Nirvana se secoua en sortant de l’eau pour faire disparaître ses écailles. Rejoindre la crypte par la nage était bien plus rapide… et lui avait permit de cogiter un peu pendant le trajet. Bien qu’il fasse encore nuit noire, la louvette pénétra dans le temple de Dairo, les cheveux dégoulinants.
Pardon Dairo, j’ai un peu retard pour nos rendez-vous quotidien.
La louvette eut un léger frisson, reniflant légèrement. Ça sentait encore quelques jours de rhume tout ça, mais il fallait impérativement qu’elle parle à sa déesse.

« — Pardon Dairo de te déranger à une heure aussi tardive. »

Nirvana commença à faire les cents pas, aussi bien pour se sécher que pour réfléchir.

« — J’ai rencontré une alliée de l’entité à l’atoll, elle l’appelle Mon oncle. Elle y est de toute évidence très dévouée… »

C’est ce qui la rend dangereuse.
La disciple interrompit sa marche, levant son museau vers la statuette.

« — C’est pour cela que tu l’as rejeté quand elle venue ? »

Sauf si c’est pour sa stupidité ? Sinon pour quelle raison ?
Elle a osé dire que son Oncle a de meilleures intentions que toi.

Les mots de Dairo réchauffent le coeur de la louvette. D’autres dieux n’auraient peut-être pas aussi bien accepté d’être dérangés à toute heure.
Mais la Renarde n’est pas n’importe qui.
Quelque chose qui repousse ? Nirvana avait remarqué que la lumière du glowstick avait dérangé la louve rose, étais-ce parce que les dieux ne l’acceptaient pas ?
Les dieux ne pourront donc jamais l’aimer.
Un affront à la vie. Les mots résonnent un instant dans l’esprit de la sirène. Sans son Oncle, cette louve aurait été orpheline, tel furent ses mots. Ceux de Dairo laissaient presque sous-entendre que la rose ne devait pas être en vie. De quelle manière l’entité avait utilisé la solitaire ?

« — Le lien entre eux… ça la rend dangereuse. »

Elle ne voit que le bien, se montre si naïve envers l’entité. Pire encore, se pensait invincible avec… que valait-elle sans ? Certes, son Oncle l’avait de toute évidence recueilli, offert protection et compagnie avec les autres louves, mais dans quel but ? Il aimait s’amuser, mais ça ne ressemblait pas vraiment à un jeu.
Ou alors il n’a pas encore commencé la partie.
Dans ses pensées, Nirvana redressa soudain le museau en entendant les paroles de sa déesse. Devenir… sa prêtresse ? Une proposition à laquelle elle ne serait attendue. Être choisie, parmi tous les autres, cela la touchait. Un sourire vint étirer les babines de l’Etelkrus.

« — Je serais très fière d’être encore plus liée à toi. »

Être à tes côtés est un véritable honneur.

La louvette s’approcha pour boire le liquide orangé et aussitôt avoir plusieurs images en tête.
De la magie. Du sang. Et de deux sacrifices, deux âmes qui n’en deviennent qu’une pour donner une seule louve. Un être maudit qui porte l’odeur de ce qui n’est plus.
Miraj n’existe que parce que deux loups ont donné leur vie pour elle, en bravant ainsi une magie dangereuse. Elle ne devrait pas exister.
Sa vie est contraire à l’ordre naturel des choses. Étais-ce pour cela que l’entité s’intéressait autant à cette louve ?

Elle n’a aucun mérite, les faveurs qu’elle s’est attiré n’est dû qu’au sacrifice d’autres.

Les corneilles sont sur des livres.
Les Nakhus savent.
Ça ne fait que confirmer ce que Nirvana soupçonnait déjà, d’autres savaient… et il n’était pas exclu que certaines des sept louves qui résidaient à l’atoll soit issues de la meute de Yurai.
Nirvana froncent les sourcils, les images toujours en tête, avant de se tourner vers sa déesse. Les loups pouvaient résoudre ces problèmes sans l’aide des dieux…
Il faut juste regrouper les informations.

« — Je n’ai pas l’intention de disparaître, je ferai attention, Dairo. »

Promis.
La louvette se leva.

« — Je dois avertir ma mère de ce que je sais, je viendrai te voir demain ! »

Comme chaque jour.
Le rôle de prêtresse ne changeait rien à cette habitude.