils pouvaient encore se frayer un chemin, tout en prenant garde au sol sous leurs pattes.

(Lancé de dé ING pour trouver la source)

Le regard de la louve se pose sur les livres qui flambent à une vitesse folle. Tant de savoir qui serait perdu, consumé par les flammes. Leikn serties crocs, elle se sent nerveuse. Protégée différemment des autres, elle parvient toutefois à apercevoir ce qui semble être la source du brasier dans cette aile.
Une statuette.

« — Ici ! Il nous faut du sable ! »

Mais elle s'était pas mal engagée la solitaire dans cette aile... Les autres l'entendraient-ils ? Auquel cas, elle devrait trouver une autre solution.

Uma avait vu le ciel grisé, pas un signe d'orage à venir, mais plutôt de flammes et de cendres.

Puis des cris, un brouhaha chaotique qu'elle ne comprenait pas. Abandonnant ce qu'elle faisait au cimetière, elle s'approcha avec rapidité de la source de ce malheur, réalisant avec peine que c'était la bibliothèque qui était touché par ce drame. Elle pensa un moment à tout le savoir qui allait se perdre, puis ensuite aux loups qui pouvaient être coincés à l'intérieur. Une fois devant la source du feu, elle regarda un moment tout ce qu'il l'entourait, reconnaissant certains loups, ne sachant pas exactement par où commencer. Elle voyait certains qui roulaient des tonneaux de sable, ayant eu le temps de réagir car ils devaient déjà être bien plus proche. Elle se sentait complètement dépassée par la situation, mais ne pouvait pas rien faire, elle devait aider du mieux qu'elle pouvait.

Il serait malheureux de remplir des tombes ce soir.

Prenant encore quelques secondes pour choisir la prochaine marche à suivre, ses yeux scannèrent l'horizon et s'arrêtèrent sur la louve grise. Kerguelen. Elle se décida à l'aider, n'ayant pas oublié son intervention du manoir il y a peu de temps de cela. Sans mot, elle était à présent à ses côtés.

(Dé réussite ING pour aider Kerguelen au centre de la bibliothèque)

Il y eut un instant de flottement, durant lequel leurs regards se croisèrent. Il lut dans celui de Freya la détermination qu'ils partageaient à arrêter le feu, à protéger cette terre qui était leur. Il se fit une promesse, pour le moment qui viendrait où ils en auraient fini avec le monstre de feu. Au même moment, la petite louve lui cria qu'elle allait aider les autres, remua la queue, et bondit dans les allées. Il hocha la tête. La voir si déterminé lui redonna de l'énergie et il tira sur ses muscles pour se redresser, le museau toujours frôlant le sol. Malgré cette précaution, il sentait ses poumons protester à chacune de ses inspirations, sa gorge s'irriter de respirer cet air sec et vicié. Il percevait par le Lien les images de ce qui se passait autour de ses camarades. Même s'il était incapable de dire encore si les choses allaient bien ou mal, il éprouvait déjà une immense fierté à voir sa meute si unie et combattant sur le front. Fier de cette famille qui ne reculait pas devant le danger.

Avec un grognement, il se remit bien d'aplomb sur ses quatre lourdes pattes et commença à pousser le tonneau vide pour s'en aller chercher du sable et des cendres pour le remplir. Il se déplaçait comme dans un rêve, comme un fantôme. Sans prendre gare aux silhouettes qui couraient autour de lui - il n'avait pas le temps, il devait se concentrer sur la tâche qui était la sienne, comme chacun. Ils devaient être méthodiques et efficaces pour maîtriser la catastrophe. Lorsqu'il s'approcha de l'entrée, il respira plus profondément l'air moins chargé en braises et en fumée. Mais le soulagement fut de courte durée. De ses muscles puissants, il refit encore ce même geste qui consistait à remplir le tonneau comme il pouvait, avant de le faire rouler à nouveau vers l'Aile Ouest. Il en profita pour attraper quelques baies dont Kerguelen avait parlé, et qui lui donnèrent un coup de fouet. Certes, cela n'empêcherait pas son corps de souffrir plus tard de ses efforts du moment. Mais il n'avait pas le temps de faire mieux. Il avait été dans le coeur du chaos. Il savait la vitesse des flammes. Il ne pouvait pas sacrifier plus de temps à se préparer.

Ce fut donc simplement revigoré qu'ils e jeta à nouveau entre les allées, dans le vacarme des craquements, dans le ronflement des flammes. Son itinéraire était simple, ses mouvements presque automatiques. Il toussait désormais à chaque expiration, ou presque, régnait sous l'effort, alors que ses larges épaules se jetaient contre le tonneau pour le faire rouler. Ses pensées étaient à la Corneille, celle dont il était l'enfant, dont la couleur faisait luire son pelage presque autour que le rougeoiement des Flammes. Il ne l'avait jamais laissé si sauvage, jamais il n'avait complètement permis à toutes ses émotions d'émaner autour de lui avec une telle force. Il ne pouvait pas avoir un seul instant de faiblesse, ou tous en pâtiraient. Fort heureusement pour l'instant, seule la détermination et la foi l'habitaient, le transcendaient.

Dame Yurai, regardez vos enfants. Regardez notre peuple, notre Famille.

[Dé FOR pour Ajani, pour répandre le sable et continuer d'étouffer le feu de l'Aile Ouest]

Avec un cri rauque qui se perdit dans l'air, le lion blanc amena le tonneau au plus près du foyer. Des braises volaient autour d'eux, menaçant de mettre feu à ses longs cheveux, rendant l'air presque irrespirable. Il l'ouvrit d'un coup d'épaules et s'affaira à répandre son contenu sur les endroits d'où partaient les langues de flammes, au pied des étagères, sur ces dernières là où il le pouvait. Il ne pouvait pas aller très haut, mais il espérait qu'en hauteur les flammes s'étoufferaient d'elles-mêmes à cause du manque d'oxygène. La tête lui tournait, et il recula en se traînant presque au sol jusqu'à l'allée centrale. Il ne pourrait pas maintenir cette cadence très longtemps. Il expira en crachotant. Sous ses coussinets, la pierre se fit moins brûlante alors qu'il se rapprochait de la sortie. Il avait conscience qu'il manquait peu de choses pour que l'Aile Ouest soit complètement sécurisée, mais il ne pouvait y parvenir seul, ou du moins pas dans l'immédiat.

Il contacta les autres par le lien ; s'ils avaient quelqu'un de démuni ou de trop de leur côté, l'Aile Ouest était presque éteinte. Cela se jouait à si peu. Ses pattes tremblaient alors qu'il se forçait à ouvrir les yeux pour chercher quelqu'un du regard de son côté.

Elle emboîta le pas à Kerguelen et pénétra à son tour dans la Bibliothèque. Aussitôt, l'air étouffant la prit à la gorge et elle toussota en s'ébrouant. L'épais pelage de sa nuque se hérissa alors que les hautes flammes se reflétaient dans ses immenses yeux. Son instinct lui hurlait de s'enfuir, quand sa conscience la faisait accélérer pour rattraper la Couturière. Les oreilles plaquées contre le crâne, elle écouta la voix de sa comparse et obtempéra. Elle se sentait presque aussi étouffée dans ce tissu que dans l'air vicié, mais au moins sa gorge ne s'asséchait plus à la même vitesse. Elle hocha la tête pour répondre à Kerguelen, et étendit ses ailes pour s'élever légèrement dans les airs. Aussitôt, la fumée lui piqua les yeux, et elle dut se résoudre à rester non loin du sol. En revanche, elle repéra non loin, à un endroit déjà étouffé, une flaque de cendre dans laquelle elle s'empressa de plonger ses pattes pourels protéger. Encore humides de sa promenade nocturne, elles furent bientôt recouvertes d'une pellicule grise et poisseuse. Cela devrait suffire pour les brefs contacts qu'elle aurait avec les braises.

Elle s'approcha avec précaution, prenant garde à ce que l'air brassé par ses ailes n'attise pas les flammes, battant en longs mouvements lents pour se maintenir juste au-dessus du sol. Ses longues pattes se tendirent vers le sol et elle se mit à pousser les braises en direction de ses camarades pour que ces dernières les étouffent.

[Dé ING pour Hedwige qui tente de déplacer les braises sans se brûler les pattes]